INFORMATIONS ENTREPRISE n°193 - Page 3 - 193 13 Informations Entreprise n°193 L a tentation était grande d’attaquer cet édito bille en tête sur la valse politique qui se joue depuis un moment. Dissolution, nouveau gouvernement, renversement, nouveau gouvernement, gauche, droite, centre. Et puis nous nous sommes dit que vous en aviez peut-être assez, que comme nous, vous aviez envie de quelque chose de plus optimiste pour débuter 2025. Janvier s’élance avec cette lumière singulière, celle des commencements. Une année neuve, fraîche, encore malléable s’offre à nous. Promesse et responsabilité à parts égales. Recevez, en ce début d’année, nos vœux les plus sincères de succès et de créativité. Puisse 2025 être une année de conquêtes, mais surtout de sens. L’économie, nous le savons, n’est plus seulement une affaire de chiffres ou de courbes de croissance. Elle est, plus que jamais, une quête de pertinence, une vigilance de chaque instant. Le défi climatique s’impose à nos consciences et à nos bilans. Ce n’est plus une vague idée lointaine, mais une réalité qui redéfinit nos entreprises, nos marchés, nos ambitions. C’est pourquoi, ce mois-ci, Informations Entreprise vous propose un format long et inspirant de Sylvain Waserman, président de l’ADEME. Un homme qui croit profondément à cette idée simple, presque élémentaire : chaque geste compte. Décarboner la France ne se fera pas uniquement par des décisions imposantes ou des politiques d’État. Non, ce sont nos gestes quotidiens, nos stratégies ajustées, nos investissements éclairés qui tracent la voie d’un futur viable. Chaque dirigeant, chaque entreprise, chaque élu en région a son rôle à jouer dans ce ballet complexe où l’économie et l’écologie ne s’opposent plus, mais s’épousent. En lisant cet entretien, vous découvrirez la pensée de celui qui milite pour une transformation concrète et efficace. Ce n’est pas de l’utopie verte, c’est de la lucidité économique. Les marchés se réinventent, les modèles s’effondrent et renaissent, les innovations affluent. À ceux qui osent, les opportunités ne manquent pas. Oui, chaque geste compte. Chaque décision prise avec discernement, chaque adaptation stratégique à l’impératif écologique est un pas vers une économie durable. Alors, en cette nouvelle année, soyons les artisans de cette transformation. Redéfinissons nos ambitions, guidés non par la peur du déclin, mais par l’appétit de réussir autrement, de bâtir un héritage à la hauteur de nos responsabilités. Bonne année à toutes et à tous. Que 2025 donne corps à vos rêves les plus fous. Philippe Boukobza, Directeur de la Publication INFORMATIONS ENTREPRISE est édité par la Société PUBLIMAG, SARL au capital de 260 000 € 11 avenue du Général Leclerc 92100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01 44 30 24 60 E-mail : info@info-entreprise.com Date de création : mars 1980 Commission Paritaire : n° 0626T88182 Depot légal : C150 ISSN : 02924765 Directeur de la Publication : P. Boukobza REDACTION Rédacteur en chef : Olivier Casado Assistante de rédaction : Janine Chedid Directeur Artistique : Lionel Sebag Crédits photos : Maphotoportrait.fr (photo édito Philippe Boukobza) Publimag (photo couverture principal) Ministères sociaux DICOM : Tristan Reynaud (photo couverture supplément) Aurélie Coudière (portrait expert-comptable) Ont participé à ce numéro : Lucas Catino / Emmanuel Bringuier PUBLICITÉ Publimag 11 avenue du Général Leclerc 92100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01 44 30 24 60 ABONNEMENTS Marianne Tournant : 01 44 30 24 60 Abonnements : 55 € (12 N°) 55 € pour l’étranger 40 € (8 N°) 22 € (4 N°) DIFFUSION -Réglage diffusion kiosque : Pagure Presse -Diffusion kiosque : MLP (Messageries Lyonnaises Presse) -Service Lecteurs Du lundi au vendredi de 14 h à 16 h. E-mail : info@info-entreprise.com Informations Entreprise n’a de lien avec aucun organisme officiel, parti politique ou autre. 