QUE CHOISIR n°635 - Page 6 - 635 Indépendant et engagé, votre magazine est, par ses tests, ses enquêtes et ses conseils pratiques, au cœur de vos préoccupations de consommateurs citoyens responsables. QUE CHOISIR, c’est plus qu’un magazine! C’est le mensuel de l’Union fédérale des consommateurs-Que Choisir, 1re association de consommateurs de France. LA PROXIMITÉ Notre réseau de 135 associations locales, situées partout en France et animées par des milliers de bénévoles, est à votre écoute pour régler vos litiges, vous aider et vous conseiller dans vos démarches. LE PARTAGE Nous relayons vos témoignages, vos alertes et vos besoins pour que votre voix soit entendue. L’EXPERTISE Nos experts décortiquent les marchés, analysent les nouvelles tendances de la consommation, mettent en lumière les abus et vous éclairent dans vos actes d’achat et vos décisions. L’ENGAGEMENT Nos juristes saisissent les autorités compétentes et la justice pour faire cesser et sanctionner les agissements illicites, et obtenir l’indemnisation des victimes. L’ACTION Nos lobbyistes interviennent auprès des pouvoirs publics et des professionnels pour faire évoluer la législation et la réglementation en votre faveur. Nous sommes indépendants grâce à vous, agissant pour et avec vous! L’UFC-Que Choisir est également présente sur: Quechoisir.org UFC-QUECHOISIR 233, boulevard Voltaire, 75555 Paris Cedex 11 0143485548. RAWPIXEL.COM/SHUTTERSTOCK 2 QUE CHOISIR 635 ◆ MAI 2024 Présidente et directrice des publications: Marie-Amandine Stévenin •Relations presse/communication: Corentin Coppens, Lauren Nelson, Anne Vesque •Directeur général délégué: Jérôme Franck RÉDACTION •Rédacteurs en chef: Arnaud de Blauwe (QC mensuel), Franck Attia (QC en ligne), Pascale Barlet (QC Argent et QC Pratique), Perrine Vennetier (QC Santé) – Assistante: Catherine Salignon •Secrétaire général de la rédaction: Laurent Suchowiecki •Enquêtes, reportages: Elsa Abdoun, Morgan Bourven, Cyril Brosset, Elsa Casalegno, Camille Gruhier (cheffe de rubrique tests), Fabienne Maleysson, Yves Martin, Élisa Oudin, Anne-Sophie Stamane, Pierre Thieulin-Pardo, Fabrice Pouliquen, Audrey Vaugrente •Secrétariat de rédaction: Valérie Barrès-Jacobs, Marie Bourdellès, Gaëlle Desportes, Leslie George (QC en ligne) •Conception graphique: Agence MaGwen et Véronique Puvilland •Maquette: Ludovic Wyart (directeur artistique), Sandrine Barbier, Clotilde Gadesaude, Capucine Ragot (première rédactrice graphiste) •Responsable photo: Catherine Métayer •Infographie/maquette web: Carla Félix-Dejeufosse (première rédactrice graphiste), Laurent Lammens, Inès Schneider-Blanjard •Documentation: Frédérique Vidal (responsable), Audrey Berbach, Véronique Le Verge, Stéphanie Renaudin •Ont collaboré à ce numéro: Boris Cassel, Géraldine Pasquier QUE CHOISIR ÉDITION •Laure Sassier ESSAIS COMPARATIFS •Éric Bonneff (directeur), Karima Amziane, Laurent Baubeste, Ozkan Calisir, Éric Ébran, Vincent Erpelding, Léa Girard, Aissam Haddad, Soraya Hamimi, Gaëlle Landry, Lars Ly, Neil McPherson, Mélanie Marchais, Mickaël Marques De Oliveira, François Palemon, Séliha Redjadj, Gabrielle Théry, Domitille Vey OBSERVATOIRE DE LA CONSOMMATION •Grégory Caret (directeur), Noé Bauduin, Isabelle Bourcier, Ingrid Stiemer, Juliette Vacant ADMINISTRATION •Florence Thomassin (directrice administrative et financière), Sandrine Flagel, Audrey Saint-Dizier •Ressources humaines: Véronique Couesnon (directrice), Aude Dauchy, Toutou Gassama •Gestion de projets: Régis Ghozlan (directeur) •Informatique: Jean-Baptiste Goupille (directeur technique), Damien Bidault, Rémy Ebbo, Gilles Jean, Willy Julan, Nicolas Lavergne, Christophe Marti, Zohra Sourta, Alexis Ulrich •Logistique: Philippe Ballon (responsable), Assia Chetioui, Franck Delhomel, Alia Mansouri MARKETING/DIVERSIFICATION •Laurence Rossilhol (directrice), Delphine Blanc-Rouchosse, Justine Boduch, Jean-Louis Bourghol, Marie-Noëlle Decaulne, Jean-Philippe Machanovitch, Francine Manguelle, Steven Phommarinh, Nicolas Schaller, Ibrahim Sissoko •Courrier: Brigitte Bouttier DIRECTION DE L’INFORMATION JURIDIQUE •Sophie Herbreteau (directrice), Murielle Bailly, Christina Bamba, Magali Berthe, Lisa Charaf Zadah, Clémentine Chervin, Emmanuel Eslin, Rachelle François, Ruth Kinouani, Julia Le Roux, Laure Littardi, Patricia Lorineau, Justine Marenda, Krystèle Mensah, Emmanuelle Pozza, Samir Victor •Service abonnements: Que Choisir, 45, avenue du Général-Leclerc, 60643 Chantilly Cedex. Tél.: 0155567109 •Inspection des ventes et réassorts diffuseurs: MP Conseil •Tarifs: 1 an, soit 11 numéros: 49 €; 1 an + 4 hors-séries: 67 €; 1 an + 4 hors-séries + 4 pratiques: 94 € UFC-QUE CHOISIR •Association à but