MARIANNE n°1439 - Page 4 - 1439 À L’HÔPITAL, ON PREND SOIN DE TOUS, MÊME DES NÔTRES. DE TOUS, MÊME DES NÔTRES. Les hospitaliers prennent soin de tous. Depuis plus de 60 ans la Mutuelle Nationale des Hospitaliers prend soin d’eux. Mutuelle Nationale des Hospitaliers CRÉÉE PAR ET POUR LES HOSPITALIERS Pour plus d’informations, rendez-vous sur l’Espace Décideurs Hospitaliers. L’ÉDITOdeNatachaPolony Livraison d’armes à Israël : non, Emmanuel Macron n’a pas commis de “faute” son agenda au risque de voir sombrer l’ensemble de l’édifice du droit international patiemment construit depuis la fin de la SecondeGuerremondiale.S’ilestunetraditiondeladiplomatie française,c’estbiendesedétacherdumessianismeoccidentaliste qui caractérise notamment la politique américaine et qui divise lemondeendeuxcamps,celuiduBienetceluiduMal,avecpour objectif de convertir chaque pays au Bien, c’est-à-dire d’en faire des satellites. C’est ce messianisme qui a conduit aux interventionshasardeusesenIraketenLibye,dontleProche-Orientetle Sahel paient encore le prix. Depuis un an, la logique de guerre qui s’est imposée après l’horreurdu7octobren’afaitqu’enfermerIsraëldansunengrenageterriblequilecondamneàécraserindéfinimentsesennemis sousdesdélugesdebombesquinepeuventqueleurapporterde nouvellesgénérationsdecombattants.C’estbiencequesouhaitaientleHamasetl’Iran.Aucunepaixpossible.Etc’estbienpourquoiceuxquiaimentvéritablementIsraëletveulentsapérennité doiventavoirlecouraged’inciteràromprececerclevicieux.C’est historiquementlerôleques’estassignélaFrance,justementparce qu’elle nourrit – ou nourrissait – à l’égard du monde arabe une proximité et une connaissance lui permettant de ne pas le rêver en miroir de l’Occident. Emmanuel Macron, depuis son arrivée au pouvoir, tente de perpétuer cette ligne complexe et nécessaire. Il le fait le plus souvent contre une part de la diplomatie désormais acquise à l’idéologie atlantiste, contre une (large) part du monde médiatico-politique, pour qui les belles histoires en noir et blanc sont tellement plus confortables, et contre le parti de la guerre, qui se fait,depuisquelquesannées,undevoirdetraquerlesennemisde l’intérieur en plaquant quelques clichés historiques mal digérés – Munich, le nazisme… – sur la réalité de son adhésion à ce messianisme occidental. Les États-Unis, que le président de la République visait dans son intervention, se condamnent à l’impuissance face à Benyamin Netanyahou en n’usant pas du seul levier entre leurs mainspourenrayerlamécaniquemortifère,aurisquedefracturer leur propre société. Quant au président de la République, faut-il le rappeler, il n’a pas choisi ce calendrier hasardeux, dicté par un Netanyahouqui,alorsquelaFranceetlesÉtats-Unisnégociaientun cessez-le-feu(grâceaufaitquelaFrance,justement,conserveun canaldediscussionavecleHezbollah),achoisidefrapperleLiban. La France doit se tenir aux côtés des Israéliens monstrueusementfrappésle7octobre.Elledoit,surtout,travailleràréparersa société gangrenée par un islamisme qui nourrit l’antisémitisme. Maiselledoitaussiœuvrerdanslesensdelapaix,danslesensdu seul avenir viable au Proche-Orient. M R eveniràunesolutionpolitique.Cesserdelivrerdesarmes qui servent à « mener le combat sur Gaza ». Les mots du présidentdelaRépubliqueontimmédiatementdéclenché l’ire de Benyamin Netanyahou et une tempête dans leverred’eaumédiatique.LePremierministreisraélien aparléde«honte»,usantdecetterhétoriquedésormais convenue qui veut que toute tentative de freiner les représailles lancées par Israël soit une façon de nier les victimes du7octobre2023etl’agressionatrocesubieparl’Étathébreu.Les commentateurs,quantàeux,ontinsistésurlecaractèreinopportun d’unetelledéclarationàlaveilledelacommémorationdumassacre. Revenonsd’abordsurlesmotsd’EmmanuelMacron.Ils’exprimedansuneémissionconsacréeàlafrancophonieetneveut passemblerhors-solenparlantdecesujetsansavoirlamoindre pensée pour la situation au Proche-Orient, et notamment au Liban,grandpaysdelafrancophonie.Etsil’onmetdecôtélaquestionducalendrier,lefonddesonproposestonnepeutplusjuste et mesuré. Il déplore, sans jamais la nommer ainsi, l’hypocrisie desÉtats-Unis,quiprétendentvouloiruncessez-le-feumaiss’abstiennent d’utiliser le seul outil pour l’obtenir : la suspension des livraisons d’armes. Il évoque le refus par Benyamin Netanyahou de ces propositions de cessez-le-feu. « C’est une faute, ajoute-t-il, y compris pour la sécurité d’Israël demain. » Bref, le président de la RépubliquesesituedansladroitelignedelapositiondelaFrance, qui,toutenétantl’alliéed’Israël,atoujoursvudanslerespectdu droit international et dans le refus de l’escalade les conditions