L'OPINION n°200519 - Page 1 - 200519 2 l’Opinion 19 mai 2020 « Déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner à d’autres est une folie. Nous devons en reprendre le contrôle », lançait, solennel, Emmanuel Macron dans son allocution télévisée du 12 mars. Au diapason de leur chef de l’Etat, une écrasante majorité (92 %) des Français est favorable à « la relocalisationdesentreprisesindustriellesfrançaises », selonunsondageOdoxa. Malgréceplébiscite,lesommetdesministres del’Industrieconsacréàl’autonomiestratégique européenne qui s’est tenu vendredi a accouché d’une souris. « Il ne s’agit pas de tourner le dos au libre-échange, mais de nous assurer que nous ne dépendons pas des autres dans certains domaines critiques tels que le secteur pharmaceutique ou celui des matières premières », a ainsi lancé le commissaire au Marché intérieur, ThierryBreton,ausortirdelaréunion. Loin des « décisions de rupture » appelées de ses vœux par le Président français, le commissaire a en outre écarté toute possibilité d’amendement de la stratégie industrielle de l’exécutifeuropéen,publiéeenmars.Pasmême inscrite à l’ordre du jour, la possibilité de relocalisation a été timidement évoquée par certaines délégations, alors que le projet de constitution de stocks européens de matériel d’urgence en restait au stade embryonnaire, en tout cas jusqu’aux propositions d’Emmanuel Macron et Angela Merkel, lundi. Réalité. Le discours volontariste du chef de l’Etat sur la nécessité d’atteindre une « souveraineté industrielle européenne » se heurte à deux réalités. La réalité économique d’abord, qui fait delarelocalisationdeproductionsàfaiblevaleur ajoutée telles que les masques une chimère, dans un monde globalisé. Le développement de « l’agilité » des entreprises, c’est-à-dire de leur capacité à réorienter leur production vers les marchandises nécessaires dans l’urgence, est une réponse certes moins symbolique mais bien plus efficace à court terme pour faire face aux pénuries. Le discours présidentiel se heurte aussi à la réalité politique d’une Europe attachée aulibre-échangeetàsesbienfaitspourlepouvoir d’achatdesescitoyens. Malgrélesinquiétantespénuriesetlesgrands discours, les termes du débat en cours au niveau européenrestentainsiglobalementinchangés.A grands traits, la discussion oppose tenants d’une stratégieindustriellecommune,issusdesgrands pays d’Europe de l’Ouest, et défenseurs du libéralisme venus d’Europe du Nord, notamment de Scandinavie. Dans ce contexte, la stratégie pilotée par le commissaireBretonetfondéesurl’identification et le soutien des « écosystèmes » de production dans les secteurs stratégiques sonne comme une victoire pour l’Europe de l’Ouest. Sa mise en œuvre dans le cadre de la réponse économique proposée lundi par la France et l’Allemagne devrait permettre d’avancer vers une « souveraineté industrielle européenne ». Bien plus en tout cas que les velléités protectionnistes affichées au début de la crise par l’exécutif français. Mathieu Solal (à Bruxelles) Relocalisation :« l’autonomie stratégique »privilégiée Le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton. SIPA PRESS indispensable » –, c’est bien une étape historique vers davantage de solidarité européenne qui a étécrantéecelundientreParisetBerlin. Les négociations ont été difficiles, parfois très tendues entre les deux pays. « Nous avons été vigilants. Nous n’avons jamais parlé des irritants “eurobonds” ou “coronabonds”. Cela a été l’une des clés de ce dialogue fructueux et apaisé avec l’Allemagne », indique un conseiller du Président. Paradoxalement, côté allemand, c’est peutêtre la récente décision de la Cour constitutionnel de Karlsruhe, qui a donné trois mois à la BCE pour justifier son programme de rachat de dettes, qui a poussé la chancelière a se diriger vers davantage de solidarité budgétaire. « Une rusedel’histoire »,soulignéeparBrunoLeMaire il y a quelques jours, qui n’a pas cité Hegel au hasard. Les 500 milliards d’euros de dépenses nouvelles vont venir s’ajouter aux 540 milliards d’euros de prêts disponibles à compter du mois de juin. Le programme SURE de la Commission européennevaaiderlesEtatsàfinancerleurchômage partiel à hauteur de 100 milliards d’euros. La Banque européenne d’investissement va, de son côté, lever 200 milliards pour prêter ou coinvestir dans les entreprises européennes. Enfin, 240 milliards de prêts d’urgence seront mis à dispositiondesEtatsparleMécanismeeuropéen desolidarité(MES). Au total, c’est donc un paquet de plus de 1 000 milliards d’euros que l’Europe met sur la table, qui vient s’ajouter aux différents dispositifs de relance de chacun des Etats membres, totalisant déjà environ 3 % du PIB européen. Soit un plan de relance d’environ 10 points du PIB de l’UE. Le tout en moins de quatre mois. Pour mémoire,ilavaitfalluquatreanspourqueMario Draghi, l’ancien président de la Banque centrale européenne, ne sorte la zone euro de la crise avecsonfameux« whateverittakes »... Tout n’est pas fait pour autant. L’initiative franco-allemande doit encore être endossée par lll Suitedelapage1 MacronetMerkelpour un électrochoc européen laCommissioneuropéenne,quiprésenteralasemaine prochaine son projet de fonds de relance. Mais le discours de sa présidente, Ursula von der Leyen, la semaine dernière au Parlement européen, laisse présager d’un alignement de l’axe Paris-Berlin-Bruxelles. Verrounéerlandais.Surtout, les parlements des 27 Etats membres devront se prononcer sur ce fonds de relance. Et rien ne dit que les Néerlandais ou d’autres pays « frugaux » d’Europe du Nordacquiescentsanspiper. Si le projet aboutit, il fera date dans l’histoire delaconstructioneuropéenne.Pourlapremière fois, « on brise un tabou qui est la capacité de s’endetter autrement que pour faire des prêts. On accepte un fonctionnement qui n’est pas fondé sur le juste retour, ce qui était la norme européenne depuis Margaret Thatcher », commente l’économisteJeanPisani-Ferry. Cette annonce importante présage-t-elle le début d’une union budgétaire ? Depuis la création de l’euro, la zone monétaire souffre d’un défaut de construction – l’absence de pilier budgétaire – qui l’empêche de fonctionner normalement. Les économistes ne crient pas victoire. « C’est peut-être un premier pas, mais ce fonds reste temporaire et ciblé pour adresser un choc identifié qui est la crise du coronavirus. Ce n’est pas un budget permanent », nuance le président du Conseil d’analyse économique (CAE), PhilippeMartin. « Mais si ce système temporaire fonctionne, silespayslegèrentbien,s’iln’yapasd’écarttrop important entre les économies européennes à la sortiedelacrise,onentireralesconséquences », ajoute l’économiste. La responsabilité en reviendra d’abord aux pays récipiendaires de l’argent européen. Et aussi aux entreprises qui recevront des fonds propres de la BEI et devront s’engager dans la transition écologique. « C’est un test pour l’Europe et pour la bureaucratie européenne », souligne Philippe Martin. @LEGENRA t Emmanuel Macron et Angela Merkel lors de leur visioconférence de presse commune, lundi. SIPA PRESS Danslesdébatssurle« monded’après », l’idéedelanécessairerelocalisationdes activitésproductivess’impose.Partout, danslestribunesdesintellectuels(oudes artistes !),danslesdiscoursdesresponsablespolitiques,danslesproposdes économistes,uneforteunanimitésedégage pourconsidérerquecetterelocalisation estunenécessité.Ilestvraiquel’incapacité industriellefrançaise(eteuropéenne)mise àjourparlacriseétaitfrappante,quecesoit pourlaproductiondemasquesoudetests sérologiques. Unefoisquel’onaditcela,passons auxtravauxpratiquesetessayonsde comprendred’abordpourquoilaFrancea perdusacapacitéindustrielle.Lesraisons sontmultiplesmaissimplesàcomprendre : lecoûtdutravailpeuqualifiéesttropcher enFrance.Pourquoi ?D’abordetavant toutdufaitdesonsystèmesocialtrèsgénéreux.Ensuite,lesrègleseuropéennes,en favorisantlalibrecirculationdesproduits etdeshommesauseindel’Uniongrâceà l’abaissementdesbarrièresdouanières,ont encouragélaconcurrenceavecdespaysà bascoûtseuropéens.Puis,avecledémantèlementdesaccordsmultifibreetl’accès delaChineàl’OMC,laconcurrence« libre » (etfaussée !)s’estélargieaumondeentier. Enfin,cettepolitiqueaétéencouragéepar lespayseuropéenslesplusexportateurs quisouhaitaientouvrirlemarchéeuropéen pourpouvoirencontrepartieavoiraccès auxmarchésdespaysimportateursdebiens industriels.LaChineestainsidevenuele premiermarchédesconstructeursautomobilesallemands. Pourrelocaliser,ilfautdoncretrouver unavantagecomparatifdanscestroisdomaines :lecoût,laconcurrence,latailledu marché.C’estlàquelebâtblesse :saufsile gouvernementfrançaisdécidaitdebaisser drastiquementleschargessociales,ilyapeu dechancesquelesproduitsàfaibleintensité technologiquefabriquésenFranceredeviennentcompétitifs.Etl’onsaitquelelabel « MadeinFrance »n’estpassuffisamment attractifpourpersuaderlesconsommateurs depayerpluscherunproduit.Ensuite,si l’onvoulaitdresserdesbarrièresàlaconcurrence,qu’ellesoitinterneàl’Europeou internationale,nousdevrionsconvaincre lesgrandsexportateurseuropéens(les Allemands,lesNéerlandais)denoussuivre. Or,cen’estpasdutoutleurintérêt. Partageentregénérations.Alors,que va-t-ilsepasser ?Legouvernementfrançais vaproposerunenouvellelisted’industries desouveraineté,fondéesurl’analysedes manquementsapparuspendantlacrise (fabricationdemasques…).Ilyajoutera d’autressecteurs,aprèsavoirdemandé auxmeilleursespritsdelaRépublique d’imaginerd’autrescrises(informatiques, nucléaires,environnementale).Lalistedes « secteursdesouveraineté »quivaensortir seralongue.Pourdonnerunechanceàces nouvelles« industriesdesouveraineté »,il faudrarendrepluscoûteuxl’importationde produitsvenantdel’extérieurdel’Europe. J’ysuispourmapartfavorable.Mais,les Allemandsneleserontpas. Ilyapourtantuneautresolution :un meilleurpartagedesrichessesentreles générations.Lesactifs,aveclacrisedu Covid-19,ontunenouvellefoispayéun lourdtributaubien-êtredeleursaînés.On espèrequelesbaby-boomerssaurontrenvoyerl’ascenseuretêtreàleurtoursolidaire enacceptantunebaissesubstantiellede leurspensionspourredonnerdel’avenirau travaildeleursenfants. Identités HakimElKaroui Lesconditions durapatriementindustriel A peine sèche l’encre du dernier projet de loi de finances rectificative (PLFR), les équipes de Bercy s’affairent à la préparation du troisième collectif budgétaire depuis le début de la crise du coronavirus. Selon nos informations, un nouveau texte financier sera présenté le 10 juin en Conseil des ministres, pour un examen la semainesuivanteàl’Assembléenationale.Cecollectif portera