QUE CHOISIR ARGENT n°172 - Page 1 - 172 BANQUES, ASSURANCES, ÉNERGIE… Des essais comparatifs de produits sont régulièrement mis à jour, des résultats que vous pouvez trier, selon vos propres besoins, par marques, prix, fonctions… PLUS DE 600 PRODUITS TESTÉS EN CONTINU Dès qu’un produit apparaît sur le marché, l’UFC-Que Choisir l’achète et le teste. Les résultats du banc d’essai sont immédiatement mis en ligne sur son site Internet. DES GUIDES D’ACHAT COMPLETS Toutes les familles de produits testés sont accompagnées d’un guide d’achat détaillant les bonnes questions à se poser avant acquisition, les critères à prendre réellement en considération et ceux sans grand intérêt. TOUS LES PRODUITS DANGEREUX RAPPELÉS Dès qu’un produit est rappelé par un professionnel car dangereux pour la santé ou la sécurité des consommateurs, l’information est portée à la connaissance de tous. Notre base de données compte actuellement plus de 1600 rappels de produits dangereux. DES VIDÉOS AU PLUS PRÈS DES PRODUITS Sans attendre les résultats du test technique d’un nouveau produit, des vidéos viennent apporter une appréciation sur la pertinence de la nouveauté, ses points forts et ses faiblesses dans son utilisation. DES FORUMS PERMANENTS Des avis sur une enquête, un test, un produit… La parole vous est donnée à travers nos forums. Venez apporter votre témoignage et participer au débat avec d’autres consommateurs. DE NOMBREUSES LETTRES TYPES POUR TOUTES VOS DÉMARCHES Régulièrement mises à jour en fonction de l’évolution du droit, elles vous guideront pour régler au mieux les principaux litiges de la consommation. Nos comparateurs en ligne sur Quechoisir.orgQuechoisir.orgQuechoisir.org Des dossiers d’investigation La rédaction de Que Choisir investit l’univers de la consommation et décrypte ses rouages pour vous aider à mieux vivre au quotidien. Des enquêtes de terrain Journalistes spécialisés et bénévoles de l’UFC-Que Choisir recueillent, sur l’ensemble du territoire, des informations sur les prix et les pratiques des professionnels pour vous éclairer. Des tests professionnels Nos ingénieurs établissent les protocoles des essais à partir de vos besoins, analysent les résultats et vous guident dans vos choix. Des combats judiciaires Notre service juridique mène des actions en justice pour sanctionner des pratiques irrégulières ou faire évoluer la jurisprudence. Des analyses économiques Dérapages des prix, ententes commerciales, pratiques abusives… des économistes analysent les marchés et dénoncent tout comportement préjudiciable aux consommateurs. Des actions de lobbying L’UFC-Que Choisir intervient auprès des parlementaires nationaux et européens ou des instances de régulation pour faire avancer vos droits de consommateurs. Un réseau de proximité Pour vous accompagner, vous assister, vous conseiller et résoudre vos litiges de consommation, plus de 150 associations locales de l’UFC-Que Choisir vous représentent près de chez vous. UN SUPPORT D’INFORMATION AU SERVICE DES CONSOMMATEURS Que Choisir et son hors-série Argent sont les seuls magazines consuméristes indépendants, édités par l’Union fédérale des consommateurs-Que Choisir. Notre association est au service des consommateurs pour les informer, les conseiller et les défendre. L’action de l’UFC-Que Choisir se traduit par: 2 OCTOBRE 2023 N° 172 QUE CHOISIR Argent Union fédérale des consommateursQue Choisir, association à but non lucratif 233, bd Voltaire, 75011 Paris Tél.: 0143485548 Télécopie: 0143484435 Service abonnements: 0155567109 TARIFS D’ABONNEMENT 1 an, 11 numéros: 46 € 1 an + 4 numéros: 64 € 1 an + 4 hors-séries + 4 numéros spéciaux: 90 € IMPRESSION: Roto France, 25, rue de la Maison-Rouge 