véritables de la sécurité et de l’avenir de l’État hébreu. Certes,d’aucunsseplaisentàsoulignerlesvoixdivergentes dans son propre camp. Caroline Yadan, élue des Français de l’étranger,quisedit«encolère»etrappellequ’avantd’êtremacroniste,elleest«d’abord»députéedesFrançaisquiviventenIsraël (en oubliant qu’elle est aussi celle des Français des territoires palestiniens et des pays environnants). D’autres, comme Aurore Bergé ou Sylvain Maillard, ont également éprouvé le besoin de marquer leur divergence. Pis, le nom du président de la République, cité par Michel Barnier, a été sifflé lors des cérémonies de commémorationdu7octobreorganiséesparleCrif,certainsdans l’assistance criant : « Des armes ! », pendant que d’autres applaudissaient à grand bruit le « courage » du Premier ministre, qui, lui,avaitparléessentiellementdelaluttecontrel’antisémitisme. Peut-être faut-il rappeler que, par-delà les doutes que l’on peut nourrir sur l’opportunité d’une telle déclaration à la veille du 7 octobre ou sur les difficultés d’Emmanuel Macron à adopter une ligne claire sur les questions internationales, le véritable courage consiste bien, de la part de la France, à se faire l’avocat de la paix plutôt que de laisser Benyamin Netanyahou dérouler 10au16octobre2024-Marianne-3 No 1439du 10 au 16 octobre 2024 32 Chroniques Marianne MARQUE LE COUP! Le surréalisme a 100 ans 34 File-t-ilunmauvaisBreton? 36 Debonsrejetonsmanifestes 38 Cequel’époquedoitausurréalisme… hélas! 40 LECONTRE-AGENDA DonaldTrumpdanslesannées1970: lesous-douépassesonbac! 42 C’ESTSONCOMBAT LucienneHaèse:“Laforêtnepeut pass’adapteraumarché” 43 LEPOINGSURLATABLE Lesdélicesd’uneaubergepotagère 44 Mieuxvautenrire! 48 COURRIERETJEUX 50 Le banc public par Kamel Daoud 3 L’ÉDITOde Natacha Polony Livraisond’armesàIsraël: non,EmmanuelMacron n’apascommisde“faute” 6 CequeMarianne enpense -MarkRutte:l’Otan,c’estmoi! -L’autocrateKaïsSaïedafaitleménage 10 Le dessous des cartes Premier,maispasPremierministre 11 INDISCRÉTIONS Marianne DÉCRYPTE 22 Pourquoi l’ayatollah Khamenei pourrait être le suivant Marianne DÉCRYPTE 26 Votreépargnepeutsauver nosusines SERVICE ABONNEMENTS Pour nous contacter : 01 86 57 08 54 abonnements@journal-marianne.com MARIANNE - Service abonnement - 60643 Chantilly Cedex TARIFS ABONNEMENTS POUR LA FRANCE MÉTROPOLITAINE : Particuliers : 1 an (51 nos dont un double) 135 €. POUR LA SUISSE : Asendia Press Edigroup S.A., chemin du Château Bloch 10, CH-1219 Le Lignon. Tél : 022 860 84 01. abonne@edigroup.ch - 1 an (51 nos ) CHF 225. POUR LA BELGIQUE : Asendia Press Edigroup S.A., Bastion Tower Etage 20, place du Champ-de-Mars 5, 1050 Bruxelles. Tél. : 070 233 304. abonne@edigroup.be - 1 an (51 nos ) 159 €. Autres pays: nous consulter. Cenumérocomporteunelettredebienvenueetuncourrier, poséssurunesélectiond’abonnés,ainsiqu’unencartLiriade posésurlatotalitédesabonnés. 44 34 DOSSIER ALEXIS KOHLER, L’ÉMINENCE NOIRE DE L’ÉLYSÉE 16 Affaire MSC : l’homme qui en savait trop 20 Privatisation de la Française des jeux : un ticket perdant Origine du papier Allemagne et France. Taux de fibres recyclés 85%.Certification 100 % PEFC. Ptot kg/t 0,004. MARIANNE 28, rue Broca, 75005 Paris Tél.:0153722900 - Fax:0153722972. MARIANNE publication hebdomadaire éditée par CMI France. Siège social : 3-9, avenue André-Malraux – Immeuble Sextant, 92300 Levallois-Perret. 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ISSN : 2425-4088 (imprimé) / 1286-4749 (en ligne) No CPPAP 1027 C 89227 Printed in France / Imprimé en France. PUBLICITÉ : CMI Media, Valérie Masson, Séverine Franier, 3/9 avenue André-Malraux – 92300 Levallois-Perret – 0187151795. 12 4-Marianne-10au16octobre2024 Couverture : Chevalin Christophe / TF1 / Sipa - Gilles Bassignac / “JDD” / Sipa - Pat Perna et Christophe Gaultier (extrait BD “Grégory”) / Les Arènes BD - Jacques Witt / Sipa - Christophe Morin / IP3 / MaxPPP - Frédéric Stucin / “le Figaro”. Sommaire : Xose Bouzas / Hans Lucas - Ullstein Bild / AKG. LEDESSINdeGros 10au16octobre2024-Marianne-5 Ceque Marianne enpense MERCOSUR Lecommando libre-échangiste Les adeptes du libre-échangisme ne lâchent jamais le morceau. La preuve : emmenés par Olaf Scholz, le chancelier allemand, ils sont repartis à l’assaut pour que l’Union européenne valide au plus vite l’accord en discussion avec le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay et Bolivie). « Les négociations avec le Mercosur devraient être rapidement conclues », a déclaré le chancelier dans un discours prononcé à Berlin devant la Fédération allemande du commerce de gros, comme s’il suffisait qu’il le demande pour obtenir satisfaction. Olaf Scholz