MARIANNE n°1431 - Page 6 - 1431 POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 Anne. Retraitée et combattante contre Alzheimer LA RECHERCHE A BESOIN DE VOS LEGS ET DONATIONS POUR METTRE ALZHEIMER KO. POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 Anne. Retraitée et combattante contre Alzheimer LA RECHERCHE A BESOIN DE VOS LEGS ET DONATIONS POUR METTRE ALZHEIMER KO. POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 Anne. Retraitée et combattante contre Alzheimer LA RECHERCHE A BESOIN DE VOS LEGS ET DONATIONS POUR METTRE ALZHEIMER KO. Fondation Recherche Alzheimer Hôpital de la Pitié - Salpêtrière - 83 bvd de l’Hôpital - 75013 Paris POUR VOUS INFORMER ET VOUS ACCOMPAGNER MARY ROUILLÉ, responsable legs, dons et assurances-vie se tient à votre disposition mrouille@alzheimer-recherche.org - 01 42 17 75 23 / 07 69 32 09 80 Anne. Retraitée et combattante contre Alzheimer LA RECHERCHE A BESOIN DE VOS LEGS ET DONATIONS POUR METTRE ALZHEIMER KO. L’ÉDITOdeFranckDedieu Du mont Olympe à la terre ferme hasardeuses quand seuls les gagnants de la vie applaudissent les winnersdelapiste.Lessuccèsd’audiencedescompétitionsretransmises sur le petit écran ne feront pas oublier à des millions de téléspectateursl’impossibilitéfinancièredebouclerleursvalises. QuantauxtombereauxdebilletsvendusauxJeux(9,4millions), ils ne dépassent pas symboliquement le nombre de bulletins en faveur d’un candidat RN ou de ses alliés aux dernières législatives (10,6 millions). Cette comparaison – un peu osée – par la loi des grands nombres sert juste à souligner combien une grande manifestation de joie peut cacher, à quelques kilomètres de distance, une large expression de mécontentement inscrite dans les profondeurs du pays. Mais, surtout, attacher une importance exagérée à l’ambiance victorieuse et au climat plus positif risque bien de produiredesdésillusions.Decreuserdavantagelefosséentrelaréalité peu reluisante de la France d’en bas et le rêve éveillé des podiums parisiens. Alors, bien sûr, des économistes de haute réputation, Yann Algan et Pierre Cahuc*, font de la défiance française à l’égard de toute institution, et même du voisin, la cause de bien des maux. Effectivement, sans désir partagé d’investir, de travailler, d’échanger en confiance, point de richesse. Mais l’actuel malaise français ne tient pas à une question d’humeur ou d’ambiance décontractée. Après les crises financière, sanitaire,socialeetpolitique,leconjoncturel ne pèse plus rien face au structurel. Pas besoin de (re)lire l’intégrale de Marx pour comprendre le problème : au-dessus de ce nouveaumicroclimatchaleureuxetpositif siège en maître la « superstructure » avec ses lois dirimantes, ses dogmes(pourl’instant)indépassables.Augmenterréellementles salaires ? La libre circulation des capitaux l’exclut sous peine de perdreencompétitivité. Effectuerunevraierelanceécologique ? LescerbèresdeBruxellesleprohibentpourdéficitsexcessifs.Maîtriser ses frontières ? Les juges administratifs nationaux et européens en restreignent l’exercice. Emportés par la ferveur des JO, les Français veulent à nouveau – tant mieux – mais ils ne peuvent toujourspas–tantpis.Et,paradoxesuprême,cerégimedel’empêchementdevientencoreplusdifficileàvivrequandlesgens,sous le feu de l’envie et de la bonne humeur revenues, voient invariablement leurs desseins échouer. Peut-être faudrait-il prendre au sérieuxlecélèbrevaudevilledeLabicheintituléEmbrassons-nous, Folleville!,danslequelunpère,pleind’entrainàl’idéedemariersa fille, se jette à chaque scène au cou du chevalier susdit, persuadé d’en faire son gendre. « Il m’enlace ! il me garrotte ! », susurre