77185 Lognes Distribué par les MLP Dépôt légal n° 144 Commission paritaire n° 0727G 82318 ISSN 1267-2033 INSPECTION DES VENTES ET RÉASSORTS DIFFUSEURS MP Conseil Tous droits de reproduction et d’adaptation réservés. Ce numéro comporte un encart abonnement de quatre pages, sur une partie du tirage, entre les p. 34 et 35. Imprimé sur papier Holmen XLNT (Norrköping – Suède) avec des encres blanches. Taux de fibres recyclées: 0%. Certification FSC PEFC. Eutrophisation: 1580 kg/C02 /t de papier. QUE CHOISIR Argent N° 172 OCTOBRE 2023 3 Sommaire QUE CHOISIR ARGENT N° 172 - OCTOBRE 2023 DOSSIER BANQUES Trouvez celle qu’il vous faut PANORAMA JEUX OLYMPIQUES 2024 Seront-ils l’Eldorado tant attendu? TRADUIT EN CLAIR TRAVAUX DE COPROPRIÉTÉ Le plan pluriannuel change la donne NOS CONSEILS GRANDE DISTRIBUTION La fidélité n’a rien de gratuit ON N’A PAS FINI GÉNÉROSITÉ Donner en temps de crise ON N’A PAS FINI FINANCES Le rapport à l’argent reste-t-il genré? 6 38 32 NINILACAILLE 44 50 54 4 OCTOBRE 2023 N° 172 QUE CHOISIR Argent LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FISCALITÉ L a France est un pays de propriétaires: 58% des citoyens possèdent un bien immobilier. On le sait, la pierre reste une valeur sûre pour bon nombre d’investisseurs.Mais,plusquejamais,jouirdesademeureauncoût.En2023,pour la première fois depuis plus de 30 ans, la taxe foncière, impôt dû sur les propriétésbâtiesetnonbâties,bonditauplannationalde7,1%parrapportà2022. Héoui,mapauv’dame,unvraicoupdemassue!Encause?Toujoursetencore l’inflation, notamment la flambée des coûts de l’énergie qui pèse sur le budget des communes. Or, la taxe foncière, héritée de la Révolution française, est calculée à partir de l’indice des prix à la consommation. Si la hausse est générale, elle est plus ou moins forte selon les villes auxquelles il revient de l’appliquer: on relève une augmentation de 52% à Paris, 25% à Grenoble, 18% à Lyon et 14% à Metz. Et ce n’est qu’un début! Comme le souligne l’économiste Étienne Wasmer, enseignant à la New York University et professeur associé à Sciences Po Paris, «les contribuables ne doivent pas espérer une baisse de la taxe foncière dans les prochaines années. Elle ne viendra pas. Nous ne sommes pas encore au niveau des États-Unis, où elle représente environ 1% de la valeur du bien. Toutefois, on doit la réévaluer, car elle finance notre modèle social.»En effet, les élus locaux ont besoin de capitaux pour créer des infrastructures: écoles, hôpitaux, maisons de retraite, réseaux de transport, médiathèques, etc.«Il est aussi possible de choisir de ne pas majorer cet impôt, c’est une décision politique, commente l’expert. Mais ce serait des services en moins et, in fine, une valeur dégressive de votre bien.»On peut voir les choses ainsi. Et se rassurer en se disant qu’au fond, tout cela est très démocratique… ÉDITO PAR PASCALE BARLET ÇA NOUS REGARDE QUE CHOISIR Argent N° 172 OCTOBRE 2023 5 IMMOBILIER Paris repasse sous la barre des 10000 €/m2 S i certaines villes échappent encore à la chute des prix de l’immobilier, ce ne sera sans doute plus le cas de Paris au troisième trimestre 2023. Dans un contexte où les conditions d’octroi des prêts bancaires restent difficiles et les taux d’intérêt hauts, il n’est pas rare que des propriétaires soient contraints de revoir leurs ambitions à la baisse, voire de renoncer à céder leurs biens. En effet, d’après les notaires, «en Île-de-France, les volumes de ventes de logements anciens ont reculé de 7% au printemps par rapport à la moyenne de ces 10 dernières années pour la période». Cette décrue, limitée à 4% pour les appartements, atteint 15% s’agissant des maisons. Quant aux prix, c’est logique, ils diminuent