non lucratif •Bureau du conseil – Présidente: Marie-Amandine Stévenin – Vice-présidents: Daniel Bideau, Marina Secall-Bersinger – Trésorier: JeanPierre Jokiel – Trésorier adjoint: Arnaud Lajugie – Secrétaire: Michel Namy •Conseil d’administration: Philippe Balbastre, Xavier Kruger, Jean-Christophe Lampe, Jean-Pierre Lhermitte, Odette Mairey, Anne Morin, Ludivine Payraud, Philippe Quique, Marie-Christine Radenne; et pour le personnel, Arnaud de Blauwe, Patricia Lorineau ACTION POLITIQUE •Cédric Musso (directeur) •Études et Lobby: Antoine Autier (responsable), Olivier Andrault, Lucile Buisson, Mélissa Chevillard, Christelle Leduc, Frithjof Michaelsen, Benjamin Recher,Maria Roubtsova •Juridique:Magali Buttard (responsable), Brune Blanc-Durand,Gwenaëlle Le Jeune,Véronique Louis-Arcène,Candice Meric,Mélanie Saldanha •Relations associatives: Myriam Bos, Christine Chaton, Catherine Guillerm, Cloé Leyrat, Nadia Mamri, Karina Novelli, Jean-Philippe Randriambelson IMPRESSION •RotoFrance, rue de la Maison-Rouge, 77185 Lognes. Distribué par MLP. Dépôt légal n° 144. Commission paritaire n° 0727 G 82318. Tous droits de reproduction et d’adaptation réservés. Ce numéro comporte un encart abonnement QC Santé, un encart «Carte d’information juridique» sur une partie du tirage et un encart sous enveloppe collée en 4e de couverture sur une partie du tirage. Numéro imprimé avec des encres blanches sur papier certifié FSC PEFC Holmen XLNT. 1580 kg CO2 /T papier. Origine papier: Norrköping, Suède. Pas de fibres recyclées. CoC inspecta 2177. ISSN 0033-5932. MAI 2024 ◆ 635 QUE CHOISIR 3 SOMMAIRE N° 635 – MAI 2024 CRÉDITS DE COUVERTURE CAROLINE MOUREAU ; J. SANCHEZ MINGORANCE/ADOBE STOCK ; IGNATIEV-KERVII-AKINBOSTANCI/ISTOCK C. MOUREAUX ; A. LECOMTE ; CLOD ALERTE ZONE ROUGE DÉCRYPTAGE LABO INFO EXPRESS Toute la consommation en bref 4 ZONEROUGE Liaison ferroviaire Lyon-Turin • Un coup à 30 milliards ! 10 ÇA POURRAIT VOUS ARRIVER Automobile • L’auto de Oui-Oui a bien dormi 16 ALERTE Jeux olympiques • Des produits dérivés venus d’ailleurs 18 Application routière Waze • Victimes de son succès 21 Crèmes solaires visage • Un tiers ne protège pas assez 24 Médicaments • Pharmaciens peu vigilants 26 LABO Levures et robots pâtissiers • Faites vos gâteaux ! 28 Matelas • Cinq repères à l’achat 34 Tablettes tactiles 36 Réfrigérateurs-congélateurs • Opération portes ouvertes 37 Autonomie des voitures électriques • Des constructeurs trop optimistes 40 Pneus été 42 Testé ailleurs 43 DÉCRYPTAGE Internet, téléphonie • C’est le moment d’aller voir ailleurs 44 Fonds verts • Repérer les plus fiables 50 Vélos électriques reconditionnés • De bonnes affaires... jusqu’à quand ? 52 FORUM Vos courriers, vos questions et nos réponses 56 TOUT S’EXPLIQUE Boissons gazeuses • L’impact des bulles de CO2 60 Prospection commerciale • Comment diable ont-ils eu mes coordonnées ? 61 Assurance • Sinistre déclaré tardivement 61 AUSSI UNE ASSOCIATION Le billet de Marie-Amandine Stévenin et les actions nationales 62 Les associations locales et leurs actions 64 SAUVERLEMONDE 66 … et surtout leur business 10 Liaison ferroviaire Lyon-Turin Un coup à 30 milliards ! Le numéro 634 de Que Choisir a été tiré à 456 750 exemplaires. 44 Internet, téléphonie C’est le moment d’aller voir ailleurs 18 Jeux olympiques Des produits dérivés venus d’ailleurs 24 Crèmes solaires visage Un tiers ne protège pas assez LABO INFOEXPRESS ARNAUD DE BLAUWE RÉDACTEUR EN CHEF ÉDITO A. LECOMTE 4 QUE CHOISIR 635 ◆ MAI 2024 Des antibiotiques largementprescrits hors indication Nos piliers D ans ce numéro, une enquête sur le projet ferroviaire Lyon-Turin? Voilà qui pourrait étonner certains de nos lecteurs! Qu’ils se rassurent,nousnenoussommespastransformés enjournalspécialisédansleBTP!Nospilierssont solides: vousaiderdansvosachats;c’estlavocation première de nos célèbres tests comparatifs, regroupésaucentredevotremagazine.Vousdonnerdessolutionspratiquespourvousguiderdans les décisions les plus diverses que vous avez à prendre; c’estl’ambitiondesarticlespubliésdans lesrubriques«Décryptage»ou«Touts’explique». Que Choisir vous met aussi en garde, vous révèle descomportementsetdespratiquesnuisibles,ou encore des arnaques; c’est le rôle attribué à notre rubrique«Alerte».Etbiensûr,nousn’oublionspas devousdonnerlaparole,derelatervosexpériences deconsommateurs; c’estl’objetdenotretoujours populaire«Forum»(lecourrierdeslecteurs)etde la double page, très appréciée, «Ça pourrait vous arriver».Pourautant,cetteproximitéavecvospréoccupations de tous les jours ne nous empêche pas de prendre de la hauteur, à l’heure où notre société connaît de fortes turbulences. Ainsi, alors queledérèglementclimatiqueinquiète,lesnotions