COURRIER CADRES n°155 - Page 1 - 155 C O URRIERC ADRE S.C OM MAI - JUIN 2025 4 TRAVAILLERAUTREMENT Depuis quelques années, une question revient avec insistance : notre rapport au travail a-t-il vraiment changé ? Si le télétravail, l’engouement pour les reconversions et les discours sur la quête de sens ont bousculé certaines habitudes, les mutations sont plus profondes qu’un simple effet postcrise. Elles révèlent un mouvement de fond : une redéfinition de ce que nous attendons du travail — individuellement et collectivement — et de sa place dans nos vies. Les jeunes, souvent désignés comme catalyseurs de ces transformations, expriment des attentes claires : plus de flexibilité, plus de cohérence entre valeurs personnelles et activités professionnelles, et surtout, plus d’écoute. Mais ce ne sont pas les seuls. Tous âges confondus, les aspirations évoluent. Le besoin de reconnaissance, d’autonomie et de dialogue sincère dépasse les cadres traditionnels. Cela pose des défis concrets pour les organisations, et notamment : comment concilier performance, santé et engagement durable ? La fonction publique en est un bon observatoire. Confrontée à une crise d’attractivité, à un absentéisme important et à une perte de repères, elle se réinvente, parfois à bas bruit. Dans notre enquête, vous découvrirez des initiatives locales, des managers engagés, des agents qui retrouvent du sens en repensant les manières de coopérer et de servir. Derrière ces exemples, une conviction émerge : innover dans les pratiques managériales et relationnelles est devenu vital pour redonner du souffle à l’action publique. C’est dans cette dynamique que s’inscrit la prochaine Semaine pour la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT), qui se tiendra du 16 au 20 juin. Le thème retenu cette année par l’Anact — “Parler du travail, c’est productif !” — invite à sortir d’une culture du silence ou du déni. Car parler du travail réel, c’est déjà en prendre soin. Les managers jouent ici un rôle-clé : créer un climat de sécurité psychologique où chacun peut exprimer ce qu’il vit, sans crainte de jugement. C’est là que commence l’intelligence collective. Et que s’inventent les formes de travail de demain. est édité par CDI Médias Services SAS au capital de 1 525 965,90 euros RCS PARIS 532 425 279 100, rue La Fayette 75010 Paris Tél. : 01 84 16 56 60 Code A.P.E. : 7312 Z Numéro de commission paritaire : 1124 T 83914 Numéro ISSN : 02206994 Impression : Imprimerie LÉONCE-DEPREZ Dépôt légal : à parution Diffusion : MLP Courrier électronique : info@cdimedias.com • Rédaction : courriercadres@cdimedias.com • Abonnements : abo@cdimedias.com • Web : web@cdimedias.com DIRECTION Président et Directeur de la publication : Yves de LA VILLEGUERIN Directeurgénéraldélégué : Florian LAVENU Rédactriceenchef: Fabienne Broucaret fabienne.broucaret@cdimedias.com RÉDACTION Léa LUCAS, Pablo LEMONNIER Journalistes pigistes : Camille PINET, Charlotte DE SAINTIGNON, Élisabeth TORRES, Laure GIRARDOT, Anne GOLEC, Virginie GONÇALVES NOS CONTRIBUTEURS Aurélie DURAND, Gilles GATEAU, Jean-Noël CHAINTREUIL, Marc BERETTA, Sylvain BERSINGER, Marco MOSCA Merci également à la rédaction de : RF Conseil Copyright : “Courrier Cadres” Toute reproduction d’articles ou de dessins, sur tous supports y compris Internet, doit faire l’objet d’une demande écrite auprès de la direction du magazine. 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RÉALISATION Directeur artistique : Jérémie HEYLEN Maquettiste: Jérémie HEYLEN ILLUSTRATIONS ET PHOTOS Shutterstock et Générateur IA Shutterstock (sauf mention contraire) Photo de couverture : Sarah CHAMBON JRI Mickaël ICARD CAMÉRAMAN - PHOTOGRAPHE Quentin DONVAL VIDÉO Virgile LELAY, Nathan ZLOTKOWSKI PUBLICITÉ Emmanuel FROMENT emmanuel.froment@cdimedias.com COMPTABILITÉ & ADMINISTRATIF Linda MECHENTEL linda.mechentel@cdimedias.com SERVICE ABONNEMENT OCIFAM / COURRIER CADRES : 100, rue La Fayette - 75485 Paris cedex 10 Tél:0185347100-abo@cdimedias.com GESTION & MARKETING DE LA DIFFUSION Bo Conseil Directeur : Otto BORSCHA oborscha@boconseilame.fr Pays d’origine du papier : Belgique Taux de fibres recyclées : 0% Certification : 100% PEFC Eutrophisation PTOT : 0,01 kg/t Yves de La Villeguerin Directeur de la publication SOMMAIRE 26 11 VEILLER 12 Bruits de couloirs 18 Futur du travail : IA et emploi, anticiper le choc de 2030 19 Prise de recul : engagement, comment redynamiser une équipe démotivée ? 