sous cape Folleville. Le voilà piégé ! *LaSociétédedéfiance.Commentlemodèlefrançaiss’autodétruit,éd.Rued’Ulm,2007. «L es gauchistes sentent le curé froid. » François Cavanna, cofondateur de Hara-Kiri et de Charlie Hebdo,savaitparleràcesmoines-soldatsincapables, tout à leur tocade révolutionnaire, de prendre un peu part à la fête, de lâcher prise un instant, de rentrer sans trop de retenue dans la danse bon enfant. Et l’idée, lancée par La France insoumise, avec les mots d’un pisse-vinaigre, de « [mettre] en place une commission d’enquête populaire […] sur les JO », pourtant très réussis, provoquerait sans doute chez l’iconoclaste journaliste, roi de la bombance, un vaste éclat de rire. Mais, attention, les rabat-joie peuvent se recruter ailleurs, de l’autre côté, pour ainsi dire. Pendant longtemps, les élites politiques et médiatiques ont porté en bandoulière une sorte de masochismepatriotiqueoudedéclinismechicdestinéàrappeler l’immaturité d’un peuple rétif aux canons de la mondialisation heureuse et réduit à demanderdupainetdesjeux(olympiques) pour améliorer l’ordinaire. Attirés par la «pureté»duTribunalrévolutionnaireetpar le discours des néolibéraux, beaucoup de médias choisirent d’ailleurs les deux dans un pessimisme de bon aloi. Mais depuis la cérémonie d’ouverture des JO, la télé et les journaux somment presque à l’unisson de penser… à l’inverse : positif. De chanter l’hymne de la grande réconciliation, de se laisser entraîner par cet élan d’optimisme après des mois de tiraillements–voiredehaines–politiques. Du26juilletau11août,unemassedebonne humeur a réellement déferlé sur la ville de Paris, belle, enfin libérée de ses échafaudages. Avec des Français excités par le souffle des victoires tricolores et des touristes de bonne mine envoûtés par la magie des lieux et des épreuves, tous unis dans la même bienveillance sportive. Faudrait-il s’en plaindre ? Non. Évidemment. Pas question de surjouer un élégant détachement ou une romanesque inaptitude aubonheur.Maisunesortedemiseengardes’impose.Cetteharmonie collective retrouvée dans la capitale et quelques « fan zones » procède d’abord d’un effet de loupe aux conclusions trompeuses. Quandlesregardssefixentsurunpharelumineux,ilssedétournent d’une réalité bien plus vaste. Et en l’occurrence bien différente. L’officedutourismeetdescongrèsdeParisévalueà15,1millionsle nombredetouristesprésentsenÎle-de-FrancependantlesJOavec, pourlesvisiteursétrangers,unbudgetmoyend’environ1300€par personne,sanscompterlevoyage.Soitpratiquementunsmicmensuel net. Attention donc aux extrapolations psychosociologiques Emportéspar laferveur desJO, lesFrançais veulentà nouveau – tantmieux– maisilsne peuvent toujourspas –tantpis. 15au21août2024-Marianne-3 No 1410du21au27mars2024 l’été de“Marianne” 22 3 L’ÉDITOde Franck Dedieu DumontOlympeàlaterreferme 6 CequeMarianne enpense Labullespéculativedansl’IA affolelesmarchés Marianne DÉCRYPTE 14 Royaume-Uni, cet embrasement qui couvait Marianne DÉCRYPTE 18 Duralex a évité la casse ! Marianne DÉCRYPTE 20 Draguer en milieu hostile 46 Mieuxvautenrire! 48 COURRIERETJEUX 50 Le banc public par Cécile Guilbert DOSSIER LES GALÉRIENS DU NET : NOUS, ON CLICK ET EUX, ILS TRIMENT 8 22 LA FOLLE SAGA DU CAP D’AGDE 25 Les repentis 26 Anti-dîner de cons 27 Repérer les bidons 28 C’EST LE JEU, MA PAUVRE LUCETTE! 