ROCK AND FOLK n°682 - Page 9 - 682 Juin 2024 R&F 003 Edito Disney(lala)land Les Beach Boys ont deux visages. Au moins. Celui de deux Amériques. Celle de leurs débuts, des années soixante et des suivantes. Jusqu’à celle d’aujourd’hui. La figure glabre, les cheveux bien peignés et les visages mafflus et barbus, les ventres défaits et les chemises criardes. Casquette de baseball incluse. “Make America Great Again!” brodé dessus ? Pas loin. Le groupe de l’Amérique, comme ils se proclament. Oui. L’Amérique des années soixante où ils débutèrent, comme tant. Celle d’un Président glabre et aux cheveux bien peignés. L’Amérique de la conquête spatiale, ses mouvements des droits civiques, sa contre-culture, son amour, sa liberté mais sa guerre aussi. Son été de l’amour. Sa musique… Celle des Beach Boys, aux références doo-wop et au look encore un peu fifties. Ringardisés par l’arrivée massive de groupes anglais, mais trouvant dans la rivalité avec les Beatles une raison d’être, poussant leur musique pop vers des sommets rarement égalés. Mais derrière les harmonies à cinq voix se nouait un drame. Une autre Amérique. La fin des rêves de progrès et d’égalité. La violence des gangs, les ordis personnels qui déboulent, la malbouffe qui prospère et la guerre froide qui ne se réchauffe pas pour l’Amérique. Côté Beach Boys, conflits permanents, pétages de plombs et autodestruction. Les Wilson/ Love/ Jardine seront des champions en la matière. Raflant des médailles dans toutes les catégories. Ou comment du chaos naît la beauté. Aujourd’hui, un documentaire sort sur Disney+. Disney… Inventeur d’un monde animé et manichéen ô combien. Qui n’utilisa même pas la musique des Beach Boys dans “Lilo Et Stitch”. Américain, tellement. Les Beach Boys sont-ils des méchants ou d’innocents chatons qui chantent ? Des Bambi, des dalmatiens ou des Crochet, des Cruella ? C’est l’histoire d’une famille. Comme les aime tant Disney. Trois frères, leur cousin et leur meilleur pote. Un père tyrannique qui maltraite ses fils, cogne l’aîné jusqu’à le rendre à moitié sourd. Un frère cadet un peu dingo (on ne parle pas ici du fidèle ami de Mickey), un cousin aux idées contraires, un génie tourmenté qui s’enfonce dans une forme de réclusion. Oasis et Kinks paraissent bien sages en comparaison. On est loin d’un conte de fées. La très dysfonctionnelle famille Wilson-Love occupe le terrain depuis soixante ans. Une longévité rare dans l’histoire du rock. Ils n’ont jamais été cool avec leurs chemisettes à rayures verticales et leur obsession pour les planches qui glissent sur l’écume, les plages avec des filles dessus et les bagnoles avec des filles dedans. Cet été qui ne se terminerait jamais… A l’heure où Brian Wilson vient d’être placé sous tutelle et ne semble plus en mesure de grand-chose, voici leur histoire. Générique de fin, feu d’artifice tiré au-dessus du château de la Belle au bois dormant, laissant dans un ciel de nuit des traînées lumineuses sublimes comme en laisseront pour toujours les mélodies merveilleuses des Beach Boys… Une fin à la Disney, quoi. Vincent Tannières Parution le 20 de chaque mois Mes Disques A Moi Alexandre Breton JAY ALANSKI 10 In Memoriam Bertrand Bouard Dickey Betts 14 Nicolas Ungemuth DUANE EDDY 16 Basile Farkas STEVE ALBINI 18 Tête d’affiche Romain Burrel SHANNON & The Clams 20 Eric Delsart HA THE UNCLEAR 22 Jérôme Soligny Grandaddy 24 H.M. LAST TRAIN 26 Nicolas Ungemuth Tony TRuant 28 Jérôme Soligny Lou Reed TRIBUTE 30 En vedette Vianney G. Richard Hawley 32 Thomas E. Florin Pokey LAfarge 38 Stan Cuesta Gerard Manset 42 Story Léonard Haddad Bruce Springsteen 48 En couverture Basile Farkas et Eric Delsart The Beach Boys 54 RUBRIQUES edito 003 Courrier 006 Telegrammes 008 Disque Du Mois 063 Disques 064 Reeditions 072 REHAB’ 076 vinyles 078 DISCOGRAPHISME 080 HIGHWAY 666 REVISITED 082 Qualite France 083 Erudit Rock 084 Et justice pour tous 086 FILM DU MOIS 088 Cinema 089 SERIE du mois 091 IMAGES 092 Bande dessinee 094 LivRes 095 Live 096 PEU DE GENS LE SAVENT 098 Sommaire 682 54 The Beach Boys www.rocknfolk.com Photo Jim Herrington DR 20 Shannon & The Clams couverture photo : Michael Ochs Archives/ Getty Images Rock&Folk Espace Clichy - Immeuble Agena 12 rue Mozart 92587 Clichy Cedex – Tél : 01 41 40 32 99 – Fax : 01 41 40 34 71 – e-mail : rock&folk@editions-lariviere.com Président du Conseil de Surveillance Patrick Casasnovas Présidente du Directoire Sophie Casasnovas Directeur Général