de consommation responsable et de développement durable ont émergé. Dans le même temps, en France tout au moins, les finances publiques se sont asséchées, ce qui oblige l’État à faire des choix drastiques dans des domaines aussi sensibles que la santé, l’éducation… Et nous sommes tous concernés! C’est donc à l’aune de ces considérations que nous avons ouvert le dossier du Lyon-Turin,un défi hors norme dont on parle finalementpeu.Parsadurée,lamanièredontlesÉtats et l’Europe le «managent», par son coût exorbitant, par son intérêt économique et son impact écologique,ilnousinterrogetousetdoitnousfaire réfléchir sur l’évolution de nos sociétés. Resituer votre quotidien dans un univers plus vaste: c’est bien, aussi, l’un des piliers de Que Choisir. Il était bon de le rappeler à travers cet éditorial! ◆ D. ZINKEVYCH/ALAMY-PHOTO12 M É D I C A M E N T S La justice de nouveau saisie À la suite des plaintes déposées depuis un an par des patients souffrant des effets indésirables des fluoroquinolones, lepôledesantépubliqueduParquet de Paris a ouvert une enquête pour tromperie et blessures involontaires. Ces antibiotiques ont provoqué des atteintes des tendons et des muscles,voiredestroublespsychiatriques, cardiaquesouneurologiques.Ilssont normalement réservés à des infections bactériennes sérieuses, mais leur usage s’est étendu à de banales otites, cystites ou sinusites, ce qui a multiplié les effets indésirables chez des patients qui n’auraient jamais dû y être exposés. L’Agence européenne du médicament (EMA) a confirmé que les deux tiers des prescriptions de fluoroquinolones se font en dehors de leurs indications. Reste à savoir si les médecins fautifs seront poursuivis par la justice.Ils n’ont pour le moment jamais été inquiétés dans les scandales liés aux médicaments, tels que ceux du Mediator ou de la Dépakine. ◆ S U C R E A J O U T É Toujours trop présent L es proportions sont impressionnantes: 84% des charcuteries,60%desplatspréparés et 40% des petits pots pour bébés, comme une très large majorité des produitstransformés,comportentau moinsunvecteurdegoûtsucré(sucre blanc, miel, édulcorants…), selon les calculs de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses).Unemauvaisenouvellepour notre santé, car «le plaisir qui y est associé nous pousse à augmenter la prise alimentaire, et donc à accumuler les calories», nous expliquait en 2020 Sabine Houdart, coordinatrice scientifique de l’unité d’évaluation des risques liés à la nutrition au sein de l’Anses.Raison pour laquelle l’agence recommande «la réduction globale du goût sucré de l’alimentation». Certes, par rapport à la précédenteanalyse(2012),ontrouvebien plusdeplatspréparés(painsdemie, sauces,céréalesdupetit-déjeuner…) sanssucresajoutés.Maislaprésence de produits sucrants «reste élevée» prévientl’Anses,quiappellelesfabricants à «poursuivre les reformulations». Côté boissons sans alcool, c’estmieux:-7%desucresentre 2013 et 2019 en France. Et ce recul «n’a pas, la plupart du temps, été compensé par l’ajout d’un édulcorant», préciseJulieGauvreau-Béziat,cheffe de l’unité observatoire de l’alimentation à l’Anses. Un point positif qui s’explique notamment par la mise en place, en 2018, d’une taxe sur les adjonctions de sucre et d’édulcorants dans les boissons. ◆ Guider, alerter, faire réfléchir Laplupartdespetitspots pourbébéscomportent dessucresajoutés. INFO EXPRESS MAI 2024 ◆ 635 QUE CHOISIR 5 C haque Français jette 561 kg de déchets par an, un poids qui ne cesse de progresser. Mauvaise pour l’environnement, cette accumulation l’est aussi pour les contribuables. Afin de trouver les 11 milliards d’euros nécessairesàlacollecteetautraitement denospoubelles,lescollectivitéslocales recourent majoritairement à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (Teom). Selon une étude de notre Observatoire de la consommation, son montants’estalourdide6%entre 2020 et 2022, passant de 118 à 125 €, en moyenne,par an et par habitant.Pire,de gros écarts apparaissent entre les communes. Des exemples ? À Brest (29), les particuliers déboursent moins de 70 € par an, tandis qu’à Marseille (13), ils paient 217 €. Ironie de l’histoire, les ménages ne sont pas taxés en fonction des quantités qu’ils jettent car la Teom est établie sur la base de la valeur locative cadastrale des logements; c’est une solution de facilité pour les collectivités locales. Elles ont pourtant à leur disposition d’autres sources de financement, plus justes et plus efficaces, comme la redevance d’enlèvement des ordures ménagères (Reom), calculée en fonction des volumes de déchets enlevés. ◆ Les ménages ne sont pas taxés selon les quantités jetées V. JOLY/ABC-ANDIA; FOURMY/ANDIA; S. ORTOLA/REA