a rappelé que la majorité des membres de l’UE soutenaient ce projet, avant d’ajouter : « L’accord avec le Mercosur est essentiel pour la diversification et le renforcement de la résilience de notre économie. » Certes, mais cela ne met pas un terme aux critiques émises un peu partout contre une initiative qui vise à créer une zone de libre-échange en supprimant la majorité des droits de douane entre les pays concernés. On imagine les conséquences en matière de concurrence déloyale et de dégâts sanitaires. Les protestations ont été telles qu’Emmanuel Macron a fini par reconnaître que le projet esquissé avec le Mercosur était « un très mauvais accord ». Le problème, c’est que le président de la République en est resté à ce constat. Il n’a jamais proposé à Bruxelles de remettre les compteurs à zéro et de reprendre les négociations. Enfin, et surtout, il n’a jamais remis en cause le mandat de négociation dévolu à la Commission européenne. Or la présidente de cette dernière, Ursula von der Leyen, défend la même position qu’Olaf Scholz, ce qui ne surprendra personne. Elle pousse donc à la signature d’un accord qui mettrait la France devant le fait accompli et l’empêcherait de faire entendre une voix alternative à la capitulation face au commando libre-échangiste. J.D. L e nouveau patron de l’Otan, le Néerlandais Mark Rutte, qui a pris ses fonctions le 1er octobre, est au bras armé de l’Alliance atlantique ce que Tony Estanguet est à l’olympisme. Autant dire qu’il a droit à tous les éloges. Son prédécesseur, le Norvégien Jens Stoltenberg, assure qu’avec Mark Rutte il laisse l’Otan « entre de bonnes mains ». Emmanuel Macron l’aencensé.LeprésidentukrainienVolodymyrZelensky,quirêvedes’asseoir à la même table, le décrit comme « un dirigeant fort et respectueux des principes ». Quant à Joe Biden, grand patron de cette armada décomplexée, il est d’autant plus persuadé que l’intéressé fera un « excellent » chef de l’Otan que rien ne peut se faire sans son aval. À défaut d’être éclairé sur la légitimité d’une organisation dont Emmanuel Macron, un jour de lucidité, avait dénoncé la « mort cérébrale », on sait qui en estlesecrétairegénéral.Pourmettresoncasquedecombat,MarkRutte,57ans, aquittésonpostedePremierministredesPays-Bas,qu’ilexerçaitdepuis2010 aunomduPartipopulairepourlalibertéetladémocratie,représentatifd’une droite néolibérale et europhile, alliée à l’extrême droite de Geert Wilders. Auparavant, il avait connu une carrière de dix années chez Unilever, ce qui forme les esprits et ouvre les portes. Sa capacité à rester aux commandes malgré quelques scandales qui en auraient enterré plus d’un lui a valu le surnom de « Teflon Mark », signe d’une résistance à toute épreuve. Il sait cultiver son image d’homme simple, décontracté, avenant. Quand il fallait aller voir le roi des Pays-Bas, il n’hésitait pas à se mettre lui-même au volant de sa voiture personnelle. Pour faire ses courses, il ne rechigne pas à enfourcher son vélo, histoire de pédaler pour sa renommée. L’impétrant a aussi hérité d’une autre étiquette : « The Trump Whisperer », l’homme qui murmurait à l’oreille de Trump, assurance tout risque en cas de retour de ce dernier à la Maison-Blanche. D’ailleurs, Donald Trump ou Kamala Harris, peu importe, puisque les deux candidats sont d’accord sur l’Otan, et raccord avec Mark Rutte pour que les alliés passent un peu plus à la caisse commune.Cedernieradonnélebonexempleenfaisantdes Pays-Basl’undesprincipauxcontributeursàl’Otan.Deplus,ilaétédeceuxqui ont poussé à l’envoi d’avions de combat F-16 en Ukraine, face à cette Russie honnie à qui il infligerait bien un Waterloo dans le Donbass. Les généraux de l’Otan rêvaient de passer du monde bipolaire d’antan, du temps de l’Union soviétique, à une domination occidentale sans rivage. Voilà pourquoi ils ont applaudi au maintien d’une organisation militaire qui aurait dûperdresaraisond’êtreavecladisparitiondel’URSS.Depuisl’agressionrusse en Ukraine, Mark Rutte entend bien en redorer la façade défraîchie, quitte à transformer l’Europe en champ de bataille à haut risque. M MARKRUTTE L’Otan,c’estmoi! Leportraitcrashé parJackDion Merci confrères ! LecasAbdallah Il est le plus vieux prisonnier politique de France, et peut-être d’Europe. Le Monde a raconté la saga du Libanais Georges Abdallah, détenu depuis près de quarante ans pour complicité dans l’assassinat de deux diplomates, à Paris, en 1982. Les faits sont loin d’être avérés. Libérable depuis un quart de siècle, Georges Abdallah est toujours derrière les barreaux. 