Frédéric de Watrigant Editeur Philippe Budillon Rédacteur en Chef Vincent Tannières (32 99) Rédacteur en Chef adjoint Eric Delsart Chef des Infos Yasmine Aoudi (32 94) Chef de la rubrique Live Matthieu Vatin (32 99) Conseiller de la Rédaction Jérôme Soligny Maquette Christophe Favière (32 03) Secrétaire de rédaction Manuella Fall Publicité : Directeur de Publicité Olivier Thomas (34 82) Assistant de Publicité Christopher Contout (32 05) PHOTOGRAVURE Responsables : Béatrice Ladurelle (31 57), Flavien Bonanni (35 29) Chromiste : Hugues Vuagnat (3489) VENTES (Réservé aux diffuseurs et dépositaires) : Emmanuelle Gay (56 95) ABONNEMENTS : Promotion Abonnements : Carole Ridereau (33 48) Abonnement : France 1 an - 12 numéros papier et numérique : 131,48 e, prélèvement mensuel : 5,95 e Suisse et autres pays et envoi par avion : nous contacter au (33) 03 44 62 43 79 ou sur : abo.lariviere@ediis.fr VENTE PAR CORRESPONDANCE : Accueil clients 03 44 62 43 79 Commande par Carte Bancaire ou sur www.rocknfolk.fr COMPTABILITé (32 37) Fax : 01 41 40 32 58 Directeur de la Publication et Responsable de la Rédaction : Patrick Casasnovas IMPRESSION : Imprimerie de Compiègne Zac de Mercières 60205 Compiègne Cedex. Papier issu de forêts gérées durablement, origine du papier : Allemagne, taux de fibres recyclées : 63%, certification : PEFC/ EU ECO LABEL, Eutrophisation : 0,003 kg/ tonne. Diffusion : MLP – Rock&Folk est une publication des Editions Larivière, SAS au capital de 3 200 000 euros. Dépôt légal : 2ème trimestre 2024. Printed in France/ Imprimé en France. Commission paritaire n° 0525 K 86723 ISSN n° 07507852 Numéro de TVA Intracommunautaire : FR 96572 071 884 CCP 11 5915A Paris RCS Nanterre B 572 071 884 Administration : 12, rue Mozart 92587 Clichy Cedex – Tél : 01 41 40 32 32 Fax : 01 41 40 32 50. Les manuscrits et documents non insérés ne sont pas rendus. Courrier des lecteurs Ego-trip hyperbolique Le retour de la censure J’ai beau aimer les émotions fortes, mais là, je le reconnais, je n’étais pas prêt. Dites, “trouver quelque chose des Beatles chez Snoop Dogg”, il faut au moins le courage d’un commando marine pour tenir ces propos au magazine dont les lecteurs vénèrent le quatuor. Je ne remets nullement en cause la sincérité de Marc Voinchet ni son statut de musicologue avisé et reconnu, mais sa déclaration a semé un sacré pataquès chez nos aînés qui ont vécu les sixties. Je les connais bien, dès que l’on touche à leurs précieux scarabées, ils ont la pression artérielle à marée haute et sont capables d’investir vos locaux pour protester du camouflet infligé au plus grand groupe de rock du monde (si, si). Alors, la prochaine fois, ne prenez aucun risque et censurez sans faiblesse ce type d’affirmation. Vous éviterez les embrouilles ! Méfisto 006 R&F Juin 2024 Bouillant de culture La question de Bernard Pivot : pierres qui roulent ou scarabées ? Patrick Moalic Syllogisme Mon cher Rock&Folk, compagnon de route depuis 1972, j’ai une question à poser : suite à l’(excellent) article sur Kurt, j’aimerais connaître la définition de “rock star”. Selon toi, Brian Jones, Jimi Hendrix, Jim Morrison, Janis Joplin, Kurt Cobain, Amy Winehouse sont des rock stars mortes à 27 ans… ok, mais alors Paul McCartney, John Lennon, Mick Jagger, Bruce Springsteen, Bob Dylan, Neil Young, Eric Clapton pour ne citer que quelques-uns des plus connus, que sont-ils ? De simples businessmen, des songwriters, de vulgaires chanteurs… ? Voilà, si tu pouvais éclairer ma lanterne, je me coucherais ce soir un peu moins idiot. Alain Gilet si radicalement opposée. Mais ainsi en va-t-il du rock, un continuum organisé comme une succession de réactions à ce qui précède ? Avec en l’occurrence ici l’ombre (“die”) et la lumière (“live”) — un astre éclairant la face cachée de l’autre — pour sceller ce récit tumultueux. Sans doute le dernier d’ailleurs. Les rock stars après ça n’en étant plus, cessant de faire les gros titres, d’être centrales ou incarnées, eu égard à cette gentrification culturelle impulsée par le cyber. De sorte que si on reste suspendu à l’aura de Kurt et Liam trente ans plus tard, toute considération nostalgique mise à part, c’est que c’est quelque chose qu’on ne peut, aujourd’hui, pas réfuter. Syd Diderou Helvètes underground Rectifions la réponse de Mr Terrasson sur les Aiglons, “des Français que j’aimais bien”, ben voyons ! Dans votre incontournable question de la rubrique Mes Disques A Moi, “Paul ou Mick ?”, il serait de bon ton de mettre quelques vérifications aux réponses données, sous peine de désinformation. Ce qui pourrait entraîner des répercussions sur l’IA qui ne serait plus alors en mesure de savoir qui de la stalactite ou de la stalagmite descend ou monte. Dans la réponse, si Ferre Grignard est bien belge, Les Aiglons, eux, n’ont rien de français. En effet, il s’agit bien d’un groupe suisse fondé à Lausanne, dont l’instrumental “Stalactite” est un succès qui va les rendre célèbres, leur apportant une heure de gloire internationale. Et ils sont reconnus localement comme les premiers rockers helvétiques ! Gérald le Lausannois L’énigme de la page 110 Dans votre numéro 681 de mai 2024, je constate l’absence de la page 110. Vous ne nous vendez donc, en réalité que 115 pages au prix de 116 ! Néanmoins, je ne divulguerais pas cette arnaque si vous publiez un article, minimum quatre pages chacun, signé Stan Cuesta ou Patrick Eudeline, sur les géniaux Procol Harum et Gérard Manset. A bon entendeur. Joël Ferrieu De l’art d’être rock star “Kurt Cobain, ange déchu le 5 avril 1994, restera la dernière rock star”, écriviezvous dans l’édito du mois dernier. Je résume. Mais à la relire, la sentence semble incomplète. Aussi (permettezmoi de me la péter cinq secondes pour vous faire cette suggestion extravagante), n’aurait-il pas fallu écrire plutôt “Kurt Cobain, ange déchu le 5 avril 1994, restera la dernière rock star, la dernière… jusqu’à l’apparition de Liam Gallagher le 10 avril (cf. “Supersonic”) de cette même année” ? L’apparition de Liam n’étant de ce point de vue pas dénuée de pédagogie tant, par contraste avec Kurt, il nous a montré que le fait d’être une rock star impliquait déjà d’y consentir et de jouer le jeu. A bien des égards, Liam demeure ainsi le reflet contradictoire de Kurt. Un antagonisme. Certes éclairant. Liam ayant toujours prétendu être “fait pour ça”. Tandis que Kurt ne l’était pas. Kurt chantant l’atrabilaire “I hate myself and I wanna die”, Liam l’antidoté “I just want to live, I don’t want to die” (cf. “Live Forever”). Ainsi, comment ne pas être interpelés de ce fait à l’idée que des gars comme les Lemon Twigs, qui eux-mêmes ont longtemps vécu dans un sanctuaire Beatles, comme Liam, puissent s’être à un moment arrêtés pour se dire, comme ils le révèlent quelques pages plus loin, “est-ce que ça va parler à quelqu’un qui n’est pas dans ma propre tête ?”. Puisqu’en le lisant, on se dit que ça, c’est précisément quelque chose qui n’est sans doute jamais arrivé à Liam, si c’est lui qu’on a toujours à l’esprit. Et pour cause. Quand la béance entre ce que Kurt avait en tête et ce qu’il vivait semblait pour ce dernier insurmontable, Liam, lui, apparemment imperturbable, donnait l’impression de traverser, sans s’arrêter, l’existence comme dans une transe immersive, un ego-trip hyperbolique, une hypnose, traversé de visions si transcendantes et épatantes, et si souvent répétées, qu’il semblait les avoir intériorisées et être finalement devenu ce qu’il projetait, s’entichant de ce rôle qu’il avait en tête, voilà, se hâtant de se confondre avec cette image, cette version de lui-même avantageuse et de vaquer activement à sa métamorphose. Fascinant de constater ainsi comment Kurt et Liam, les deux dernières rock stars mondiales, et têtes de gondole des années 1990, ont articulé leur alternance avec un discours ayant pour trame l’estime de soi Patriiiiiick Patrick Moalic ou comment se constituer une discothèque en écrivant deux lignes tous les mois. Chapeau l’artiste. Nicolas Aubree Une autre époque Dickey Betts disparu : souvenir de “Jessica”, indicatif de “Pas De Panique” de Claude Villers sur France Inter, pépite du 33 tours “Brothers And Sisters” à la pochette magnifique. Souvenir de “Eat A Peach” que j’avais découvert en 1978, au rez-de-chaussée de Beaubourg, du temps où on pouvait choisir d’écouter des vinyles au casque. Une autre époque dont, à juste titre, Chris Robinson dans Rock&Folk d’avril souligne qu’elle ne revêt “plus la même importance autour des artistes ou des groupes rock”. Dominique Dadaïsme L’histoire de la fable de la grenouille et du dictateur est très intéressante, la mésaventure du musicien Jean-Yves Labat de Rossi en Ouganda et sa rencontre avec le dictateur Idi Amin Dada feraient un excellent sujet pour un film de cinéma. Bien qu’il y ait eu un précédent en 2006 avec “Le Dernier Roi D’Ecosse” de Kevin Macdonald, même si l’acteur Forest