eux aussi. Sur la base des avant-contrats, les notaires évaluent la régression à fin juillet à 1% sur un an au niveau national. Et à Paris même, ils relèvent un fléchissement de 5%. Dans le sillage des agents immobiliers, ils estiment que la capitale sera officiellement repassée sous la barre des 10000 € du mètre carré au troisième trimestre. Parmi les autres villes touchées par cette baisse, on trouve Nantes, Rouen (-4%) et Lyon (-3%). TARIF RÉGLEMENTÉ DE L’ÉLECTRICITÉ Une hausse scandaleuse P rofitant de la torpeur estivale, le gouvernement a annoncé une majoration de 10% du tarif réglementé de vente (TRV) de l’électricité le 1er août, après celle de 15% subie en février. Il revient ainsi sur sa promesse de limiter, via le bouclier tarifaire, sa hausse à 15 % cette année. Cette décision a, en outre, été prise sans concertation avec les associations de consommateurs. In fine, les augmentations cumulées représenteront, en 2023, un surcoût moyen de 425 €, que devront assumer les particuliers au TRV ou ayant souscrit des offres indexées sur celui-ci. Ce chiffre constitue une moyenne et masque donc d’importantes disparités. De fait, les consommateurs habitant dans des passoires thermiques voient leur facture exploser, avec 1000 € de plus à débourser. Cette situation met à nouveau en lumière le caractère anarchique du TRV. L’UFC-Que Choisir ne cesse de plaider pour une réforme profonde du marché de l’électricité et, en particulier, une redéfinition du rôle et du calcul du TRV, qui doit être orienté vers les coûts de fourniture réellement supportés par EDF. DETTE PUBLIQUE Le cap des 3000 milliards d’euros À la fin du premier trimestre 2023, la dette publique française a atteint la barre symbolique des 3000 milliards d’euros. Elle s’élève désormais à 112,5% du produit intérieur brut (PIB), contre 111,8% à la fin de décembre 2022, selon les chiffres de l’Insee du 30 juin dernier. Jusqu’à récemment, notre pays empruntait à des taux quasi nuls. Or, aujourd’hui, on observe une hausse historique des taux d’emprunt auquel il peut prétendre sur les marchés internationaux; un effet probablement dû en partie à la dégradation de la note attribuée à l’Hexagone par l’agence internationale Fitch (elle a chuté de AA à AA-), qui a estimé que les tensions sociales autour des retraites représentaient un «risque pour le programme des réformes» en cours. Car en matière d’économie, la confiance joue un rôle capital. En clair, la France emprunte un volume d’argent de plus en plus élevé sur les marchés financiers. La remontée des taux d’intérêt a certes un impact relativement limité à court terme, la plupart des obligations d’État (prêts que souscrivent les pouvoirs publics sur les marchés financiers) arrivant à échéance de remboursement au bout de 10 ans. Mais une fois ce terme passé, une hausse de 1% des taux d’intérêt sur un prêt à 10 ans représente un coût supplémentaire de 40 milliards d’euros, soit l’équivalent du budget annuel du ministère de la Transition écologique. P.MASANTE/MAXPPP G.ROLLE/REA La France emprunte plus, et à des taux croissants… DOSSIER Trouve qu’il voBANQUES 7 D eux pourcentages témoignent de l’omniprésence du système bancaire dans nos vies: 99,25% des Français détiennent au moins un compte courant ou un livret d’épargne (selonlerapport2021delaCourdescomptes); 88% estiment que «la banque fait partie de leur quotidien» (enquête Ifop-FBF,décembre 2022).Logique,les revenus de tout un chacun y passent. Voilà pour la surface. Sous le capot, c’est beaucoup plus flou. Qui saurait vraiment définir ce qu’est une banque aujourd’hui? Tant de services et de produits (utiles?) s’y sont développés, tant de marques (pérennes?) sont apparues,tant