notamment les mesures d’urgence sectorielles pour le tourisme, l’automobile et l’aérien. Edouard Philippe a déjà présenté le plan de 18 milliards d’euros pour le tourisme. L’accès au chômage partiel et au fonds de solidarité avec les indépendants et TPE restera ouvert aux entreprises du secteur jusqu’à fin 2020. Ce fonds sera élargi aux entreprises jusqu’à 20 salariés et deux millions de chiffre d’affaires – l’aide pourra alors monter à 10 000 euros. Doté de 7 milliards, il « devra être réabondé », indique une source à Bercy. Le plan automobile sera annoncé dans quinze jours. L’aéronautique bénéficiera de mesures spécifiques annoncées avant juillet, selon BrunoLeMaire. Collectivités. Ce PLFR contiendra des dispositifs fiscaux comme l’exonération de charges pour les entreprises sous fermeture administrativeetdescréditsdecotisationspourlessecteurs exposés à la crise. Les entreprises du tourisme bénéficieront par exemple d’une exonération de taxedeséjouretdecotisationfoncièredesentreprises. Les indépendants pourront aussi débloquer de manière anticipée leur épargne retraite « Madelin ». A contrario, le texte prépare aussi le débranchement de l’assistance respiratoire accordéeàtouteslesentreprisesdepuisledébutdu confinement (chômage partiel, fonds de solidarité…). L’opération sera progressive, mais il s’agit de revenir vers un fonctionnement normalisé de l’économie. Le PLFR disposera ensuite d’un volet international pour traduire les engagements de la France dans le plan de soutien européen. Il faudra également inscrire le relèvement du plafond d’autorisation de prêt de la France auprès du FMI. Enfin, une section concernera les collectivités locales. S’il n’est pas encore question de soutien à l’investissement – le sujet viendra dans la loi de finances pour 2021 –, l’exécutif travaille à une garantie sur les recettes, qui devraient chuter d’une quinzaine de milliards entre 2020 et 2021. « Cela permet d’aider davantage ceux qui en ont le plus besoin et moins les autres », résumeunmembredugouvernement.Pasquestion, par contre, que l’Etat se substitue aux territoirespourleursdépensescourantes. R.L. Relance :le10 juin,untroisième collectifbudgétaireentroismois LePLFRdisposerad’un voletinternationalpour traduirelesengagements delaFrancedans leplandesoutien européen 19 mai 2020 l’Opinion 3 Le couple franco-allemand a survécu au confinement et il semble même en sortir renforcé, au vu des annonces de ce lundi sur la capacité de l’Union européenne à s’endetter en commun pour financer la relance. Ce n’était pas gagné d’avance, tant les tensions s’étaient accumulées entre les deux capitales jusqu’aux premières semaines de la crise. Certes, en 2019, Paris et Berlin avaient célébré leurs noces de lapis-lazuli – 56 ans de mariage depuis le traité de 1963 – en signant à Aix-la-Chapelle un nouveau traité de coopération et d’intégration, mais le cœur n’y était pas. La déclaration commune de Meseberg de juin 2018 sur « la sécurité et la prospérité » n’avait déjà pas eu l’allant escompté et, depuis 2017, on ne comptait plus les agacements réciproques et les rendez-vous manqués entre les deux pays. Dimanche encore, le chef de l’Etat célébrait les combats des soldats français de mai-juin 1940 contre l’envahisseur allemand. Mais dès le lendemain, le Président et la chancelière reprenaient ensemble les rênes d’une Europe malmenée pour tenter de relancer le processus d’intégration face à la crise économique. Le « moteur » franco-allemand sera-t-il assez puissant pour mettre en marche l’Union européenne dans son ensemble – ce qui nécessitera l’accorddes25autresEtatsmembres ?Ilesttrop tôt pour le savoir, mais une chose est certaine : sans cette dynamique franco-allemande, ce n’était même pas la peine d’y songer. « Accélération de l’intégration ». A l’Elysée, on ne masque pas les difficultés de la relation bilatérale avec ses « divergences », ses « tensions » et le refus d’« afficher des compromis de façade ». A deux reprises au cours des derniers mois, la France a signé des textes avec d’autres Etats européens, mais sans l’Allemagne : d’abord sur le climat, en octobre 2019, puis sur la solidarité financière en mars. « Nous ne cherchons pas la confrontation, mais lorsque nous ne sommes pas sur la même ligne, nous le disons. Et nous créons un débat politique avec l’Allemagne », explique l’entourage du Président. Et il arrive que cela marche. D’autant, qu’outre-Rhin, le contexte politique s’y prête. La décision tonitruante et « eurosceptique » du Tribunal constitutionnel de Karlsruhe, le 5 mai, a été mal perçue dans les milieux dirigeants et a poussé la chancelière Merkel a plaider devant le Bundestag en faveur d’une « accélération de l’intégration de la politique économique » au sein de l’UE. Le 1er juillet prochain, l’Allemagne prendra, pour un semestre, la présidente tournante de l’Union européenne. Ce sera un moment important pour Angela Merkel, qui doit – en principe – quitter la chancellerie après les élections de septembre 2021. Alors qu’elle apparaissait usée et en fin de course, elle sort renforcée de la crise du coronavirus avec une popularité qui frôle les 70 %. Cela lui donne des marges de manœuvre politiques, chez elle et en Europe. « Discours de la méthode ». Au-delà, il y a l’engagement européen de l’Allemagne, qui s’exprime différemment qu’à Paris, mais qui n’en est pas moins très profond. Le 8 mai, le président fédéral Frank-Walter Steinmeier avait ainsi trouvé les mots justes, largement partagés dans l’opinion publique, pour célébrer le 75e anniversaire de ce qu’on appelle outre-Rhin « la libération du national-socialisme et la fin de la Seconde Guerre mondiale ». « Pour l’Allemagne, “Plus jamais !” signifie avant tout “Plus jamais seul !” », déclarait-il, ajoutant : « Cette phrase ne vaut nulle part ailleurs autant qu’en Europe. Nous devons penser, sentir et agir comme des Européens. Ne pas maintenir l’unité de l’Europe, pendant et après la pandémie, c’est se montrer indigne du 8 mai. » De son côté, l’ancien ministre des finances Wolfgang Schäuble (CDU), aujourd’hui président du Bundestag, propose un « discours de la méthode » franco-allemande et européenne dans le Rapport Schuman 2020 : « Après avoir admis la diversité de nos cultures politiques, nous devons apprendre à mieux comprendre le point de vue de l’autre pour parvenir à une véritable perspective européenne en partant de nos positions nationales avec leurs perspectives limitées », écrit le dirigeant démocrate-chrétien, qui plaide pour « un échange ouvert et parfois pénible sur des questions concrètes » afin de « surmonter les blocages nationaux auto-infligés ». En attendant les lendemains européens qui chantent, les deux pays ont un dossier à régler : la réouverture de leurs 451 kilomètres de frontière commune, qui ne sera pas totale avant le 15 juin. Le 16 mars, des points de passages ont été fermés et des contrôlés instaurés, ce qui provoque désormais des embouteillages importants : 46 000 Français vont chaque jour en Allemagne pour y travailler (et 4 000 en sens inverse). La coordination politique et administrative transfrontalière n’a pas toujours été très coopérative... Dans le quotidien berlinois Tagesspiegel, la spécialiste des relations franco-allemandes Claire Demesmay dénonce ce lundi « la réapparition des réflexes nationaux de repli et de la méfiance du voisin », liée au rétablissement de la frontière. Une leçon sans doute entendue à l’Elysée et à la chancellerie. Jean-Dominique Merchet @jdomerchet t Aprèsdesmoisdetensions,ParisetBerlin retrouventunedynamiquecommune « Nous devons penser, sentir et agir comme des Européens », affirme le président de la République allemande Frank-Walter Steinmeier. SIPA PRESS Electronlibre MaximeSbaihi LaFrance débrouillarde Oublionsuninstantlefestival depolémiquesetd’incriminations quiaccompagnelacrise.Pendant quelevacarmemédiatiquerésonne demilleincantationssurlemonde d’après,nombreuxsontlesFrançais quirelèventlesmanchesaunomdu présent.Lamodestieetledévouement deceshérosanonymesméritentd’être saluésetencouragés. Auxquatrecoinsdupays,lesinitiativessesontmultipliéespourconstituer unarrière-frontcontrelevirus.Les salonsfamiliauxsesonttransformésen ateliersdecoutureafindeconfectionnerdesmasquespoursoignantsetvoisins.Arméedesapairedeciseauxetde rouleauxdetissus,mamères’estainsi enrôléedansunechaînedeproduction régionalequi,grâceàunedivisionspontanéedutravail,afournidesinfirmières aumomentlepluscritique. Instagrampulluled’exemples demicroproductionsdemasques artisanaux,inspirésparlesnombreux tutorielsmisenlignesurYouTube,et descentainesdegroupesFacebook ontétécrééespourmettreenrelations petitesmainslaborieusesetsoignants danslebesoin. Main-forte.Dansleshôpitaux,les chefsdeserviceontdûbricoleravec lesmasquesdeplongée« Easybreath » deDécathlon,reliésauxrespirateurs pouralimenterenairsouspression lespatients.Alaplacedutuba,des valvesfurentfabriquéesàlahâteparles imprimantes3Ddeparticuliersgrâce ausitepartage3d.fretauxplanscommuniquésparlafirme.Desétudiants prêtantmain-fortedanslesEhpadaux professeurss’improvisantYoutubeurs pourfaciliterlescoursàdomicile, lesFrançaisontsus’organiserpour s’entraider. BienvenuedanslaFrancedu« systèmeD »,patriedeladébrouillardise, cesubtilmélangedepanache,astuceet créativité.