LIRE - MAGAZINE LITTÉRAIRE n°541 - Page 1 - 541 Aimée et partagée par des millions de lecteurs, l’œuvre envoûtante de Richard Adams fait partie de ces livres mythiques, une épopée sombre et violente, néanmoins parcourue d’espoir et de poésie. Vous tremblerez face aux dangers. Vous craindrez la nuit. Et, par-dessus tout, vous ressentirez l’irrépressible désir de savoir ce qui va se passer. Maîtrisée avec brio par l’auteur primé James Sturm au scénario et sublimée par les illustrations de Joe Sutphin, cette bande dessinée spectaculaire a reçu le Prix Eisner de la meilleure adaptation 2024. Watership Down est un récit intemporel de survie, d’espoir, de courage et d’amitié qui a fasciné plus de cinquante millions de lecteurs à travers le monde depuis plus d’un demi-siècle. Premier roman graphique adapté de Watership Down, le plus “grand classique et best-seller de tous les temps”, de Richard Adams. Watership Down, d’après le roman de Richard Adams. Scénario de James Sturm. Illustrations de Joe Sutphin. Lettré à la main par Léopold Prudon. Reliure cartonnée avec dorure à chaud. 18 x 25,5 cm. 368 pages en couleur. LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 • 3 REBECCA MANSELL/ÉDITIONS DU SOUS-SOL - ÉRIC GARAULT POUR LIRE MAGAZINE - PEXELS - STÉPHANIE LACOMBE POUR LIRE MAGAZINE SOMMAIRE CRÉDIT COUVERTURE : CLÉMENT BARBÉ Ce numéro comporte un encart bon de commande Lire Magazine diffusé sur l’ensemble des abonnés France. 4 L’ÉDITO Baptiste Liger 6 LE GRAND ENTRETIEN David Grann 13 L’ACTUALITÉ 36 L’UNIVERS D’UNE ÉCRIVAINE Susie Morgenstern 40 LE DOSSIER Écrire la mer 54 LE PORTRAIT Olivier Bal 58 L’ENQUÊTE Des nouvelles à l’écran 67 LE CAHIER CRITIQUE 68 l Littérature française 74 l Littérature étrangère 80 l Romance/Science-fiction/Polars 85 l Jeunesse/Bande dessinée/Manga 88 l Classiques/Études littéraires/Poésie 94 l Essais/Documents LES EXTRAITS 64 l La Forme et la couleur des sons de Ben Shattuck 82 l Mirage de Camilla Läckberg et Henrik Fexeus 90 l Cioran ou le gai désespoir d’Anca Visdei 102 LA LANGUE FRANÇAISE 114 LES LIVRES DE MA VIE Arthur H LA CHRONIQUE DE 39 Gérard Oberlé Livres méconnus ou oubliés 66 Bernard Lehut Le livre à lire 73 Patricia Reznikov Dans les piles 93 Mazarine M. Pingeot Entre les lignes 101 Pascal Ory Mot de tête 109 Éric-Emmanuel Schmitt L’atelier d’écriture 112 Philippe Delerm Le sens de la formule ABONNEZ-VOUS EN 1 CLIC SUR WWW.LIRE.FR OU EN SCANNANT CE QR CODE POUR DÉCOUVRIR TOUTES NOS OFFRES! N° 541 - JUIN 2025 6 LE GRAND ENTRETIEN DAVID GRANN 36 L’UNIVERS D’UNE ÉCRIVAINE SUSIE MORGENSTERN 40 LE DOSSIER ÉCRIRE LA MER 54 LE PORTRAIT OLIVIER BAL Salon du livre de Saint-Germaindes-Prés: et de deux ! Attention, à ne pas confondre avec Paris Plages! En effet, les 28 et 29 juin, Carole Fernandez (qui supervise, entre autres activités, le Lundi des écrivains aux Deux Magots) vous propose de fureter à la 2e édition du Salon du livre de Saint-Germain-des-Prés. Sous-titrée « Des pages avant la plage », cette manifestation (située sur la fameuse place du 6e arrondissement de Paris) vous proposera une série de rencontres (animées entre autres par Baptiste Liger), une grande dictée et, évidemment, une séance de dédicaces. Parmi les auteurs conviés, on retiendra notamment Kamel Daoud, Camille Laurens, David Foenkinos, Valérie Trierweiler, Bernard Werber, Irène Frain, Grégoire Delacourt… Un peu de farniente sur les lieux, avant l’effervescence de la rentrée littéraire! salondulivredesaintgermaindespres.fr RÉDACTION Directeurdelarédaction BaptisteLiger Rédacteurenchef AlexisBrocas Directionartistique/Maquette IsabelleGelbwachs Secrétariatderédaction MeriemDjebli,avecSébastienCordin Iconographie JanickBlanchard,CyrilleDerouineau Rédactrice MargauxMorasso Chroniqueurs PhilippeDelerm,BernardLehut,GérardOberlé, PascalOry,MazarineM.Pingeot,PatriciaReznikov, Éric-EmmanuelSchmitt. Ontcollaboréàcenuméro