6-Marianne-10au16octobre2024 Prenons-les au MOT par Samuel Piquet “POPULAIRES” SANSLEPEUPLE Le 10 juin, les principaux partis politiques français de gauche lançaient, en vue des élections législatives, une coalition qu’ils choisissaient de baptiser « Nouveau Front populaire » (NFP), nom censé rappeler le fameux Front populaire de Blum en 1936. À peine quatre mois plus tard, le 29 septembre, l’ex-ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin lançait son « mouvement de réflexion », nommé « Populaires ! » devant 250 personnes. Outre l’ironie de l’emploi d’un tel terme par des politiques de plus en plus éloignés des préoccupations du peuple, il est étonnant de constater que le terme « populaire » n’a pas subi le même sort que le mot « populiste », souvent associé, voire confondu avec l’adjectif « démagogue ». Emprunté au latin popularis, « du peuple », « dévoué au peuple », le terme « populaire » est pourtant, tout comme « populiste », dérivé du même mot latin, populus, peuple. Étymologiquement, les deux termes se complètent : le populiste est, selon le Dictionnaire historique de la langue française (Le Robert), celui qui « donne de l’importance aux couches populaires de la société » ; il devient « populaire » dès lors qu’il est apprécié par ceux à qui il a choisi de s’adresser en priorité. Mais de nos jours, il fait bon être populaire sans être populiste, ce qui a pour conséquence que l’emploi de « populaire » est plus populiste, au sens moderne du terme, que l’utilisation de « populiste ». Il faut dire que le mot « populaire » a pris une connotation méliorative à partir du XVIe siècle et signifié « qui jouit de la faveur du peuple » jusqu’à devenir quasi synonyme de « célèbre ». La volonté de nos politiques de s’afficher comme populaires témoignerait-elle alors de leur désir de surfer sur la tendance de notre société à chercher la notoriété à tout prix ? On peut d’autant plus le penser qu’il est parfois difficile de distinguer les prétendus hommes d’État des influenceurs politiques. M “Michel Barnier n’existe pas. C’est un algorithme.” YÁNIS VAROUFÁKIS, ex-ministredesFinancesgrec,Libération,le5octobre2024. Il a osé le dire L emacronismepuretparfaitrepose sur deux piliers : les plus riches, à préserver pour favoriser l’investissement et l’innovation, et les retraités, à ménager pour s’assurer de leur soutien électoral. Eh bien, pourtant peu disposé à abattre le mur de l’argent, le nouveau Premier ministre,MichelBarnier,s’enprendàces deux « contreforts » patiemment bâtis par l’actuel président. En premier lieu, les plus riches : 65000 ménages (0,3 % de l’ensemble) installés en haut de l’échelle fiscale devront sortir de leurs poches 2 milliards d’euros. Ensuite, les retraités : au lieudevoirleurspensionsaugmenterau rythme de l’inflation (+2,1 %) en janvier, ils devront attendre juillet pour bénéficierdu«coupdepouce»automatiqueet donc perdre un peu de pouvoir d’achat. L’équivalent, à l’échelle nationale, de 3,7 milliards d’euros, tout de même. Non macronistes dans leur principe, ces deux décisions présentent tout de même une contradiction : le supplément d’impôt s’inscrit dans la logique de « justice fiscale », pour reprendre les termes de Michel Barnier, mais le gel de touteslesretraites–faméliquescomme plantureuses – va, lui, à l’encontre de la justice sociale. Les titulaires d’une pension minimale (848 € à la suite de la loi de2023)sentirontpasserlanon-indexation sur l’inflation. Ceux qui touchent une retraite confortable en ressentiront moins les effets. Chiffres assez peu connus,maisfinalementassezlogiques, les écarts entre retraités équivalent grosso modo à ceux qui sont en vigueur entre actifs. Selon l’Observatoire des inégalités, les 10 % des retraités les plus riches touchent sept fois plus que les 10% les plus pauvres. En matière patrimoniale – donc compte tenu de l’épargne accumuléeetdel’immobilieraufildesans–, le gouffre social s’amplifie encore entre les deux extrémités sociales. Jean-René Cazeneuve, député Ensemble du Gers, ancien rapporteur général du budget, déclarait d’ailleurs sur France Info le 7 octobre : « Le débat parlementaire va pouvoirpermettredemodulerceteffort[de désindexation], peut-être en fonction du niveau des retraites. » Enfin un macronistepourmettreunpeudejusticedans le prochain budget ! M Franck Dedieu BUDGET Lesretraitésmaltraités? DÉSINDEXATION Le gel de toutes les pensions, grosses ou petites, qui devrait rapporter 3,7 milliards d’euros, va à l’encontre de la justice sociale. 