« Setirerd’affaire,voirclair dansquelquechose » :c’estainsique JulesMicheletdéfinissaitladébrouille, soulignantbiensadoublecapacité d’agiretdepenser.Elleempêchel’immobilismedanslebrouillarddel’incertitude,etfaitprimerl’actionsurlapeur. Ladébrouillenousapermisdedévelopperuneforcederésiliencepardes chaînesdesolidaritéaussiinstinctives qu’agiles,palliantainsileslourdeurset défaillancesdel’administration. DanssesMémoiresdeguerre,de GaulleécritàproposdelaFrance :« S’il advientquelamédiocritémarque, pourtant,sesfaitsetgestes,j’en éprouvelasensationd’uneabsurde anomalie,imputableauxfautesdes Français,nonaugéniedelapatrie. » Cettedistinctionfictiveamalvieilli.La mobilisationactuelleprouvequece fameuxgéniefrançaisn’ariend’une mystiqueabstraite,ils’incarnedansle volontarismeconcretetéparpilléde noscompatriotes. Cequifitnotreforceenconfinementdoitnousinspirerpourledéconfinement.Faceàunavenirassiégé d’incertitudes,notrepaysdoitlaisser respirerlasociétécivilepourbénéficier pleinementdesonpotentiel.Les politiquesetlapuissancepubliques’en sonttroplongtempsméfiésaupointde l’étoufferdecentralisation,d’impôts, taxesetrégulationsentousgenres. LaFrancedes« faizeux »,galvanisée parAlexandreJardin,saitêtreréactive sansréclamerdecomptes.Toutesces petitesmainsinvisiblesnerecevrontni médailleniprime,maisellesdoivent nousinspirerpourretrouverlavitalité dontnotrepaysabesoin.Bâtirl’avenir enleurfaisantconfianceestlemeilleur moyendeleur rendre hommage. Maxime Sbaihi est directeur général du think tank GénérationLibre. Aidespubliques :impossibled’imposer desconditionsauxPME Les plans de relance des économies déconfinées se précisent, et avec eux leurs conditions : investir dans la transition écologique, relocaliser les usines, maintenir l’emploi, ne pas placer d’argent dans les paradis fiscaux, ne pas verser de dividendes ou de bonus aux dirigeants, ne pas faire de rachats d’actions… « La conditionnalité est la clé de la définition d’un avenir post Covid-19 »,écritPeterDietsch,économisteetphilosopheàl’UniversitédeMontréal. Mais cette conditionnalité est beaucoup plus difficile à appliquer aux petites et moyennes entreprises qu’aux grands groupes. D’ailleurs, la Commission européenne exonère les PME de « reporting » après un éventuel apport en capital public. « Les entreprises bénéficiaires de recapitalisation, hormis les PME, doivent publier des informations sur l’utilisation de l’aide reçue, notamment la manière dont elle a soutenu les activités […] liées à la transformation numérique et écologique », écrit-elle dans son cadre exceptionnelpourlesaidesd’Etatentempsdecrisedu coronavirus. De leur côté, les Etats membres ont pour le moment surtout abordé la conditionnalité fiscale. La France, le Danemark et la Pologne ont pris des mesures pour que les entreprises aidées ne puissent recourir aux paradis fiscaux. Mais là encore, difficile de l’appliquer aux PME. Le gouvernement français s’est ainsi opposé à des amendements comme celui de la sénatrice Nathalie Goulet (Union centriste), visant à priver toute entreprise enregistrée dans un paradis fiscaldebénéficierdesmesuresd’urgence. « Cet amendement a été considéré comme marginal car les aides concernent largement les TPE qui n’ont pas de filiales » a expliqué Vincent Eblé, président socialiste de la commission des finances du Sénat, à Public Sénat. C’est finalement une ordonnance qui prévoit que les TPE et indépendants bénéficiaires du fonds de soliEnattendantles lendemainseuropéens quichantent,lesdeux paysontundossier àrégler :laréouverture deleurs451 kilomètres defrontièrecommune darité pourront être contrôlés pendant cinq ans parlefisc. La conditionnalité la plus prisée reste néanmoins la transition écologique. Bruno Le Maire a maintes fois répété que le soutien au secteur automobile irait seulement vers l’électrique – et en contrepartiederelocalisations.Maisalors,faut-il laisser tomber tous les sous-traitants qui ne sont pas dans l’électrique ? A Bercy, on indique que, de manière générale, les conditions aux aides concernentplutôtlesgrandesentreprises. Contrôle compliqué. « Il faudrait être capable de ne sauver que les bouts intéressants des entreprises, estime Patrick Artus, chef économiste de Natixis : sauver Renault mais en faisant en sorte que le groupe produise 30 % de voitures diesel en moins, par exemple. On l’a fait pour Air France, en supprimant les lignes pour lesquelles on peut faire le trajet en train en moins de deux heures trente. Mais quand il s’agit d’une PME, c’est impossible. » Pour Karima Delli, députée européenne EELV, il faut aider toutes les PME en « nouantuncontratpourqu’ellesrentrentdemanière beaucoup plus incisive dans la transition écologique ». Il y a une autre raison très prosaïque à la non-conditionnalité pour les PME. « La conditionnalitén’adesensquesilesconditionsposées sont contrôlées et sanctionnées en cas de nonrespect », souligne Karima Delli. Or cela « serait trèscoûteuxàréaliserPMEparPME »,remarque Augustin Landier. L’économiste et professeur à HEC déconseille de demander à certaines professions « des engagements collectifs solennels à préserver l’emploi, comme l’avaient fait les cafés etrestaurantsenéchangedeleurbaissedeTVA » en 2009 : un « modèle obsolète car ces métiers sontdemoinsenmoinsorganisésenbranche ». Pour lui, la conditionnalité des aides aux PME doit plutôt peser sur les banques : « Il faudrait qu’elles s’engagent à restructurer la dette qu’elles détiennent chez les PME et à la transformer en actions, pour que l’argent versé par l’Etatneservepasàrembourserlesemprunts,et qu’on sorte de la situation intrinsèquement perverse d’avoir des entreprises “zombifiées” par unniveaudedettequilesétrangle,etquin’investissent pas. » Jade Grandin de l'Eprevier @JadeGrandin t L’usine Renault de Maubeuge, dans le Nord. Bruno Le Maire a répété que le soutien au secteur automobile irait seulement vers l’électrique. SIPA PRESS 4 l’Opinion 19 mai 2020 Transition Total a signé un partenariat avec la startup anglaise Cambridge Quantum Computing afin d’améliorer sa stratégie de captageduCO2 .Unenouvelleétapedesonengagementpourréduiresonempreintecarbone. MurielMotte Qu’on se le dise, Total sera l’un des acteurs majeurs de la relance verte voulue par les pouvoirs publics ! La cinquième major pétrolière dirigée par Patrick Pouyanné a détaillé le 5 mai son objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050, pour l’ensemble de ses activités mondiales, depuis sa production jusqu’à l’utilisation par ses clients de ses produits énergétiques vendus. Elle enchaîne depuis les annonces visant à accélérer satransitionversdesactivitésmoinspolluantes. Lundi, le groupe a prévenu qu’il renonçait finalement à acquérir les actifs d’Occidental Petroleum au Ghana. En revanche, il a repris pour 515 millionsd’eurosunportefeuillede2,5 millions declientsrésidentielsespagnolsjusque-làdétenu par EDP, l’équivalent portugais d’EDF. Ainsi que deuxcentralesàcyclecombinéaugaznaturel. Supercalculateur. L’opération fait de Total le quatrième fournisseur d’électricité et de gaz de la péninsule ibérique, après la reprise en début d’année d’un portefeuille de près de 2 gigawatts d’électricité renouvelable à développer. « Avec cette opération, Total fournira dès 2021 du gaz et de l’électricité à 8,5 millions de clients en Europe, en route sur son ambition d’atteindre plus de 10 millions de clients à horizon 2025 », se félicite Patrick Pouyanné. Parallèlement, le géant pétrolier a noué un partenariat pluriannuel avec la start-up anglaise Cambridge Quantum Computing, spécialiste de la technologie quantique. Cet accord vise à améliorer les matériaux utilisés pour le captage de CO2 . « Les algorithmes quantiques, qui seront développés au sein de la collaborationentreTotaletCQC,simulerontl’ensemble des mécanismes physiques et chimiques dans ces absorbants en fonction de leur taille, de leurforme,deleurconstitutionchimique,etpermettront ainsi de sélectionner les matériaux les plusperformantsàdévelopper »,expliqueTotal. De telles simulations sont pour l’heure impossibles à réaliser avec un supercalculateur classique,telqueceluiqueTotalainauguréàPau à l’automne dernier. Pangea III, le plus puissant supercalculateur industriel du monde, a rejoint Pangea I et II. Dédiée à l’exploration-production, pour mieux identifier la structure géologique des sous-sols notamment, cette formidable puissance de calcul sera aussi mise au service de sa transitionécologique.EnassociationavecCQC. La crise économique provoquée par le coronavirus et la chute combinée des prix du pétrole nedévientpaslepétrolierdesarouteverslaneutralité carbone. Contraint de réduire de 25 % le montant de ses investissements cette année, le groupe préserve les sommes dédiées aux énergies bas carbone et à la transition écologique. Annoncéesentre1,5et2 milliardsdedollarspour 2020,ellesserontdanslafourchettehaute. Quant aux recrutements, ils sont gelés pour tout le groupe à l’exception des métiers du bas carboneetdudigital.Unefoisn’estpascoutume, lasociétédegestionPhitrust,trèsàchevalsurles questions environnementales, s’est publiquement réjouie au début du mois des avancées de Totalsurcessujets. @murielmottet Total,ungéantdel’ornoir de plusenplusvert Lamajorpétrolièrevas’appuyersur la technologiequantiquepouraccélérer sa mutationécologique Abonnement par téléphone 01 55 56 70 73 (lundi-vendredi / 9h-18h) En cas de difficulté pour vous abonner en ligne, contactez-nous : abonnements@lopinion.fr Offre réservée à nos nouveaux abonnés. 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Des milliers de salariés sont concernés. Emmanuelle Ducros Les coups se sont succédé, violents. Ils ont érodé puis anéanti les chiffres d’affaires d’enseignes qui ont pourtant pignon sur rue. La crise des Gilets jaunes puis les manifestations contre la réforme des retraites les ont étourdies… Le Covid-19 a mis une dizaine de chaînes nationales au tapis. Alinéa, enseigne spécialisée dans l’ameublement et la décoration de la galaxie Mulliez a déposé son bilan, les 2 000 salariés sont dans l’attente. Ils sont 9 000 chez Conforama, en grande difficulté ; 2 900 chez le spécialiste de l’habillement enfantin Orchestra-Prémaman ; 1 700 chez Naf Naf (Groupe la Chapelle) ; 600 chez le vendeur de chaussures André (Spartoo), les trois dernières étant en redressement judiciaire. Liste non exhaustive. Pour les analystes du secteur de la distribution, aucun mystère dans cette série dedéfaillances.