30 Hommes/femmes, divergences 31 Les lois du quotidien 32 SON ALTESSE PIERRE BERGÉ 36 Ces volcans éteints 38 Déclin de l’Occident 40 L’Élysée en bouteille 42 Suites royales 44 Disparu du français 45 Autotest No 1431du 15 au 21 août 2024 SERVICE ABONNEMENTS Pour nous contacter : 01 86 57 08 54 abonnements@journal-marianne.com MARIANNE - Service abonnement - 60643 Chantilly Cedex TARIFS ABONNEMENTS POUR LA FRANCE MÉTROPOLITAINE : Particuliers : 1 an (51 nos dont un double) 135 €. POUR LA SUISSE : Asendia Press Edigroup S.A., chemin du Château Bloch 10, CH-1219 Le Lignon. Tél : 022 860 84 01. abonne@edigroup.ch - 1 an (51 nos ) CHF 225. 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ISSN : 2425-4088 (imprimé) / 1286-4749 (en ligne) No CPPAP 1027 C 89227 Printed in France / Imprimé en France. PUBLICITÉ : CMI Media, Valérie Masson, Séverine Franier, 3/9 avenue André-Malraux – 92300 Levallois-Perret – 0187151795. 28 4-Marianne-15au21août2024 Couverture : Justin Tallis / AFP - Benoît Tessier / Reuters - Lahcene Abib / Divergence. Sommaire : Sophie Loubaton - Shamley Productions / Paramount Pictures Diltz / Bridgeman Images LEDESSINdeJiho 15au21août2024-Marianne-5 Ceque Marianne enpense 6-Marianne-15au21août2024 Erica Dischino / Reuters FRAÎCHEUR Sans se donner trop de peine, Kamala Harris, la vice-présidente et candidate à la présidentielle, a relancé une machine démocrate presque à l’arrêt du temps de Joe Biden. LECHIFFREQUICHIFFONNE + +23,4% C’est la hausse de la consommation d’antidépresseurs chez les jeunes de 2020 à 2021, selon l’assurance maladie. Cette consommation a encore augmenté de 5 % en 2023, année durant laquelle près de 936000 jeunes ont été remboursés pour un médicament psychotrope. Le phénomène concerne majoritairement les filles. Des récoltes de blé 2024 inférieures de près de 27,2 % à celles de 2023 (sans doute 25,17 t contre 35,1) et une qualité qui parfois fait défaut… Telles semblent être les conséquences des intempéries qu’a subies la France. De quoi faire réagir le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, sur France Info, qui s’est empressé de demander le soutien de l’État et de l’UE pour les céréaliers. Gageons qu’il aura l’oreille du ministre, qui s’est déjà engagé le 29 juillet à activer des dispositifs d’aide exceptionnels si les moissons se révélaient vraiment mauvaises. Elles le sont. L’autre enjeu de cette catastrophe agricole, et pas forcément le moindre, est géopolitique. Car la France exporte beaucoup de blé : en 2023, 6 millions de tonnes vers l’UE et 10 millions vers, entre autres, la Chine, le Maroc, le Royaume-Uni et l’Algérie. Mais si la France exporte son surplus vers l’UE cette année, il ne restera pour les autres pays que la portion congrue…, notamment pour le Maroc et l’Algérie, vers lesquels, en 2023, elle avait expédié 1,7 million de tonnes pour le premier, 1,5 pour la seconde… qui a décidé de diversifier ses fournisseurs. Et si, pendant longtemps, le blé français a tenu le haut du pavé, pour la campagne 2023-2024, ce sont 2,34 millions de tonnes de blé russe qui sont arrivées en Algérie. Or la Russie, devenue premier exportateur de blé du monde (avec un quart du commerce mondial), fait de cette céréale un outil de guerre non seulement commerciale, mais aussi géopolitique, puisqu’il lui sert à tisser des alliances ou à pénétrer de nouveaux territoires. Au jeu des chaises musicales des exportateurs de cette année, il est fort à craindre que la France se retrouve… le cul par terre – et peut-être pour longtemps ! Pascale Fourier Mauvaiserécolte, grossesconséquences BLÉ I l y a deux dates dans le calendrier que Donald Trump doit détester : le 14 décembre 2020, quand le collège des grands électeurs valida définitivementlavictoiredesonrivaldémocrate, Joe Biden. Et, plus récemment, le 21 juillet, lorsque ce dernier, pressé par son camp, annonça qu’il renonçait à briguer sa réélection. En ce dimanche