d’informations (crédibles?) circulent sur la sécurité de vos avoirs et tant de messages sont martelés sur la mobilité bancaire (effective?) qu’il est bien difficile, pour le commun des mortels, de distinguer le vrai du faux. Inutile de se perdre dans des analyses de prix ou de services vite obsolètes tant ces items fluctuent. Les comparateurs sont là pour vous donner une idée à un instant T. L’objectif est plutôt de mener une prospection globale du monde bancaire afin de ne plus le subir…et d’en avoir pour son argent. Si l’on veut y parvenir, il faut s’affranchir du regard classique jusqu’ici posé sur ce marché. Notre rapport à la banque a évolué, les échanges se font désormais essentiellement à distance, via Internet et des applications.En 2007,62% des Français se rendaient plusieurs fois par mois dans leur banque; 15 ans plus tard, ils ne sont plus que 9%, et près d’un tiers y va moins d’une fois par an (Ifop-FBF)… De quoi modifier le rôle des agences bancaires, parfois transformées en espaces patrimoniaux. Mais cet emballage est-il consistant? Et quel est son prix? Des questions parmi d’autres qu’il convient de se poser, en prenant du recul par rapport aux éléments de langage commerciaux.«La communication des banques s’articule autour de deux grandes logiques: parler au client ou parler du client», estime une étude Xerfi de janvier 2023. Nous avons, pour notre part, décidé de vous parler des banques sans complaisance. DANS UN PAYSAGE BANCAIRE PLURIEL ET MOUVANT, TROUVER LA BONNE ADRESSE VIRE AU CASSE-TÊTE. NOTRE CONSEIL? S’EN TENIR À L’ESSENTIEL: LA QUALITÉ DE L’OFFRE, UNE TARIFICATION JUSTE ET LA SÉCURITÉ DES AVOIRS. PAR AURÉLIE FARDEAU ET FRÉDÉRIC GIQUEL ILLUSTRATIONS NINI LA CAILLE z celle us faut SOMMAIRE 8 TROIS REPÈRES POUR MIEUX VOUS ORIENTER 16 ÉPARGNEZ-VOUS LES MAUVAIS PLACEMENTS 23 POSEZ-VOUS DES QUESTIONS SUR LA SÉCURITÉ 27 C’EST PLUS FACILE, ALORS CHANGEZ DE CRÉMERIE! 30 PRÉPAREZ-VOUS AU FUTUR UN MARCHÉ MOUVANT ET FOISONNANT Le saviez-vous? Début 2023,il existait 330 enseignes bancaires en France,selon l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le gendarme du marché. Bien plus, donc, que la dizaine d’établissements historiques connus de tous. Dans ce paquet, 192 banques étaient françaises et le reste venait principalement de l’Union européenne.Un bon volume, le tout sur un marché mouvant, façonné par des fusions-absorptions – comme celle du Crédit du Nord par la Société générale,formant désormais le réseau «SG». Ce secteur est également marqué par des retraits du marché hexagonal – par exemple, celui d’ING, pionnière du Net, sortie en 2022 – ainsi que par un foisonnement de l’offre en ligne et maintenant des néobanques. De quoi s’y perdre! LAMAINMISEDESBANQUESTRADITIONNELLES En prenant du recul, on peut faire trois constats clés. Le premier, c’est que les établissements traditionnels (dits «de réseaux») demeurent les maîtres du jeu. S’appuyant sur de très nombreuses agences (plus de 36000 sur tout le territoire), ils captent l’immense majorité des ménages et des entreprises.Côté finances, six grands groupes – BNP Paribas, BPCE (Banque populaire et Caisse d’épargne), Crédit agricole, Crédit mutuel,La Banque postale et Société générale – réalisent 82% du bilan du secteur bancaire français (soit 9934 milliards d’euros en 2022, selon l’ACPR). Les enseignes classiques ont aussi pris le virage du numérique puisqu’elles détiennent la plupart des grossesmarquesduWeb.Sachez-le,HelloBank!appartient à BNP Paribas,Boursorama Banque à la Société générale, Fortuneo au Crédit mutuel Arkéa, etc. Devenir client de l’une d’entre elles,c’est donc entrer dans le giron d’un important groupe bancaire français. Ce qui, du reste, nourrit leur succès. Selon une étude du cabinet iProspect de 2019, le premier critère pour choisir une banque internet est qu’elle soit adossée à un établissement traditionnel reconnu. Deuxième constat: depuis 10 ans, certaines marques en ligne ont réussi à s’enraciner. C’est notamment le cas de Boursorama Banque,qui revendique 5 millions de clients, avec un rythme de croissance ultrarapide (+34%entremars 2022etmars 2023).