20 Qualité de vie au travail : - Management : créez une “safe zone”pour votre équipe - À vous de jouer ! Rejoignez la tribu des Happy Workers ! 24 Leadership : management, et si la vulnérabilité était une force ? 26 DOSSIER : NOTRE RAPPORT AU TRAVAIL A-T-IL CHANGÉ ? 41 DIRIGER 42 Ressources humaines : - Dominique Cavalié, DRH de FDJ United, “Nous sommes dans un moment stratégique” - Et si on parlait... de task masking ? 46 Objectif responsable : Café Joyeux,aussi délicieux qu’inclusif ! 48 Vie d’entreprise : épargne salariale, un levier d’attractivité 52 Mice : séminaires, 50 nuances de vert 56 Flotte auto : Location Longue Durée, faut-il craindre la restitution ? 60 Juridique avec RF Conseil : licenciement économique, justifier le bon motif MAI - JUIN 2025 20 46 C O URRIERC ADRE S.C OM 6 MAI - JUIN 2025 COURRIER CADRES EN RÉALITÉ AUGMENTÉE Votre magazine est désormais enrichi grâce à SnapPress. Bonne expérience ! TÉLÉCHARGEZ ICI 74 126 82 SARAH CHAMBON 65 PROGRESSER 66 L’entretien : Alessandra Sublet, tracer son chemin 72 Entrepreneur de légende : Charles Pathé, la naissance de l’industrie du cinéma 86 Mobilité : Toulouse,la ville qui voit la vie en rose ! 92 Mutation : Xavier Rodriguez,d’ouvrier à chef d’entreprise 94 Argent & patrimoine : fiscalité,la pierre sans l’IFI, comment faire ? 104 Drive : Audi A5 Avant S Line TDI Hybride S Tronic, Audi va de l’avant 106 Conso : c’est du sport ! 110 High-tech : smartphones,l’IA dans la poche ! 112 Heures sup 114 Courrier 74 TENDANCE : FONCTION PUBLIQUE : LES RESSORTS D’UNE MUTATION SILENCIEUSE 85 RESPIRER 94 74 66 C O URRIERC ADRE S.C OM 7 MAI - JUIN 2025 C O URRIERC ADRE S.C OM 8 MAI - JUIN 2025 PRÉVENIR ET GÉRER LA FATIGUE DES COLLABORATEURS Repérer les signaux d’alerte,adapter l’environnement et le management sont des leviers clés pour préserver la santé,mais aussi l’engagement des collaborateurs. c o u r r i e r c a d r e s . c o m DIGEST NOS ARTICLES LES PLUS LUS NOS PODCASTS NOS VIDÉOS LE “MANAGER HUMBLE” SERAIT-IL LE REMÈDE AU DÉSENGAGEMENT ? L’heure est à la remise en question du leadership traditionnel. Face au désengagement des salariés et à la crise du management, de nouvelles pistes émergent, notamment autour de la notion d’humilité. LES PETITS CAILLOUX Episode #29 : Je suis stressée par la reprise du travail après mon burn-out. FEMMES DE DÉFIS Saison 3,épisode 3 : Justine Mettraux, skippeuse au Vendée Globe 2024-25 SOURIRE À LA VIE Découvrez notre interview de Théo Curin. GESTION DES CONFLITS : DÉSARMORCER SANS FUIR Découvrez le replay de notre webinaire. ORGANISÉ PAR : INSCRIVEZ-VOUS EN SCANNANT LE QR CODE L E S A LO N D U MANAGEMENT Mardi 3 juin 2025 Palais des Congrès de Paris MANAGERS • RH • DIRIGEANTS Inspirez-vous des dernières tendances managériales 50 conférences • 4 masterclass • 90 speakers • 50 partenaires l e s a l o n d u m a n a g e m e n t . c o m SOMMAIRE 12 Bruits de couloirs 18 Futur du travail : IA et emploi, anticiper le choc de 2030 19 Prise de recul : engagement, comment redynamiser une équipe démotivée ? 20 Qualité de vie au travail : - Management : créez une “safe zone”pour votre équipe - À vous de jouer ! Rejoignez la tribu des Happy Workers ! 24 Leadership : management, et si la vulnérabilité était une force ? VEILLER VEILLER VEILLER VEILLER 11 C O URRIERC ADRE S.C OM 12 MAI - JUIN 2025 À travers des actus insolites et sérieuses autour du monde, Courrier Cadres vous propose un regard incisif sur la Planète travail. Revue de presse par Pablo Lemonnier. Pour retrouver ces articles, scannez la page ! ÉVITER LES NON-DITS D ’après Fortune, la qualité commune aux leaders et aux parents qui réussissent à instaurer des relations solides, au travail comme à la maison, serait la capacité à affronter l’incertitude avec transparence. Pour Becky Kennedy, psychologue et fondatrice de Good Inside, éviter les conversations difficiles est une erreur : “C’est l’évitement qui crée le malaise, pas l’événement.” Dans un contexte de licenciements ou de crise, dire ce que l’on sait