Fabriced’Almeida,FrédériqueAnne,HubertArtus, SimonBentolila,SolangeBied-Charreton,Boll,PatriceBollon, EugénieBourlet,OlivierCariguel, MathieuCharrier, ean-PierreColignon,FabriceColin, LéonardDesbrières, BrunoDewaele,SophieDiMalta,MarcusDupont-Besnard, Nicolasd’Estienned’Orves,AntoineFaure,LaëtitiaFavro, IlanFerry,FabriceGaignault,AmbreGantner, HélèneGestern,AudeGiger,MarieJouvin,ÉtienneKern, AntoineLeiris,ÉricLibiot,MarylinMaeso,GladysMarivat, GabrielleMartin,JeanMontenot,MariannePayot, JacquesPerry-Salkow,DominiquePoncet,Hubert Prolongeau,BernardQuiriny,ChristopheRioux, JulietteSavard,SergeSanchez. Publicitélittéraire,partenariatsetdéveloppement AstridPourbaix:0147000323 IsabelleMarnier:0147001177 publicite@lire.fr Photogravure/Impression MauryImprimeurS.AMalesherbes PublicationmensuelleéditéeparEMC2SAS. Siègesocial:43,avenuedu11-Novembre, 94210Saint-Maur-des-Fossés N°Commissionparitaire:0625K85621 Dépôtlégal:moisencours ISSNn°3038-3900 SecondClassPostagePaid AtLongIslandCityN.Y. Régiepublicitaire Mediaobs:0144889779 Directricegénérale:CorinneRougé Directricecommerciale:SandrineKirchthaler(8922) Ventesaunuméro:0488151241 Diffusion:MLP SERVICEABONNEMENTS ServiceAbonnementsLireMagazine 20,rueRouget-de-Lisle, 92130IssylesMoulineaux. Boutiqueabonnement https://abonnements.lire.fr Courriel:abonnements@lire.fr-Tél.:0179921186 Tarifd’abonnement 1an,10numéros,55€(Francemétropolitaine) AUDREY SOVIGNET Imprimé sur du papier certifié PEFC, 100 % fabriqué en Autriche avec 15 % de fibres recyclées. Le Ptot est de 0,006 kg/tonne. LireMagazinesuriPad! Nouvelle liseuse pour lire votre magazine en ligne : lire.fr/pages/liseuse. L’application Lire Magazine est disponible sur l’App Store et sur Play Store. 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Tour à tour synonyme de voyage, d’ailleurs, de nouveau départ, d’effroi, de mort ou métaphore de la mère, l’élément aquatique semble une source inépuisable de mots, quelles que soient les formes littéraires choisies – roman, théâtre, récit, Mémoires, poésie ou bien encore nouvelle. Justement, la forme courte peut se révéler une merveilleuse source d’inspiration pour le septième art. À l’occasion de la sortie en salles de l’admirable Life of Chuck tiré d’un petit bijou de Stephen King, nous sommes revenus sur quelques classiques du cinéma (ou des séries télé) inspirés par de brèves narrations. Enfin, au sommaire de cette édition, il sera question de La Meute. Attention, pas l’enquête sur LFI qui fait sensation en librairie (et sur laquelle tout a déjà été dit), mais le thriller homonyme d’Olivier Bal sorti en format poche au même moment (ainsi que son nouveau roman, l’épatant Malaven)! Un hasard qui méritait bien un clin d’œil, avec un portrait de cet écrivain fan de jeux vidéo. Pour revenir à la mer, une partie d’Endless Ocean Luminous sur Switch, entre deux chapitres de L’Île au trésor? n ÉDITO DE BAPTISTE LIGER Sociétééditrice EMC2 SAS au capital de 499400 euros Siègesocial 43, avenue du 11-Novembre, 94210 Saint-Maur-des-Fossés Tél.: 0147004949 - RCS 832332399 Créteil Président/Directeurdelapublication Jean-Jacques Augier Directeur Stéphane Chabenat pour Berrynvest S.A.S Adjointe Sophie Guerouazel Livre Livre & de la & de la BD BD Festival Festival éme éme Plus de 120 auteurs et dessinateurs Evelyne DRESS Cécile CHABAUD DOUCHKA Danièle GILBERT Grâce de CAPITANI SOUHILA Jacques PRADEL Gilles LECLAIR Gilbert BORDES Jean-François PRE Marc GEIGER Claude CANCES Emmanuel PIERRAT Laurent MALOT Fabrice PAPILLON Frédéric PLOQUIN Bernard SAUVATOlivier KOURILSKY Jean Christophe PORTES ... du du Rencontres et dédicaces Conférences -Interviews Grandes dictées Ateliers Mangas Speed-Editing Prix littéraires Caricaturiste Micro-Folies Programme Programme Parrain : Olivier NOREK Parrain : Olivier NOREK Invité d’honneur : Alexandre jardin Invité d’honneur : Alexandre jardin En partenariat avec salondulivreidf@gmail.com Entrée libre | Parking assuré 14 & 15 juin 2025 6 • LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 MONFOURNY/LEEXTRA VIA OPALE.PHOTO D avid Grann a réussi la fusion de la littérature et du journalisme. David Grann a écrit, avec Les Naufragés du Wager, La Cité perdue de Z ou La Note américaine, des livres où tout est vrai, et qui se lisent néanmoins comme de formidables romans d’aventures (pour les deux