Àunemoindre échelle, Hello Bank! ou Fortuneo ont fait leur nid, tout comme Orange Bank, qui vient d’être revendue à BNP Paribas. Leur credo – une offre dématérialisée équivalente à celle des établissements classiques mais à un coût inférieur – fonctionne plutôt bien. Reste que la concurrence féroce dans ce secteur, très coûteuse avec les multiples opérations promotionnelles, fera des perdants. Lesquels? Difficile à dire, tant la publication du nombre de clients demeure confidentielle, ou à prendre avec des pincettes, la gonflette étant de rigueur (on peut majorer les chiffres en liant, par exemple, l’ouverture d’un livret d’épargne à un compte courant, y compris pour les mineurs). FOURMILLEMENT D’ACTEURS L’implantation des banques en ligne n’est pas terminée que, déjà, de nouveaux trublions pointent leur nez,les néobanques.Elles offrent un service bancaire dans un smartphone,qui devient une sorte de portemonnaie électronique (lire aussi l’encadré néobanques p. 9).La numérisation bouleverse tout,mais elle n’est qu’un outil. Ce qui nous mène au troisième constat: d’autres acteurs, bien implantés sur le territoire,arpentent le secteur bancaire.Parmi eux,citons les assureurs.Alors que certains ont déployé une offre bancaire complète (comme Axa), d’autres (telle la Macif) se limitent aux crédits conso/travaux et aux produits d’épargne bancaire (livrets, PEL, CEL), excluant les comptes et les moyens de paiement. Possible? Oui,car la Macif agit en l’espèce comme un 53 millions Groupe Crédit agricole 36millions GroupeBPCE (Caissed’épargne, Banquespopulaires) 31millions BNPParibas * Particuliers, professionnels, entreprises. Source: Statista 2023. TROISREPÈRESPOUR MIEUXVOUSORIENTERMOT GÉNÉRIQUE, LA BANQUE RECOUVRE DES RÉALITÉS AUJOURD’HUI TRÈS DISPARATES. POUR AVOIR LES REPÈRES ADÉQUATS, POSONS-NOUS LES QUESTIONS CLÉS. QUI SONT LES BANQUES? COMBIEN COÛTENT LEURS SERVICES? QUELS PRODUITS VENDENT-ELLES? DOSSIER 8 OCTOBRE 2023 N° 172 QUE CHOISIR Argent NOMBRE DE CLIENTS des principaux groupes bancaires * intermédiaire en «opérations de banque et services de paiement» pour le compte de Socram Banque, un établissement inconnu du grand public. Également bien installés dans le pays,des opérateurs venus de la grande distribution,à l’instar de Carrefour Banque et E.Leclerc, qui proposent quelques solutions financières. Et des banques à projets, comme le Crédit coopératif (130 ans d’existence!) ou Lanef, une coopérative bancaire «éthique» lancée en 1988 (80000 clients). Sans oublier le marché plus feutré des banques privées,source de forte rentabilité pour l’industrie financière.De fait,tous les grands réseaux bancaires ont leur cellule banque privée – même La Banque postale en a une pour ses clients disposant de plus de 250000 € d’avoirs financiers. Des groupes indépendants (Edmond de Rothschild, Neuflize OBC, etc.) et de grosses enseignes internationales (J.P. Morgan, UBS…) y font aussi recette. UNEOFFREDIVERSIFIÉEETCOMPLÉMENTAIRE Cette répartition du marché profite-t-elle aux consommateurs? La question n’est pas tranchée. Bien sûr, les professionnels la défendent, arguments à l’appui (lire «2 questions à…» p. 10). Gardons-nous toutefois d’être naïfs. Les groupes bancaires cherchent avant tout à maximiser leurs