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Ceci est inévitable, compte tenu de notre grande diffusion. Soyez vigilant et d’une manière générale Attention aux guides ou revues qui utilisent des titres similaires au nôtre, aux entreprises qui utiliseraient des photocopies de nos textes et annonces en vous demandant de régler uniquement des frais techniques. Nous ne pouvons que vous conseiller de ne pas donner suite et d’identifier ces entreprises afin de nous communiquer leurs coordonnées. Nous vous rappelons que nos fichiers ne sont ni prêtés, ni loués, ni vendus. Groupe Publimag SARL : 11 avenue du Général Leclerc 92100 Boulogne-Billancourt RCS Paris B 397 872 938 Gérant : P. Boukobza Principaux associés : P. Boukobza Photogravure et impression : Siep Retrouvez-nous sur internet : www.info-entreprise.com Olivier Casado, Rédacteur en Chef Regard 15 Informations Entreprise n°193 20 DIXIT Sylvain Waserman Président Directeur Général de l’ADEME C’est ensemble que nous réussirons. L’ADEME conduit le pays vers le succès. 44 PILOT GROUPE La révolution temps partagé 40 BPI BIG 2024, agilité et progrès au cœur de l’entreprise française Retour sur les moments forts du Salon BIG 2024 organisé par Bpifrance Sommaire 17 Informations Entreprise n°193 Sommaire 78 IT & DIGITALISATION Préparez votre entreprise aux défis numériques de 2025 IA, cloud, cybersécurité, la mue digitale obligatoire des entreprises. 102 SANTÉ Ces startups innovantes qui façonnent l’avenir Levées de fonds records et innovations majeures en 2024. 58 BTP Le sursis, mais pas encore la relance Des avancées timides et des signaux contradictoires, un secteur toujours en quête de stabilité. 19 Informations Entreprise n°193 Sommaire 142 INDUSTRIE L’ère des robots et des jumeaux numériques Industrie du futur, un équilibre à réinventer dans un monde connecté. 166 LOGISTIQUE & EMBALLAGE Emballage, le futur est déjà dans les cartons Écoresponsabilité et intelligence artificielle redessinent les chaînes d’approvisionnement. 130 FINANCE Investir en 2025 : stratégies gagnantes et zones à explorer Actions, PEA, immobilier, assurance-vie : décryptage des choix d’investissement les plus pertinents pour l’année à venir. 20 Informations Entreprise n°193 C’est ensemble que nous réussirons L’ADEME conduit le pays vers le succès Dixit Dossier réalisé par Olivier Casado Sylvain Waserman Président Directeur Général de l’ADEME Retrouvez la vidéo de l’interview en scannant ce QR Code 21 Informations Entreprise n°193 I nformations entreprise : Bonjour, monsieur Waserman. Merci de nous accueillir dans les locaux de l’ADEME. Vous êtes à sa tête depuis un peu plus d’un an. Commençons par un point d’étape : où en est la transition écologique en France selon vous ? Est-ce que nos objectifs sont atteints ? Sylvain Waserman : Bonjour. Merci de votre invitation. La transition écologique est entrée dans une nouvelle phase. On est passé d’une ère de discours, portée par les visionnaires, à une ère de résultats mesurables et chiffrés. On parle d’objectifs concrets, d’indicateurs de performance et de programmes de suivi. C’est une approche que j’apprécie personnellement, fort de mon expérience passée comme dirigeant d’entreprise. Et c’est une approche que les entreprises semblent bien appréhender également. Pour la première fois en 2023, la France a atteint ses objectifs de décarbonation. Nous parlons d’une réduction annuelle de 4 à 5 % des émissions de gaz à effet de serre, avec un taux de 5,8 % atteint l’année dernière. C’est un résultat significatif. IE : C’est effectivement un succès notable, mais il ne faut pas oublier le contexte budgétaire actuel… Les caisses de l’État ne sont pas illimitées. Comment concilier décarbonation et contraintes financières ? SW : C’est un point crucial. Évidemment, l’argent public est une ressource limitée. Cependant, l’ADEME a vu ses moyens multipliés par quatre ces quatre dernières années, ce qui nous permet de mener des actions ambitieuses. Nous disposons d’un budget propre, participons activement au programme d’innovation “France 2030”, gérant ainsi 7.9 milliards d’euros destinés à la décarbonation. Notre rôle est d’optimiser l’utilisation de ces fonds en ciblant des actions à fort impact. Le Fonds Chaleur, par exemple, avec son efficacité de 37 € par tonne de CO₂ économisée, est un exemple concret. Nous devons également insister sur l’efficacité carbone de chaque euro dépensé. IE : Vous avez évoqué un travail important sur l’économie circulaire et la responsabilité élargie des producteurs. Pouvez-vous développer ? SW : L’économie circulaire est absolument essentielle, tant pour la transition écologique que pour la souveraineté nationale. La responsabilité élargie des producteurs responsabilise les fabricants, en les impliquant