« Toutescesentreprisesonten commun d’être entrée dans la crise avec, déjà, des difficultés et une situation financière peu saine, note Philippe Goetzmann, qui dirige le cabinet de conseil à son nom. Elles étaient toutes atteintes du cancer dans le monde de la distribution : un besoin en fonds de roulement trop élevé et une trésorerie fragilisée par des années de mauvaise gestion et de pertes. » Cela tenait plus ou moins bien en temps Goetzmann. Ces paquebots prennent l’eau de toute part. La remise en question récente et prometteuse du modèle d’Alinéa, qui favorise désormais les approvisionnements plus proches pour limiter ses stocks et réduit la taille de ses magasins – des thèmes dans l’air du temps –, a été fauchée par le Covid-19. Fonds de roulement. Les conséquences des trésoreries exsangues et des énormes besoins en fonds de roulement sont doubles : la plupart de ces enseignes ne sont pas éligibles aux dispositifs de soutiens mis en place par l’Etat. « Orchestra-Prémaman a sollicité le soutien de ses banquiers, via le dispositif PGE (prêt garanti par l’Etat), mais ils sont réticents à prêter », note Cédric Ducrocq. Pour Conforama, même schéma. Le 18 mai, les représentants syndicaux CFE-CGC de l’entreprise ont mis en cause BNP Paribas qui, selon eux, « boycotte les réunions » destinées à tenter de trouver une issue financière au marasme. Alinéa, Conforama, André…. C’est un triste début. Sur des schémas similaires, le commerce va encore compter les victimes. « On va observer un darwinisme très fort dans les prochains mois », note Cédric Ducrocq. Mais, selon lui, il convient de ne pas désespérer. Certaines des entreprises placées en redressement judiciaire s’en sortiront car des repreneurs se manifestent. « Mais cela va être brutal. Survivront celles qui vont accélérer les plans de transformation : digitalisation, fermetures de magasins, remise à plat des modèles d’approvisionnement… Il va y avoir des ajustements virils. Les dirigeants vont devoir combiner deux approches a priori irréconciliables : un tri sévère dans les activités et la tentation de ralentir pour reconstituer les trésoreries… Et la nécessité d’investir dans des plans de transformation profonds et ambitieux. @emma_ducros t normal, mais dès que le chiffre d’affaires s’est tari, elles se sont retrouvées en cessation de paiements. De fait, Naf Naf, La Halle et André, trois enseignes issues du groupe Vivarte, se démènent depuis près de dix ans pour tenter de trouver un modèle pérenne. Les « dernières chances » successives ont laissé des entreprises chancelantes. Les pressings 5 à Sec doivent, à la fois, consentir de gros investissements et endiguer la fuite des clients, qui, signe des temps, font de moins en moins nettoyer leurs vêtements. Conforama sombrait déjà. Le fait que les secteurs de l’ameublement et de la mode soient si touchés n’est pas, non plus, une surprise. « Ce sont des activités en perte de vitesse depuis des années, qui nécessitent des stocks importants et coûteux. Ils viennent de loin et les entreprises, qui assurent seules leurs approvisionnements dans ces modèles intégrés, doivent immobiliser des capitaux considérables », explique Cédric Ducrocq, du cabinet Dia Mart. Elles se retrouvent dans l’impossibilité de rentrer dans leurs fonds : « Dans le textile, à la différence de l’électronique ou de l’alimentation, où les stocks tournent vite et où il y a peu de décalage entre le paiement des fournisseurs et la vente, on achète très à l’avance des stocks voués à se déprécier. Si une saison est ratée, ils sont démonétisés. » Achat plaisir. Double peine : pour Cédric Ducrocq, le textile, qui incarne, à un moment où les dépenses des ménages sont sous contrainte, « un achat plaisir, plus futile », ne peut pas compter sur une reprise des ventes rapides pour se remettre en selle. Il n’en va pas de même pour l’ameublement, qui pourrait, peut-être, bénéficier de l’engouement des Français pour l’équipement de leur habitat. Ce segment de marché est celui qui est reparti le plus vite depuis deux SIPA PRESS LeduoGiletsjaunes-coronavirusprovoquedes défaillancesensériechezlesgrandesenseignes Lacrisesanitaireaccélèreladégénérescencedecertainsmodèlesdéjàtrèsfatigués,notamment danslessecteursdutextileetdel’ameublement.Unedizainedechaînessontdéjàtouchées Lachaîned’ameublementAlinéa, qui emploie 2 000 personnes, est en redressement judiciaire. 19 mai 2020 l’Opinion 5 Manigances La création d’un neuvième groupe parlementaire à l’Assemblée doit être annoncée ce mardi, en fin de matinée. Il rassemblera une vingtaine de députés, pour l’essentiel en rupture de ban de la macronie, sous la présidence des anciens marcheurs Matthieu Orphelin et Paula Forteza. Matthieu Deprieck Agenda Invité d’Europe 1, lundi, François Baroin a constaté « l’impuissance de l’Etat dans beaucoup de secteurs », à l’occasion de la crise sanitaire provoquée par l’épidémie de Covid-19. « Ce fonctionnement, le statu quo de ministères en silo, ultra-bureaucratisés, totalement décidé à Paris, ne peut plusfonctionner »,adénoncéleprésidentde l’association des maires de France, plutôt en retrait ces dernières semaines. Ludovic Vigogne Il ne manque plus que le faire-part pour que la naissance soit officielle. Après des mois de gestation, une partie de l’aile gauche de La République en marche doit annoncer la création d’un groupe autonome, en marge de la majorité, ce mardi à l’Assemblée nationale. Ses membres sont pour la plupart des députés déjà éloignés de la macronie, à l’image des futurs coprésidents, Matthieu Orphelin et Paula Forteza, partis en février 2019 et janvier 2020 du groupe En Marche. Les anciens socialistes Delphine Batho (non inscrit), Aurélien Taché (LREM) et Émilie Cariou (LREM), rejoints par Cédric Villani, exclu du mouvement présidentiel pour s’être présenté en candidat dissident à la mairie de Paris, sont attendus pour en composer la direction. Les manigances et tractations de coulisses, nombreuses ces derniers jours, invitent à la prudence. « Il ne faut pas se rater dans ce genre de moment. Si vous êtes moins de 20, c’est foutu. Or, dans la dernière ligne droite, il y en a toujours qui se font rattraper par le col », observe un élu de la majorité. Le nombre de députés prêts à sauter le pas a de fait fondu à grande vitesse. D’une cinquantaine, il est tombé à une vingtaine. Mauvais coups. Le premier coup porté à l’initiative Orphelin/Forteza remonte au 8 mai. Les Echos annoncent la « fracture » imminente de la majorité : 58 députés sont prêts à s’allier dans un nouveau groupe. L’heure est à la sortie du confinement. Dans un tel contexte, un tel message d’émancipation ne passe pas. Le président de l’Assemblée, Richard Ferrand, ses proches (son directeur de cabinet, Jean-Marie Girier, le questeur, Florian Bachelier) et le patron des députés LREM, Gilles Le Gendre, appuient là où ça fait mal. Comment peut-on quitter la majorité dans un moment aussi grave ? Message reçu par ceux qui avaient déjà un pied dehors. La manœuvre fonctionne. « Le temps n’est pas venu pour une telle sortie », confie ainsi un parlementaire pourtant en phase avec les idées défendues par ce futur groupe. Le second coup est porté la semaine suivante. Des voix de la macronie soufflent l’existence d’une autre initiative : la création d’un courant interne au groupe LREM. Mené par les députés Barbara Pompili et Hugues Renson, « En commun » creusera le même sillon que l’association Orphelin-Forteza mais au sein de la majorité. Les tenants de la ligne Ferrand-Le Gendre y voient le bénéfice qu’ils peuvent en tirer : pour défendre une ligne sociale et écologique, les députés ne sont plus obligés de rompre avec La République en marche. S’ils le font, c’est même à dessein, dans le strict but d’affaiblir le chef de l’Etat. « Richard Ferrand et Gilles Le Gendre se servent de ce projet de courant pour montrer la déloyauté de ceux qui partent, juge un cadre de la majorité. Ils posent le débat sur le terrain de la loyauté alors que ce n’est pas le sujet. » Le président du groupe LREM continue d’ailleurs de juger ce nouveau groupe comme une « rupture de confiance » en opposition à un courant qui ne pose, lui, aucun problème de ce type. « Il n’y a pourtant pas l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette entre les deux », assure un marcheur pris entre les deux feux. « Avec leur courant, Barbara Pompili et Hugues Renson auront plus de succès, prédit un autre. Mais c’est plus périlleux pour l’unité du groupe. Ils pourront parler avec tout le monde tout en restant au chaud. Ils ont bien compris que partir, c’est s’effacer, et qu’ils risquaient de perdre la présidence de la commission développement durable, pour l’une, et la vice-présidence de l’Assemblée, pour l’autre. » Ce sujet de la loyauté est mal venu. D’abord parce qu’il éclipse l’éternelle difficulté qui plombe la majorité : comment animer un groupe aussi imposant que celui de La République en marche ? « Les courants au PS avaient deux finalités : conquérir le pouvoir et se partager les responsabilités internes. Il n’y a rien de cela dans le fonctionnement d’En Marche », constate un survivant de « l’ancien monde ». « La création de ce groupe illustre la difficulté de certains à s’exprimer au milieu de 300 députés,lasouffrancemêmedesesentirinexistant », ajoute le député MoDem du Finistère Erwan Balanant, approché par Matthieu Orphelin pour l’accompagner dans sa démarche d’autonomie. Ensuite, parce que, comme le craint un responsable de la macronie, « à force qu’on dise qu’ils sont déloyaux, ils vont finir par le devenir ». Or la seule question que se pose Emmanuel Macron, c’est de « savoir s’ils l’aideront lors de la présidentielle de 2022. Attendons tous qu’il fixe la ligne et ne nous demandons pascommentl’obliger,maiscommentl’aider ». Certainement pas en lui mettant entre les mains une difficulté de plus. Défaire un nœud, passe encore, mais quand il s’agit d’un sac, on peut rester longtemps devant avant de trouver par quel bout le prendre pour le dénouer. @mdeprieck t Sur le rétroplanning qu’il s’était fixé, c’était la première réponse qu’il devait apporter. Initialement, c’est ces jours-ci que François Baroin devait dire s’il était candidat ou non à un troisième mandat de président de l’association des maires de France (AMF). Alors que tous les regards sont tournés vers lui en vue de la présidentielle de 2022, sa décision était très attendue. Que le maire de Troyes rempile ou non, chacun aurait sans aucun doute lu, à travers elle, le signe qui l’arrangeait sur son choix de se jeter ou non dans le combat élyséen. Finalement, François Baroin n’aura pas à répondre à la question. L’élection du président de l’AMF (de même que celles du bureau et du comité directeur) prévue en novembre, à l’occasion du traditionnel congrès de l’association, est en effet reportée d’un an. Là aussi c’est une des conséquences de l’épidémie de Covid-19. Selon les statuts de l’AMF, le corps électoral est issu des dernières élections municipales ; or le second tour a été reporté. Les candidatures pour la présidence de l’association doivent être déposées plus de quatre mois avant la date du congrès ; or l’évènement, qui occupe les trois quarts du parc des Expositions, Porte de Versailles, à Paris est matériellement inamovible. Aucune autre solution n’était possible. Nouvelle thématique. Elu à la tête de l’AMF en 2014, réélu en 2017, François Baroin en restera donc le président jusqu’en novembre 2021. Où en sera-t-il alors ? Si la première étape du calendrier personnel qu’il s’était fixé s’est évanouie, son entourage assure que la suivante reste pour l’instant d’actualité. Sera-t-il candidat à l’élection présidentielle de 2022 ? Concernant cette question-là, l’ancien ministre des Finances avait promis, avant l’apparition du virus qui allait changer la dernière phase du quinquennat, de lever un coin du voile en octobre ou en novembre – « Il