premiers) ou comme une sidérante enquête criminelle (pour le troisième). David Grann a aussi connu la gloire d’être adapté au cinéma par James Gray et Martin Scorsese. Et, bien qu’il soit devenu une figure célébrée des lettres américaines, David Grann reste extrêmement accessible et parle de ses sujets avec le même enthousiasme contagieux que dans ses livres. Ajoutons qu’il ne joue pas les baroudeurs (même si ses enquêtes l’ont conduit, entre autres, au cœur de l’Amazonie), qu’il plaisante volontiers sur lui-même, et vous comprendrez la joie que l’on éprouve à s’entretenir avec lui, même si c’est à distance, et en anglais. Il était une fois dans les Amériques, son dernier livre paru en France, rassemble, paginées tête-bêche, deux enquêtes jadis discrètement parues chez Allia et l’un de ses textes les plus célèbres. Dans Chronique d’un meurtre annoncé, Grann s’intéresse à Rodrigo Rosenberg, avocat d’affaire guatémaltèque qui prédit avec raison son propre assassinat. Dans The Yankee Comandante, il expose le destin de William Alexander Morgan, jeune rebelle sans cause de l’Ohio qui partit soutenir la révolution cubaine bien avant qu’elle ne vire marxiste, et finit fusillé pour trahison. Dans La Cité perdue de Z, il retrace les aventures romanesques et « J’essaie toujours de me mettre au service de l’histoire » néanmoins authentiques du Britannique Percy Fawcett, archétype de l’explorateur victorien, qui consacra sa vie à chercher les traces d’une civilisation perdue en Amazonie et disparut corps et biens dans la jungle. Trois textes sur trois avatars de Quichotte inventés par la réalité… Le tout, pour Grann, est d’enquêter jusqu’à ramener ces personnages à hauteur humaine, afin de les montrer dans leur grandeur comme dans leurs ridicules, en laissant au lecteur le soin de juger. Il utilise pour cela tous les outils du journalisme, et tout le répertoire de la littérature – de là le titre garciamarquézien de la première enquête, de là les références à Hemingway dans la deuxième ou à Conan Doyle dans la troisième. De là, aussi, le beau travail d’écriture pour donner à chacune de ces histoires la forme et la structure qu’elle réclamait. Qu’il s’agisse d’enquêter dans tous les sens ou de mettre en prose ses découvertes, David Grann manifeste la même touchante dévotion pour son sujet, qui se traduit à la fois en rigueur et en passion. Faut-il s’étonner qu’il ait tant de succès? n IL ÉTAIT UNE FOIS DANS LES AMÉRIQUES, TROIS ENQUÊTES INVENTÉES PAR LA RÉALITÉ DAVID GRANN HHHHH ILÉTAITUNEFOISDANSLESAMÉRIQUES. CHRONIQUED’UNMEURTREANNONCÉ, THEYANKEECOMANDANTE, LACITÉPERDUEDEZ DAVID GRANN TRADUITS DE L’ANGLAIS (ÉTATS-UNIS) PAR VALERIA COSTA-KOSTRITSKY, DAMIEN AUBEL ET MARIE-HÉLÈNE SABARD, 496 P., SOUS-SOL, 24,90 € EXTRAIT lll LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 • 7 LE GRAND ENTRETIEN PAR ALEXIS BROCAS L es trois histoires vraies d’Il était une fois dans les Amériques ont un point commun: toutes parlent d’un héros solitaire – Rosenberg le chevalier blanc de la lutte anticorruption au Guatemala, l’Américain Morgan qui devint une figure de la révolution cubaine, Fawcett l’explorateur de l’Amazonie. Choisissez-vous vos enquêtes en fonction de leur personnage principal? David Grann. C’est une très bonne question – mais la réponse varie selonlesenquêtes.Parfoisl’histoireestsiintéressanteenelle-même,ou adetellesimplicationsmorales,quevouscontinuerezvosrecherches quoiqu’ilarrive.Maislesgenssontaussiessentiels,carj’essaietoujours de raconter de leur point de vue. Ceux qui ont vécu ces histoires ne doiventpasseulementêtreintéressants,ilfautaussiqu’ilsaientlaissé assez de documents, ou qu’ils soient toujours vivants et en état de donner de longs entretiens, cela pour m’approcher autant que je le peuxdeleurconscience.Leplussouvent,audépart,jenesaispresque riensureux.C’estunedesdifférencesentrelafictionetlanon-fiction: l’auteur de fiction, lui, habite la conscience de ses personnages. Au fond, nous sommes tous assez intéressants, à notre façon. Le défi, pourmoi,estdedéfinirenquoi.Parailleurs,j’écrissurdespersonnes