E n réaction au mouvement des Gilets jaunes, le gouvernement avait mis sur pied le Grand débat national et invité les Français à exprimer leurs doléances. Or ces contributions sont, pour l’instant, restées lettre morte. Leur accès est limité à quelques équipes de recherche et aucune exploitation sérieuse n’a été menée sur leur contenu. C’est ce que nous apprend le documentaire d’Hélène Desplanques, « Les doléances », disponible sur France.tv (chercher ce titre sur la plateforme puis cliquer sur «Vidéos»).La baisse du pouvoir d’achat, mais également toutes les questions de santé – déserts médicaux, coût des soins, etc. – et la fracture entre métropoles richement dotées et zones rurales nourrissent l’essentiel des griefs. D’après un consultant à qui une analyse du corpus de textes avait été demandée, une centaine de propositions reviennent si souvent qu’elles revêtent probablement un caractère transpartisan. Mais une actualité chassant l’autre, ces suggestions sont rapidement passées au second plan, et les 12 millions d’euros d’argent public qui avaient été engagés pour le Grand débat sont partis en fumée. Constatant l’ampleur de la participation (plus de deux millions de réponses) et « l’érosion inquiétante de la confiance des citoyens envers les institutions », MariePochon,députéedelaDrôme(Écologiste-NUPES), a présenté avec plusieurs de ses collègues une proposition de résolution invitant le gouvernement à financer la mise en accès libre des doléances sur un site dédié,tout comme la recherche publique à leur sujet. ◆ C A H I E R S D E D O L É A N C E S Que contiennent-ils ? D É C H E T S M É N A G E R S Plus de poubelles, plus de taxes Réfréner notre fièvre acheteuse reste le meilleur moyen de préserver la planète. Problème, beaucoupestimentquelasobriété devrait surtout être l’affaire des autres… À la question: «Diriezvous qu’aujourd’hui, en France, les gens consomment trop?», 83 % des personnes interrogées par l’Agence de la transition énergétique (Ademe) répondent oui. Or,lorsque la demande porte sur leur propre foyer,elles ne sont plus que 28% à le penser.Autre résultat: seule une minorité envisage d’agir sur ce qui pèse le plus dans la balance environnementale, à savoir l’usage de la voiture, la consommation de viande et le recours au transport aérien. S O B R I É T É C’est pas moi, c’est les autres! Un énorme gâchis U n total de 466 millions d’euros, c’est le montant des fraudes détectées en 2023 par l’Assurance maladie. L’occasion pour cet organisme de témoigner auprès des médias de sa lutte contre les pratiques préjudiciables aux comptes sociaux. Mais son action montre surtout à quel point la triche a évolué dans ses formes. Car si les assurés étaient les plus nombreux à frauder, ils n’ont pas coûté le plus. En effet, les professionnels de santé sont à l’origine de près de 71% des sommes indûment perçues! Les pharmaciens restent les «champions»,avecunpréjudiceévaluéà60 millions d’euros, mais ils sont désormais talonnés par les centres de santé (58 millions d’euros). L’entrée fracassante de ces derniers dans le « top 3 de la fraude » a d’ailleurs incité l’Assurance maladie à leur coller aux basques. Ainsi, 200 centres ophtalmologiques, dentaires ou ophtalmo-dentaires ont subi un contrôle depuis 2021, et 21 ont écopé d’un déconventionnement l’an dernier. Ces établissements, qui ont poussé comme des champignons dans les zones où l’accès aux soins est difficile, ont prospéré notamment grâce au tiers-payant systématique. Les audioprothésistes ne sont pas en reste: galvanisés par le développement du 100 % santé, certains ont franchi le pas de l’illégalité, engrangeant frauduleusement plus de 21 millions d’euros en 2023. u A S S U R A N C E M A L A D I E La lutte contre la fraude s’intensifie C réée en 2019, la coopérative Railcoop avait l’ambition de relancer la liaison en train Lyon-Bordeaux, abandonnée par la SNCF. Un trajet qui devait marquer plusieurs haltes (Périgueux, Limoges, Montluçon…). Mais, malgré la réunion de 14500 sociétaires, Railcoop n’a jamais réussi à boucler le budget nécessaire à la mise en œuvre de son projet. La période de redressement judiciaire ouverte mi-octobre 2023 ne lui a pas permis de trouver les capitaux indispensables pour garantir la poursuite de son activité. En conséquence, la coopérative aétémiseenliquidation.Cetéchecillustre les difficultés des opérateurs privés à se lancer sur le marché du ferroviaire. Pour l’heure, seules Trenitalia et la Renfe, les compagnies nationales italiennes et espagnoles, sont en mesure de proposer une offre voyageurs sur le réseau français, à savoir Paris-Modane via Lyon pour la première, et Madrid-Marseille ainsi