y aura une indication à l’automne », confiait-il à l’Opinion au début de mars. On demeure sur cet échéancier-là. S’il répond oui, son maintien à la présidence de l’AMF sera d’ailleurs loin d’être inutile : lors d’une course élyséenne, les maires sont toujours un public très prisé ; ce n’est pas pour rien qu’Emmanuel Macron a tant cherché ces derniers mois à se rabibocher avec eux. A l’agenda de François Baroin figurait enfin un dernier rendez-vous. A la rentrée prochaine, il devait sortir un livre sur la laïcité, un thème qui lui tient très à cœur. Comme prévu, un ouvrage signé de sa main sera bien dans les librairies en septembre. Mais le chiraquo-sarkozyste en a en revanche revu la thématique, afin de s’adapter à la crise sanitaire et économique que la France et le monde traversent. Ce lundi sur Europe 1, il n’a pas manqué d’ores et déjà de constater « l’impuissance de l’Etat dans beaucoup de secteurs » et de plaider pour davantage de décentralisation. Ne faut-il pas voir dans ce changement de pied éditorial le signal d’une envie ? Au sein des Républicains, on trouvera là une occasion de se rassurer. Ces dernières semaines, la discrétion de François Baroin a semé des doutes au sein du parti, où nombreux sont ceux qui espèrent sa candidature en 2022. Alors que Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, Bruno Retailleau, Laurent Wauquiez… se sont beaucoup exposés, le maire de Troyes avait choisi de rester discret et de se concentrer sur la gestion de la crise dans sa ville. Le 15 mars, il y avait été réélu dès le premier tour avec 66,7 %. @LVigogne t Macronvoitsamajoritéàl’Assemblée s’effilocherpourfinirensacdenœuds Baroindoit réviserson calendrier Lamacronieestscindéeentredescadreslégitimistesmenéspar RichardFerrandetGillesLeGendre,desdéputésentrésendissidence dansunnouveaugroupeetd’autresquiveulentunvirageàgauche Initialementprévue ennovembre, l’électiondu présidentdel’AMF est reportéed’unan EmmanuelMacronauxcôtés du présidentdel’Assemblée RichardFerrand. SIPA PRESS cadres du parti… ses figures apparaissent ainsi en bonne place parmi les 150 personnalités signataires d’une tribune parue la semaine dernière et appelant à l’organisation d’une « convention du monde commun » réunissant partis, associations, syndicats et ONG. Aux côtés notamment des écologistes. « Salutcollectif ». Sauf qu’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) prétend également assumer cette « place de pivot », dixit son secrétaire national Julien Bayou. Mais là encore les socialistes notent « un changement de ton » alors que le patron des Verts a convié tout le monde à une université d’été commune à la rentrée. Une proposition acceptée par Olivier Faure… qui a toutefois rappelé qu’il le lui avait proposé un mois plus tôt. Une inflexion que les experts électoraux du parti mettent sur le compte des résultats du premier tour des municipales. Le PS tire en effet les fruits de son opération résistance le 15 mars dernier. A Paris, Le PS reprend du crédit à gauche et, comme souventenlamatière,c’estJean-LucMélenchon qui sert de mètre étalon. Le chef de file de La France insoumise (LFI) s’est récemment fait plus lisse dans la forme et ses rares clins d’œil ont été reçus cinq sur cinq chez les socialistes. Comme ce tweet en apparence anodin d’il y a dix jours, dans lequel il s’est réjoui de l’appui du PSàlamotionderejetdeLFIsurlaprolongation de l’état d’urgence sanitaire. Ou son hommage à François Mitterrand à l’occasion de l’anniversaire de sa première élection en 1981, « pour avoir surmonté la division de la gauche ». Le député de Marseille se tient pourtant prudemment à distance des appels qui fleurissent pour proposer une convergence programmatique des forces politiques. Sous l’impulsion d’Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste, qui a tendu la main dans le vide pendant deux ans, les socialistes y retrouvent au contraire ce qu’ils espèrent être une place de pivot. Députés, maires, eurodéputés, Nantes, Rennes, Lille, Le Mans ou encore Clermont-Ferrand, les sortants socialistes ont été confortés, souvent devant leurs concurrents écolos qui les menaçaient dans les sondages. Ailleurs, là où les candidats d’EELV ont pris la tête de listes d’union avec la gauche dont le PS, les résultats ont été bons comme à Bordeaux, Tours ou Besançon. « Quand on part avec eux, c’est l’union de la gauche qui gagne et, dans le cascontraire,c’estladébâcle !Cesontdesenseignements forts pour chacun et on voit bien que le salut est collectif », plaide un cadre du parti. « Le premier tour du scrutin a servi de juge de paix et démontré qu’il ne pourrait y avoir de victoire que dans l’unité. Ce qui était souhaitable au niveau local n’était que le signe avantcoureur de ce qu’il peut se passer au niveau national dans les mois à venir », juge le maire de Clermont-Ferrand Olivier Bianchi, bien engagé pour sa réélection à la tête d’une liste roserouge-verte. Les sortants « restent des figures indépassables dans leurs territoires », estime l’élu socialiste mais, ailleurs, « pas une force de gauche ou écologiste ne s’impose comme la seule en capacité de rassembler ». Il reste toutefois un gouffre entre les tribunes collectives et la mise sur pied concrète d’une initiative unitaire type « confédération des gauches ». La prochaine étape devrait passer par un rassemblement à l’automne dont ni le contenu, ni le modus operandi ne sont encore fixés. Pas plus que la tenue du second tour des élections municipales qui pourraient tout aussi bien être reconvoquées et chambouler les rapports de force. @raphaelproust t LePSrevientenodeurdesaintetéàgauche LePartisocialisteespèredésormaisjouerlespivotsalorsquelacrise ducoronaviruspousselagaucheetlesécologistesàladiscussion Changementdeton Des députés, maires, eurodéputés et cadres du Parti socialiste figurent en bonne place parmi les 150 personnalités signataires d’une tribune parue la semaine dernière et appelant à l’organisation dans les mois qui viennent d’une « convention du monde commun » réunissant formations politiques, associations, syndicats et ONG. Raphaël Proust Ilrestetoutefois un gouffreentre les tribunescollectives et lamisesurpied concrèted’une initiativeunitaire type « confédération des gauches » 6 l’Opinion 19 mai 2020 Serpentdemer En fin de semaine dernière, le groupe de Patrick Drahi a annoncé qu’il se séparait de Libération, désormais rattaché à un fonds de dotation qui sera pour le moment principalement fourni par le groupe Altice. Cette exfiltration du quotidien, après celui de L’Express il y a un an, marquelafindudésengagementd’Alticedans la presse écrite. L’opérateur va, par ailleurs, fermersachaîneRMCSportNewsle2juin. CyrilLacarrièreetMurielMotte A la différence de son voisin chinois qui est parvenu à maîtriser la première vague de la pandémie, l’Inde semble encore loin d’être en mesure d’enrayer la progression du nombre de personnes contaminées (96 169) et de décès 3 029). Les autorités, qui ont décrété un confinement strict le 25 mars, ont cependant décidé d’alléger ledispositif,enpermettantnotammentauxcommerces de reprendre leurs activités avec un tiers deleurpersonneletdeshoraireslimités. La crainte de voir l’économie nationale plongéedansdesabîmes,alorsqueplusieurspays,en particulier la Chine, relancent progressivement lamachineéconomique,conduitNarendraModi à improviser une politique oscillant entre protection de la santé publique et volonté de ne pas plomber totalement l’avenir du pays. Dimanche, son gouvernement a annoncé que « les mesures Eté 2015, l’Opinion titre « Drahi et Weill bâtissent le premier groupe multimédia français ». Les deux entrepreneurs s’apprêtent alors à créer un géant de la convergence télécoms-contenus, calqué sur ce qui se passe aux Etats-Unis. Un modèle qui n’a jamais convaincu les opérateurs français. A l’époque, Stéphane Richard, patron d’Orange, ironise sur cette stratégie dont il parle comme d’un « serpent de mer » vieux de quinze ans. L’opérateur se souvient encore douloureusement de son incursion sur le marché des droits du foot. Cette méfiance n’altère pas le volontarisme de Patrick Drahi et d’Alain Weill qui, non contents d’avoir deux radios (RMC et BFM Business), des chaînes de télé (BFMTV, RMC Découvertes et l’ex-Numéro 23 qui va devenir RMC Story) et des titres de presse écrite (L’Express, Libération et Stratégies), se veulent offensifs en matière de contenus. Ils lancent leur service de vidéos à la demande par abonnement, inaugurent la chaîne Altice Studio qui va investir 40 millions d’euros dans la production et mettent 350 millions d’euros par an sur la table pour les droits de la Ligue des champions de football. De tout cela, à l’approche de l’été 2020, il reste principalement les chaînes de télé et RMC. « Le modèle de distribution exclusive de contenus, ça ne marche pas sauf si vous êtes dans une situation quasi monopolistique comme l’est d’ailleurs Altice, mais aux EtatsUnis », commente un concurrent de Patrick Drahi. En Europe, et donc en France, le fournisseur d’accès n’aura jamais réussi à trouver d’allié pour soutenir ses investissements massifs dans le sport. « Le fait qu’il soit lui-même un opérateur, c’est forcément bloquant, assure la même source, on n’avait pas très envie de lui donner de l’argent ou même un coup de main. » Remontada. Mais à défaut de devenir un géant des contenus, ces derniers ont-ils profité à SFR, racheté par Patrick Drahi en 2014 ? Disons que cettestratégieasansdoutecontribuéàredresser unesociétéàladérive. « On a déjà atteint l’objectif de nombre d’abonnés qu’on s’était donné pour l’année. Et il reste encore de beaux matchs en octobre, novembre, décembre, commentait Alain Weill, PDG d’Altice en septembre 2018, au sujet de l’effet RMC Sport. C’est encourageant, cela veut dire que des gens changent d’opérateur pour venir s’abonner au foot chez nous. » Manque de bol, le PSG s’est fait prématurément éliminer et la campagned’abonnementaprisduplombdansl’aile. PSG ou pas, à l’époque, SFR est en pleine remontada après avoir subi une hémorragie de clients entre 2015 et 2017 : environ un million était parti à la concurrence, et même près de 3 millions en prenant en compte les abonnés B2B et les contrats prépayés. Une fuite motivée par la mauvaise qualité des services et des tarifs jugés non-compétitifs. C’est en jouant d’abord sur ces paramètres essentiels que SFR a pu ramener au bercail des clients exigeants. Les comptes de 2018 portent d’ailleurs la marque de cette offensive commerciale : les abonnés reviennent, mais les recettes