quiseretrouventdansdessituationstrèsinhabituelles.Parlanature mêmedecescirconstances,ilstendentàêtreintéressants– parceque, s’ils ne l’étaient pas, ils ne s’y seraient pas exposés! Vous vous êtes vous-même exposé à ces circonstances, en Amazonie sur les traces de Fawcett ou sur le rivage désolé où ont échoué les naufragés du Wager… D.G. Oui, cela fait partie de ma quête pour me rapprocher de leur conscience! Bien sûr, nous sommes tous des mystères, y compris pour nous-mêmes, et nous passons toute notre vie à chercher qui nous sommes… Dès lors, l’idée que nous puissions nous représenter la conscience d’un autre est illusoire. Mais une partie de la quête consiste à essayer de se rapprocher le plus possible de la réponse à l’énigme que représente le personnage dont je vais parler. Et je suppose que, lorsqu’on essaie d’élucider l’énigme d’une personne, on se rapproche aussi de sa propre énigme. D’autant qu’il y a bien des points communs entre ces personnages et vous. Ce sont des gens obsessionnels, qui se sont assigné une mission. Et ne dites-vous pas, dans La Cité perdue de Z, que lorsque vous travaillez sur une enquête, vous vous transformez en grand obsessionnel? D.G. Je crois que toute quête d’investigation exige un certain degré d’obsession – vous poursuivez une idée qui est entrée dans votre tête, et soudain, au fil de vos recherches, vous vous retrouvez dans des situations que vous n’auriez jamais imaginées. Bien sûr, au début, je passe la plupart de mon temps dans les archives, à étudier des documents, à faire des entretiens – un travail plutôt sédentaire. Vous savez, je vis une vie très banale, mais quand je travaille sur une histoire, là, tout change, et je me mets à faire des choses qui poussent ma femme à me regarder en levant les yeux au ciel: « Mon Dieu, qu’est-ce qu’il va encore faire? » L’enquête pour La Cité perdue de Z en est à la fois le pire et le meilleur exemple: pour tous ceux qui me connaissent, l’idée que je puisse crapahuter ainsi dans la jungle amazonienneétaitfranchementcomique!Maistoutcequejeraconte dans le livre sur ce que j’ai vécu là-bas est vrai. Depuis, d’ailleurs, je déteste le camping. Je ne comprends même pas que l’on puisse aimer ça. Aimer dormir dans une tente, harcelé par les insectes? S’il existe un gène du camping, je ne suis pas né avec! 2003 Après une carrière de journaliste bien remplie, David Grann, 36 ans, est embauché au célèbre magazine The New Yorker, où il se fait remarquer, entre autres, pour son enquête sur la mort mystérieuse d’un spécialiste de Sherlock Holmes. Il s’intéressera aussi à un biologiste lancé sur la piste du calamar géant, au braqueur de banques Forrest Tucker, à un gang de suprémacistes blancs… 2009 Parution aux États-Unis de La Cité perdue de Z, version étendue d’une enquête réalisée en 2005 pour le New Yorker. Le livre sera adapté au cinéma par James Gray en 2016. 2023 Parution des Naufragés du Wager, sur une fameuse catastrophe maritime dont les survivants finirent par s’affronter devant les tribunaux. La même année sort le film de Martin Scorsese Killers of the Flower Moon, adaptation de La Note américaine, paru six ans plus tôt. BIObibliographie LE GRAND ENTRETIEN l DAVID GRANN 8 • LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 REBECCA MANSELL/ÉDITIONS DU SOUS-SOL Vos personnages ont d’autres vertus. Fawcett est un explorateur victorien typique, grâce auquel vous pouvez parler d’impérialisme, de racisme ou de spiritisme. Morgan semble le vecteur idéal pour exposer les métamorphoses de la révolution cubaine. Et l’affaire Rosenberg est au cœur de la corruption qui gangrène le Guatemala. Choisissez-vous aussi vos histoires parce qu’elles vous permettent d’évoquer un tableau plus vaste? D.G. Oui. Vous m’avez demandé tout à l’heure quel était l’élément décisif dans le choix d’une enquête: c’est souvent ce que vous venez de décrire. Il existe plein d’histoires de crime, de disparition, de suicide: si on les raconte sans les relier à quelque chose de plus grand – à la société, à la condition humaine, etc. –, elles apparaissent comme des récits gothiques. Pour moi, trouver de quoi parle