TÉLÉRAMA n°3893 - Page 8 - 3893 Venez partager des moments rares avec des artistes Le lundi 23 septembre, au Théâtre du RondPoint, Paris 3 1952 Naissance à Paris. 1994 Premier film, Regarde les hommes tomber. 2001 Sur mes lèvres. 2005 De battre mon cœur s’est arrêté. 2009 Un prophète. 2015 Dheepan, Palme d’or. 2018 Les Frères Sisters. 2021 Les Olympiades. L’INVITÉ Jacques Le film noir, le western, le drame… et maintenant une comédie musicale transgenre, Emilia Pérez. Où le cinéaste explore avec toujours autant de passion les fragilités humaines. Audiard 4 Télérama 3893 21/08/24 L’INVITÉ LE RÉALISATEUR JACQUES AUDIARD L’INVITÉ LE RÉALISATEUR JACQUES AUDIARD lorsqu’elle devient politique. Je pense à Cabaret, de Bob Fosse (1972). Notamment à cette scène où l’on voit un adolescent blond chanter devant une foule debout. Lorsque la caméradescendlelongdesonbras,onserendcomptequ’il porte une croix gammée. Ça fout littéralement les jetons! Emilia Pérez serait donc un opéra plutôt qu’une comédie musicale? Disons qu’au moment de l’écriture le projet m’est d’abord apparu sous cette forme. Ou peut-être serait-il plus juste de parler de «drame musical». En tout cas, une chose m’intéressait: de même que le personnage effectue une transition, je voulais que le film soit lui-même transgenre. Jusqu’à l’excès, jusqu’à la telenovela, jusqu’au ridicule. Sans occulter la gravité, car le film parle aussi de l’État du Mexique, des disparus, des féminicides. Je voulais raconter tout ça, en exploitant une forme capable de sublimer tous les registres. L’émotion transmise par le chant est inégalable. Pourquoi le thème de la transition de genre? L’idée m’est venue en lisant Écoute (éd. Stock), le livre d’un ami, Boris Razon. L’un des chapitres esquissait le portrait d’un baron de la drogue qui voulait changer de genre. Cette histoire m’a sidéré, et j’ai eu envie de développer le personnage. Appliquer la question de la transition à l’univers du narcotrafic me paraissait, en plus, créer un niveau de drame supplémentaire. J’avais aussi en tête le parcours d’un personnage secondaire de la série Les Soprano, qui m’avait bouleversé: un gangster gay, Vito Spatafore, dont nous est montrée la déshérence, la difficulté à assumer ce qu’il est. Dans mon film, lorsque Manitas devient Emilia, il n’a d’autre choix que de mettre en scène sa disparition. L’homme doit mourir aux yeux du monde. Votre film montre que l’homme est mauvais, là où la femme devient vertueuse… C’est, en tout cas, ce que croit Emilia! L’idée selon laquelle la féminité tiendrait lieu d’ardoise magique, annulerait la nocivité de la masculinité, je n’y crois qu’à moitié. Mais ça me semblait beau de voir un personnage qui, en devenant une femme, va tenter de se racheter, en aidant les familles de disparus. Je suis dans une logique très chrétienne, ça doit venir de mon éducation. Et je pose, à travers le film, la question du prix à payer pour tout recommencer, pour accéder à une nouvelle vie. Vous semblez vous situer de plus en plus du côté des femmes, vous qu’on a longtemps associé à un cinéma d’hommes. Au départ, il y a trente ans, je me démarquais des réalisateurs débutants comme Arnaud Desplechin ou Pascale Ferran, qui avaient dix ans de moins que moi et se plaçaient dans un rapport plutôt autobiographique ou biographique au cinéma. M’intéressant à la littérature noire, Lors du dernier Festival de Cannes, Jacques Audiard a confirmé qu’avec lui le cinéma est, chaque fois, une aventure totalement neuve — et surprenante. Emilia Pérez, ovni musical sur la transition de genre d’un narcotrafiquant mexicain, a raflé le Prix du jury et valu à ses actrices (Karla Sofía Gascón, Zoe Saldaña, Selena Gomez et Adriana Paz) un Prix d’interprétation