davantage dans la gestion du cycle de vie de leurs produits, et donc dans la gestion de leurs déchets. Cela permet de réduire les volumes et d’améliorer les taux de recyclage. C’est une démarche gagnante autant pour l’environnement que pour l’économie. IE : Parlons du rôle de vos ministères de tutelle. Vous êtes partagés entre l’écologie et la recherche. Comment la ministre, Mme Agnès Pannier-Runacher, contribue-t-elle à votre action ? SW : C’est ma ministre principale et c’est réellement la bonne ministre au bon moment. Elle a une maîtrise des sujets et c’est un bonheur parce qu’il faut bien comprendre que dans ces domaines-là, il faut quand même rentrer dans le fond des choses pour pouvoir les porter. Elle a notamment défendu sur ses budgets 2025 le Fond Chaleur, qui est un des combats emblématiques. Elle a toujours été très engagée sur cette thématique. Alors effectivement, c’est la bonne personne parce qu’elle en maîtrise les éléments et elle a le courage de porter une parole qui est de dire : « Ne confondons pas le coût à court terme et la dépense et l’investissement de moyen terme. » IE : Abordons maintenant le secteur privé et la nouvelle directive CSRD (NDLR : Corporate Sustainability Reporting Directive en anglais). Vous avez récemment signé un partenariat avec la Banque de France, pouvez-vous nous en parler ? SW : Vous savez, l’ADEME a eu, il y a cinq ans, une vision très claire de l’avenir économique. Nos ingénieurs se sont dits : « Demain, ce qui comptera sur le marché, ce n’est pas tant les objectifs qu’on annonce, mais la crédibilité des plans de décarbonation qu’on présente. » Et, pour que cette crédibilité soit solide, il fallait une méthodologie scientifique rigoureuse. Nous avons donc développé une méthode, en trois ans, qui permet de donner une note sur vingt, une lettre et une tendance à un plan de décarbonation. Ce système évalue les moyens mis en œuvre, la gouvernance, l’implication des actionnaires. Pourquoi est-ce crucial ? Parce que dans le contexte économique actuel, les entreprises, grandes ou petites, font face à des pressions énormes. Prenez l’exemple des grands groupes qui intègrent les fameux scopes 1, 2 et 3 dans leur stratégie. Les sous-traitants sont désormais directement concernés. Imaginez un verrier dans l’Orne, qui réalise 80 % de son chiffre d’affaires avec des clients du luxe. Ces derniers lui disent : « Nous serons décarbonés en 2030, avec ou sans vous. » Pour ce chef d’entreprise, ce n’est plus un simple sujet de discussion en Codir : c’est une question existentielle, au cœur même de sa stratégie. Ensuite, il faut penser aux changements dans les achats publics : dès 2026, des clauses environnementales obligatoires feront leur entrée. Il sera essentiel de distinguer entre deux entreprises disant « Je serai verte en 2040 », laquelle est réellement crédible. Les banques aussi flèchent leurs financements vers des projets de plus en plus vertueux. Enfin, le cours du carbone est une grande inconnue. Pour un chef d’entreprise, présenter des risques carbone élevés à ses actionnaires, c’est introduire L’ ADEME prouve que la décarbonation est réalisable en utilisant des leviers innovants et en s’appuyant sur une mobilisation citoyenne et une collaboration inter-acteurs. Face aux défis de la décarbonation, l’ADEME propose une approche concrète et pragmatique pour les entreprises françaises, en s’appuyant sur une expertise technique et scientifique reconnue. Rencontre avec Sylvain WASERMAN président Directeur général de l’ADEME. 22 Informations Entreprise n°193 une incertitude supplémentaire qui peut menacer un business plan. Ce contexte crée une véritable course à la décarbonation. On voit un nombre impressionnant d’entreprises qui ont basculé dans l’action, et la France a ici un atout majeur : son électricité est déjà largement décarbonée. Cela offre un avantage concurrentiel immense, notamment face à des pays comme l’Allemagne ou la Pologne. Pour une entreprise comme Stellantis, par exemple, investir en France dans une transition énergétique est bien plus efficace que dans d’autres pays. Pour revenir à notre convention avec la Banque de France, elle repose sur notre méthodologie ACT, qui est aujourd’hui reconnue pour sa rigueur. Elle se décline en deux volets : « ACT pas à pas », qui accompagne les entreprises sur 12 à 18 mois pour