vraiment l’histoire représente un défi, mais c’est aussi ce qui rend la recherche si intéressante. J’ai des amis journalistes qui couvrent la Maison-Blanche : ils vont d’une administration présidentielle à l’autre, ils connaissent les personnes utiles, ils ont à peu près tous le même répertoire avec les numéros des mêmes sources. De mon côté, quand je commence une histoire, je n’ai le numéro de personne, je ne sais pas qui appeler, ou ce que je dois lire. Et plus je creuse, plus je découvre des aspects qui me passionnent. Au-delà de l’affaire Rosenberg, Chronique d’un meurtre annoncé parle de corruption, de violence et, surtout, montre ce qui se passe quand toutes les institutions légales et civiles d’un pays s’écroulent, et quand la notion de vérité s’effondre avec elles. Un phénomène qui, semble-t-il, n’est pas propre au Guatemala… D.G. Eneffet,jepensequenoussommesentraind’expérimenterce quisepasselà-bas.AuxÉtats-Unis,nousassistonsàl’effondrement de nombreuses institutions garantes de la vérité que nous avons tendance à tenir pour acquises. Mais quand on voit ce qui se passe auGuatemala,ondécouvreàquelpointellessontfragiles.L’affaire Rosenbergaeulieuilyalongtemps[en2009],maiselleestunpeu, pour nos nations, ce que le canari en cage était autrefois pour les mineurs qui extrayaient le charbon. Pour l’histoire de Morgan, le grand sujet, c’était la révolution cubaine, et aussi cette idée que toutlemonde,alors,avaitunrêved’unesorteoud’uneautre.C’est presqueunclashentrecequirelèveduréeletdel’illusionséduisante. Quant à Fawcett, c’est celui des trois qui s’est probablement le plus fermement accroché à son idée fixe. Cette idée qu’il aurait pu exister, en Amazonie, une grande civilisation grandit en lui toute sa vie. Au départ, elle s’appuie sur des éléments tangibles – des poteries, des indices.MaisaprèslaPremièreGuerre mondiale– oùilaparticipéàlabataille delaSommeetvudesmilliersdejeunes gens fauchés par les mitrailleuses –, cetteidéefixesetransformeenquelque chose de fantastique, et il se met en quête d’un mythe. Au fond, ces trois personnages sont de grands romantiques. Ne pensez-vous pas que l’inclination au romantisme soit une donnée de base de la condition humaine? D.G. En plus d’avoir une idée romantiquedenous-mêmes,noussommesaussimodelésparleshistoires avec lesquelles nous avons grandi. Dans le cas de Morgan et de Fawcett, les histoires romantiques qui ont baigné leur jeunesse – qu’il s’agisse de films ou de romans victoriens – ont fini par prendre possession d’eux. Et, d’une façon très étrange, ils sont devenus les versions réelles de ces fictions qui étaient dans leur esprit.Etnousarrivonsàcetteintersection,quejetrouvefascinante, entre réalité et fiction: Morgan est peut-être ce qui se rapproche le plus, dans la vie, d’un personnage de Pour qui sonne le glas, de Hemingway.Ilestlaquintessenced’uncertainarchétypeaméricain, « hemingwayesque » ou « bogartien »: l’antihéros en rupture avec la société mais qui a une bonne nature et veut faire le bien. C’est une idée très romantique. D’ailleurs, les gens du New York Times ont jadis envoyé l’histoire de Morgan à Hemingway, en lui disant: vous devriez écrire ça, c’est une histoire hemingwayesque. En fait, comme Don Quichotte devenu fou à force de lire des romans de chevalerie, vos personnages ont été intoxiqués par la fiction? D.G. Oui, et de cela découlent des conséquences très étranges! Fawcett, dont le destin a été influencé par les romans victoriens, a vécu des aventures qui ont inspiré, à leur tour, d’autres romans – dont Le Monde perdu, de Conan Doyle. Au Guatemala, on voit la version la plus menaçante du phénomène, où c’est tout un système qui manufacture la réalité pour créer du pouvoir, pour miner la croyance aux faits, et pour mener à la destruction. Cet exemple nous montre ce qui se passe quand un gouvernement se met à créer des fictions au point que plus rien n’est assuré. CestroishistoiressepassentenAmériquelatineetcen’estsans doute pas un hasard: ce continent n’agit-il pas comme un acide sur les rêves et les idéaux des Occidentaux? lll «Lavieestpleine defolie,d’humour