d’été, l’ex-magnat de l’immobilier a tout simplement vu s’envoler sa meilleurechancedeprendresarevancheet d’effectuer un deuxième mandat. Si,cesderniersmois,Trumparetrouvé unesolideassisedanslessondages,surle terrainetauprèsd’unélectoratrépublicain ressoudé autour de son nom, c’est beaucoup par contraste avec un Biden essoré, semi-comateux, incapable de défendre son bilan et contesté au sein mêmedupartidémocrateparlagauche propalestinienne. Galvanisée par l’aubainequ’areprésentée,defacto,latentatived’assassinatdumilliardaireàButler (Pennsylvanie) puis, dans la foulée, par l’euphorique convention républicaine de Milwaukee (Wisconsin), la « Team Trump»afaitminedeseréjouirdel’entrée en lice de Kamala Harris. Pas pour longtemps. En l’espace de quelques jours, d’une poignée de meetings et d’apparitions à la télévision, la viceprésidentearelancéunemachinedémocratepresqueàl’arrêtjusque-là.Leplus étonnantestquel’ancienneprocureure généraledeCalifornien’arienfaitnirien proposédespectaculairepourainsirenverserlatable:dessourires,quelquespas dedanse,uneprésencephysiqueetune fraîcheursoudainementperçuscomme la promesse d’un renouveau du vivreensemble, dans un pays où l’on joue à se faire peur et à se détester depuis un certaintemps. On a brièvement cru que Trump allaitluiaussireprendreàsoncomptele besoindesoufflerqu’éprouventnombre d’Américains tant sont réelles et profondes les raisons de craindre l’avenir. Mais, très vite, on a retrouvé le Trump «badboy»de2016,commes’illuiétait tropcompliquédes’adapteràlanouvelle donneetàuneadversairemoinsconnue maisaussimoins«clivante»queHillary Clinton. Cette année-là, Trump n’était pas le favori et l’avait emporté. Le scénario inversé se profile déjà à l’horizon du6novembre. M AlainLéauthier DonaldTrumpaperdu sonadversairepréféré ÉTATS-UNIS Il a osé le dire 15au21août2024-Marianne-7 Yuichiro Chino / Getty - Astrid Di Crollalanza / Opale “Si le PS s’affirme, je n’ai aucun doute sur l’émergence d’une incarnation, on la trouvera. J’y aiderai.” FRANÇOIS HOLLANDE, ex-présidentdelaRépublique,leMonde,le8août. PRISE DE RISQUE Selon Daron Acemoglu, professeur à l’institut MIT, l’intelligence artificielle ne devrait permettre qu’une petite hausse de 0,9 % du PIB américain en dix ans. Dur dur pour les investisseurs… BAISSEDESGAFAM Labullespéculative dansl’IAaffolelesmarchés D el’intelligenceartificielle(IA),le commundesmortelsneconnaît souvent que les recherches qu’il fait sur ChatGPT. Mais derrière les requêtes se cachent des questions de gros sous, car les fameux Gafam de la tech américaine ne regardent pas à la dépense. Mais pour quel retour sur investissement ? Les marchés financiers, eux-mêmes, commencent à s’en inquiéter. Si l’on observe la valorisation boursière des Gafam, qui se sont lancés dans la course à cette nouvelle technologie, la chute en un mois, du 6 juillet au 6 août, est phénoménale : à eux cinq, Amazon, Apple, Google, Meta et Microsoft, qui finance OpenAI (ChatGPT), ont perdu 1 806 milliards de dollars de capitalisation boursière. Alors qu’Amazon, Microsoft, Google et Meta vont consacrer, en 2024, 200 milliards dans les infrastructures nécessairesàcettetechnologie(45 %deplus qu’en 2023), des interrogations se font jour sur la rentabilité à court terme des investissements. Ainsi, Daron Acemoglu, professeur à l’institut MIT, dans une note du 25 juin de Goldman Sachs, affirme que les « changements vraiment transformateurs [dont est porteuse l’IA] ne se produiront pas rapidement, et peu – voire aucun – ne se produiront probablement au cours des dix prochaines années ». Il calcule alors une augmentation du PIB états-unien liée à l’usage