collectif. Pied de nez d’un réalisateur souvent associé à un cinéma très masculin: Audiard place aujourd’hui le féminin, sous toutes ses formes, au cœur d’un drame emballant, qui assume les outrances et la tragédie, le mélo et le kitsch, célèbre la sororité et la rédemption. Depuis trente ans, il n’a cessé de se renouveler: jonglant avec les codes du cinéma de genre, du film noir (Sur mes lèvres) au western (Les Frères Sisters), creusant le sillon du marivaudage moderne (Les Olympiades), tournant en tamoul (Dheepan) ou en espagnol (Emilia Pérez), variant les formes, imposant de la diversité dans les castings. À 72 ans, l’audace est son moteur, tout comme, semble-t-il, l’inquiétude. En ce jour de début juillet où nous le rencontrons, le réalisateur est mal en point. Il souffre d’un lumbago, fume cigarette sur cigarette. L’entre-deux-tours des élections législatives rend notre entretien aussi incertain que le futur proche trouble l’atmosphère estivale. Allure de dandy — casquette et gilet sans manches, foulard au cou —, Jacques Audiard semble à la fois accablé et d’humeur un peu frondeuse, malicieuse. Entretien avec un esthète intranquille. C’est la première fois que vous écrivez et réalisez en musique. Pourquoi ce choix? En réalité j’y pensais depuis longtemps! À l’époque de mon deuxième film, Un héros très discret (1996), le compositeur Alexandre Desplat et moi avions déjà caressé l’idée d’en faire un petit opéra, à la façon de Brecht ou de La Tragédie de Carmen, de Peter Brook. J’aime l’opéra, qui, à mon sens, contient l’essence de la tragédie, permet de construire des personnages excessifs. Lorsque ça marche, c’est très puissant! De la même manière que la comédie musicale — dont je ne suis pas toujours fan — peut être aussi très puissante «Toutcommelepersonnaged’EmiliaPérez effectueunetransition,jevoulaisquelefilm soitlui-mêmetransgenre.Jusqu’àl’excès.» Propos recueillis par Hélène Marzolf Photo Jérôme Bonnet pour Télérama 5 Télérama 3893 21/08/24 ☞ j’ai logiquement commencé à creuser le sillon du film noir. Et cela m’a poussé à ausculter la société masculine. Mais mon premier film s’appelait Regarde les hommes tomber. C’était programmatique ! J’y entamais déjà une critique des mecs. Depuis, je n’ai cessé de travailler la fragilité masculine. Le personnage de Matthias Schoenaerts dans De rouille et d’os (2012), par exemple, est un colosse aux pieds d’argile. Il va tomber sur Marion Cotillard, qui va l’éduquer, de la même manière qu’Emmanuelle Devos, dans Sur mes Lèvres (2001), va faire l’éducation de Vincent Cassel, le transformer en amoureux possible. Ces deux films étaient déjà des portraits de femmes. On sent quand même que votre regard sur les personnages féminins a évolué. C’est indéniable. Je pense qu’il y a dix ans je n’aurais pas pu imaginer Emilia Pérez. Ce qui a changé, c’est probablement le rapport de mes personnages féminins au pouvoir. Emmanuelle Devos dans Sur mes lèvres se débat dans une société masculine hostile qui ne la reconnaît pas. Rita, l’avocate jouée par Zoe Saldaña dans Emilia Pérez, va réussir à dépasser sa condition. Ce film montre des femmes qui cherchent à créer une société entre elles. Une sorte de société autonome, qui pourrait presque correspondre à une utopie du xviiie siècle. On peut aussi s’interroger sur les sentiments profonds de Rita. À la fin, elle accède à un nouveau destin professionnel grâce à Emilia, elle trouve en elle une amie, mais peut-être qu’au fond autre chose se joue entre elles, quelque chose de l’ordre d’un amour non dit. Comment s’est passé le travail avec les actrices? J’ai adoré filmer ces femmes, si différentes les unes des autres. Zoe Saldaña est très américaine dans son jeu. C’est un couteau