et ce que l’on ignore renforce ainsi la confiance. “Nous aimons entendre des vérités difficiles de la part de personnes avec qui nous sommes connectés”, insiste-t-elle, plaidant pour une communication honnête, même incomplète, comme un ancrage émotionnel en période trouble. Quel futur du travail ? A lors que les entreprises peinent à suivre le rythme effréné des mutations sociales, technologiques et climatiques, País Circular relaie une initiative lancée par la SOFOFA, la fédération de l’Industrie chilienne : le rapport Escenarios y desafíos de los futuros del trabajo (Scénarios pour le futur du travail). Fruit d’un travail collaboratif réunissant plus de 200 représentants du secteur privé, public et académique, ce document identifie quatre grands moteurs de transformation, dont le changement climatique et la transformation démographique. Treize tendances émergentes et pas moins de 35 scénarios possibles sont également mis en avant. Ce rapport propose surtout 10 défis stratégiques pour renforcer la résilience des organisations, comme l’intégration de profils diversifiés, la valorisation des compétences relationnelles, la construction de structures plus souples ou encore la promotion de la coopération au détriment des hiérarchies traditionnelles. “Il ne s’agit pas de deviner l’avenir, mais d’élargir notre manière de le penser”, résume Natalia Lidijover, directrice exécutive de Futuro del Trabajo. CHERCHESECONDJOB D’après Forbes, le salariat classique perd du terrain aux États-Unis, où 71 % des actifs cherchent des sources de revenus complémentaires. Face à une économie sous tension, les “side gigs” en ligne séduisent par leur souplesse : sondages rémunérés (64,7 %), investissements numériques (39,8 %) ou freelancing (23,8 %). Selon une enquête de Superprof, près d’un Américain sur deux pense que les compétences numériques seront cruciales pour monétiser leur activité en 2025. Camille Lemardeley, directrice de Superprof, constate que “les gens veulent de l’autonomie financière et mettre leurs talents à profit”. D’autres pistes émergent, comme la vente artisanale saisonnière ou le nettoyage de logements après déménagement (jusqu’à 800 $ par week-end). Autant de solutions pour reprendre le contrôle de leur vie pro. C O URRIERC ADRE S.C OM 13 MAI - JUIN 2025 BRUITS DE COULOIRS VEILLER D ’après une enquête menée en 2025 par Gallup auprès de 10 000 salariés dans le monde, le bien-être personnel s’impose désormais comme le premier critère pour accepter un emploi, devant la rémunération et la sécurité de l’emploi. Dans ce contexte, l’Europe domine le classement des meilleures régions pour l’équilibre vie pro-vie perso. L’étude prend en compte des critères comme le congé maternité, les arrêts maladie, les horaires de travail, l’accès aux soins ou encore les protections sociales. Le score global, noté sur 100, se base aussi sur la durée des congés annuels, le salaire minimum, l’inclusivité LGBTQ+, ou encore l’indice de bonheur, offrant un panorama complet des conditions de travail dans chaque pays. On y retrouve ainsi la France en 17e position avec un score de 62,75. La première position étant attribuée à l’Irlande avec un score de 78,67 pour ses congés annuels bien payés, sa sécurité sociale et le plus haut salaire minimum horaire de 13,44 euros de l’heure. E n Inde, l’insécurité domine le paysage professionnel, selon une vaste enquête publiée par The Hindu BusinessLine. Réalisée auprès de plus de 8 000 salariés, issus de 13 secteurs économiques, cette étude révèle que 71 % d’entre eux se sentent menacés dans leur emploi. Un climat d’incertitude qui alimente l’anxiété (59 %) et l’insatisfaction (47 %), transformant nombre de salariés en “employés distraits”, préoccupés davantage par la recherche d’un nouveau poste que par leurs missions actuelles. Cette spirale d’insécurité touche particulièrement les 40-59 ans, selon Harish Bijoor, auteur de l’analyse. Coincés entre les responsabilités familiales, l’essor de l’intelligence artificielle et la baisse de l’intérêt des recruteurs, ils cumulent pression économique et sentiment d’obsolescence professionnelle. À l’inverse, les moins de 30 ans se montrent plus sereins, fraîchement intégrés dans un marché du travail