Whitaker malgré tout son immense talent et une excellente prestation, n’était pas assez terrifiant pour incarner le très flippant Idi Amin Dada. Quant au personnage du docteur Nicholas Garrigan, interprété par le très bon James McAvoy, il était, et c’est bien dommage, un personnage fictif créé par l’écrivain Giles Foden. Jacky Salamo Ecrivez à Rock&Folk, 12 rue Mozart, 92587 Clichy cedex ou par courriel à rock&folk@ editions-lariviere.com Chaque publié reçoit un CD 008 R&F Juin 2024 MICHKA ASSAYAS Le journaliste publiera “Very Good Woodstock Trip” pour les cinquante-cinq ans du mythique festival. Issu de sa série d’été sur France Inter et incluant des textes inédits, l’ouvrage sera en librairie le 14 juin. BEATLES La version originale du documentaire “Let It Be” de Michael Lindsay-Hogg, publiée en 1970, a été entièrement restaurée par les équipes de Peter Jackson. Elle est visible pour la première fois depuis plus de cinquante ans sur Disney +. BELLE AND SEBASTIAN Après leur désistement en 2023 pour des raisons de santé, les Britanniques prennent la route à travers nos régions. Ils seront le 11 juin à Lyon à l’Epicerie Moderne, et le 12 à Nîmes au Paloma. JOHNNY CASH Le guitariste Marty Stuart, le regretté bassiste Dave Roe, le batteur Peter Abbott, Dan Auerbach (Black Keys) et bien d’autres ont prêté mainforte à l’élaboration de l’album posthume de l’homme en noir. “Songwriter”, onze morceaux, conçu à partir de reliquats enregistrés en 1993 supervisé par John Carter Cash qui coproduit le disque avec David Ferguson, verra le jour le 28 juin prochain. DEEP PURPLE Avant la sortie de “=1” produit par Bob Erzin et annoncée pour le 19 juillet, les légendes du hard rock joueront dans l’Hexagone en juin, à Toulouse au Zénith le 17, à Nancy au Heavy Week End le 22, et à Tilloloy au Festival Retro C Trop le 29. DIRTY THREE En stand-by depuis 2012, le groupe formé à Melbourne par Warren Ellis, Mick Turner et Jim White reprend du service le 28 juin avec le très instrumental “Love Changes Everything”. ELYSIAN FIELDS Le duo new-yorkais composé de Jennifer Charles et Oren Bloedow, avec l’assistance de Matthieu Lopez et Olivier Perez, revient avec un treizième opus, “What The Thunder Said”, déjà disponible. MAXWELL FARRINGTON & LE SUPERHOMARD Les deux comparses joueront leur dernier-né, “Please, Wait…”, à La Maroquinerie à Paris le 30 mai. HEAVY WEEK-END Les 21, 22 et 23 juin, six groupes emblématiques de la scène hard rock et heavy metal : Deep Purple, Judas Priest, Alice Cooper, Megadeth, Extreme et Scorpions se succèderont sur la scène du Nancy Open-Air. ELTON JOHN Christophe Delbrouck relate la vie et la carrière artistique de l’excentrique icône pop dans le livre “Sir Elton – L’Odysée Du Petit Reginald Dwight”. 600 pages aux éditions Erick Bonnier, il sera en vente le 6 juin. ROBERT JON & THE WRECK Les mastodontes du blues-rock sudiste s’apprêtent à dévoiler “Red Moon Rising” le 28 juin prochain, sur le label du guitariste Joe Bonamassa, Journeyman Records. MARSHALL La nouvelle version du casque Major V, offrant plus de 100 heures d’autonomie est disponible sur le site marshall.com au prix de 149 euros. Quant aux oreillettes Minor IV, elles sont proposées au prix de 129 euros. Télégrammes par Yasmine Aoudi Dirty Three Photo Mark Seliger-DR Elysian Fields Photo Daniel Boud-DR PAUL McCARTNEY & WINGS Capté en 1974 aux studios Abbey Road lors du tournage d’un documentaire, le live “One Hand Clapping”, longtemps piraté, bénéficiera enfin d’une sortie officielle en vinyle, CD et numérique. Au total vingt-sept titres, mixés par Giles Martin et Steve Orchard en Dolby Atmos, sortie le 14 juin. MEGADETH Les Californiens adeptes de heavy metal prendront d’assaut le Zénith de Paris le 19 juin prochain. WILLIE NELSON Pour son pique-nique annuel du 4 juillet prochain qui aura lieu pour la première fois dans le New Jersey au Freedom Mortgage Pavillon (Camden), le Texan toujours flanqué des siens a fait appel à Bob Dylan, Robert Plant, Alison Krauss, Mavis Staples… NOUVELLE VAGUE Le 4 juin au Trianon de Paris, le groupe français qui revisite la new wave à la sauce bossa-nova, interprétera entre autres sa dernière livraison, “Should I Stay Or Should I Go?”, parue en février dernier pour les vingt ans du projet conçu par le producteur Marc Collin et feu Olivier Libaux. ORVILLE PECK Pour annoncer sa signature sur le label Warner, l’artiste country a dévoilé le single “Cowboys Are Frequently, Secretly