suisse, elle peut tout faire : chanter, danser, jouer la comédie. Karla Sofía Gascón, elle, ne danse pas, chante moyennement, mais ça la rend d’autant plus émouvante, elle fait «trembler» le film… C’est une femme très intelligente, très spirituelle, grâce à laquelle mes personnages ont évolué. Au départ, Emilia devait avoir une trentaine d’années, et Rita, 26, mais le casting de Karla Sofía a tout changé. Ce que j’ai aimé avec elle, c’est qu’elle «habitait» son âge (52 ans) de manière magnifique… Quant à Selena Gomez [qui joue l’épouse de Manitas-Emilia, ndlr], elle est charmante. C’est une jeune femme qui passe son temps à s’excuser, à se reprocher des choses, notamment dans son jeu. Moi, je la trouvais délicieuse, et un peu sur une autre planète… J’ai pris beaucoup de plaisir à jouer des contrastes entre ces actrices. À Cannes, Karla Sofía Gascón a été attaquée dans un tweet par Marion Maréchal, qui s’indignait qu’une actrice transgenre remporte le Prix d’interprétation féminine. J’ai trouvé cette réaction d’une méchanceté extrême. En plus, Marion Maréchal n’avait même pas vu le film. Je déteste cette culture de l’opinion, où l’on s’exprime sans savoir. C’est vieux, rance, et totalement à côté de la plaque. Moi, je sais ce que je dois à Karla. Elle a été mon éducatrice. Lorsque je la vois, avec sa femme et sa petite fille, cela me fait réaliser à quel point j’étais ignorant. Elle a fait évoluer mon regard et mes représentations. Êtes-vous inquiet, en tant qu’artiste, de la montée du Rassemblement national? Forcément ! D’autant que je peux imaginer les conséquences sur un film comme le mien. Il y a deux ans, Emilia Pérez a bénéficié du financement de la Région Île-deFrance. Avec le RN au pouvoir, il n’aurait jamais obtenu cet argent. Et je ne peux même pas imaginer ce que deviendrait le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée)… Alors oui, cette montée en puissance laisse présager un avenir compliqué. Mais, d’une certaine manière, je pense que la société qui vient représente un challenge intéressant. Réaliser que 30 % des gens ne pensent pas comme nous, cela nous force à nous interroger: comment s’adresser à ces personnes, comment les représenter ? Tout cela va peut-être rendre, d’une certaine manière, le cinémaplusintéressant,ou,entoutcas,nousobliger,nous, cinéastes, à inventer d’autres formes. Je veux continuer à faire des films. Et si je peux déclencher des petits urticaires chez des gens comme Marion Maréchal, c’est pas mal. À VOIR ; Emilia Pérez, de Jacques Audiard. En salles. LIRE critique p. 50. Karla Sofía Gascón, dans le rôle d’Emilia Pérez, Prix d’interprétation féminine partagé avec Selena Gomez, Adriana Paz et Zoe Saldaña. SHANNA BESSON 6 Télérama 3893 21/08/24 L’INVITÉ LE RÉALISATEUR JACQUES AUDIARD «Jediraisquejesuissolitaire,mutiqueetdépressif. Réaliser des films m’oblige à m’extérioriser. Cetteouverturemefaitdubien.» Les gens, généralement, me trouvent très sympathique, mais ils ne connaissent pas le fond de ma personnalité. Ils ne voient pas la momie aztèque que j’ai en moi! Vous avez attendu d’avoir 42 ans pour devenir réalisateur, après une carrière de scénariste, comme votre père, Michel Audiard. Qu’est-ce qui vous freinait? La réalité, c’est que je n’y pensais pas! Mon père lui-même a réalisé quelques films, mais je ne les aime pas particulièrement, et je l’ai toujours considéré, en premier lieu, comme un scénariste. J’ai été poussé à la réalisation par mes vieux compagnons Didier Haudepin et Alain Le Henry. Nous avions une maison de production ensemble, et il fallaittournerunfilm.CefutRegardeleshommestomber,etj’ai détesté cette première expérience. Au point de me dire, sur le moment, que je ne réaliserais plus jamais de