etdetragédie,c’est cequejecherche àmontrerpourfaire réagirlelecteur» The Lost City of Z (2016), adaptation par James Gray du livre de David Grann sur la quête de l’explorateur Percy Fawcett en Amazonie, où il disparut en 1925. LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 • 9 LCOZ HOLDINGS, LLC D.G. Je suis d’accord à 100 %, et la jungle amazonienne est la quintessence de cela. Comme elle était si vaste et restait inexplorée par les Occidentaux – il est important de préciser que des Indiens y vivaient et la connaissaient très bien –, on pouvait y projeter tous nos fantasmes. Quant à Cuba, c’est un lieu où les puissances occidentalesetleursservicessecretsontimportéleursconflitset,là encore,leursfantasmes:songezauxprojetsdelaCIApouréliminer Castro! De même, la situation au Guatemala est un sous-produit de ces fantasmes, qui peuvent avoir des conséquences terribles. Vos textes ont un autre point commun: vous vous y mettez en scène, mais assez peu, comme si vous teniez à garder vos distances avec le sujet. S’agit-il de toujours conserver l’histoire au premier plan? D.G. Je me vois comme un observateur extérieur: au cours de l’enquête, j’apprends des informations, et, si le seul moyen de les présenter au lecteur est d’apparaître, alors j’apparais. Je suis plus présent dans La Cité perdue de Z, parce que je voulais montrer comment le monde et l’Amazonie avaient changé depuis l’époque deFawcett,fairedesallers-retoursdupasséauprésent.Maisquand j’ai fini le manuscrit, et que je l’ai donné à un ami, il m’a dit: « C’est très bien, mais il faut que tu dises quelque chose de toi. » Alors je mesuisforcé:cen’étaitpasnatureldutout!J’essaietoujoursdeme mettre au service de l’histoire, de me rapprocher de la vérité, et si le lecteur a besoin que je sois le véhicule qui l’y amène, je serai là. Et vous n’avez jamais eu, comme tous ces aventuriers qui sont allés chercher Fawcett et mourir en Amazonie, la tentation de vous prendre vous aussi pour un explorateur? D.G. Non, ou alors seulement dans le sens où vous voudriez une version comique de Fawcett [rires]! Mais c’est intéressant parce qu’au cours de mon travail j’ai bien vu qu’il y avait une parenté entre ma quête et celle de Fawcett. Ma quête est biographique, elle est guidée par une histoire, mais elle cherche aussi à savoir si cette histoire de cité perdue était réelle ou non. Ma présence sert aussi à montrer cette parenté des quêtes. Elle vous permet aussi d’aborder les extraordinaires découvertes archéologiques qui prouvent que Fawcett avait raison de soupçonner l’existence d’une vaste civilisation en Amazonie… D.G.Oui,cesdécouvertessontincroyables!Vousm’avezdemandéun peuplustôtcequim’intéressaitdanscesenquêtes.Enfait,souvent, cequim’obsèdedansunehistoirechangeencoursderoute.Là,au départ, c’était: « Qu’est-il arrivé à Fawcett? » Puis, après quelques recherches,c’était:« Attendsunpeu,cestrouvaillesarchéologiques sontbienplusintéressantes,ellesvonttransformertoutenotrevision decequ’étaitl’Amazonieavantl’arrivéedeChristopheColomb! » Ces trois personnages aspirent à l’héroïsme, ce qui aurait pu vous exposer à la tentation de souligner leurs ridicules et de tourner leurs histoires en satires. Était-il difficile de donner un récit équilibré, quand vous voyez, par exemple, Fawcett frayer avec Madame Blavatsky, la fameuse spirite théosophe? D.G. Ah! Madame Blavatsky est quelqu’un de génial, une femme incroyable, peut-être le plus grand escroc de tous les temps. On ne peut pas inventer de tels personnages! Mais la nature humaine est si compliquée, et nous sommes tous si fragiles, si crédules, qu’il est toujours facile de se moquer des gens. Or je ne veux pas me moquer de ceux sur qui je travaille: je veux juste les comprendre! Et qui suis-je, moi, le biographe, l’investigateur, pour me montrer arrogant au point de les juger et de me rire d’eux? Je ne veux pas en faire des héros non plus. J’essaie de les montrer et de faire comprendre au lecteur pourquoi ils ont fait ce qu’ils ont fait, avec leur ridicule, leur folie… Et de le laisser faire son jugement – je mets beaucoup de foi en lui. Certes, quand