et les marges chutent. Depuis, l’intensité de la guerre des prix a diminué d’un cran sur un marché français toujours hyperconcurrentiel. Et la qualité du réseau de confinement pour enrayer la propagation de la Covid-19 restent en vigueur jusqu’au 31 mai », enajoutantqu’ellespourraientêtremodifiées« si nécessaire, afin de faciliter les activités économiquestoutencontenantlevirus ». Le Premier ministre indien souhaite donner l’impression qu’il tient bien son pays en dépit d’une situation sanitaire compliquée. Son objectif premier est d’attirer les industriels étrangers, enparticulierceuxquisouhaitentquitterleterritoire chinois. La perte de confiance envers Pékin ou encore les incitations financières de certains gouvernements, à l’instar de celui du Japon, pour limiter la dépendance à l’égard des Chinois sont autant de signaux auxquels New Delhi est trèsattentif. MakeinIndia. « Danslecontextedescepticisme qui entoure actuellement Pékin, nous devons attirer l’attention des milieux d’affaires mondiaux avec le soutien du gouvernement pour promouvoir non seulement la fabrication dans notre pays,maisaussilesproduitsdemarqueindienne dans le monde entier, affirme Sharad Kumar Saraf, président de la Fédération des organisations indiennes d’exportation. Nous avons besoin de plus de mesures politiques et fiscales en termes de facilité d’exercice des activités commerciales, de disponibilité des financements pour l’industrie et surtout d’une meilleure infrastructure, tantpourletransportquepourlalogistique. » Depuisqu’ilalancésonplanMakeinIndiaen septembre 2014, Narendra Modi a fait de l’industrialisation de son pays une priorité. Si plusieurs projets ont pu voir le jour comme l’implantation deDassaultàNagpur,danslecentredel’Inde,les résultats sont dans l’ensemble décevants. L’objectif de faire passer la part de l’industrie dans le PIB de 16 % à 25 % et de créer 100 millions d’emplois dans ce secteur d’ici à 2022 reste lointain, les investissements industriels étrangers ayant même reculé passant de 9,6 milliards de dollars en 2015 à 7 milliards en 2018. Résultat : la part de l’Inde dans les exportations mondiales stagne à 2 %quandcelledelaChines’élèveà18 %. Le gouvernement indien estime que la situation actuelle constitue une occasion unique de rebondir. Parmi les décisions qui pourraient favoriser l’installation d’entreprises étrangères, l’Etat envisage de mettre à leur disposition près de5 000kilomètrescarrésdeterrains,soitl’équivalentdedeuxfoislasuperficieduLuxembourg. Il s’agit d’une mesure importante dans un pays oùl’acquisitiondeterresconstituel’unedesprincipalesdifficultéspourlesinvestisseurs. Parailleurs,NewDelhiaidentifiéunedizaine de secteurs – équipements électriques, produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux, électronique, ingénierie lourde, équipements solaires, transformation des aliments, produits chimiques et textiles – comme prioritaires pour la promotion de l’industrie manufacturière. En choisissant des domaines grâce auxquels la Chine a bâti sa puissance industrielle, Narendra Modi réaffirme son désir, déjà marqué, de se situer dans le camp occidental. Le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a expliqué, fin avril, que Washington était en pourparlers avec des« amis »commel’Indepour« restructurerles chaînes d’approvisionnement mondiales » afin deréduireladépendanceàl’égarddelaChine. Soucieux de ne pas laisser passer le train, le Premierministreaannoncé,le12 mai,unplande relance de 265 milliards de dollars, soir 10 % du PIB indien, dont une bonne partie devrait justement servir à ces projets d’industrialisation. « La crisenousaapprisl’importancedelafabrication locale, du marché local et des chaînes d’approvisionnement locales », a-t-il rappelé pour justifier son ambition. Reste à savoir s’il fera mieux qu’avecleprojetMakeinIndia. @Japonlinet SFRs’estaméliorée.« Lesrésiliationsétantmoins nombreuses, le groupe peut se permettre d’être moins agressif en matière de promotions, de marketing et de publicité », souligne un gérant. Quant au rôle des contenus offerts, « il a toujours étédifficileàquantifier,poursuit-il.Laperted’exclusivité des droits de la Premier league anglaise et de la Ligue des Champions réduit de toute façonlaprimedontpouvaitbénéficierSFR. » Pour l’avenir, le groupe compte davantage sur les recettes procurées par l’entité SFR FttH, son réseau de fibre optique construit en propre dont il loue des lignes aux autres fournisseurs d’accès à Internet. Un business en plein boom. Côté contenus, Altice s’est donc plutôt lancé dans une opération dégraissage. Oublié les ambitions d’Altice Studio ; perdus les droits de la Ligue des champions sans même avoir participé à ceux pour le championnat de France ; fermée la chaîne spécialisée RMC Sport News et donc out la presse écrite sans que jamais les rédactions de Libé ou de L’Express ne donnent réellement l’impression d’avoir participé à la dynamique du groupe. La seule offensive actuellepourAlticerésidedansl’informationavec le déploiement de la marque BFM en région. Preuve sans doute qu’une page est en train de se tourner, Alain Weill lui-même semble avoir disparu de la circulation. Depuis le début de l’année, c’est Arthur Dreyfuyss, directeur général d’Altice Média et très proche de Drahi, qui est à la manœuvre d’une vaste réorganisation qui aura même emporté Damien Bernet, lui, très proche de Weill. Bernet travaille désormais chez Netflix, un poids lourd des contenus. @cy_lacarrieret @murielmottet La seule offensive actuelle pour Altice réside dans l’information avec le déploiement de la marque BFM en région Alticemetuntermedéfinitif à sesrêvesdeconvergence L’allianceentreDrahietWeillpourfonderle premieropérateurdetéléphonietotalement diversifiédanslescontenusafaitlongfeu L’Indeveutdamerlepionàla Chinedanslemonded’après LegouvernementModitented’attirer les industrielsétrangersdésireuxderéduire leurdépendanceàl’égarddePékin Opportunité Après s’être retirée des discussions sur le Partenariat économique régional global en novembre dernier par crainte d’être submergée par les produits chinois, l’Inde a récemment annoncé qu’elle n’ouvriraitplusaussilargementsesportesaux investissements des pays avec lesquels elle partage des « frontières terrestres », en d’autres termes la Chine. Bien que cette décision ne soit pas à une interdiction, mais seulement une surveillance accrue, elle arrive à un moment particulièrement sensible pour Pékin pointé du doigt par de nombreux paysoccidentaux. ClaudeLeblanc L’Armée nationale populaire (ANP) vat-elle évoluer pour devenir une force de projection extérieure ? Sa capacité d’intervention à l’étranger sera, en tout cas, gravée dans le marbre si le projet de nouvelle Constitution, proposé par la présidence algérienne, est adopté en l’état d’ici la fin de l’année. « Le président Tebboune et son armée veulent réintroduire une forme de dissuasion, explique le journaliste et chercheur au Centre d’études stratégiques pour le Moyen Orient, Abdennour Toumi. La doctrine militairedelafindesannées1970n’estpluscelle qui prévaut aujourd’hui. L’Algérie ne peut se permettre d’avoir des Etats défaillants à ses portes,enLibyeetauMali. » Théoriquement, rien n’empêche constitutionnellement le chef de l’Etat de lancer une opération extérieure. Des unités de l’ANP ont participé, à côté de l’armée égyptienne, aux guerres de 1967 et de 1973 contre l’armée israélienne. Des soldats interviennent aussi sous la bannière onusienne dans le cadre des opérations de maintien de la paix, notamment au sein de la Minusma au Mali. Selon la revue ElDjeich de l’ANP, la première mission de l’armée algérienne, de janvier 1989 à janvier 1991, a consisté à vérifier le retrait des troupes cubaines d’Angola. S’en sont suivies plusieurs autres opérations au Cambodge, à Haïti, en Ethiopie/ Erythrée,auBurundi,enRépubliqueDémocratique du Congo et aujourd’hui au Mali. Mais l’armée algérienne participe essentiellementàdestâcheshumanitairesetd’observationdescessez-le-feu. Opération Serval. En fait, Abdelaziz Bouteflika, élu en 1999, a repris une doctrine en vigueur : la non-intervention de ses troupes à l’étranger. Il considérait que le sang de ses soldats ne devait couler que pour la défense nationale. « En faisant évoluer la Constitution, la présidence algérienne envoie un message dissuasif à l’extérieur et fait comprendre qu’elle a voix au chapitre pour tout ce qui se passe à ses frontières, particulièrement en Libye, où plusieurs forces étrangères sont impliquées dans le conflit », analyse JeanFrançois Daguzan, ancien directeur adjoint à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et co-directeur de Les forces armées arabesetmoyen-orientaleschezEska. Sollicité par des pays comme la France, l’Algérie n’a jamais voulu intervenir militairement au Sahel. Seules des immixtions discrètes et ponctuelles, notamment au mont Chaambi en Tunisie, ont été observés dans le cadre de la lutte antiterroriste. En fait, les décideurs algériens ont toujours préféré privilégier la voie politique. Et Abdelatif Bouteflika n’a pas fléchi au moment du lancement de l’opération française Serval en janvier 2013 alors que certains officiers considéraient que ce n’était pas à la France d’intervenir. « Bouteflika a accepté Serval contre mauvaise fortune bon cœur, indique un observateur privilégié des relations franco-algériennes. Il avait alors pris un jugement de Salomon en permettant – une petite révolution–lesurvolducielalgérienpardesavions dechassefrançais. » Une décision qui n’a peut-être pas été étrangère à l’attaque par des membres d’Aqmi du site gazier d’In Amenas dans le sud-est algérien, une semaine après le lancement de Serval. Une opération planifiée par un ancien du GIA, Mokhtar Belmokhtar, certains terroristes passant préalablement par le Mali et le Libye. Cet assaut a achevé de convaincre de la nécessité de réviser la doctrine militaire. Enseignante à la faculté des sciences politiques d’Alger, la politologue Louisa Dris-Aït Hamadouche admet, dans un entretien à ElWatan, les évolutions pour s’adapter au contexte géopolitique et aux menaces mais regrette l’absence de débats préalables. PascalAirault @P_Airaultt Tebbouneouvrelaporteàdes opexdel’arméealgérienne AbdelazizBouteflika considéraitquele sangdesessoldatsne devaitcoulerquepour ladéfensenationale Narendra Modi mise sur une industrialisation de l’Inde. SIPA PRESS ALORS QUE LA CHINE rétablit soigneusement sa production pour relancer une économie frappée par l’épidémie de COVID-19, le pays prévoit de promouvoir