films! En quoi cette expérience a-t-elle été si douloureuse? Ce qui m’a déplu, c’est justement d’expérimenter la «société des hommes» sur un plateau. Avec cette équipe masculine, j’ai vécu des rapports de force. J’avais le sentiment d’être bizuté. J’ai quand même dû virer le chef opérateur en milieu de tournage… J’ai eu le sentiment de me frotter au pouvoir et à ses abus. Pour le film suivant, j’ai remis les choses au carré, pourqueçanesereproduiseplus.Avecletemps,leséquipes ont changé, il y a eu autant de femmes que d’hommes à des postes de responsabilité, et ça s’est mieux passé. Vous avez souvent dit que votre père vous avait transmis une culture plus littéraire que cinématographique. Il m’a transmis un amour de toutes les formes de littérature. Mon amour de Proust, c’est lui. Il m’a aussi ouvert au roman noir américain, ou à Bossuet! Et à la musique, aussi! J’ai toujours son intégrale de Schubert. Pensez-vous encore souvent à son influence? Il m’a offert la chance d’être élevé dans le monde du cinéma, sans même m’en apercevoir. Mon père m’a aussi rendu très naturel le fait d’écrire. Il m’a permis de ne pas fantasmer la chose, de ne pas être intimidé par ça. Aujourd’hui, c’est un peu bête, un peu sentimental ce que je vais dire, mais je regrette deux choses: d’abord, il m’a quitté très vite, trop tôt, à 65 ans, et cela me fait un drôle d’effet de penser qu’aujourd’hui j’ai sept ans de plus que lui. Et je regrette qu’il n’ait pas connu mes enfants ni mes films. Savez-vous ce que vous allez tourner après? Pas du tout. Quand j’ai commencé à écrire Emilia Pérez, j’avais un autre projet devant moi qui était Les Olympiades, mais les circonstances ont fait que je l’ai réalisé avant. Là, je n’ai plus rien. Je suis vacant, je suis une poche vide. Ça vous angoisse? (Rires.) J’ai un lumbago• Lors de la sortie des Frères Sisters, en 2018, vous aviez dit vous interroger de plus en plus sur la pertinence du cinéma pour rendre compte du monde. Je me pose la question de la fonction du cinéma qui, pour moi, est avant tout un outil d’identification. Lorsque je vois certainsfilmstaïwanais,hongkongaisoucoréens,j’admirela manière dont leurs réalisateurs arrivent à identifier des pans d’humanité au départ loin de nous, et trouvent des formes qui nous les rendent compréhensibles, proches. En comparaison,jedoisreconnaîtrequ’ilyaeudesmomentsoùj’aipu trouverlasociétéfrançaisedifficilementdéfinissable.Maisje ne lâche pas l’affaire! En réalisant Les Olympiades (2021), par exemple, j’essaie de rendre compte du monde contemporain, de sa mixité, de la manière dont évoluent les rapports hommes/femmes, les relations amoureuses. Et je persiste à dire que la situation actuelle, en France, va peut-être rendre encore plus intéressant le cinéma. Parce qu’il y a des contradictions énormes à résoudre, parce que c’est conflictuel. Vous avez réalisé plusieurs films en langue étrangère… Ilm’esteneffetarrivéderessentirlebesoindefairedesécarts vis-à-vis de ma langue maternelle. Avec laquelle j’ai un rapport compliqué! Pour résumer, je suis plus lecteur que spectateur. Je peux ne pas voir d’images, alors qu’il m’est impossible de ne pas lire. Je lis énormément. Et ça crée chez moi un attachement assez particulier aux mots. Pour moi, la langue française est avant tout porteuse de sens et, lorsque j’écris ou que je filme, j’ai parfois besoin de m’en affranchir. Prendre de la distance avec la langue me permet de trouver des «fables» différentes, d’expérimenter d’autres formes esthétiques, d’autres récits. Récemment, je me suis rendu compte que cette démarche annonçait peut-être le choix de réaliser une comédie musicale. Le recours à la langue étrangère induit, en soi, un rapport musical à la fabrication