vous nous montrez Fawcett ravi parce qu’il vient de recevoir la médaille qui fait de lui une sorte de héros officiel, vous ne soulignez pas le côté puéril de sa joie. Mais on le comprend très bien, et on rit! D.G. La vie est pleine de folie, d’humour et de tragédie, c’est ce que je cherche à montrer pour faire réagir le lecteur. Ce que je ne veux pas, c’est livrer des caricatures, réduire ces personnages à une seule dimension. Je les veux en trois dimensions, autant que possible, puisque c’est ainsi qu’ils étaient! Dans ma tête, je me dispute avec Fawcett tout le temps! Je me suis promené tant d’annéesavec lui qu’ilm’arrivait delui crier intérieurement dessus: « Mais pourquoi as-tu emmené ton fils aîné dans cette expédition? Il n’était pas préparé, c’était tellement insensé! Et d’abord, tu étais trop vieux pour tout ça! » Ainsi, j’ai ces conversations légèrement folles avec les gens sur lesquels j’écris. Si quelqu’un les entendait, il me prendrait probablement pour un spirite allumé. Au fond, votre travail ne peut-il pas se décrire comme des tentatives d’objectiver des figures héroïques par le journalisme? De montrer des sortes de crash-tests où la traditionnelle figure du héros entre en collision avec la réalité? D.G. Oui, et pour moi, c’est ce qui peut rendre la vérité plus complexe et intéressante que la fiction: beaucoup des histoires sur lesquelles je travaille portent sur des gens qui ont lu de la fiction et essaient de la vivre. Alors, quand j’écris ces histoires, j’essaie de rester dans le genre de fiction qu’ils lisaient et voulaient connaître dans leur vie. La Cité perdue de Z imite, en quelque sorte, les romans d’aventures victoriens. Mais ce qui est fascinant, c’est qu’il y a toujours un moment où la réalité finit par subvertir le genre. En effet, Morgan est arrivé à Cuba en croyant qu’il vivrait un roman d’aventures héroïques, et s’est retrouvé dans une fiction politique avec une forte dimension d’espionnage… D.G. Morgan est un personnage tellement intéressant! Il est le rebellesanscause!Etlemomentoùilatteintsonbutestceluidesa propredestruction,cequiestpourmoiàlafoispoétiqueettragique. «Notre besoinde mystère n’apasdisparu,maisla façon dontil se manifeste aujourd’huiestune questioncompliquée» LE GRAND ENTRETIEN l DAVID GRANN 10 • LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 Justement, n’est-ce pas leur propre mort que recherchent tous ces personnages, sans le savoir? D.G. C’est vrai. D’ailleurs, ces trois histoires se terminent tristement. Mais ces personnages sont très différents. Quand j’écris sur Morgan, je peux m’identifier facilement à lui: il incarne un archétype romantique américain avec lequel j’ai grandi. Fawcett, lui, c’est un dur de dur. Vraiment, je n’aurais pas aimé partir en expédition avec lui! Il m’aurait fait signer ce papier où il est écrit que si je ne peux pas continuer, je serai laissé derrière. Ce qui serait arrivé, puisque je l’aurais ralenti… Au fond, au-delà de vos personnages, ces histoires ont aussi toutes les qualités que l’on peut trouver dans une bonne fiction traditionnelle… D.G. Oui, elles ont tant de rebondissements, de virages imprévus. Cela me rappelle cette réflexion que livre Sherlock Holmes à Watson, où il explique que si nous pouvions soulever tous les toits pour voir ce qui se passe dessous, nous découvririons tant que cela dépasserait toutes les inventions de l’esprit humain. De telles histoires existent et, quand vous en trouvez une, elle ne vous lâche plus – parce qu’en plus d’avoir les qualités de la fiction, elles ont le pouvoir d’être vraies. À la fin de La Cité perdue de Z, vous vous apercevez que le mythe a muté et parle maintenant d’une cité souterraine, ce qui vous inspire cette réflexion: « Nous recréons des blancs sur la carte du monde. Comme si nous avions besoin de ces blancs pour y projeter nos fantasmes… » Une part des angoisses contemporaines ne vient-elle pas du fait qu’il n’existe plus de blancs sur nos cartes? D.G. Ce n’est pas seulement que tous les blancs ont été remplis, c’est aussi que tout le monde les a pris en photo et que l’on peut voir ces