10au16octobre2024-Marianne-7 Sebastien Salom-Gomis / Sipa - Baltel / Sipa Ce que Marianne en pense MÉDIASTICSpar Samuel Piquet LECHIFFREQUITUE 45% C’est la part des profits que le groupe TotalEnergies entend distribuer aux actionnaires, soit sous forme de rachat d’actions (pour faire monter le cours en Bourse), soit sous forme de dividende. La bonne nouvelle a été annoncée à New York par son PDG, Patrick Pouyanné, pas peu fier de son bilan. À l’occasion des 20 ans de la série, Télérama a republié, le 3 octobre, son article de 2012 intitulé « Les Desperate Housewives étaient-elles réacs ? ». Ce serait quand même dommage d’analyserunesérieautrementqu’enessayant deluiplaquerdesgrillesdelecturecontemporaines. SiTéléramaconfesseavoirétéd’embléeséduitpar la série, il précise que son « enthousiasme s’est doucement émoussé » à cause de la tendance des héroïnes « à se recroqueviller sur des valeurs conservatrices pas franchement acquises à la cause des femmes ». Si elles avaient divorcé pour vivre à fond leur non-binarité, on aurait en revanche frôlé le chef-d’œuvre. Interrogée, Virginie Marcucci, professeure d’anglais en prépa, regrette que le progressisme de la série soit parfois « trop subtil » : « Il y a des choses qui megênent,commelefaitquel’avortementnesoitjamais évoqué en cas de grossesse non désirée. » Vite, des trigger warnings (avertissements) pour les séries dont l’idéologie n’est pas ostensiblement progressiste. Elle ajoute que les désaccords d’interprétation de la série « en disent au moins autant sur le féminisme et ses enjeux aux États-Unis que sur la série elle-même ». Mais pas autant que sur Télérama. Virginie Marcucci conclut toutefois : « À mon sens, “Desperate Housewives” s’inscrit dans un féminisme “queer” qui prône la déconstruction des genres et des rôles sociaux. » Ouf ! On a le droit de regarder la série sans culpabiliser. Il est cocasse que les médias les plus imprégnés par l’idéologie de leur époque s’étonnent que d’autres aient pu être influencés par la leur. Les articles invitant à relire les séries passées avec les lunettes du présent sont légion, que ce soit au sujet de la série « Friends », accusée d’être grossophobe, sexiste et homophobe par Slate et le Monde, ou la série « H », taxée de misogynie par les Inrocks. Dans la préface à Mademoiselle de Maupin, ThéophileGautierécrit:«Lestableauxsefontd’après les modèles et non les modèles d’après les tableaux. Je ne sais qui a dit je ne sais où que la littérature et les arts influaient sur les mœurs, c’est indubitablement un grand sot. […] Les siècles se succèdent, et chacun porte son fruit qui n’est pas celui du siècle précédent ; les livres sont les fruits des mœurs. » Quel dommage qu’il soit mort avant d’être éclairé par Télérama. M Femmesdésespérées pourmédias désespérants TUNISIE L’autocrateKaïsSaïed afaitleménage «L es imprudents ! Me laisser tout seul avec moi-même… Et ils me défendaient des mauvaises fréquentations… Quelle inconséquence ! Mais quelle prodigieuse destinée ! » Les cinéphiles reconnaîtront les mots de Jacques Prévert mis dans la bouche de Pierre-François Lacenaire,lecélèbreécrivaincrimineldufilmcultedeMarcelCarné,les Enfants du paradis (1945). Mais, aujourd’hui, c’est dans la voix du président tunisien Kaïs Saïed, vainqueur sans surprise, avec 90 % des voix, de l’élection présidentielle, que ce laïus semble résonner. Pourtant, celui qui est arrivéàlatêtedupaysen2019,avant des’octroyerlespleinspouvoirspar un coup de force en 2021, semble aujourd’huiassezseul.Unsoliloque étrange et dangereux qui n’épargne ni ses amis ni ses adversaires. En quatre ans à peine d’exercice, le président s’est installé en véritable autocrate. À l’en croire, la faute en revient aux autres. À ses collaborateurs d’abord, considérés comme des incapables, mais aussi aux populations noires migrantes, quiseraientenvoyéespardesforces ennemies étrangères dont le nom est bien évidemment tu. C’est aussi et surtout la faute de ses opposants. Mais, là encore, le Lacenaire de Carthage a tout prévu. Pour assurer sa victoire à la présidentielle, Kaïs Saïed a fait le ménage. Le 5 août, un tribunal a condamné cinq candidats potentiels à huit mois de prison assortis d’une interdiction à vie de se présenter à une élection. Une semaine plus tard, Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre et figure de l’opposition, a été condamnée à deux ans de prison. Son crime ? Elle aurait « répandu de fausses nouvelles et des rumeurs » au sujet de la commissionélectorale.Ce,àlasuite d’une plainte déposée… par cette même commission électorale, qui a fait les yeux doux au président Kaïs Saïed. Ce président un tantinet chafouinaenvoyéaupassageunevingtaine de cadres du parti islamiste Ennahdha derrière les barreaux. Au sortir du printemps arabe, la formation politique de Rached Ghannouchi avait le vent en poupe et aujourd’hui reste en réalité assez hautdansl’opiniontunisienne.Mais Kaïs Saïed n’en a cure… Bref, dans la tête du président tunisien comme pour les Tunisiens, c’est tendu ! M Stéphane Aubouard VAINQUEUR SANS SURPRISE Réélu avec 90 % des voix, Kaïs Saïed avait pris soin d’envoyer en prison cinq candidats potentiels à la présidentielle. 