que Barcelone-Lyon pour la seconde. u T R A N S P O R T F E R R O V I A I R E Railcoop liquidée Prix des hôtelset Jeux olympiques Les stats Notre deuxième vague de relevés destarifsdeshôtels(unechambre double dans 80 établissements, 3 et 4 étoiles essentiellement) pour le jour de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris (26 juillet) révèle un reflux. Selon ces observations effectuées mi-mars, la nuit est, en moyenne,facturée820€,soit161%de hausseparrapportauprixd’«unenuit normale»(celledu12au13juillet),où ellerevientà314€.Lorsdenotrerelevé de décembre, ces deux tarifs étaient respectivement de 1033 € et 317 € (QC n° 633). Autre évolution forte: alors que la moitié des hôtels indiquaient, il y a quatre mois, ne plus avoir de disponibilités pour le soir de la cérémonie d’ouverture, ce taux est tombé à 30%. Bref, le niveau des réservations ne semble pas à la hauteur des espérances… INFOEXPRESS INFOEXPRESS 6 QUE CHOISIR 635 u MAI 2024 B. LEVESQUE/IP3 PRESS-MAXPPP LeprojetdetrainLyonBordeaux reste à quai La triche évolue sans cesse L’espagnole Renfe propose deux liaisons en France. NUIT DE LA CÉRÉMONIE D’OUVERTURE 820€ Le montant moyen pour une chambre 2 adultes +161 % d’augmentation par rapport à un week-end normal (du 12 au 13 juillet) 30%des hôtels disent ne plus avoir de disponibilités à cette date Le nouveau Peugeot 3008 électrique L e Peugeot E-3008 adopte un style plus moderne tout en offrant un bon niveau d’équipement et une belle qualité de fabrication. Autre bon point, le nouveau combiné d’instruments est plus lisible que précédemment, et l’ergonomie particulièrement soignée, ce qui rend le SUV facile à piloter. D’abord proposé en version électrique, il est très silencieux et agréable à conduire. Acceptable comparée à celle des modèles concurrents, son autonomie annoncée est de 525 km avec sa batterie de 73 kWh (une nouvelle, de 98 kWh, devrait permettre de parcourir 680 km). Cela dit, lors de notre essai, nous n’avons roulé que 400 km sur un trajet mixte route/ville/autoroute. Par ailleurs, Peugeot a grandement simplifié la gamme et seules deux finitions du E-3008 électrique sont commercialisées: Allure (44990 €) et GT (46990 €). C’est plus cher qu’un Tesla Model Y (à partir de 42990 €), pourtant un peu plus grand et plus habitable, ou qu’un Renault Scenic E-Tech (dès 39990 €, mais avec une autonomie moindre). À noter que les trois modèles précités sont éligibles au bonus écologique de 4000 €. Avantage intéressant à l’actif du SUV de Peugeot: il inaugure la garantie 8 ans ou 160000 km qui couvre désormais tous les éléments électriques et mécaniques. Une première pour une marque européenne. P esticides, allergènes, résidus chlorés… Les protections périodiques contiennentparfoisdessubstances malvenues.Aussi,le décret prévoyant que leur composition soit détaillée sur l’emballage et les sites de vente a-t-il été bien accueilli. Mais les femmes n’apprendront pas grand-chose,car ces composés indésirables ne sont pas introduits intentionnellement, et ne seront donc pas étiquetés,contrairementauxmatièrespremières (coton,rayon,polyesteretc.).Letexteprésente quand même un intérêt: il oblige à mentionner sur les produits que le syndromeduchoctoxique,pathologiepotentiellement grave qui touche des dizaines defemmesparan,tientavanttoutauport prolongé (soit plus de six heures) d’une protection interne, quelle qu’elle soit. Pas de sa composition. La prudence invite donc à exclure tampons ou coupes la nuit. Les fabricants ont jusqu’au 31 décembre pour écouler leurs stocks non porteurs de ces informations. u P R O T E C T I O N S P É R I O D I Q U E S Un décret en trompe-l’œil I M P Ô T S Le Fisc fait erreur? Il indemnise! Depuis le début de l’année, vous avez droit à une indemnisation dès lors que le fisc se trompe et qu’il vous fait payer un impôt indu. Dans ce cas, il doit vous restituer la somme en question, mais aussi vous verser desintérêtsmoratoires.Lanouveauté? Ces derniers sont dus y compris si l’administration rectifie elle-même son erreur et vous rembourse l’impôt prélevéàtortsansdemandepréalable de votre part. Jusqu’en 2023, vous ne pouviez prétendre à des intérêts qu’en cas de contentieux engagé contre le fisc. Et si ce dernier réparait sa faute à l’amiable, il se contentait de vous rembourser le trop-perçu. Les plus # La ligne innovante # La qualité de fabrication # Le silence au roulage # L’habitabilité # L’ergonomie Les moins # La fermeté des suspensions sur les petites bosses # La visibilité vers l’arrière # Le volume de coffre Voiture du mois INFO EXPRESS MAI 2024 u 635 QUE CHOISIR 7 IMAGEBROKER/ANDIA ; F. REGLAIN/ALAMY-PHOTO12 ; PEUGEOT ; ZORANM/ISTOCK Chaque mois, Que Choisir