de cette technologie de seulement 0,9 % sur la décennie. De quoi casser unpeul’ambiance.L’IAn’aurait-ellepas généré une bulle spéculative ? Chacun a investi gros et a promis beaucoup à qui les suivait, mais « les succès viendront-ils suffisamment vite pour justifier les investissements aujourd’hui ? », s’interroge, dans les Échos, Yann Le Cun, le Monsieur « IA » de Meta, avant d’ajouter : « C’est une question stratégique de risque. » Un risque qui commence à faire trembler les multinationales. Si lescinqmembresdececlubtrèsfermé ne sont pas tant mus par un désir de se livrer à une concurrence féroce entre eux que par la volonté de développer leur propre IA pour proroger, chacun dans sa spécialité, leurs avantages, la perspective de bénéfices rapides s’éloignealorsquedesinvestissements colossaux sont nécessaires. La Bourse, ordinairement, n’aime pas ça… M P.F. PREMIERMINISTRE Lesmédiasvotent XavierBertrand Laparenthèseolympiquefermée,uneautre compétitions’ouvreavec la nomination d’un nouveau Premier ministre. Pour préparer une combinazione permettant à Emmanuel Macron de poursuivre la même politique malgré deux déconvenues électorales (les européennes puis les législatives), les médias de la Cour ont mis en scène une opération promotion des noms dont on peut rêver pour continuer comme si de rien n’était. La preuve avec l’apparition de Xavier Bertrand, ancien ministre et président (LR) des Hautsde-France, qui se dit « prêt à relever le défi ». En quelques jours, les gazettes ont expliqué que la France vivait « le moment Bertrand », ce qui a dû en surprendre plus d’un. Quand le Nouveau Front populaire, arrivé en tête aux législatives, avance le nom de Lucie Castets pour Matignon, on lui rétorque que la gauche n’est pas majoritaire à l’Assemblée, ce qui est vrai. Mais quand il s’agit de Xavier Bertrand, membre d’un groupe doté seulement de 47 députés, nul ne s’offusque, espérant voir naître une coalition incertaine permettant de faire du Attal sans Attal. FrançoisDarras Nombreuxsontceuxquis’interrogent surlebutdel’incursionukrainienne dans la région russe de Koursk : réelle avancée stratégique, tentative de diversion pour contraindre la Russie à redéployer ses troupes en dégarnissant le front de l’est où elle avance inexorablement ? Ou encore, pour les autorités de Kiev, un moyen de prouver aux Ukrainiens et à leurs alliés que l’armée conserve sa combativité, alors que la fatigue gagne ? Ou bien s’agit-il de gagner des points pour mieux négocier une paix tant attendue avec Vladimir Poutine ? Le raid ukrainien a pris de court la défense russe et affolé la population du cru, démontrant une fois de plus les dysfonctionnements qui règnent en Russie. Si la centrale nucléaire de Koursk, à Kourtchatov, paraît a priori hors d’atteinte, le centre de transit du gaz russe vers l’Europe situé à Soudja, à dix kilomètres de la frontière, est en revanche à portée de main. Or à l’extrémité du gazoduc se trouvent la Slovaquie, la Hongrie et l’Autriche, trois pays de l’UE plutôt prorusses dans ce conflit. Allô ! Clausewitz ? Anne Dastakian Incursionukrainienne pourlapaix? RUSSIE LesgalériensduNet NOUS, ONCLICK eteux, ilstriment Le consommateur qui passe commande sur la Toile doit savoir que, à l’autre bout de la chaîne, il y a des hommes et des femmes qui œuvrent dans des conditions très difficiles. Plongée dans l’univers de la logistique, la face cachée de l’e-commerce. Textes et photos : Sophie Loubaton Yoann, directeur d’activité, plate-forme FM Logistic, mardi 22 novembre 2022, Escrennes (45), 9 h 04. Le picking, littéralement « cueillette » en anglais, c’est l’action d’aller