images instantanément! Je ne suis pas assez malin pour en conclure quelque chose sur nous. Notre besoin de mystère, de grand voyage, d’énigme à résoudre, n’a pas disparu, mais la façon dont il se manifeste aujourd’hui est une question compliquée. Je ne sais plus quel poète a dit que le romantisme est mort quand les hommes ont mis le pied sur la Lune, mais c’est vrai: on ne peut plus regarder la Lune et projeter quoi que ce soit là-haut. Quant aux explorations d’aujourd’hui, elles tendent à devenir des défis physiques extrêmes, avec une forte dimension punitive et souvent sans objet. Pour moi, les explorations arctiques en sont l’ultime exemple. Vous prenez un endroit qui n’a jamais été atteint, disons, par les Européens. Vous allez là-bas et, quand vous touchez au but, que découvrez-vous? De la glace, et un paysage où vous risquez votre vie! Mais la quête elle-même appartient à la nature humaine, et se retrouve dès les premières histoires – l’Odyssée. Bien sûr, tout est différent aujourd’hui, quand on peut avoir en deux clics une vue satellite sur le jardin du voisin… Nous parlions tout à l’heure de ces vestiges archéologiques qui prouvent que, comme Fawcett le pensait, une vaste civilisation amazonienne avait bel et bien existé avant l’arrivée des Européens. Qu’avez-vous ressenti quand vous avez vu ces vestiges et compris qu’il avait raison, mais qu’il était trop aveuglé par ses fantasmes pour le voir alors que les ruines se trouvaient sous son nez? D.G. À la fois un sentiment de pathos et de profonde tragédie. Fawcett avait rassemblé des preuves sur l’existence de cette civilisation, mais il s’imaginait des cités de pierre, alors qu’elles étaient faites de terre et de bois. Et, en effet, il a probablement marché sur leurs ruines sans s’en rendre compte! C’est encore ce moment où la réalité et le mythe se rejoignent… Pour moi, il y a là quelque chose de poignant et d’une certaine beauté. Oui, Fawcett avait raison, et oui, il ne pouvait pas le voir parce qu’il se trompait tellement par ailleurs. Mais de mon côté, quand j’ai rencontré l’archéologue Michael Heckenberger et le chef des indiens Kuikuro, et qu’ils m’ont montré ces vestiges, j’ai éprouvé un immense émerveillement. Je venais de crapahuter dans l’Amazonie en perdant bien des kilos – un excellent régime! –, et c’était incroyable de découvrir ces ruines au bout. Je me souviens d’avoir fermé les yeux pour essayer de voir ce que Fawcett avait vu à ce moment-là. Pour moi, les voir, c’était aussi essayer d’en faire l’expérience pour lui… Au fond, Fawcett peut être défini comme l’homme qui se rapproche des choses sans jamais les atteindre. Lorsqu’il découvre les Indiens, il parvient à dépasser les jugements de son temps pour apprécier la richesse de leur civilisation. Mais c’est pour aussitôt conclure, en bon victorien, qu’ils doivent avoir quelque chose d’européen! D.G. Oui,ilnesedélivrejamaistoutàfaitdelamaladieduracisme. SesrencontresaveclesIndiensleconduisentàdépassersespréjugés, et il se met à avoir envers eux une attitude progressiste et moderne par certains côtés. Mais il ne peut échapper à ce qu’il a lu, à ce qu’il a appris dans les manuels. Alors sa seule façon de résoudre la contradiction est d’imaginer aux Indiens cette ascendance européenne. Il est piégé dans cette pensée! Ce qui m’intéresse, et qui est vrai pour moi comme pour mes personnages, est que nous sommes tous aveuglés par nos préjugés, nos idéologies… Lorsque j’écris,jem’interrogesouvent:quelssontlespréjugésquejecolporte sans le savoir, quels biais affectent ma vision de l’histoire… C’est pourquoi être objectif, atteindre la vérité, est toujours un tel défi. Ce n’est pas que la vérité n’existe pas, c’est que nos esprits humains ne sont pas parfaitement logiques. Et c’est pourquoi il n’est jamais simple d’atteindre une vérité, ou même de la percevoir. n Propos recueillis par Alexis Brocas William Alexander Morgan, « The Yankee Comandante », applaudi par Fidel Castro (assis, à droite), à La Havane en 1959. LIRE MAGAZINE • JUIN 2025 • 11 COURTESY RAMIRO LORENZO
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