construire leur plan de décarbonation, et « ACT évaluation », qui, en trois jours, attribue une note sur la solidité de ce plan. La Banque de France a évalué des méthodologies venant de différents acteurs et choisi celle de l’ADEME pour ses indicateurs climat, en raison de sa crédibilité et de son sérieux. C’est une reconnaissance majeure et le fruit de plusieurs années de collaboration. Enfin, mon message pour les entreprises est simple : avec la directive CSRD, vous serez confrontées à de nombreuses obligations. Mais, en adoptant la méthodologie ACT, non seulement vous serez alignées sur ces exigences, mais vous pourrez aussi tirer parti de l’avantage concurrentiel unique que vous offre la France. IE : Nous allons laisser quelques secondes le monde de l’entreprise pour nous intéresser à nous, hommes et femmes de ce monde. J’aimerais que vous nous parliez de ce site « Nos gestes climat », qui est tellement simple et essentiel. SW : Vous avez raison, nous sommes tous sensibles à la question climatique et beaucoup veulent agir à leur échelle. Mon message à vos lecteurs est simple : commencez par évaluer votre empreinte carbone personnelle. Pour cela, l’ADEME propose un outil, Nosgestesclimat.fr, qui permet de mesurer l’impact de nos gestes quotidiens : déplacements, alimentation, choix de consommation, etc. En moyenne, un Français émet entre 8 et 10 tonnes de CO₂ par an. Une fois ce bilan établi, on peut identifier des changements simples et accessibles : par exemple, reprendre le vélo, réduire sa consommation de viande à deux fois par semaine ou limiter les courts séjours en avion. L’idée n’est pas de demander des efforts énormes immédiatement, mais de viser une réduction progressive, en commençant par les 10 premiers pourcents. Pourquoi 10 % ? Si chaque Français, émettant 10 tonnes, réduit d’une tonne ses émissions, cela représente 58 millions de tonnes en moins, soit la moitié de l’effort national nécessaire pour atteindre nos objectifs de 2030. Et 2030, c’est demain. Prenons un exemple concret : en faisant mes courses, je me suis demandé pourquoi j’achetais encore du gel douche, qui contient 95 % d’eau et vient dans une bouteille en plastique, Dixit © Pixabay 23 Informations Entreprise n°193 plutôt qu’un simple savon. Si tout le monde faisait ce choix, cela représenterait 185 millions de bouteilles en plastique en moins chaque année en France, soit l’équivalent de 10 tours Eiffel ! Et pourtant, ce petit geste ne change rien à notre qualité de vie. Je crois en notre capacité collective à agir. Si chacun s’engage sur ces 10 %, non seulement nous atteindrons nos objectifs, mais nous le ferons ensemble, en prenant conscience de notre rôle dans cette transition. Ce sont ces petits gestes, additionnés, qui feront une grande différence. IE : Et concernant les collectivités locales et leur implication dans la transition énergétique, notamment face aux défis du réchauffement climatique (canicules, etc.) ? SW : Les collectivités jouent un rôle déterminant dans la transition écologique. L’ADEME estime qu’environ la moitié des décisions en la matière dépendent d’elles. C’est pour cela que nous avons créé le réseau « Élus pour agir ». Ce réseau propose des sessions d’échange et de partage d’expérience entre élus, sans la pression médiatique, pour échanger librement sur les difficultés, les réussites et les solutions. Nous leur proposons des clés de décryptage, des outils et des financements. L’objectif est de les aider à intégrer la transition écologique dans leur action quotidienne, qu’il s’agisse de la gestion des canicules, de l’urbanisme, de la dé-bétonisation, etc. IE : Et concernant des outils comme « Plus fraîche ma ville » ? SW : « Plus fraîche ma ville » est un outil concret qui fournit aux élus des pistes de réflexion et des exemples pour atténuer les effets des canicules dans leurs villes et villages. Nous proposons également des pistes, comme la peinture des routes en blanc pour limiter l’effet de chaleur du bitume. Nous incitons à repenser les modes de vie et l’usage de l’espace et à intégrer des matériaux biosourcés. IE : Parlons des nouvelles technologies et du numérique. Quels sont les projets les plus innovants auxquels vous participez actuellement ? SW : L’ADEME croit en l’innovation et investit massivement dans le domaine du numérique. Nous ne sommes pas