Fond Of Each Other” (reprise de Ned Sublette de 1981), sa première collaboration avec Willie Nelson. Il précédait la sortie en version digitale le 10 mai dernier de “Stampede, Vol 1”, qui contient des duos avec Elton John, Allison Russell, Nathaniel Rateliff… Le volume 2 suivra prochainement. POND Nick Allbrook, leader et chanteur du combo psychédélique originaire de Perth (Australie), sortira le 21 juin son dixième album. “Stung!”, qui réunira quatorze morceaux, lui a été inspiré en passant la tondeuse chez un voisin. TY SEGALL Le prolifique Californien sera à La Rochelle (La Sirène) le 21 juin et à Paris (Elysée Montmartre) le lendemain. SPARKS Le label Pale Wizard poursuit sa série hommage “50 Years Later”, consacrée au duo formé par Ron et Russell Mael, en célébrant le jubilé de “Kimono My House” (1974). Divers artistes de la scène rock mondiale ont apporté leur contribution à l’édition vinyle limitée “Kimono My House – 50 Years Later”. Déjà en vente. SPIRITUALIZED C’est au tour du sixième album “Songs In A&E”, paru en 2008, période où le leader Jason Pierce était atteint d’une double pneumonie, de jouir d’une réédition dans le cadre de son projet The Spaceman Reissue Program. Accompagnée de nouvelles illustrations, la version vinyle sera dans les bacs le 21 juin prochain. SUM 41 Les Canadiens seront en tête d’affiche de la deuxième édition du Slam Dunk Festival de Lyon qui se tiendra à la Halle Tony Garnier le 22 juin. SWIM DEEP Le quintette d’indie pop a terminé son quatrième album. Juin 2024 R&F 009 “There’s A Big Star Outside”, produit par l’Anglais Bill Ryder-Jones et renfermant dix chansons, sera en vente le 7 juin. ALAN VEGA “Insurrection”, album posthume contenant onze morceaux inédits tirés du travail solo de l’ex-Suicide, est annoncé pour le 31 mai. Jusqu’au 27 juillet, la Galerie Laurent Godin (Paris) mettra à l’honneur, à travers l’exposition Alan Vega — Cesspool Saints, le travail plastique de l’artiste, avec Jared Artaud (The Vacant Lots) en co-commissaire sous la houlette de Liz Lamere, compagne et partenaire musicale d’Alan Vega. THOM YORKE Le chanteur de Radiohead s’est chargé de la BO du film dramatique italien “Confidenza” de Daniele Luchetti. La version digitale a vu le jour le 26 avril, le CD et le vinyle sont attendus le 12 juillet. FRANK ZAPPA Un nouveau live de près de cinq heures contenant de nombreux inédits et capté le 23 juillet 1968, est annoncé. Au format coffret 3 CD, 5 LP ou en édition vinyle 2 LP “Frank Zappa & The Mothers Of Invention – Whisky A Go Go, 1968” sera disponible le 21 juin. Condoléances Steve Albini, John Barbata (batteur américain de pop et rock, The Sentinals, CSNY), Dickey Betts, Mister Cee (DJ américain), Roger Corman (cinéaste et producteur américain, “Le Masque De La Mort Rouge”), Michael Cuscuna (producteur américain de jazz), Gérald Duchemin dit Mag-ness (poète, slammeur et photographe français), Duane Eddy, El Globos (dessinateur français, visuels du Festival des Vieilles Charrues), Richard Horowitz (compositeur américain de musiques de film), Steve Kille (bassiste américain, Dead Meadow), Dege Legg (musicien, journaliste et écrivain américain de folk, delta blues, Brother Dege, Santeria, Black Bayou Construkt), Mandisa (chanteuse américaine de gospel), Jean Musy (musicien, compositeur et arrangeur français, Nino Ferrer), Graeme Naysmith (guitariste britannique, Pale Saints), Larry Page (chanteur, producteur et manager britannique, The Kinks, The Troggs…), Mike Pinder (musicien britannique, Moody Blues), Reita (musicien et bassiste japonais, The Gazette), David Sanborn (saxophoniste américain, Eric Clapton), Richard Tandy (musicien britannique, Electric Light Orchestra), Tony Tuff (chanteur jamaïcain de reggae, African Brothers), Rico Wade (producteur américain de hip-hop, Outkast), Max Werner (chanteur et batteur néerlandais de rock progressif, Kayak). Orville Peck Photo DR Au milieu de piles de livres, dont la quasiintégralité de l’exégèse proustienne, de DVD, vinylesetCDenpagaille,JayAlanskyalafaconde infatigable et dansante des exaltés. “J’aime l’idée qu’un artiste soit dépassé par ce qu’il fait.” Dépassés ? Nous ne nous souhaitons pas mieux, au milieu d’une discographiedédale fascinante, entre productions impeccables pour d’autres — Lio, Les Innocents, Jil Caplan, Marie-France etc. —, les siennes — de “Tendre Est La Nuit” (1980) à ces 167 titres, “The Pulverized Years”, patiemment assemblés sur Bandcamp (un album de huit heures, donc !) — sans oublier quatre livres, huit films, des clips, des expos photos, n’en jetez plus ! Sous différents avatars — A Reminiscent Drive, Bronzino, sEYmour, Alansk.i ou .y —, notre hôte compte parmi ces artistes contemporains aussi essentiels que discrets qui, pour notre bonheur, ont le sens tragique du grandiose. A la sortie de la messe ROCK&FOLK : Que ne trouve-t-on pas dans votre discothèque ? Jay Alansky : Rien ! Si, la chanson française peut-être. Ça ne correspond pas à ma sensibilité, même si je peux reconnaître une chanson bien écrite. Il y a bien “La Mémoire Et La Mer” de Léo Ferré,unechansondeJacquesBrel,mais je n’aime pas du tout Georges Brassens. Les émotions ne me touchent pas. C’est lié à la France, à une certaine couleur du ciel, la ville, Paris, etc. Quand j’entends Barbara, j’ai juste envie de me flinguer. Mon environnement musical depuis que j’ai cinq ou six ans, c’est le rock’n’roll. J’étais enfant quand les Beatles ont sorti leur premier single. Le rock’n’roll a tout irrigué. J’écoutais ça à la radio, m’endormais avec mon transistor. Le jour de sa sortie, sur Europe 1, passe “God Only Knows” des Beach Boys. Cela m’a bouleversé ! Pareil pour “Sgt. Pepper’s…”. En plus, ça sonnait grandes ondes, j’adorais ce son. Dans mon album de 2021, “Wine And Resurrection”, j’ai essayé de retrouver ce son lo-fi, qui viendrait d’une radio lointaine. On passe devant un garage, un type répare sa voiture et on entend une chanson, comme ça, au loin. R&F : Quelle musique écoutait-on chez vous ? Jay Alansky : Mon père était éditeur de musique, il n’aimait pas du tout le rock, mais il avait une boutique d’instruments de musique rue Vivienne, et un petit label de disques à compte d’auteur. Un jour, il m’a rapporté des disques de Donovan qu’on lui avait livrés par erreur. J’ai adoré, “Wear Your Love Like Heaven”, “Mellow Yellow”, tout ça. Un autre jour, c’était Nancy Sinatra, The Association ou Eddie Cochran, dont j’étais fan. Ce sont d’abord les sixties qui m’ont marqué, Elvis est venu plus tard, avec Buddy Holly, Gene Vincent. Avec un copain qui adorait Gene, à la sortie de la messe, on se prêtait des disques. Moi, j’enachetaistrèspeu,n’ayantpasd’argent de poche. Enfin, j’avais un système : je piquais tous les jours de l’argent dans le porte-monnaie de ma mère et dans la pochedemonpère.Alafindelasemaine, je me retrouvais avec quinze ou vingt francs, et là j’achetais immédiatement un disque chez Gibert. Il y a eu, comme ça, “A Quick One” des Who, mon premier disque acheté. Je suis resté un obsédé. J’achetais souvent sur les pochettes. A ce propos,ilyaeuunerencontreimportante, danslesannéesquatre-vingt,c’estEyeless In Gaza, acheté à cause de la pochette et de“TheEyesOfBeautifulLosers”.“CaughtInFlux”étaitaussienvoûtant que du This Mortal Coil — qui, d’ailleurs, reprenaient sur l’album “It’ll End In Tears”, “Holocaust” d’Alex Chilton dont j’adore “Thirteen”. Là encore, un hommage parfait et tremblant au rock’n’roll et à ses illusions : “Rock And Roll Is Here To Stay”. Quand on sait qu’Eyeless In Gaza est le titre d’un livre d’Aldous Huxley qui a écrit “The Doors Of Perception” dontlegroupes’estinspirépourtrouverunnom!JepenseaussiàLeonard Cohen, qui a écrit “The Beautiful Losers” dont je me suis inspiré. Bref, j’aime cette idée de constellations qui se forment sans cesse. R&F : Quand, dans les années soixante-dix, alors élève du lycée Voltaire, vous sortez “Season”, on perçoit déjà l’influence prégnante de la folk et d’une pop ouvragée héritée des sixties. Jay Alansky : Oui, à l’époque, ce sont les Beatles, les Beach Boys, Qui, aujourd’hui, pour parler avec le même enchantement des Beatles, de Paddy McAloon ou de Cloud rap ? Rien n’est perdu, il se trouve encore des enthousiastes, go-betweens polymaniaques, dont Jay Alansky, fils spirituel de Francis Scott Fitzgerald, perdu dans une époque qui lui doit énormément. Jay Alansky Recueilli par Alexandre Breton - Photos Muriel Delepont 010 R&F Juin 2024 Mes disques à moi “ça sonnait grandes ondes, j’adorais” Juin 2024 R&F 011 012 R&F Juin 2024 Crosby, Stills, Nash & Young, Simon And Garfunkel, une espèce de folk où la mélodie est fondamentale. Lorsque, enfant, j’entends les mélodies de Burt Bacharach — peut-être le plus grand mélodiste de tous les temps — comme “What’s New Pussycat?”, chantée par Tom Jones, je suis complètement bouleversé. Dans les années soixante, les mélodies et les harmonies étaient