davantage la vague de modèles commerciaux innovants qui surgissent dans la lutte du pays contre le virus. L’épidémie apportera des opportunités pour les cours et l’enseignement en ligne, le télétravail et les activités sur Internet, les applications 5G industrielles, le commerce et les services sans personnel et le commerce électronique de produits alimentaires frais en relation avec l’augmentation accélérée des entreprises et des services sans contact, d’après la société International Data Corporation. L’IAEN PREMIERE LIGNE ET DANS LAVIE Parlez à l’ascenseur et il vous amènera à l’étage que vous souhaitez. Un système d’ascenseur à commande vocale a été mis en service dans un hôpital de Beijing pour réduire le risque d’infection croisée. Développé par SoundAI, une entreprise technologique basée à Beijing, le système d’ascenseur a été installé dans l’Hôpital de Haidian. Il utilise des technologies de l’intelligence artificielle (IA), dont la reconnaissance vocale et la conception interactive, permettant aux passagers de contrôler l’ascenseur sans avoir à appuyer sur le bouton. Un autre système d’IAdéveloppé par le géant technologique chinois, Alibaba, permet d’identifier les passants avec de la fièvre ou sans masque dans les marchés, les gares, et autres zones piétonnes très fréquentées. Le système se base sur des technologies intégrées, dont l’imagerie thermique pour la détection de la fièvre à distance sans contact, avec une marge d’erreur de moins de 0,3 degré Celsius. En plus d’Alibaba, de nombreuses autres entreprises technologiques, telles que Megvii et Baidu, ont également développé et mis en service leurs systèmes de dépistage de la fièvre grâce à l’IA. LATENDANCE 5G Le pays a également étendu l’utilisation de la technologie 5G. Le ministère chinois de l’Industrie et des Technologies de l’Information a appelé les entreprisesdetélécommunicationàoptimiser les plans de construction du réseau 5G et à jouer pleinement leur rôle pour stabiliser les investissements et stimuler le développement de la chaîne industrielle correspondante. Une plate-forme en nuage qui combine la 5G et la réalité virtuelle (RV) a été conçue pour offrir une expérience d’achat virtuelle panoramique aux consommateurs qui restent à leur domicile. Elle sera utilisée dans une centaine d’entreprises commerciales à travers le pays, a indiqué le ministère. Basé sur la technologie 5G et l’Internet des objets, un système de verrouillage magnétique intelligent, qui a été mis en service dans les provinces du Jiangsu et du Guangdong, est capable de contrôler l’état de la porte d’une famille qui doit être isolée en raison de la quarantaine et d’en rendre compte rapidement aux travailleurs de quartier. Grâce à un robot doté de la technologie 5G, des médecins d’un hôpital de la province orientale du Zhejiang ont réalisé une échographie sur un patient à Wuhan, capitale de la province centrale du Hubei, à 700 kilomètres de là. Wuhan était épicentre de l’épidémie de COVID-19. Outre les robots 5G, des équipements intelligents, dont des caméras thermiques 5G et des moniteurs de santé 5G, ont été également mis en service pour aider les gens à maintenir une distance sociale sûre dans le contexte de l’épidémie. LAVIE EN LIGNE Alors que les gens étaient confinés chez eux à cause de l’épidémie, des modèles commerciaux innovants ont aidé les gens à vivre leur vie sans contact. En Chine, de nombreuses entreprises et sociétés se sont empressées de reprendre le travail en nuage. Pour la première fois, les employeurs, ainsi que les employés, ont dû se familiariser avec les outils de télétravail tels que les vidéoconférences et les kits de bureau en ligne. DingTalk, une application de communications d’Alibaba, a déclaré avoir été utilisée par plus de dix millions d’entreprises et plus de 200 millions de personnes.Poursatisfaireàcettedemande énorme durant les heures de pointe, DingTalk a ajouté plus de 100 000 serveurs afin de maintenir la stabilité de l’application. Des sociétés Internet, dont NetEase, ont récemment proposé une chaîne complète de plate-forme de recrutement sans contact avec la soumission de curriculum vitae en ligne et des entretiens en ligne également. Les candidats peuvent signer des contrats, participer à des ateliers de formation et même débuter le travail sur Internet. Un certain nombre de sites touristiques ont exploité la technologie de la RV pour permettre aux touristes bloqués chez eux de découvrir des paysages naturels sans être exposés au virus, selon Gao Zheng, un responsable du ministère chinois de la Culture et duTourisme. Le ministère chinois du Commerce a encouragé ce modèle commercial innovant qui a vu le jour durant l’épidémie, qui a montré de nouvelles tendances en matière d’informatisation, de grande qualité, de commodité et de convergence dans le développement de l’industrie des services. Xinhua communiqué Une employée utilise un robot pour désinfecter l’extérieur d’un centre commercial à Wuhan, capitale de la province chinoise du Hubei (centre), le 12 avril 2020. Le robot a grandement augmenté l’efficacité du travail de désinfection. XINHUA / CHEN ZHENHAI Lesnouvellestechnologiesrenforcentlesservices sanscontactdanslecontextedel’épidémiedeCOVID-19 Une femme consulte un médecin de l’hôpital de Shangdi via un robot intelligent, le 1er avril 2020 dans un immeuble de bureau à Zhongguancun, un quartier de haute technologie à Beijing, en Chine. Le robot intelligent récemment mis en service a aidé les employés à consulter un médecin et a favorisé la reprise des activités des entreprises. XINHUA / REN CHAO Des employés disposent à l’avance des repas sur les tables des élèves dans un gymnase transformé en cantine, dans le lycée Changjun Xiangfu, à Changsha, dans la province chinoise du Hunan, le 21 avril 2020. XINHUA / WANG YUGUO APRÈS NETTOYAGE, désinfection et remise en état du gymnase, les élèves du lycée Changjun Xiangfu de Changsha, capitale de la province du Hunan (centre de la Chine), ont pu faire la queue pour entrer dans la salle de sport de leur école afin d’y prendre leur repas. Le gymnase de 800 mètres carrés a été transformé en une grande cantine aux airs de « salle d’examen » avec des tables espacées de 1,5 mètre les unes des autres et un sol recouvert d’une toile en nylon imperméable. La province du Hunan, une province voisine du Hubei (centre), n’a signalé aucun nouveau cas depuis plus de 30 jours et a fourni beaucoup de soutien à la lutte mondiale contre le COVID-19. Le 13 avril, un deuxième groupe d’élèves a repris les cours à Changsha. Après les élèves de terminale, qui ont débutéleurnouveausemestrele7 avril, tous les autres élèves des lycées et des collèges ont repris le chemin des salles de cours. Différentes écoles ont mis en place leurs propres solutions pour faire de petits groupes afin d’assurer la sécurité des enseignants et des élèves. « Gardez vos distances et ne parlez pas », a lancé à l’entrée du gymnase Li Jianpeng, directeur adjoint du département de l’éducation du lycée Changjun Xiangfu,afindemaintenirl’ordre.« Ilest plus facile de gérer la restauration des élèves dans le gymnase. Cela évite les files d’attente à la cantine, et les risques qui en découlent », a ajouté M. Li. Face au grand nombre d’élèves, ce lycée a adopté une organisation par roulement pour que les élèves des différentes classes déjeunent soit à la cantine de l’école, soit dans le gymnase soit dans les salles de classe. Alors que les élèves de seconde et de terminale prennent leur repas à la cantine, deux élèves par table, les autres lycéens déjeunent dans leurs salles de classe où le personnel de la cantine leur apporte les repas. M. Li a déclaré que cette organisation peut non seulement compenser la pénurie d’espace et de sièges dans la cantine d’origine pendant cette période spéciale de lutte et de prévention de l’épidémie, mais aussi s’assurer que tous les élèves peuvent terminer leur repas dans un délai raisonnable. « Manger dans le gymnase, c’est comme participer à un examen, dans un environnement calme et confortable. L’intervalle de 1,5 mètre entre chaque personne me rassure », a déclaré Yu Yan, un élève en classe de première, ajoutant que cette mesure permettait d’économiser du temps et d’assurer la sécurité des élèves. Le lycée No.1 de Changsha a, pour sa part, fait en sorte que tous ses élèves puissent déjeuner dans les salles de classe. « Les repas sont distribués chaque jour par la cantine et une entreprise de restauration », a expliqué Zheng Xiuhe, directeur adjoint du département des affaires générales de l’école. Après la distribution des repas, les élèves mangent à leur propre bureau tout en gardant une distance de sécurité de 1,5 mètre. « Cette façon de faire assure la sécurité des enseignants et des élèves. Nous espérons également que cela aidera nos élèves à adopter de bonnes habitudes d’hygiène », a déclaré M. Zheng. Le 6 mai, 57 800 élèves de terminale des lycées et des écoles professionnelles et techniques de Wuhan sont retournés à l’école, signe de la réouverture partielle des écoles dans toutes les régions du niveau provincial de Chine. Les écoles chinoises accueillent cette rentrée spéciale en adoptant les mesures de prévention et de contrôle de l’épidémie. Xinhua Chine :leHunanassurelasécuritédesrepasdesélèves aprèslaréouverturedesécolessecondaires (XINHUA / CHEN ZHENHAI) Des élèves prennent leur repas dans un gymnase transformé en cantine, dans le lycée Changjun Xiangfu, à Changsha, dans la province chinoise du Hunan, le 21 avril 2020. 