des films.QuandjesuisaveclesacteurstamoulsdeDheepan,qui parlententamil,monaccèsàeuxn’estpaslinguistique,mais musical. Pareil avec l’anglais dans Les Frères Sisters. Dans le documentaire Le Mystère Jacques Audiard (Julien Dupuy, 2018), vous dites que filmer est le seul rapport possible que vous avez trouvé avec le monde. Bien sûr! Si j’essayais de me définir, je dirais — même si c’est moinslecasmaintenant—quejesuissolitaire,mutiqueetdépressif. Je peux rester chez moi et me suffire à moi-même, entre lectures, écriture et musique — que je ne pratique pas, mais que j’écoute. En fait, réaliser des films m’oblige à m’extérioriser. Je travaille avec une équipe, ce qui est une bonne chose. Ensuite, quand le film sort, je dois m’adresser à des gens que je ne connais pas. Cette ouverture me fait du bien. Ça ne vous aurait pas tenté de devenir écrivain? Non, parce que ce serait un retour à la solitude. Et cet attrait pour la solitude est quelque chose dont je me méfie beaucoup, car il se traduit par des formes d’égoïsme terribles. Camille PERRIER Votre contact privilégié, est à votre disposition pour répondre à vos questions et vous accompagner en toute confidentialité. Tél. : 01 73 60 40 40 E-mail : legs@wwf.fr DEMANDE D’INFORMATIONS SUR LE LEGS À retourner sous enveloppe affranchie à : Camille Perrier WWF France – 35-37, rue Baudin – 93 310 Le Pré Saint-Gervais Je souhaite recevoir gratuitement et en toute confidentialité votre brochure d’information sur le legs. Je souhaite être contacté(e) par téléphone. Nom : Prénom : Adresse : Code Postal : Téléphone : Courriel : En faisant un legs au WWF, vous nous donnerez les moyens d’agir durablementpour la sauvegarde des espèces en danger mais aussi celle des forêts et des océans. Un geste fort pour lequel les futures générations vous remercieront. TRANSMETTEZ AUX JEUNES GÉNÉRATIONS LE PLUS BEAU DES HÉRITAGES : UNE PLANÈTE VIVANTE © Getty Images LEGS - ASSURANCE-VIE - DONATION Les informations recueillies dans ce formulaire sont enregistrées dans un fichier informatisé par WWF qui dispose d’un délégué à la protection des données : Charlotte Galichet, 4 place de Valois, 75001 Paris. Elles sont destinées à ladirectiondelagénérositédupublicdeWWFetauxtiersqu’ellemandatepourrépondreàvosdemandesoufaireappelàvotregénérosité.Ellessontconservéespendantuneduréede9ansdanslecadredelatransmissiondepatrimoineou parladuréenécessairedanslecadredel’appelàvotregénérosité.Conformémentàlaloi«informatiqueetlibertés»vousbénéficiezd’undroitd’accès,d’information,derectification,delimitation,d’oppositiondeportabilitéoudesuppressiondesdonnéespersonnellesvousconcernant.Vouspouvezexercercedroitàtoutmomentenvousadressantparcourrielà:mesdonnees@wwf.frouparcourrierà:WWF,CamillePERRIER,35-37rueBaudin,93310Le-Pré-Saint-Gervais. Pour plus d’informations, rendez-vous sur wwf.fr/transmettre ou scannez ce QR code 8 LUDOVIC CARÈME/AGENCE VU | OSTERREICHISCHER RUNDFUNK (ORF)/SUDWESTFUNK (SWF) | ELSA/GETTY IMAGES VIA AFP| FANNY DE GOUVILLE POUR TÉLÉRAMA Télérama 3893 21/08/24 SOMMAIRE COUVERTURE Zoe Saldaña, Karla Sofía Gascón et Selena Gomez, à Cannes, le 18 mai 2024. Photo Yann Rabanier pour Télérama Ce numéro comporte pour la totalité des kiosques: une couverture spécifique «Paris-ÎdF»pour les abonnés et les kiosques de Paris-ÎdF, et une couverture nationale. Posé sur la 4e de couverture: un encart 4 p. «Le monde de Simenon» sur la totalité des abonnés en France métropolitaine. Édition régionale, Télérama+Sortir, pages spéciales, foliotée de 1 à 48 jetée pour les kiosques des dép. 75, 77, 78, 91, 92, 93, 94, 95, posée sous la 4e de couverture pour les abonnés des dép. 75, 78, 92, 93, 94. MAGAZINE 3 L’invité Le réalisateur Jacques Audiard 9 Premier plan Aux