très complexes et ça faisait des succès énormes. Dans les années quatrevingt, le groupe qui faisait le lien avec Bacharach, dans la démarche harmonique, l’attachement aux mélodies complexes et en même temps immédiates, c’étaitPrefabSprout.Jepensenotamment à “From Langley Park To Memphis”, de 1988. Enorme influence de Paddy McAloon. Mais, aujourd’hui, le hip-hop et la musique électronique, que j’aime beaucoup par ailleurs ont appauvri harmoniquement le spectre. La simplicité et l’efficacité priment. Sous acide R&F : Pour autant, dès la fin des années quatre-vingt-dix, vous vous orientez vers l’electronica avec votre projet A Reminiscent Drive. Jay Alansky : Oui, j’en avais marre de la pop, du rock, des chansons. La techno, l’ambient arrivaient. Il y avait déjà eu Brian Eno ou le rock allemand, en précurseurs. Kraftwerk fut une découverte incroyable, surtout “Trans Europa Express”. Donc, fin quatre-vingt-dix, c’était assez logique d’explorer cette musique à ma manière : unemusiqueélectroniqueàlamain,sans ordinateur. J’adorais “Endtroducing.....” de DJ Shadow, uniquement fait de samples, incroyablement riche harmoniquement et très lyrique. Ou le premier Aphex Twin. En fait, le fil rouge, pour moi, c’est le lyrisme, une espèce d’emphase. Quelque chose qui soulève, qui me rappelle Phil Spector, le maître absolu, avec ses cathédrales sonores, ses symphonies de poche, comme il disait. R&F : Le glam rock, aussi, vous a marqué. Jay Alansky : Le glam rock, bien sûr ! Adolescent, j’ai entendu “Life On Mars” de David Bowie à sa sortie, ou “Starman”, à Londres, c’était énorme. Mais avant ça, il y avait le Velvet Underground, découvert avec le double album aux bouteilles de Coca. Un choc esthétique, le contraire du rhythm’n’blues dont les groupes anglais que j’écoutais étaient fous. Le Velvet, c’était trouble, étrange. Comme avec Bob Dylan dans “Like A Rolling Stone”. Le son, l’urgence, le lyrisme, et puis les voix, de Dylan, de Bowie, de Lou Reed ! Et Marc Bolan ! T. Rex, j’ai aimé dès 1968, avec “Debora”. Puis, l’album de soixante-dix, “T.Rex”, génial. De cette période, il y a aussi Sparks, qui ont traduit en anglais les chansons que j’avais écrites pour Lio. Il y a un autre artiste que j’aimais beaucoup, c’est Jobriath. “Creatures Of The Streets”, son deuxième album de 1974, complètement décrié comme du sous-Bowie, contient des chansons folles. Ce type à la voix nasillarde avait des harmonies incroyables. New-yorkais, gay, flamboyant, proustien même, au sens où c’est un malade de réminiscences. Le glam a été très déterminant, jusque dans la façon très maniérée de chanter qui venait de Lou Reed. Mon album le plus électrique, “Our Secret Place”, de 1994, en est très marqué. R&F : Que gardez-vous des années soixante ? Jay Alansky : Les Pretty Things, sublimes, Procol Harum, groupe spectral avec des textes étranges, “You skip the light, Fandango” dans “A Whiter Shade Of Pale”, ça ouvrait plein de portes ! Comme les collages à la Burroughs chez Bowie ou ces visions qui se télescopent chez Bolan, ces chansons mystérieuses du John Cale de “Paris 1919”. Et les Kinks ! Mon premier EP, c’était “Dead End Street”. Les Doors aussi ont été très importants. Leur psychédélisme était enraciné dans le blues, la solitude et la désolation de Los Angeles, avec des textes bourrés de secrets et d’obsessions qu’on décryptait inlassablement. Morrison était vraiment transgressif, une sorte de théâtre de la cruauté à lui seul, la connexion sombre avec le Velvet. Tout en cuir, à la Gene Vincent, l’outrage, l’excès, à l’instar des Stooges, que j’ai également adorés, “1969”, “Search And Destroy”. Sous acide à 17 ans, c’était quelque chose ! Il y avait aussi Love avec “Forever Changes”, troisième album totalement baroque, typique de cet affranchissement des formules instrumentales classiques du rock, tout ça initié par les Beatles bien sûr. Tout à coup, tout était possible, les cordes, les clavecins, les trompettes. Là encore, un disque drogué, lumineux et visionnaire. Bon, je n’ai pas encore parlé des Beatles ! R&F : Nous y venions ! Jay Alansky : J’ai une théorie en trois phases : la révélation, le mystère, la présence. La révélation, c’est ce qui se passe quand on découvre un groupe comme ça. Dylan roule sur une autoroute en Amérique, il entend “I Want To Hold Your Hand”, il s’arrête net ! Le mystère : comment est-il possible qu’ils aient fait ça en 1964 et, trois ans plus tard, “Strawberry Fields