8 l’Opinion 19 mai 2020 considérablement le nombre de candidats potentiels », souligne M. Levie chez Box. « Même sans augmenter les salaires, vos employés disposeront de davantage d’argent s’ils peuvent travailleroùilsveulent. » Certains ont déjà décidé de déménager. Heidi Kasemir, 31 ans, occupe un poste de développeur dans une start-up d’apprentissage en ligne et prévoyait depuis longtemps de quitter SanFrancisco.L’épidémiedecoronavirusaaccéléré ses projets. Mi-avril, après avoir vécu près de huit ans dans la baie de San Francisco, elle a négocié avec son entreprise de pouvoir travailler à distance depuis Salt Lake City en échange d’unebaissedesalairede25 %. « Ce n’est pas si difficile à faire et je suis sûre que j’aurai une meilleure qualité de vie en habitantailleurs »,explique-t-elle. Reste qu’il pourrait être délicat pour ces entreprises d’entretenir le niveau de communication et de camaraderie nécessaire à l’innovationetaudéveloppementdeproduitssiungrand nombred’employéstélétravaillent. « Elles devront trouver des solutions pour bâtir une culture d’entreprise à distance, ce qui est vraiment compliqué », prévient Gene Munster, analyste de longue date du secteur technologique et désormais associé gérant chez Loup Ventures,unesociétédecapital-risque. Récemment, Twitter a organisé pour la première fois de manière virtuelle sa semaine mondiale de l’innovation (« Hack Week »), qui se tient d’habitude dans ses bureaux. « Chacun pouvait participer de la même manière et partager cette expérience », indique Jennifer Christie, directrice des ressources humaines. Lorsque les bureaux rouvriront, elle souhaite continuer d’accueillir virtuellement les nouvelles recrues quin’ontpasàtravailleràSanFranciscoetquiauparavant s’y rendaient pour l’occasion en avion. « Nouspensonstoutsimplementquec’estmieux pournosemployésd’effectuerleurintégrationlà oùilsvivent »,déclareMme Christie. Elle affirme que l’entreprise est désormais plus ouverte au fait de recruter des collaborateurs « où qu’ils se trouvent » et de ne pas forcément les contraindre à venir travailler dans les bureaux de Twitter, ni même à vivre dans une ville où l’entreprise dispose de bureaux. Elle estime toutefois que les employés préféreront en majoritépartagerleurtempsdetravailentreleur domicileetlebureau,plutôtquetélétravailleren permanence. « Les employés apprécient le fait de venir sur place et de collaborer avec leurs collègues. Nous avons surtout observé un désir de flexibilité », note-t-elle, en citant une enquête réalisée aucoursdesdernièressemaines. Brent Hyder, directeur des ressources humaineschezSalesforce,pensequedenombreux employésdugéantdeslogicielsd’entreprisesouhaiterontretrouverleurbureaulorsquecelasera possible, même s’ils ne s’y rendront peut-être pastouslesjours. « Les gens vont continuer à avoir besoin de lien social », prédit-il. « Ils voudront toujours se réunir dans une salle pour chercher ensemble dessolutionsauxproblèmes. » Al’avenir,lesmodesdetravaildanslesentreprises technologiques dépendront des fonctions qu’occupent les équipes. Celles qui conçoivent le matériel, par exemple, auront plus de mal à télétravailler. Apple a déjà commencé à rappeler certains employés sur son site californien de Cupertino, y compris un petit pourcentage de sesingénieursenmatérielinformatiqueetdeses designers industriels, selon des sources proches del’entreprise. Jason Owen-Smith, professeur de sociologie à l’Université du Michigan, a étudié la dynamiquedessecteursdelahautetechnologieetobserve que, d’après les recherches, le fait que les employésnepartagentpaslemêmeespaceades inconvénients : certaines interactions fortuites et fugaces aboutissent parfois à la production de nouvelles idées, et à la création de nouvelles équipes.« Ilestprobablequ’ilsoitplusdifficilede lancerdenouveauxprojets »,indique-t-il. Facebook veut essayer d’offrir une certaine flexibilité à ses employés tout en continuant de favoriserletyped’innovationquinaîtdupartage d’unmêmelieu,déclareBrynnHarrington,viceprésidentedesressourceshumaines. L’entreprise a fourni à chacun un système de vidéoconférence mais il est recommandé aux managers d’éviter d’enchaîner les appels vidéo, explique-t-elle. « Nous sommes une entreprise trèsportéesurlesréunions. » Mme Harrington ne croit pas en la disparition définitive des bureaux. « Je ne vois pas d’exemples remarquables d’entreprises ayant réussiàinnoveravecdeséquipesàdistance. » . KatherineBindley KonradPutzieretTrippMickle ontcontribuéàcetarticle (Traduitàpartir delaversionoriginaleenanglais parAnneMontanaro) Il y a quatre ans, Aaron Levie, cofondateur de Box, spécialisé dans l’informatique en nuage, avait décidé de transférer ses bureaux dans un nouveau site en briques rouges orné du logo de l’entreprise. Le bâtiment cochait toutes les cases de la Silicon Valley : une cafétéria à l’élégance étudiée, des parties communes agrémentées de hamacs orange et un bar installé dans un ancien combi Volkswagen proposant thé Kombucha et caféglacéserviàlapression. M.Levieetsonéquipen’ontpasmislespieds dans ces bureaux depuis huit semaines mais, aux dires du dirigeant, cela n’a pas empêché l’entreprise de travailler normalement – bien au contraire. L’équipe commerciale a multiplié les contacts clients, la participation aux réunions hebdomadaires du personnel a augmenté et le temps économisé sur les déplacements a permis àM.Leviedetravaillerdavantage. Partisandelonguedatedelaflexibilitéautravail, M. Levie se félicite de « ne pas avoir à faire la navetteentrelamaisonetlebureau,niàprendre l’avion pour des rendez-vous d’affaires, ni tout un tas d’autres choses qui s’immiscent habituellement dans votre journée de travail ». Box propose des services de stockage en ligne et de partage de fichiers qui peuvent être utiles dans detellessituations. SelonM.Levie,mêmelorsqu’unretoursurle lieu de travail sera sans danger, de nombreuses entreprises technologiques permettront à une partie de leurs employés de travailler à distance, bienau-delàdelaSiliconValley. Dans tous les secteurs, les entreprises tentent d’évaluer à quel moment et selon quelles modalités leurs personnels pourront réintégrer leurs bureaux. Cependant, dans les technologies, le lieu de travail fait véritablement partie de l’identitédesentreprises. La Silicon Valley, succession de petites villes et de complexes de bureaux au sud de San Francisco, est assimilée au secteur technologique et les campus d’entreprises comme Facebook, Google–filialed’Alphabet–ouApplesontconnus pour leurs infrastructures innovantes, leurs espacesdecollaboration,leurstablesdeping-pong etleurscafétériaspermettantaupersonneldene jamais avoir à sortir pour déjeuner – voire, souvent,demangergratuitement. Ces dernières années, les géants des technologies ont investi davantage encore dans leurs bureaux. Apple a dépensé 5 milliards de dollars pour son siège à l’allure de vaisseau spatial, Salesforce.com s’est fait construire une tour de 61 étages au cœur de San Francisco et le personnel d’Amazon.com a emménagé dans des sphères végétalisées à Seattle. Ces espaces ouverts sont conçus pour que les employés puissent facilement entrer en contact les uns aveclesautres–unconceptàl’exactopposédela distanciationsociale. Mais le secteur emploie essentiellement des cols blancs et prône l’adaptabilité, et les entreprises qui le composent ont été parmi les premières à faire télétravailler leur personnel lorsque l’épidémie de coronavirus a paralysé l’activité aux Etats-Unis en mars. Deux mois après s’être faites à cette nouvelle réalité, les entreprises technologiques affirment que l’impactseradurablesurleursmodesdetravailetde recrutement. Peu d’entre elles sont allées aussi loin que Twitter : son directeur général, Jack Dorsey, a déclaré la semaine dernière que la plupart des employés seraient autorisés à travailler depuis leur domicile de manière permanente. Google etFacebooklaisserontleurpersonneltélétravailler au moins jusqu’à la fin de l’année et le mois dernier, Marc Zuckerberg, le directeur général de Facebook, a annulé toutes les réunions de 50 personnesouplusjusqu’àfinjuin 2021. Les entreprises technologiques testent des solutions virtuelles pour organiser les conférencesetlancementsdeproduitsessentielspour assurer la fidélisation et l’enthousiasme de leurs développeurs et de leurs clients. Apple compte tenir sa première conférence de développeurs entièrementenligneenjuin. Le passage au télétravail présente des avantages aux yeux de certains dirigeants d’entreprises technologiques, comme le fait de pouvoir répartir plus rapidement leurs effectifs au-delà des centres traditionnels de la Côte Ouest que sont Seattle et la baie de San Francisco. Du fait del’explosiondesprixdel’immobilieretducoût de la vie, il est devenu très difficile d’attirer les talentssuffisantsdanscesrégions,quelesgéants des technologies se sont vus accuser de rendre inabordables. Amazon, Google et Apple ont massivement investi à l’extérieur de ces zones et M. Zuckerberg déclarait déjà en octobre que Facebook axait essentiellement sa croissance en dehors de labaiedeSanFrancisco. La pandémie va jouer le rôle d’accélérateur, selon José Cong, un conseiller en recrutement quiatravailléchezAppleouGoogle. « Aujourd’hui, lorsque l’on évalue ce que coûte le recrutement d’un collaborateur dans la baie de San Francisco, les loyers atteignent des niveaux extravagants », observe-t-il, ajoutant que les avantages accordés aux employés sont coûteux eux aussi. « En plus de cela, si vous êtes une entreprise comme Google, vous allez dépenser des sommes folles dans les services de restauration. » Silesemployésnesontplusobligésdetravailler au siège, de nouveaux avantages pourraient leur être offerts, comme une indemnité journalière pour les repas ou des séjours hors site permettant aux équipes travaillant à distance de se réunirpendantquelquesjours,indiqueM.Cong. « Vous pouvez recruter n’importe où. C’est vraiment fantastique parce que cela augmente DanslaSiliconValley,lelieudetravailfaitpartiedel’identitédesentreprises.IcilecampusFacebookàMenloPark,enCalifornie. Lebureaunomade,uneidéequifaitsonchemin dans laSiliconValley Edited from the original BEY MEDIAS PRESSE & INTERNET SASU - 14, rue de Bassano, 75116 Paris - www.lopinion.fr - Actionnaire : Bey Médias SAS. Président, directeur de la publication : Nicolas Beytout. Rédacteur en chef : Rémi Godeau. Rédacteurs en chef adjoints : Olivier Auguste, Marie-Catherine Beuth et Emmanuel Ginisty. BEY MEDIAS PUBLICITÉS - Tél : 01 40 69 46 96. Directrice de la régie publicitaire : Brune Le Gall. Publicité commerciale : Ronan Daligault, Pierre-Louis Orsini. Publicité financière : Nicolas Wattinne. SERVICE ABONNEMENTS L’OPINION : 4, rue de Mouchy 60438 Noailles Cedex - Tél : 01 55 56 70 73 du lundi au vendredi de 9h à 18h - Email : abonnements@ lopinion.fr. Formule d’abonnement pour 1 an – France métropolitaine : 342 €. IMPRESSION : Paris Offset Print (La Courneuve). Dépôt légal mai 2013 – ISSN : 2266-9922 / CPPAP : 0921 C 91894. Papier produit à partir de fibres issues de forêts certifiées gérées durablement. Origine du papier : Norvège. Taux de fibres recyclées : 0%. Eutrophisation : Ptot 0,022 kg / tonne de papier Lamatinaled’Europe1 MatthieuBelliard 6h-9h Retrouvez à 7h50 « l’Opinion » de Nicolas Beytout SIPA PRESS Appleadépensé 5 milliardsdedollars poursonsiègeàl’allure devaisseauspatial, Salesforces’estfait construireunetourde 61 étagesàSanFrancisco etAmazonaemménagé dansdessphères végétaliséesàSeattle
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