chercher les produits dans le stock pour les regrouper à l’endroit où on va les « coliser ». Le site d’Escrennes, 90 000 m2 (soit environ 12 terrains de foot) est spécialisé dans la cosmétique et le luxe. On y réalise tous les jours en moyenne 70 000 prises et on y prépare 18 000 colis. “Ce qu’on fait ici, c’est une logistique fine. On est capable d’envoyer n’importe quelle unité, quantité, partout dans le monde, on a des milliers de références. Si quelqu’un commande à l’autre bout de la planète un simple rouge à lèvres, c’est ici que la commande arrive et d’ici que ça part.” 15au21août2024-Marianne-9 bon moment, au bon endroit, au moindre coût et avec la meilleure qualité. La méthode du « juste à temps ». La chaîne logistique façonne également nos paysages en France par l’implantation d’immenses et d’opaques entrepôts le long des grands axes de communication, souvent éloignés des centres-villes. Travailleursinvisibilisés Si,d’uncôté,logistiquerimeavecAmazonetartificialisationdessols,crispantdenombreuxespritsetfaisantse déployerdesbanderolesdeprotestation,lafilièreestnéanmoinslecinquièmerecruteurenFrance.Sestravailleurs, peureprésentésdanslesmédiasoudansl’iconographiedu mondedutravail,fortementinvisibilisés,formentlenouveauvisaged’uneclasseouvrièrequis’estinexorablement éloignéedusecteurindustrielmaisquin’apaspourautant disparu.Lereportagequisuit,pensécommeunemiseen lumièredepersonnestropsouventdansl’ombre,entend montrer ce que nous sommes nombreux à ne pas voir et à ignorer : l’arrière-boutique de notre consommation de biens et de marchandises. Un monde en coulisse que j’ai exploréafindelivrerdesscènesdevieautravail,desportraits, accompagnés de témoignages ainsi que de photos depaysage.J’aiarpentédesplates-formeslogistiques,mais aussilesroutesquilesdesserventpouryrencontrercelles etceuxquiytravaillent,àtouteheuredujouretdelanuit. M F ranceTravaill’affirmesursonsite:«Lesentreprises du transport et de la logistique ont le vent en poupe. Saisissezlesopportunités!»Ellesrecrutentàtourde bras:manutentionnaires,responsablesd’entrepôt, chefs de quai, caristes, magasiniers… Un secteur en pleine croissance qui embauche pas moins de 1,8milliondepersonnesenFrance,soitquatrefois plusquedanslesecteurautomobile,etdontlestroisquarts sont des ouvriers. Des emplois, mais, comme le disait Washington,agentlogistiquerencontrésurlaplate-forme colisMondialRelaydeRéau(Seine-et-Marne):«Beaucoup de gens ne se rendent pas compte. Il faut venir nous voir pour comprendre à quel point nous travaillons dur. » Une réalité à rebours de la facilité déconcertante avec laquelle on fait désormais son marché sur le Web, confortablement installédanssoncanapé. Dansuneéconomiemondialebouleverséeparlacrise sanitaire, le secteur du transport et de la logistique s’est révélévitallorsqu’ilafallumainteniràflotlachaîned’approvisionnement.Enoutre,lepaysentiers’estrenducompte delanécessitédesemploisqu’ellegénère,maisc’estununiversencoreabstraitpourleconsommateur.Uneenseigne préféreratoujoursrendredésirableunproduitprésentépar unjolimannequinquepalettiséparuncariste. La logistique, c’est quoi ? Pour dire vite, c'est l’art et la manière de mettre à disposition un produit donné au LesgalŽriensduNet 10-Marianne-15au21août2024 10-Marianne-15au21août2024 LEDOSSIER LEDOSSIER Romain, plate-forme FM Logistic, mardi 6 décembre 2022, Neuville-aux-Bois (45), 15 h 46. “Je suis arrivé par hasard dans la logistique. À la base, je suis peintre en bâtiment. J’avais été agent d’entretien dans une maison de retraite et j’ai été licencié. Là, sur la chaîne du « caf » (conditionnement à façon), je suis « col » (chef opérateur de