techno-solutionnistes, mais nous reconnaissons le potentiel des nouvelles technologies pour accélérer la transition écologique, tout en étant conscients de l’impact environnemental du numérique luimême (Green IT). Nous travaillons, par exemple, sur l’éco-conception des applications et services numériques pour réduire leur empreinte carbone. L’utilisation de l’IA pour optimiser la consommation énergétique est un domaine clé. Le partenariat avec l’ARCOM et l’ARCEP vise à développer des labels pour identifier les solutions numériques les plus responsables, permettant ainsi de créer un avantage concurrentiel pour les entreprises françaises et européennes par rapport aux GAFAM. On veut les inciter à « ouvrir le capot », c’est-à-dire à laisser auditer leurs processus afin de mesurer et de quantifier l’impact environnemental de leurs solutions. IE : Un dernier mot, un message pour vos arrière-arrière-petits-enfants ? SW : J’aimerais qu’ils se souviennent qu’en dépit des immenses défis auxquels nous faisions face, c’est grâce à la détermination des femmes et des hommes, à la collaboration entre entreprises, aux collectivités, aux citoyens, et surtout la force de l’espoir qui a permis de faire basculer le monde du côté de la transition écologique. J’aimerais qu’ils sachent que nous y avons cru et que nous avons agi avec conviction pour la rendre possible. Tout ça se joue maintenant. C’est à portée de main, il suffit d’y croire et d’agir. © Freepik 24 Informations Entreprise n°193 I nformations Entreprise : Quelles initiatives concrètes pourraient accélérer la diffusion de la sensibilisation au numérique durable au-delà des grandes entreprises européennes ? Amael Parreaux-Ey (CEO et co-fondateur de Resilio) : Ces six derniers mois, nous avons constaté une forte dynamique autour du numérique durable, particulièrement en Europe et dans les pays francophones, souvent axée sur le matériel (hardware). En revanche, dans les pays anglophones, le focus se porte davantage sur le logiciel (software). Aujourd’hui, ce sujet est devenu incontournable pour les grandes entreprises comme celles du CAC 40 et les administrations majeures, et commence à se diffuser auprès d’entités légèrement plus petites, mais toujours de grande envergure. En quatre ans, la sensibilisation a considérablement progressé : davantage de décideurs clés s’impliquent, de nouvelles méthodologies émergent, et des outils ainsi que des prestations commerciales se développent. La France est leader dans ce domaine, suivie de la Belgique et de la Suisse, tandis que d’autres pays comme l’Allemagne restent moins matures. Cependant, pour diffuser cette prise de conscience à grande échelle, il faudra combiner initiatives commerciales, clusters collaboratifs, études partagées et interventions étatiques. I.E : Quels sont les principaux leviers à actionner pour allier conformité réglementaire, réduction des coûts et résilience opérationnelle des systèmes d’information ? Amael Parreaux-Ey : Lorsqu’on parle de systèmes d’information (SI), cela englobe tant les SI de gestion dans les entreprises que les SI productifs, par exemple dans les banques. Plusieurs raisons expliquent l’urgence d’agir. Premièrement, il y a désormais une obligation légale en Europe avec la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui impose aux entreprises une transparence environnementale incluant l’impact de leur IT, qu’il soit internalisé ou externalisé. Cela concerne notamment la consommation des télécoms, des ressources cloud, des serveurs ou encore des parcs utilisateurs. Ensuite, réduire l’empreinte IT présente un avantage économique majeur. L’IT souffre souvent de surconsommation, et adopter des pratiques de sobriété — consommer juste ce qu’il faut — permet de diminuer les coûts tout en améliorant l’efficience. Enfin, cette prise en compte est une réponse réaliste aux risques environnementaux et opérationnels. Les crises climatiques récentes et les perturbations dans la chaîne des semi-conducteurs rappellent à quel point il est vital de rendre les SI résilients et adaptés aux défis actuels. I.E : Pouvez-vous expliquer le fonctionnement de l’outil d’analyse du cycle de vie (ACV) de Resilio ? Amael Parreaux-Ey : Chez Resilio, nous avons développé deux outils clés pour évaluer et réduire l’empreinte environnementale des produits et services numéMAÎTRISER