JO, des cérémonies joliment culturelles 10 Ici et ailleurs SPÉCIAL RENTRÉE LITTÉRAIRE 14 Nos coups de cœur 459 romans et récits, dont 311 ouvrages français, arrivent dans nos librairies. Notre première sélection 15 Gaël Faye À travers l’histoire d’une famille, il revient sur celle du Rwanda 18 Alice Zeniter Son talent et son empathie pour la Nouvelle-Calédonie 20 Gabriella Zalapì L’intime, en toute pudeur 22 Alertes dystopiques Péril climatique, apocalypse… des auteurs imaginent demain 24 Frédéric Paulin Son nouveau triptyque nous plonge dans la guerre du Liban 27 La mémoire des camps Des témoignages inédits continuent de paraître 29 Nathan Hill Le romancier américain qui entre dans la tête des gens 30 Hommage Gena Rowlands, grande et belle dame du cinéma 32 Contrechamp Les Jeux (et les photographes des Jeux) en images CRITIQUES 37 Le rendez-vous La désinvolture est une bien belle chose, le nouveau roman de Philippe Jaenada 40 Livres 49 Enfants 50 Cinéma 56 Musiques 57 Arts TÉLÉVISION 59 Le meilleur de la semaine télé Quatre téléfilms inédits de Michael Haneke sur Arte.tv 66 Programmes et commentaires RADIO & PODCASTS 122 Lemeilleurdelasemaine radio& podcasts Des mangas audio français par Radio France et Milan 125 Les programmes 131 Mots croisés Du 24 au 30 août 2024 32 18 30 59 Sur notre site C’était en mai. Jacques Audiard présentait au Festival de Cannes Emilia Pérez, son insensée comédie musicale sur la transition d’un trafiquant de drogue mexicain, pour laquelle il reçut le Prix du jury et ses actrices, le Prix d’interprétation. Pendant deux ans, Télérama a suivi le cinéaste sur ce projet, des premiers repérages au Mexique aux tout derniers instants de la postproduction, en passant par les auditions des acteurs à Mexico ou les enregistrements musicaux de Camille. Alors qu’il sort en salles ce mercredi, plongez dans les coulisses de la création d’un film hors norme. telerama.fr/cinema/ ICI ET AILLEURS 9 Télérama 3893 21/08/24 RICHARD CALLIS/EURASIA SPORT IMAGES/GETTY IMAGES PREMIER PLAN MÉDAILLE D’OR DE LA CULTURE Par Yasmine Youssi magistrales cérémonies des JO. C’est la France, que le metteur en scène Thomas Jolly y a célébrée. Son éternel génie créatif. Son audace. Son insolence. Sa générosité. Et son universalité. Mais ces spectacles disaient aussi ce qui nous différencie fondamentalement des autres contrées: la place essentielle que nous accordons à la culture. Rien de ce que nous avons vu n’aurait été possible sans une politique culturelle forte menée depuis le Front populaire par l’État et les collectivités.Laplupartdesmusiciens,danseurs,comédiens ou circassiens impliqués dans ces fêtes olympiques ont été Ces deux soirs-là, le monde entier nous a enviés. Et il est probable qu’il en soit de même pour l’ouverture des jeux Paralympiques, le 28 août. Car nul autre pays n’a été capable de produire d’aussi formés dans des écoles nationales, ont pu ensuite parfaire leur art dans des institutions subventionnées, que certains dirigent aujourd’hui. À commencer par Thomas Jolly, passé par l’école du Théâtre national de Bretagne à Rennes, avant de créer sa compagnie, dont les spectacles étaient présentés au Trident, la scène nationale de Cherbourg, ou à Avignon. Idem pour la cheffe Zahia Ziouani à la tête de l’orchestre Divertimento,composéd’instrumentistesissusd’ensembles musicaux nationaux et de conservatoires — présents à la cérémoniedeclôture.Certes,toutn’estpasparfait.Lessubventions sont en baisse et la démocratisation culturelle toujours pas effective. Thomas Jolly a pourtant montré qu’on pouvait y arriver en faisant appel aux meilleurs, en mariant la créationaupatrimoine,enabolissantlafrontièreentreartsavant etculturepopulaire.Grâceàlaculture,cessoirs-là,laFrance