8-Marianne-10au16octobre2024 Tunisian Presidency / Sipa Qui est le plus pirate des deux ? Les deux titis parisiens sont partis à l’abordage du capitalisme français en prétendant toujours se battre dans l’intérêt du petit peuple... Par Pierre Lann Tapie Après une flopée d’échecs, il parvient, en 1979, à berner l’« empereur » Bokassa en lui faisant croire que ses biens allaient être saisis par le fisc français. Tapie propose de les racheter pour une somme dérisoire. Le dictateur centrafricain accepte. Bingo. « Nanard » parade en une du New York Times, promettant de faire don des châteaux du tyran à l’Unicef. Mais patatras. Le tribunal rattrape l’aspirant Robin des bois, annule la vente et lui inflige une amende de 100000francs. Tapie En 1990, il pense toucher le Graal en rachetant la marque Adidas et s’imagine en redresseur de boîtes en faillite. Mais il lâche tout deux ans plus tard quand « Tonton Mitterrand » l’appelle au ministère de la Ville. Il se sépare de sa pépite. Le début d’une longue galère. La vente deviendra l’« affaire Adidas », qu’il traînera le reste de ses jours. Beaucoup de tracas pour quatre mois et vingt-quatre jours sous les ors ministériels… Tapie Son obsession : « gagner ». Dans le sport, il a plutôt réussi avec le Tour de France et comme patron de Bernard Hinault, puis avec l’Olympique de Marseilleeeeuh. À coups de millions (et de magouilles), il monte une équipe de rêve et terrasse l’AC Milan de Berlusconi en finale de la Ligue des champions 1993. Mais ça se finit mal. « Nanard » passera de longs mois à l’ombre pour une affaire de match truqué. VICTOIRE FINALE: Tapie. En bon pirate, il a toujours rêvé de devenir rentier mais n’a jamais réussi tandis que Niel, le geek qui ne voulait surtout pas finir grand bourgeois, a fini par le devenir. Leurcoupdemaître Leurcoupfoireux Leurpéchémignon Niel Il a une idée géniale au début des années 2000 : réunir le téléphone, la télé et Internet dans une « box » vendue par sa société, Free. Carton immédiat. Le geek deCréteilrécidivedixansplustardenproposant des forfaits de téléphone à prix cassés. Sa fortune est faite. Mais il pousse le bouchon trop loin en traitant les clients de ses concurrents de « pigeons ». Les juges le condamnent à une amende de 25 millions d’euros pour « dénigrement commercial ». Niel Il touche le fond à la prison de la Santé pour une histoire de sex-shops strasbourgeois. Soupçonné de « proxénétisme aggravé », il passe vingt-huit jours derrière les hauts murs, où il rencontre « Ketchup », un codétenu dont la spécialité était de dépouiller des personnes âgées après les avoir aspergées de sauce tomate. Finalement, l’affaire se dégonfle et le roi des télécoms ne sera condamné qu’à du sursis pour « recel d’abus de biens sociaux ». Niel Il dit souvent qu’il « adore les journalistes. Enfin, tant qu’ils ne parlent pas de [lui] ». Il a donc pris des parts dans une tripotée de titres de presse, en commençant par une obscure feuille humoristique – Des pieds, des oreilles et des nez – pour finir par le gros lot : le Monde. Une bonne manière de se respectabiliser après la case prison. Drôle de sommet La France a accueilli le 19e sommet de la Francophonie à Paris et à Villers-Cotterêts (Aisne), où a été installée la Cité internationale de la langue française. Thème officiel des festivités : « Créer, innover, entreprendre en français ». Dans un pays où le président, adepte du globish, se veut l’animateur d’une « start-up nation » et qui organise un salon baptisé « Choose France », c’est assez drôle. On s’en fout ! BernardTapie XavierNiel ISRAËL Feusurl’ONU Le ministre israélien des Affaires étrangères, Israël Katz, a déclaré le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, « persona non grata en Israël », l’accusant de ne pas avoir condamné l’Iran après l’envoi de missiles contre l’État hébreu. Et d’ajouter : « Nous avons affaire à un secrétaire général anti-israélien qui soutient les terroristes, les violeurs et les assassins. » António Guterres a pourtant dénoncé l’« attaque massive aux missiles par l’Iran sur Israël », tout en condamnant l’« élargissement du conflit au Moyen-Orient ». Mais pour l’équipe Netanyahou, quiconque ne s’aligne pas sur Tel-Aviv est suspecté de complicité avec les terroristes. Les États-Unis ont déclaré