braque les projecteurs sur un modèle récent, pris en main par un de nos journalistes. Ses premières impressions. Ses atouts: ergonomie et agrément de conduite INFOEXPRESS 8 QUE CHOISIR 635 ◆ MAI 2024 A cide tartrique, sulfites, ovalbumine, gomme arabique, additifs, arômes… Bien souvent, le vin ne contient pas que du raisin. Les initiés le savent, les profanes, un peu moins. Mais cette information sera bientôt portée à leur connaissance –du moins, en théorie! Depuis le 8 décembre 2023, les bouteilles doivent indiquer leur liste d’ingrédients et leur valeur nutritionnelle (1) . Hélas, la filière viticole a réussi à contrer cette mesure en obtenant un étiquetage dématérialisé. Il faudra donc scanner un QR-code à l’aide d’un smartphone pour lire cette information – autant dire que la plupart des gens n’en feront rien. Lesboissonsalcooliséesavaientéchappé au règlement européen de 2011 relatif à l’information des consommateurs (dit Inco), qui oblige les fabricants d’aliments transformés à afficher les ingrédients et la valeur nutritionnelle de leurs produits. Mais le Plan de lutte contre le cancer,présentéparBruxellesenfévrier 2021,prévoit de supprimer l’exemption dont jouit l’alcool.Difficiledes’yopposerfrontalement. Lesprofessionnelsontalorsoptépourune autre tactique: réduire à néant l’efficacité d’un étiquetage. Près de 70 documents –e-mailsetcomptesrendusderéunions– que s’est procurés le Bureau européen des consommateurs (le Beuc, dont est membre l’UFC-Que Choisir) révèlent le lobbying intense mené auprès de la Commission entre 2021 et 2023 afin de bénéficier de ce nouveau passe-droit. Un lobbying efficace Lors de réunions en tête-à-tête,au moins une vingtaine en trois ans, les représentants des filières martèlent à la fois leurs «inquiétudes» et leurs arguments. Ainsi, SpiritsEurope (pour les spiritueux) réclame que l’information nutritionnelle se réfère «à la portion» (au verre) et non aux 100 ml; les listes d’ingrédients, elles, ne seraient «pas particulièrement utiles», car les spiritueux ne renferment « que trois ingrédients ». Pourquoi, alors, les refuser? Peut-être parce que le consommateur apprendrait que «la belle teinte ambrée du whisky vient souvent non pas d’un vieillissement en fût mais d’un additif, le colorant caramel», ironise Emma Calvert, du Beuc. À ce jour, les informations restent volontaires pour les spiritueux.La filière viticole,elle,a obtenu que la mesure soit négociée dans un autre cadre, celui de la réforme de la Politique agricole commune (Pac). Bien joué: un amendement autorise la dématérialisation de la liste d’ingrédients –mais pas celle de la valeur énergétique. ◆ (1) Cela concerne les vins produits à partir du 8 décembre 2023, et donc les vendanges 2024. V I N S E T S P I R I T U E U X Comme un goût de bouchon… Troisième fournisseur mondial de moteurs de vélos à assistance électrique (derrière Bosch et Shimano), le japonais Yamaha rapatrie une partie de son activité en France. Inaugurée en mars dernier, la ligne de production a pris place à Saint-Quentin (Aisne), dans l’usine historique de MBK (ex-Motobécane), absorbé par Yamaha en 2000. Avec ses 15 salariés, elle permet de sortir 400 moteurs par jour et vise un total de 45000 unités cette année (le modèle PWseries C2, pour vélos de ville). D’ici à 3 ans, Yamaha entend tripler les effectifs afin d’atteindre 300000 moteurs. Cela ne suffira pas pour servir tous les fabricants de vélos intéressés (d’après nos calculs, il en faudrait plus du double). «C’est un bon début», plaide Patrice Maciejewski, le président de la filiale. Il précise que «les 60 pièces contenues dans chaque moteur viennent du Japon, mais notre objectif est d’en trouver le maximum en Europe, afin de limiter encore davantage l’empreinteécologiquedesmoteurs». Une initiative à saluer. V É L O S É L E C T R I Q U E S Des moteurs assemblés en France La filière viticole ruse pour cacher ses ingrédients Rappel.conso.gouv.fr Sur ce site, régulièrement mis à jour par les pouvoirs publics, consultez les rappels et les alertes concernant des produits dangereux dans divers secteurs de la consommation (alimentation, automobile, équipements électriques, hygiène-beauté…). ALAMY/PHOTO12 ; J-C. MOSCHETTI/REA ; Y. POURDIEU LE COZ INFO EXPRESS MAI 2024 ◆ 635 QUE CHOISIR 9 S ervie à toutes les sauces, la supplémentation en vitamine D n’a, malgré sa popularité, que peu d’intérêt scientifiquement et médicalement établi. La récente position du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) en rajoute une couche. Revenant sur l’habitude de prescrire de la vitamine D aux enfants dès leur plus jeune âge, et parfois jusqu’àlafindel’adolescence,ilrecommande de s’interroger