encore porteur. QUAND L’INCERTITUDE PÈSE OÙ FAIT-IL BON TRAVAILLER ? UNE SÉGRÉGATION SALARIALE D’après une analyse relayée par El Economista, les salariés les mieux rémunérés travaillent de plus en plus entre eux, dans une forme de ségrégation croissante qui nuit à la cohésion sociale. En se fondant sur un milliard de données issues de 12 pays développés, les chercheurs ont montré qu’en 25 ans, le 1 % des mieux payés s’est progressivement entouré de profils similaires, tandis que la proportion de collègues issus des bas salaires a chuté. Ce phénomène, amplifié par la digitalisation, l’externalisation et la désindustrialisation, accentue la fracture entre les élites et les autres. Moins de contacts entre strates professionnelles signifie aussi moins de chances de progression pour les bas revenus, exclus des réseaux d’information et d’influence. Dans ce contexte, l’ascension sociale à la Elliott Hill, patron de Nike passé de stagiaire à PDG, semble relever d’un passé révolu. C O URRIERC ADRE S.C OM 14 MAI - JUIN 2025 VEILLER BRUITS DE COULOIRS POURL’ÉGALITÉ SALARIALEENAUSTRALIE La Fair Work Commission australienne a statué que cinq conventions collectives couvrant des secteurs à prédominance féminine — dont la petite enfance, la pharmacie, la psychologie ou les services communautaires — ne garantissent pas l’égalité salariale. Conséquence : des hausses significatives de salaires, jusqu’à +23 % pour certaines éducatrices de jeunes enfants, ont été proposées. Une première depuis la réforme du Fair Work Act en 2022, qui impose désormais de prendre en compte l’égalité femmeshommes sans avoir à démontrer de discrimination ou à comparer avec des métiers masculins. Si le relèvement de 14 % pour les pharmaciens est acté dès juillet 2025, d’autres propositions restent provisoires. Certaines inquiétudes subsistent : les syndicats redoutent que les modifications de classification dans les services sociaux n’annulent des acquis salariaux. Les discussions avec les employeurs et gouvernements sont en cours, ces derniers appelés à financer les augmentations dans les secteurs subventionnés. VERS UN SALAIRE UNIVERSEL ? S elon CNN, un revenu de base mensuel n’incite pas à l’oisiveté. C’est l’un des enseignements majeurs d’une expérimentation menée en Allemagne par l’association Mein Grundeinkommen : 122 personnes âgées de 21 à 40 ans ont reçu 1 200 euros par mois, sans condition, entre 2021 et 2024. Résultat : les participants ont conservé une activité professionnelle comparable à celle du groupe témoin, avec 40 heures hebdomadaires en moyenne. En revanche, les bénéficiaires ont changé plus facilement d’emploi, se sont formés, et ont exprimé un sentiment d’autonomie renforcé, notamment chez les femmes. Leur satisfaction globale – qu’elle soit liée au travail, au revenu ou à leur santé mentale – s’est nettement améliorée. Financé par des dons privés, le projet entend désormais élargir son panel pour tester l’impact du revenu de base à l’échelle d’une population plus représentative. QUAND LE TEMPS PARTIEL PREND DE L’AVANCE D ans un article publié par Libre Éco, les chiffres de Statbel confirment un basculement structurel : en Belgique, le travail à temps partiel concerne désormais 26,4 % des salariés, contre seulement 8,3 % en 1983. Cette progression spectaculaire touche aussi bien les hommes – passés de 1,9 % à 12,8 % en quarante ans – que les femmes, dont 40,5 % travaillent aujourd’hui à temps partiel. Le régime 4/5e domine largement. Dans l’horeca, le secteur d’activités de l’hôtellerie, de la restauration et des cafés, ce type de contrat représente la moitié des emplois, avec 61,6 % des femmes concernées. Le secteur de la santé affiche des taux similaires. D’autres domaines – comme l’enseignement, les arts ou les services administratifs – oscillent entre 30 % et 40 %. L’écart entre les sexes reste notable : dans les services administratifs, 53,3 % des femmes sont à temps partiel contre 16,8 % des hommes. Après un pic en 2009, une légère baisse est observée depuis 2020. 38€ Aulieude57,60€* Soit+de35%deremise (valeurvente aux numéros) 1 AN : 6 NUMÉROS Instagram X LinkedIn Facebook Scannez le QR code pour vous abonner
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