que la saillie de Katz n’était « vraiment pas utile », tandis que la France la jugeait « contre-productive ». Défendre António Guterres, c’est bien. Défendre le droit international violé par Israël, ce serait encore mieux. P.M.O. AVANTAGE : TAPIE (POUR LE PANACHE) AVANTAGE : NIEL (S’EN EST MIEUX SORTI) AVANTAGE : TAPIE (À JAMAIS LE PREMIER) 10au16octobre2024-Marianne-9 Lematch Sureau / TF1 / Sipa - Ugo Amez / Sipa Le dessous des cartes INDISCRƒTIONS] De43à48… Un an après les massacres et les enlèvements du 7 octobre, l’État français revoit à la hausse le bilan des morts. Depuis que la dépouille du FrancoMexicain Orión Hernández-Radoux, âgé de 32 ans, a été retrouvée en mai à Gaza, on comptait 43 décédés de nationalité française. Selon nos informations, ce sont 48 Français qui auraient été tués à la suite du « samedi noir ». Comment expliquer cette évolution ? Outre la difficulté à identifier les dépouilles, le recensement a été plus complexe du fait de la non-inscription sur les listes consulaires avant le 7 octobre. D’autres – qui n’avaient pas lancé les démarches administratives bien qu’enfants, petits-enfants de Français ou mariés à des Françaises – se sont vu attribuer la nationalité française après le 7 octobre par décret présidentiel. Une manière de peser sur les négociations et de les sortir de Gaza, et aussi de les reconnaître comme les enfants de la République. R.B. Plusc’estlong… « Ça a été long, mais c’est son style. » Voilà Michel Barnier rhabillé pour l’hiver par le président du groupe communiste à l’Assemblée nationale, André Chassaigne, assommé par la déclaration de politique générale du nouveau Premier ministre. « Il gagne du temps, il est très montagnard dans sa démarche, avançant à pas mesurés, sans coup d’éclat », apprécie toutefois le grognard coco. André Chassaigne reste toutefois sur ses gardes : « Se concerter, c’est très bien, mais est-ce que le gouvernement sera prêt à assumer les conséquences financières de ces discussions alors qu’il a 60 milliards à trouver ? »L.N. Lafausseclémence d’Horizons À peine débarqué à Matignon, Michel Barnier a affronté un vent de méfiance de la part des élus Renaissance et MoDem, guère disposés à perdre de leur influence (et leurs postes). Certains n’ont pas hésité à critiquer publiquement les orientations du Premier ministre. L’occasion pour Pologne Bien que le parti populiste et nationaliste Droit et justice (PiS), au pouvoir depuis 2015, soit arrivé en tête des législatives d’octobre 2023 avec 35,5 % des suffrages, contre 30,70 % àlaCoalitioncivique(KO)deDonald Tusk, il a dû céder les clés du gouvernement à l’opposition proeuropéenne.Celle-ci,fortede53,52%des suffrages, a aussitôt constitué une coalitionunbrinhétéroclite,réunissantlatrèslibéraleKOauxcentristes delaTroisièmeVoie etàlaGauche. Suède En septembre 2022, lePartisocial-démocrate de la Première ministre sortante, Magdalena Andersson, réalise un scorede30,3%desvoix,loindevant les 20,5 % des populistes de droite des Démocrates de Suède. Mais les forces de gauche n’ont réuni que 48,88 % des suffrages et 173 sièges, contre 49,5 % et 176 sièges aux quatre formations de droite. C’est finalement le conservateur Ulf Kristersson,dontlepartidesModérés n’étaitarrivéqu’entroisièmeposition avec 19,1 % des voix, qui dirige une coalition de droite minoritaire, soutenueparl’extrême droite. M Autriche Arrivéfinseptembre au premier rang, à l’issue des législatives, avec 29 % des suffrages, contre 26,5 % à la formationconservatriceÖVP(Partipopulaire autrichien), le très controversé Herbert Kickl, leader du FPÖ (Parti de la liberté d'Autriche), ne devrait pas pour autant devenir chancelier. C’est l’ÖVP, au pouvoir depuis 1987, quidevraitconserverlachancellerie. Encause,l’hostilitéduprésidentdela Républiqueàsonégardetlerefusde laplupartdespartisdes’associeràlui. Pays-Bas Le Parti pour la liberté(PVV)deGeert Wilders, condamné pour propos antiislam, a remporté les législatives de novembre2023avec23,70%desvoix, devant l’alliance Parti travaillisteGauche verte (PvdA-GL, 15,56 %) de FransTimmermansetlePartipopulaire pour la liberté et la démocratie (VVD, 15,25 %) du Premier ministre sortant, Mark Rutte. Huit mois de tractationsplustard,unaccordaété trouvéentretroispartisdedroiteetdu centredroit,dontlePVVetleVVD,et ungouvernementcomposéenpartie detechnocrates.Unecoalitionfragile, dirigée par l’ancien chef du renseignement Dick Schooft, personnage dénuédetouteexpériencepolitique. La gauche reproche à Emmanuel Macron de n’avoir pas nommé à Matignon Lucie Castets, candidate du NFP, la formation arrivée en tête des législatives en juillet. Mais le cas