SON IMPACT NUMÉRIQUE Mesurer et réduire l’empreinte environnementale des systèmes d’information reste un défi complexe. Resilio, pionnière en évaluation environnementale IT, propose des solutions innovantes mêlant automatisation, expertise pointue et collaboration stratégique. Focus. Chiffres clés • Le numérique c’est une consommation exponentielle de matériaux critiques : des ressources épuisées dans 1 à 2 générations • Le numérique c’est 2x plus d’émissions de Gaz à Effet de Serre que l’aviation civile ! • Budget moyen d’un bilan environnemental de l’IT : 15-30K euros • Durée moyenne d’un projet : 4 mois • Réduction moyenne des coûts IT attendus : 25% • 300-400 kg éq CO2/ pers (niveau moyen d’émissions pour un employé classique pour l’usage de l’IT pro). Jusqu’à 1’400 kg CO2eq/pers dans la banque/assurance ADEME 25 Informations Entreprise n°193 riques. Le premier, Resilio Database, fournit une base de données précise permettant d’évaluer l’impact environnemental d’un appareil, qu’il s’agisse d’un laptop, d’un serveur ou d’un téléphone, simplement à partir de sa référence. Ce premier niveau permet de chiffrer individuellement l’empreinte des équipements. Ensuite, notre plateforme Resilio. tech pousse l’analyse plus loin en intégrant ces données dans une évaluation complète du cycle de vie d’un service numérique, tel un système d’information. L’outil permet de dresser un inventaire détaillé des matériels (laptops, serveurs, smartphones), des datacenters, des achats cloud, et même des déplacements des collaborateurs. Cette vue d’ensemble identifie les principales sources d’empreinte pour agir efficacement. Notre priorité est de minimiser le temps consacré aux calculs pour maximiser les efforts de réduction. En somme, Resilio.tech fournit une interface intuitive et flexible pour identifier rapidement les leviers d’action et initier des réductions concrètes et mesurables I.E : Comment Resilio parvient-elle à allier expertise technique et collaboration avec ses partenaires ? Amael Parreaux-Ey : La force de Resilio réside dans notre capacité à couvrir l’évaluation environnementale depuis le composant le plus spécifique, comme une puce électronique, jusqu’à l’ensemble d’un système d’information à l’échelle mondiale. Cette flexibilité, véritable signature de notre entreprise, nous permet de répondre à des problématiques variées et complexes. Nous adaptons nos solutions aux besoins spécifiques de nos clients, qu’il s’agisse d’évaluations pointues ou de conseils stratégiques pour les DSI. Cette approche est renforcée par un solide réseau de partenaires. Nos clients peuvent travailler directement avec nous ou via ces partenaires, qui utilisent nos méthodes, nos logiciels et notre base de données pour avancer dans leurs projets. Cette dynamique communautaire, où nos outils servent également d’appui à des sociétés de conseil, nous permet de combiner expertise interne et collaboration externe pour offrir des solutions à la fois robustes et adaptables I.E : Comment Resilio anticipe-t-elle les évolutions technologiques et organisationnelles pour répondre à la montée en échelle et à l’interopérabilité des outils environnementaux ? Amael Parreaux-Ey : La tendance actuelle dans le domaine de l’évaluation environnementale est clairement à l’automatisation et à la généralisation. Nous voyons de plus en plus d’applications qui s’automatisent et qui s’étendent à des publics plus larges. Par exemple, au lieu de traiter une ou deux évaluations à la fois, nous en traitons désormais des dizaines, voire des centaines ou des milliers. Cela marque une véritable montée en échelle. Par ailleurs, nous observons une évolution vers un écosystème d’outils. À terme, une poignée de solutions généralistes domineront le marché du reporting global, tandis que chaque domaine, comme l’IT, la mobilité ou la production, conservera ses outils spécialisés. Chez Resilio, nous sommes positionnés pour adresser ces deux dynamiques. D’une part, nous simplifions nos interfaces pour permettre aux utilisateurs de monter en compétence rapidement. D’autre part, nous travaillons à l’intégration et à l’interopérabilité, en respectant et en façonnant les standards émergents pour que nos données s’intègrent facilement dans les frameworks de nos clients. Amael Parreaux-Ey
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