ligne), donc capable de tourner sur tous les postes.” Hamoud, tournée de livraison Mondial Relay, vendredi 6 janvier 2023, Brie-Comte-Robert (77), 9 h 19. “J’ai fait différents boulots avant celui-ci. En arrivant d’Algérie dans les années 1990, j’ai travaillé dans la restauration, puis je suis devenu magasinier, commercial. Pendant un an, j’ai été directeur d’un magasin Leader Price, c’était très lourd. Il fallait assurer tous les jours les horaires d’ouverture et de fermeture du magasin. J’avais le statut d’adjoint alors que je faisais le boulot de directeur, le salaire ne suivait pas… Puis, j’ai ouvert ma propre boîte de transport en 1996, j’ai eu jusqu’à 21 chauffeurs, mais là je préfère rester petit. Ça m’a déjà coûté un divorce… J’ai maintenant quatre camions, un associé et deux chauffeurs.” Stéphanie, directrice d’exploitation, plate-forme Stef, vendredi 25 novembre 2022, Darvault (77), 15 h 45. “Le Covid, c’était l’inconnu. Les personnes ont eu très peur, en particulier les personnes à risque. Et nous, en logistique, on n’a pas été considérés comme prioritaires. Heureusement, on a eu un très gros élan de solidarité, on se rendait tous service, ça a vraiment changé nos rapports, ça a soudé les gens, ça a marqué, c’est fortement resté. La logistique, ce sont des métiers difficiles qui ne sont pas reconnus partout sur le plan financier, et ce, à tous les niveaux. C’est pour ça que c’est difficile de trouver de la main-d’œuvre ; et pourtant on demande de plus en plus de qualification. L’amour du travail, ce n’est pas tout, les gens veulent pouvoir vivre.” 15au21août2024-Marianne-11 -Marianne-11 LesgalériensduNet Fatima, intérimaire, plate-forme Mondial Relay, chutes des colis « non lus » par la machine de tri, mercredi 4 janvier 2023, Réau (77), 17 h 47. “Je suis polyvalente. Dans le travail, il faut savoir tout faire ! À 53 ans, j’ai beaucoup travaillé dans la cosmétique, mais aussi la restauration, la boulangerie, j’ai fait un peu de tout. Ici, c’est la première fois que je suis dans la logistique. Je suis sur les colis « non lus »... Je travaille depuis l’âge de 20 ans, mais je me suis arrêtée pour élever mes enfants et, depuis que la dernière est entrée à la maternelle, j’ai repris. Il faut travailler et penser à la retraite. Le travail, c’est bien, mais on bosse aussi en essayant de penser à un monde meilleur pour nos enfants. On pense à l’écologie, au tri… on voit bien que, partout, il y a de la surconsommation. Les marchands font les frais de port offerts pour les promos, les fêtes… ça incite les gens à commander, commander…” Blandine, plate-forme Ba&sh, lundi 28 novembre 2022, Louvres (95), 14 h 58. “À la base, je suis couturière. J’ai un CAP de couture, puis j’ai passé un bac optométrie et je suis devenue opticienne. Là, je reviens à ma passion, la couture. Mon travail ici correspond à mes valeurs. Je suis très active : écolo, je fais de la récup, je suis bénévole au vestiaire de la Croix-Rouge. J’ai travaillé chez Hermès, je transformais, je dégriffais pour anonymiser les vêtements. On n’a plus le droit de détruire les vêtements comme cela se faisait autrefois dans le luxe. Ça part en recyclage. J’ai eu le privilège de rencontrer Sharon et Barbara, fondatrices de la marque. Ces femmes dégagent des ondes positives ! À mon poste, j’ai aussi été très bien accueillie par Cécile, qui travaille aux retours, une femme qui aime son travail. Elle m’a touchée, m’a parlé de Ba&sh et je suis restée. Les rencontres, c’est important.” 12-Marianne-15au21août2024 12-Marianne-15au21août2024 LEDOSSIER LEDOSSIER
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