est loin d’être isolé dans l’Union européenne. Par Anne Dastakian Premier, mais pas Premier ministre 10-Marianne-10au16octobre2024 L’infoenplus les élus Horizons de se démarquer en se grimant en bons élèves, prêts à filer des coups de main, bien que peu représentés dans l’équipe gouvernementale. « Il ne faut pas en rajouter, il faut être plutôt aidant », plaide, grand seigneur, un élu « philippiste », admettant qu’Horizons a été « moins servi » au gouvernement qu’il aurait pu l’être. Avant de glisser : « C’est mal connaître Édouard Philippe que de croire qu’il sera souple sur un certain nombre de sujets. »En politique, la clémence en public a toujours un prix en privé. H.B. Sil’exceptionnel durait… Deux jours avant sa déclaration de politique générale, Barnier pouvait apprécier, dans sa lecture dominicale, une tribune signée par une trentaine de députés macronistes qui s’élevaient contre une hausse d’impôts. Faisant fi de ce coup d’éclat, le Premier ministre a annoncé 40 milliards de coupes budgétaires et 20 milliards de recettes fiscales supplémentaires. « Une contribution exceptionnelle », selon Barnier. Pas de quoi rassurer l’un des signataires : « Je suis absolument contre ce budget. On peut très bien s’imaginer que l’exceptionnel sera pérennisé. » Barnier, trop à gauche pour les macronistes ? Vite, ramenez-leur Lucie Castets. M.J. Barnier-Attal: legrandfroid Les relations ne se réchauffent pas franchement entre Michel Barnier CommentLFIa dispersélesrebelles Comme chacun sait, la géographie de l’Hémicycle a son importance. Et il n’aura pas échappé aux observateurs les plus avertis que, dans le nouveau plan de classe de l’Assemblée nationale, les frondeurs insoumis – François Ruffin, Alexis Corbière, Clémentine Autain… – ont été séparés. Effet d’image regrettable pour les intéressés : au lieu de former une petite grappe d’irréductibles Gaulois dans l’Assemblée, les voici perdus dans la masse. « Les écolos ont accepté de les prendre, mais les Insoumis ont mis un petit coup de pression pour qu’ils ne soient pas ensemble », avance un de leur voisin dans l’Hémicycle. À quand le bonnet d’âne ? L.N. et Gabriel Attal, ce dernier ne cessant de prendre ses distances avec la ligne politique du nouveau locataire de Matignon. « Gabriel n’a pas digéré de ne plus être Premier ministre, souffle un ancien conseiller ministériel. Il ne veut pas être un soutien sans faille d’un gouvernement qui peut tomber demain. » Peu décidé à se laisser faire, Michel Barnier s’est vengé à l’Assemblée nationale : « Je serai très attentif à vos propositions d’économies supplémentaires… pour faire face au déficit que j’ai trouvé en arrivant. » « Il a renvoyé Attal dans ses cordes ! », se marre un cadre LR. « Il prend des risques notre Joe Biden français, grince un collègue d’Attal. Pour le coup, il s’est fait plaisir. C’était gratuit ! Et on ne risque pas de l’oublier. »H.B.etM.J. Hollandesuper-tare Mais qui pourrait bien dire du mal de François Hollande ? Soulevez une pierre au PS, vous trouverez 15 volontaires. Du côté de la direction, bien sûr : « Hollande est candidat depuis qu’il a renoncé à être candidat, grince un proche d’Olivier Faure.Il fait un livre tous les six mois, ce ne sont plus des cartes postales, c’est le courrier du cœur. » Mais aussi, est-ce bien surprenant, au sein de la touchante confrérie sociale-libérale dont il fut le grand sachem? Chez certains de ses membres, la nouvelle popularité du sage Hollande agace profondément : « Il faut arrêter avec le mythe du maître tacticien, s’agace l’un d’eux. Il n’a même pas réussi à se représenter, s’est retrouvé tout seul et a propulsé son fossoyeur… Bravo la clairvoyance tactique ! »L.N. “Je ne crois pas au villiérisme défroqué.” JEAN-PHILIPPETANGUYDéputéRNdelaSomme C’est peu de dire que le nouveau ministre de l’Intérieur a marqué de son empreinte ses premiers pas à Beauvau. Entre déclarations martiales et promesses de fermeté sécuritaire et migratoire, Bruno Retailleau paraît fournir des gages à Marine Le Pen. « Il donne l’impression d’être un porteparole du Rassemblement national ! », s’exclame la députée RN du Var Laure Lavalette. De quoi menacer les positions du parti en accomplissant son programme ? « Je ne crois pas au villiérisme, et encore moi au villiérisme défroqué », grince le député Jean-Philippe Tanguy, en référence aux origines vendéennes de Retailleau et à son ancien compagnonnage avec le très conservateur Philippe de Villiers, peu apprécié au sein du RN. H.M. RETAILLEAU, CHOUCHOU OU RIVAL DU RN ? L’infoenplus 10au16octobre2024-Marianne-11
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