s’est réconciliée avec elle-même. Et elle a ébloui le monde• Les acrobates des compagnies XY et Gratte Ciel, dans un tableau chorégraphié par Rachid Ouramdane, vendredi 26 juillet. Lacandidatedémocratedominelacampagneaméricaine surleréseausocialdesplusjeunes.Décryptageavec LaurenceGrondin-Robillard,doctoranteencommunication àl’universitéduQuébecàMontréal. QuelrôleTikToka-t-iljouédanscelancementdecampagne réussideKamalaHarris? Un rôle primordial. Kamala Harris a ouvert son compte, KamalaHQ,enfévrier2024.EnmêmetempsqueceluideJoe Biden. Dès le départ, son équipe a été prolifique et a compris que pour être vu sur TikTok, et plaire aux algorithmes, il fallait adopter certains codes. Les contenus de Harris jouent avec l’humour et l’authenticité de la plateforme Qu’est-cequele«ProjectCoconut»,signede reconnaissancedesessympathisantsenligne? En 2023, Kamala Harris a raconté une taquinerie de sa mère qui lui avait dit: «Vouslesjeunes,vouspensezêtretombésd’un cocotier»,pour lui signifier qu’on existe toujours par rapport au contexte qui nous entoure. La phrase est ressortie en juillet, et cette histoire est devenue un élément très important de la campagne. Sur les réseaux, les émojis noix de coco et cocotier sont désormais synonymes de soutien à Harris. Sur son compte TikTok, la candidate résume sa biographie à cette phrase: «Providingcontext» —«Je fournis du contexte». Ainsi, Harris fait un clin d’œil discret à ses sympathisants. Cettestratégieduclind’œilest-ellepayante? La jeune génération aime décoder les signes de reconnaissance. Ce sont les mêmes qui passent leur temps à repérer le moindre détail dans les publications de Taylor Swift et à échafauder des théories sur ses projets. L’équipe de Harris, en disséminant des petites références, attire leur attention. Paradoxalement,TikTokatoujoursrefuséd’être uneplateformepolitique.Ya-t-iluntournant? TikTokseveutunespacededivertissement.S’ilyatoujours eu des contenus politiques, ils ne sont jamais mis en avant. Pour réussir à toucher les jeunes utilisateurs, les politiciens doivent s’intéresser aux tendances, et savoir les manier. Il n’y a donc pas de tournant, mais simplement une bonne équipe du côté de Kamala Harris. Propos recueillis par Julia Vergely INTERVIEW MINUTE KAMALA HARRIS, REINE DE TIKTOK 10 Télérama 3893 21/08/24 Philippe Katerine, devenu star internationale depuis sa prestation à la cérémonie des JO. UNE DEUXIÈME VIE POUR LA « PEAU DE COCHON » DU PETIT HOMME BLEU Les réacs de tous bords l’ont voué aux gémonies pour son apparition en Schtroumpf dionysiaque lors du banquetpaïendelacérémonied’ouverture des JO. Barbe jaune canard, peau bleu Avatar, les attributs dissimulés par un string assorti et une guirlande de fruits, Philippe Katerine a chanté Nu, extrait d’un album à paraître à l’automne. La prestation culottée a reçu, assez vite, un accueil à la hauteur de son exubérance. En particulier sur les réseaux sociaux où «The Blue Man» est devenu une idole: on ne compte plus les déguisements et les pâtisseries à son effigie. Profitant de cet inattendu retour de flamme (olympique), un distributeur franco-allemand, Films Boutique, a acquis les droits de Peau de cochon, l’unique film réalisé par l’inclassable Frenchie,sortien2005surunepoignée d’écrans hexagonaux. Entre le film à sketchs et le journal intime, Peau de cochon a été conçu comme un album, avec douze pistes autobiographiques, la caméra DV en guise de guitare. Dans la plus cul(te), Katerine invite son ami Thierry Jousse dans le salon de son appartement montmartrois. Sur la table basse, onze boîtes en plastique contenant onze «joyaux du quotidien»: onze étrons de sa production, méticuleusement conservés et étiquetés avec date et menu transformé. Les