sur cette prévention systématique.Le rachitisme,la seule maladie pour laquelle la vitamine D a prouvé son utilité, a quasiment disparu, et son bénéfice dans d’autres affections n’est pas étayé. Par précaution, le CNGE préserve la supplémentation des moins de deux ans, et surtout celle des bébés de moins d’un an nourris au sein ou qui présentent des facteurs de risque de carence, comme la peau noire ou le suivi d’un régime végétalien. L’organisme souligne qu’au-delà aucun essai sérieux n’a été identifié et, qu’après l’âge de cinq ans, les études disponibles ne montrent pas de différences entre les enfants traités avec de la vitamine D et ceux qui ne le sont pas. La position du CNGE se distingue de celle du consensus d’experts qui, il y a deux ans, a recommandé la supplémentation de tous les jeunes jusqu’à 18 ans, sur la base d’objectifs de concentration dans le sang, et non d’effets constatés sur la santé. ◆ V I TA M I N E D Supplémentation à réserver aux petits? Nouveau logo Undeplus.D’iciàl’été,le gouvernementveutproposer lelabelOrigine-info,pourindiquer auxconsommateursdequelspays proviennentlesingrédientscontenus danslesalimentstransformés. L’UFC-QueChoisirréclamecette transparencedepuislongtemps(lire aussip.63)etsaluedoncl’initiative, maisaveccirconspection.Deux désaccordsapparaissentdéjà.D’abord, selonlaministredéléguéechargée delaConsommation,OliviaGrégoire, cetaffichagesera«volontaire».Pour l’UFC-QueChoisir,«c’estinadmissible». Ensuite,lesassociationsexigentque l’affichagesoitprésentsurl’emballage, tandisquelesindustrielsprônent sadématérialisation,afindes’adapter àlasaisonnalitédesoriginesdeleurs matièrespremièresagricoles.L’UFCQueChoisirrappellealorslemalheureux précédent du Nutri-Score: les aliments classés E sont rarement étiquetés. O R I G I N E D E S A L I M E N T S Vu! Cette rubrique est la vôtre. Si vous tombez sur des situations choquantes, des messages mensongers ou amusants, adressez-nous vos photos (en précisant le lieu et la date) et un commentaire en scannant le QR code ci-contre ou en envoyant un e-mail à redaction@quechoisir.org. L es barres chocolatées Ovomaltine se prétendent «source de 3 minéraux» (magnésium, calcium et fer) alors qu’une portion n’en contient que des doses ridicules: entre 5 et 7% des apports quotidiens recommandés, ce qui est très loin des 15% minimum exigés par la réglementation européenne. Nous dénoncions ce genre de fausses promesses, alors fréquentes, il y a trois ans déjà (lire QC n° 602). Il semble que les autres marques mises en cause à l’époque (et qui commercialisent encore leurs produits) ont, depuis, réagi: Bjorg et BN ont retiré leurs allégations problématiques tandis que les groupes Mondelez (Lu, Oréo…) et Leclerc promettent de bientôt mettre à jour leurs étiquettes; ce que nous vérifierons! La société Twinings & Co, propriétaire d’Ovomaltine, considère quant à elle n’avoir rien à se reprocher… La répression des fraudes finira-t-elle par intervenir? Contactée, elle n’a pas donné suite à nos sollicitations. ◆ Les fausses promesses d’Ovomaltine Non,cette barre chocolatée n’estpas «sourcede 3minéraux». lement établi. La récente position du Collège national des généralistes enseignants (CNGE) en rajoute une jusqu’àlafindel’adolescence,ilrecommande de s’interroger sur cette prévensouligne qu’au-delà aucun essai sérieux n’a été identifié Surcotée! Les fausses promesses d’Ovomaltine Non,cette C’ est à Modane, en Savoie, que la vallée de la Maurienne vient buter contre les Alpes.De l’autre côté,l’Italie.Une frontière naturelle que l’on franchit par l’historique route du col du Mont-Cenis, un tunnel ferroviaire du XIXe siècle ou, depuis 1980,par le tunnel autoroutier du Fréjus.Un fond de vallée oublié de tous…Or,c’est ici que l’un des projets européens «du siècle» a pris racine: un double-tube ferroviaire transfrontalier de 57,5 km (situé à 80% en territoire français), dont le percement a déjà débuté. Il nécessitera la construction d’une nouvelle ligne mixte à grande vitesse fret/voyageurs, entre Lyon (Rhône) et le tunnel, d’environ 140 km. Un maillon essentiel dans la création du corridor ferroviaire de l’Espagne à l’Ukraine,porté par l’Union européenne (UE). Financée sur fonds publics (France, Italie et Europe), l’aventure devrait afficher un coût d’environ 26 milliards d’euros, voire frôler les 30 milliards,dont 10 à 12 milliards pour le tunnel. Loin des prévisions initiales. Des dérapages que les cours des comptes française et de l’UE ont déplorés dans plusieurs rapports très réservés sur l’utilité d’un tel investissement. Le train-train de la France C’était moins une!Le28 janvier2023,Laurent Wauquiez,président (LR) de la région Auvergne