Forever” ? Aujourd’hui, les gens mettent dix ans à faire dix morceaux ! Enfin, la présence. On écoute un remastering et on est encore scié par la présence des voix. Les Beatles ont la grâce jusqu’à “Abbey Road”, dont la face B est pure luminosité. Les Rolling Stones ne rivalisent pas, même si j’aime beaucoup un album mésestimé comme “Their Satanic Majesties Request”. MES DISQUES A MOI Jay Alansky “Un disque drogué, lumineux et visionnaire” Juin 2024 R&F 013 Dans ce schéma ternaire rentre un autre artiste que j’ai absolument adoré, c’est Todd Rundgren. D’abord son double, “Something/Anything”. Après cet album fantastique où il enregistre tout seul, il sort “A Wizard, A True Star”, en 1973, et là, c’est fou : une collision entre les pures harmonies à la Beach Boys, Broadway, Bacharach, Zappa et, en même temps, une violence, un truc très urbain, post-psychédélique, une électricité, une emphase aussi dont je ne me suis toujours pas remis ! Pour revenir sur la grâce, il y a aussi “Off The Wall” de Michael Jackson ou cet album de Joni Mitchell que Prince aimait beaucoup, “The Hissing Of Summer Lawns” de 1975. Candeur et gravité R&F : Votre album de 1993, “Honey On A Razor Blade” réunit tous ces aspects, l’emphase et le lyrisme. Jay Alansky : Oui. Après, il y a chez Todd Rundgren une incandescence, un rapport à l’enfance, aux souvenirs massacrés par la violence du monde auquel je suis très sensible. Comme chez les Beach Boys ou Syd Barrett. Je me souviens du premier album solo de Barrett, écouté en pleine descente d’acide. Il s’arrête, reprend, n’arrive plus à chanter, c’est le chaos. Je passais de ça à “Sunflower” des Beach Boys, album magnifique, et me souviens avoir été tiraillé entre le désordre mental de Barrett et la plénitude harmonique presque effrayante des Beach Boys sur “Cool Water” ou “Forever”. On a toujours envie de pleurer. Sinon, en matière de lyrisme, je voulais ajouter un groupe méconnu, The Blue Nile. Un son clinique, presque froid, avec la voix de Paul Buchanan, brisée, au bord du malheur, même si la rédemption n’est jamais loin. Comme chez Nirvana, dont on pressent quelque chose de complètement excessif et très lyrique, cette façon de démarrer doucement et d’exploser, cette violence, ce mal-être. R&F : En 1980, après l’explosion punk et l’arrivée de la vague cold, vous sortez le fitzgeraldien “Tendre Est La Nuit”, plus proche de Michel Berger que du rock qui vous a nourri. Jay Alansky : Oui, c’était ma façon de retrouver une fraîcheur. Au début du punk, j’ai adoré Suicide, Richard Hell, les Buzzcocks, “Spiral Scratch”, leur premier EP avec “Boredom”, “Orgasm Addict”. J’ai acheté les Sex Pistols, j’ai aimé tout ça mais, après, j’ai senti un essoufflement. Le disco, dont j’étais fan, renouait avec les musiques noires de Smokey Robinson, Curtis Mayfield. Ça me parlait presque plus que la new wave, même si j’ai acheté “Love Will Tear Us Apart” à sa sortie. J’aimais cette profondeur cachée derrière une apparente légèreté. “Night Fever” est un hymne incroyable ! Je commençais alors à travailler avec Lio sur “Le Banana Split”. Berger, avec “Dancing Disco”, écrit pour France Gall, photographiait bien mieux l’époque. “Viens, Je T’Emmène”, c’est simple, magique, il y a une foi incroyable. Pour revenir à Fitzgerald, je pense à Eric Carmen, mort récemment, qui avait écrit une chanson extraordinaire, “Boats Against The Current”, où il reprend cette idée que nous sommes comme des bateaux sans cesse rejetés par les courants vers notre passé. C’est vraiment quelqu’un qui a œuvré pour le rock’n’roll. Comme Karl Wailinger, créateur de World Party et anciendesWaterboys.Cesgens-làonten commun ce rêve de fabriquer la chanson parfaite, et cela me touche beaucoup. Comme chez les Flaming Lips. “The Soft Bulletin”, de 1999, est le dernier grand album que j’ai écouté. Ce n’est pas toujours très juste, mais ils mettent toutes leurs ressources mélodiques dans cet album, fantastique. Même chose avec “In The Aeroplane Over The Sea”, de Neutral Milk Hotel, sorti en 1998, un album fou. Deux albums pleins de foi, de lumière, d’une intensité presque insupportable, de candeur et de gravité. Même si la mort rôde toujours. R&F : Qu’est-ce que le rock’n’roll pour vous ? Jay Alansky : Une vie fantasmée, comme le dit Lou Reed dans “Berlin”, “Living my life by proxy”. H Mixtape “Do Anything” Bandcamp https://jay-h-alanski.bandcamp.com 014 R&F Juin 2024
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