résultats, y compris par des stratégies de multidistribution. «Les géants NÉOBANQUESElles pullulent On les appelle aussi «nouvelles banques» ou «banques mobiles». Leurs noms? N26 (groupe allemand), Revolut (groupe lituanien), Nickel (BNP Paribas), Eko by CA (Crédit agricole), Bunq (groupe néerlandais), Ma French Bank (La Banque postale), Lydia (fintech française à financements internationaux), etc. Leur credo? Compte courant sans barrière à l’entrée, carte de paiement et frais réduits, le tout sur smartphone via une application mobile. Les néobanques sont parfois juridiquement des établissements de paiement, ce qui les empêche de proposer du découvert autorisé, de l’épargne et des crédits – dans leur cas, le terme de banque est donc quelque peu usurpé. D’autres ont obtenu leur agrément d’établissement de crédit pour élargir leur offre. Ce marché disruptif n’est pas si neuf, certaines marques ayant près de 10 ans. Mais il s’épaissit depuis deux-trois ans, malgré quelques échecs (comme celui d’Aumax pour moi, du Crédit mutuel Arkéa), avec notamment des enseignes arrimées à la «transition énergétique», telles Helios, Green-Got ou OnlyOne. À noter: on peut aussi ouvrir un compte de néobanque ou obtenir une carte dans des lieux physiques. Citons Nickel, chez les buralistes, ou Ma French Bank, dans les bureaux de poste. QUE CHOISIR Argent N° 172 OCTOBRE 2023 9 10 OCTOBRE 2023 N° 172 QUE CHOISIR Argent de la banque ont chacun bâti un véritable portefeuille avec des marques “filles” aux positionnements radicalement différents pour éviter toute cannibalisation, analyse lecabinetXerfi(étudejanvier 2023).Cesstratégiesjouent sur la complémentarité des offres, des cibles et des images de marque afin de répondre aux attentes – divergentes et parfois paradoxales – des clients. Dans la plupart des cas, lesgrandsacteursmisentsurl’étanchéitéenmatièredecommunication entre le groupe et les marques filles.» Le marché bancaire est donc aussi une affaire de mots. Le rapport à l’argent change,avec un message décomplexé, direct et incitant à profiter du temps présent. Parfoisavechumour,commeceluideMaFrenchBank: «C’est quoi déjà, une banque mobile? C’est tous les services d’une banque classique, et même beaucoup plus, regroupés dans votre téléphone.Pas d’agence à perpet’,pas de banquier austère,tout se fait en ligne et c’est bien plus facile.» Les slogans suivent la tendance: «1 compte + 1 carte + 1 RIB en 5 minutes», vous promet-on chez Nickel. Nous vivons dans la société de l’immédiat. DESTARIFSBANCAIRES DURS À DIGÉRER Combien vous coûte votre banque? Cette information vous est obligatoirement fournie chaque mois de janvier pour l’année écoulée – encore faut-il aller consulter le document «relevé de frais» dans votre espace client.En moyenne,il en va de 150 à 200 € par an. Ce n’est pas rien. Pour évaluer si cette facture est bon marché et/ou si vous en avez pour votre argent, pas d’autre solution que de comparer avec ce que vous auriez payé ailleurs. Comment? En lisant les documents d’information tarifaire (DIT) des banques,disponibles sur leur site web. Problème: bien que standardisés (loi oblige),ces DIT restent un amas de lignes et de tarifs indigestes pour le consommateur,comme l’avait dénoncé la Cour des comptes dans son rapport public de 2021. Elle recensait alors «597 intitulés différents dans les grilles tarifaires appliquées aux particuliers en 2019, contre 372 en 2011»! La raison? Le saucissonnage des procédures réalisé par les établissements, qui multiplie les tarifs. LES COMPARATEURS, C’EST TRÈS UTILE Ne vous découragez pas: dans les DIT figure toujours, en premier lieu,la liste des services les plus représentatifsrattachésàuncomptedepaiement(aussinommé