deux compères les analysent doctement telles des œuvres d’art brut, des ready-merdes. Chacun feignant, avec génie, d’ignorer les effluves et l’absurdité de la situation. C’est jubilatoire. Reste à savoir si cet humour — so french — passera les frontières… — Jérémie Couston ICI ET AILLEURS 11 Télérama 3893 21/08/24 Ce félin qui s’étire fait partie de l’arche de Noé que le street-artiste a déployée tout autour de Londres. LE BESTIAIRE POÉTIQUE DE BANKSY DÉFRAIE LA CHRONIQUE EN ANGLETERRE Pour se détendre cet été, les Français ont eu les jeux Olympiques et les Anglais Banksy. Tout a commencé avec unbouquetinperchésurunmuràKew Bridge, dans la banlieue de Londres. Ont suivi deux têtes d’éléphant du côté de Chelsea, trois singes à Brick Lane, un loup, un félin sur un panneau publicitaire, deux pélicans sur la façade d’un fish&chips. Ces animaux ont vite été revendiqués par Banksy. Le streetartiste anglais en a ainsi peint huit en huit jours, complétant son arche de Noé avec des piranhas sur une guérite de police devenue un insolite aquarium urbain; et un rhinocéros tentant de s’accoupler avec une épave de voiture.Cen’estqueleneuvièmejourque vint enfin l’explication de ce bestiaire intrigant: un gorille laissant s’échapper quelques collègues du zoo de Londres… on comprenait alors que le primateétaitàl’originedelavadrouille de tous ces animaux. Ces invasions ont défrayé la chronique en Angleterre, excitant les voleurs (le loup, peint sur une antenne parabolique, a disparu dans l’heure), et suscitant de nombreuses théories: dénonciation du drame à Gaza, prise DES CARNETS À SOI DE VIRGINIA WOOLF RETROUVÉS Des textes de Virginia Woolf (1882-1941), on pensait tout connaître. Ses romans exceptionnels, ses articles littéraires et critiques, ses journaux intimes, sa riche correspondance avec l’écrivaine et poétesse Vita Sackville-West… Le King’s College de Londres vient de mettre en ligne les derniers documents inéditsdel’écrivaineanglaise.Leprojet WoolfNotes recense soixante-sept carnets de l’autrice de Mrs Dalloway, soit sept mille pages manuscrites, détaillant ses notes de lecture et ses recherches personnelles. Michèle Barrett, l’une des deux chercheuses en charge du site, indique que cette numérisation de manuscrits — d’une qualité exceptionnelle, pour qui saura décrypter les pleins et déliés de Woolf — permet de montrer à chacun «l’étendue de l’érudition et des lectures» de l’écrivaine. Ces notes éclairent la manière dont «son écriture, à la fois fictionnelle et non fictionnelle, est le fruit de recherches approfondies et rigoureuses sur des questions sociales, historiques, économiques, politiques et impériales. Cette vaste collection corrige le mythe selon lequel elle n’était pas éduquée». Les carnets, qui sont encore aujourd’hui conservés à divers endroits, avaient été indexés en 1983 par une spécialiste de Woolf, Brenda Silver. Jamais ils n’avaient été ainsi livrés à la curiosité des amoureux de celle qui a révolutionné la littérature au xxe siècle. — J.V. de position écolo, ou même un hommage à la gymnaste Simone Biles… InterrogéparunjournalisteduGuardian, le Pest Control Office, le bureau qui représente Banksy (dont l’identité est toujours secrète), a coupé court aux extrapolations, indiquant qu’en cette période de tensions sociales ces créatures «remontent le moral et apportent aux gens de surprenants moments de joie et d’amusement, tout en soulignant la capacité humaine à créer plutôt qu’à détruire». Pour cette fois, le patron du street art a préféré l’humour au militantisme choc. — OlivierGranoux JÉRÔME BONNET POUR TÉLÉRAMA | JUSTIN SULLIVAN/GETTY IMAGES VIA AFP | VUK VALCIC/ZUMA PRESS WIRE/SHUTT/SIPA
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