Rhône-Alpes,annonce que pour «sauver le Lyon-Turin», il ajoute 20 millions d’euros au budget des études du tracé de la ligne nouvelle (lire encadré et infographie, p.12-13). Deux jours avant la date limite fixée par Bruxelles pour déposer un dossier de financement. La dépasser aurait reporté sine die l’éventuelle participation de l’Europe à hauteur de 90 millions d’euros (décision en juin), sur une facture totale d’environ 220 millions. Il revenait à la Francedesedébrouillerpourtrouverlecomplément(130millions).Après des semaines de tensions,l’État et les collectivités locales ont donc fini par s’entendre sur leur quote-part respective.C’est peu dire que l’Europe et l’Italie, très proactives dans la réalisation du Lyon-Turin, ont été agacées par cette passe d’armes franco-française (lire l’interview p.14). Pour ces 140 km de voies d’accès,une fois les études préliminaires terminées (lire encadré p.13), il restera à boucler le calendrier et le financement de leur construction. Encore beaucoup d’obstacles à franchir pour cette liaison Lyon-Turin, promue dans les années 1980 par Louis Besson alors ministre et maire de Chambéry («Il voulait sa gare et sa ligne TGV»,persiflent ses détracteurs). Et l’idée a mûri. Vider les vallées alpines des camions, transportés par des trains,voilà qui était vertueux! Mais au fil du temps, des fractures sont apparues.Des partisans du projet –notamment écologistes– passent même au camp adverse.Tergiversations, défis environnementaux et de mobilité à apprécier à l’aune du changement climatique,gestion des coûts: ce plan pharaonique est remarquable par les questions qu’il soulève. QUI TIENT VRAIMENT LES RÊNES ? Si la paternité du projet Lyon-Turin est attribuée à Louis Besson, c’est la Commission européenne qui a signé son acte de naissance. Dans la foulée de la Convention pour la protection des Alpes de 1991, cette liaison est identifiée Percer un tunnel d’une soixantaine de kilomètres sous les Alpes et créer des voies nouvelles pour y accéder: ce chantier titanesque, ballotté entre des intérêts contradictoires, semble manquer d’un pilotage clair et assumé. Par PASCALE BARLET et ARNAUD DE BLAUWE LIAISON FERROVIAIRE LYON-TURIN Un coup à 30 milliards! ZONEROUGE 10 QUE CHOISIR 635 ◆ MAI 2024 Un projet hors normes comme hautement prioritaire lors du Conseil européen d’Essen (Allemagne), en 1994. «Il s’agit de créer une infrastructure pleinement interopérable au sein du marché intérieur de l’Union,argumente Bruxelles.Elle présentera l’intérêt de fédérer les régions et de renforcer la cohésion économique et sociale en Europe.» Et les «convaincus» embrayent. Lyon, quartier Confluence, juillet 2023, au siège du comité pour la Transalpine. Depuis sa création en 1991, cette association a pour mission de faire progresser au plus vite le Lyon-Turin. Stéphane Guggino, délégué général, nous reçoit. En entrant dans ses bureaux, nous nous attendions, face à l’ampleur du défi, à découvrir une fourmilière. Mais, non: il est seul avec une secrétaire! Le sujet est maîtrisé, le discours aussi. «Nous représentons de nombreux acteurs de la vie économique et du rail, entame Stéphane Guggino. Les lignes existantes ne permettent pas de faire circuler en même temps, de manière optimale, les voyageurs et les marchandises. Le fret n’a pas d’autre choix que de passer par la route. Le Lyon-Turin, avec ses deux tubes, inversera la tendance.» Mais alors pourquoi le chemin est-il si chaotique ?«C’est un investissement ferroviaire, par conséquent non rentable tout de suite, réplique ce lobbyiste chevronné. De plus, il est européen. Or, certains n’aiment pas que Bruxelles soit à la manœuvre. Ajoutons qu’un tel projet est aussi soumis aux aléas électoraux.» La position française est difficilement lisible. En résumé, de ce côté-ci des Alpes, nos décideurs semblent partagés. «Les hauts fonctionnaires concernés ont toujours été contre, remarque un observateur attentif du dossier. Pour eux, c’est un truc d’ingénieurs qui n’a pas vraiment de sens.» Si Rome a aujourd’hui un discours extrêmement clair pour défendre le Lyon-Turin,la France manie l’ambiguïté.En février 2023, le Comité d’orientation des infrastructures (COI), organe MAI 2024 ◆ 635 QUE CHOISIR 11 >>> 2032, 2045-2050 DATES PRÉVUES DE MISE EN SERVICE du tunnel transfrontalier et des voies d’accès 26 à 30 milliards d’euros BUDGET GLOBAL DU PROJET Financement : France et Italie (État et collectivités territoriales) +Union européenne 57,5 km DISTANCE EXACTE DU TUNNEL FERROVIAIRE TRANSFRONTALIER Il faut y ajouter 140 km (+60 km en Italie) de voies d’accès à construire C. MOUREAUX ; PICTOS : NOUN PROJECT
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