DR DOSSIER «En France, le marché est inclusif et protecteur» Avec l’émergence des banques en ligne et des néobanques, comment se caractérise le marché actuellement? Solenne Lepage Nous avons la chance, dans notre pays, d’avoir à la fois des banques très différentes et concurrentes, et un modèle bancaire solide, attaché à la proximité et soucieux d’être utile à tous ses clients. C’est un grand atout pour notre économie. Ce modèle singulier de banque universelle se traduit par un taux de bancarisation parmi les plus élevés d’Europe, plus de 99%. La proximité est géographique et numérique, en adéquation avec les attentes des Français. En effet, 80% d’entre eux considèrent que la banque idéale permet de recourir en même temps à des services en ligne et en agence (étude Ifop-FBF de décembre 2022). Les établissements nationaux font évoluer leurs services pour les adapter aux besoins et aux usages de leurs clients, tout en gardant la dimension relationnelle. En effet, pouvoir rencontrer un conseiller reste primordial, notamment avant de prendre de grandes décisions – par exemple, souscrire un emprunt immobilier, investir dans la rénovation énergétique de son logement, financer les études des enfants… Si je devais qualifier notre marché bancaire, je dirais qu’il est inclusif et protecteur. Que recouvrent ces deux qualificatifs ? S. L. Inclusif, parce qu’il apporte des solutions à tous. Les dispositifs s’adressant aux clientèles financièrement fragiles, définis par la réglementation ou proposés directement par les établissements, sont ainsi particulièrement développés. Protecteur, parce qu’en matière d’emprunt immobilier, élément central de la vie des ménages, les offres reposent sur un taux fixe dans 96% des cas. En cette période de hausse des taux d’intérêt, c’est crucial, car les foyers ne subissent pas d’augmentation. Ainsi, une mensualité de remboursement fixée lors de la souscription du prêt reste stable et prévisible. En somme, les banques pratiquent le crédit responsable, c’est-à-dire respectueux des capacités de remboursement de leur client, afin de ne pas l’exposer au surendettement. 3 QUESTIONS À… SOLENNE LEPAGE Directrice générale adjointe de la Fédération bancaire française Trouvez celle qu’il vous fautBANQUES QUE CHOISIR Argent N° 172 OCTOBRE 2023 11 «extrait standard des tarifs»); par exemple, ce que coûte une carte bancaire internationale à débit immédiat ou différé.De quoi aller à l’essentiel,sachant que les offres de services groupés (ou packages bancaires) ne sont pas incluses dans cette liste,et que tout est susceptible de bouger chaque année. Ajoutons que les promotions récurrentes, non intégrées dans le DIT, faussent aussi les comparaisons… Bref,pour tout un chacun,la tarification bancaire est difficile à appréhender. Inutile de tergiverser, votre salut repose dans un outil, le comparateur de services/tarifs bancaires. Lancé en 2016, celui des pouvoirs publics est gratuit et,théoriquement,mis à jour toutes les semaines par le cabinet Sémaphore Conseil. Son panel? Environ 150 établissements de crédit, répartis sur tout le territoire. Outre les services de base, comme les virements, les prélèvements ou les cartes bancaires, cet outil digital permet de comparer le prix de 15 prestations différentes, le tout dans un département. Utile, sauf qu’en pratique vous ne pouvez sélectionner chaque fois que six critères de comparaison, et que vous n’avez pas la possibilité de définir votre profil (par exemple, jeune actif, cadre supérieur ou retraité). Insuffisant, donc. Vous trouverez sur la Toile d’autres comparateurs privés. L’écueil? Ils sont rémunérés par les banques sur la base des prospects fournis. Ce qui n’est pas le cas, à l’inverse,du comparateur de l’UFC-Que Choisir,dont la logique est simple: vous orienter selon vos besoins. Au total,155 banques y sont référencées en métropole et dans les départements d’outre-mer,ce qui regroupe plus de 1000 packages bancaires et 60 services. Son adresse: Ufcqc.link/banque172 (accès payant). ATTENTION AUX FRAIS ABUSIFS! Vu de haut, le problème des frais bancaires – tant leur compréhension que leur niveau – est-il soluble? Depuis 15 ans,lois,décrets,jurisprudences et engagements des professionnels se sont empilés, avec pour résultat… l’illisibilité du dispositif côté consommateurs et (c’est le paradoxe) côté conseillers bancaires. Du reste, comme le confie un banquier sous anonymat, «les frais des services bancaires ont pris une importance croissante dans la rentabilité des banques, venant compenser les moindres marges réalisées, sur les crédits notamment.Iln’estdoncpasquestiondes’enpasser».Est-ce la raison pour laquelle aucune statistique publique, y compris dans les instances représentatives des banques(!),nerecenselafacturepayéeparlesFrançais? Dans les années 2010, diverses estimations avaient abouti à un total colossal de 6 ou 7 milliards d’euros, dans une indifférence politique assez large. Avec le retour de l’inflation l’an dernier,changement de ton: le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, a demandé aux banques la mise en place d’un «bouclier sur les frais bancaires», avec une hausse limitée à 2% pour 2023. Mais «comment s’en satisfaire, alors que cette annonce vient, en réalité, sanctuariser les marges exorbitantes (86% en moyenne) que la profession bancaire pratique sur les 13 millions de consommateurs dont le solde du compte tombe dans le rouge au moins une fois par an?, avait réagi Alain Bazot, ex-président de l’UFC-Que Choisir. À titre illustratif, rappelons que les frais de rejet de prélèvement coûtent pas moins de 20 € par opération,un montant 17 fois plus élevé qu’en Allemagne.» Ajoutons que la sanction peut atteindre 30 € pour un chèque sans provision de 50 € oumoinsetjusqu’à50 €sicedernierestdeplus de 50 € (hors«clients fragiles»).Le dépassement d’un découvert autorisé, lui, grimpe parfois à 8 € par opération (plafond de 80 € par mois)! La dénonciation de ces abus par l’association semble enfin trouver écho dans le débat public.En témoigne le rapport parlementaire du député Charles de Courson, en 2022, portant lutte contre l’exclusion financière et pour le plafonnement des frais bancaires. «S’il est normal que les banques facturent leurs services, il n’est pas admissible que ces frais soient dévoyés, en étant multipliés et décorrélés du coût réel des prestations MULTIBANCARISATION Ça peut vous coûter cher Aujourd’hui, 29% des Français détiennent un compte bancaire dans deux établissements, 7% dans trois, 1% dans quatre (source: Ifop-FBF, décembre 2022). La proportion de ces «multibancarisés» varie selon les régions (ils sont 46% en Île-de-France). Leurs objectifs? Diversifier leurs avoirs, disposer de plusieurs moyens de paiement, etc. Mais quid des frais? Ils risquent de s’empiler. De fait, avec des comptes dans deux banques traditionnelles, on paie deux fois les frais de tenue de compte et la cotisation à la carte bancaire. En optant pour une banque en ligne ou une néobanque en complément, on évite cette double facturation, leurs offres étant souvent gratuites. D’où la tendance à en faire des banques d’appoint. Attention, être multibancarisé, c’est aussi s’astreindre à une gestion plus compliquée de ses avoirs, même si des agrégateurs en ligne permettent de réunir tous ses comptes sur une même application.
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