VOILE MAGAZINE n°354 - Page 3 - 354 VOILE MAGAZINE • JUIN 2025 3 Le First 30 en Slovénie, vu par Thibault Desplats. L ’EDITO Achacun sathalasso! uoi de mieux, pour lancer la saison, qu’un bon Spi Ouest, fut-il humide et venté ? Après deux parcours banane bien frappés, avec embruns giflés par 25 nœuds de vent, vous êtes déjà dérouillé. Deux jours de ce régime, et vous voilà rodé, conditionné pour ce parcours côtier incluant un interminable retour au près sous la bruine, les fesses martyrisées par le pavois du Super Arlequin… Avouons-le : ce résumé thalasso-masochiste de notre Spi Ouest sur le Super Arlequin correspond à une certaine réalité. Pourtant, et avec le recul c’est une source d’étonnement, on y a pris beaucoup de plaisir. Plaisir de faire marcher au mieux une belle carène, en quête d’un certain état de grâce vélique. Plaisir de parfaire le réglage d’une garde-robe imaginée par nos soins avec toute l’expertise de notre ami et skipper Bernard Mallaret. Maître Bernard qui, à la barre comme aux debriefings du soir, nous transmet le meilleur de son expérience. Plaisir d’écouter et d’apprendre à ses côtés, à la technique comme au mental. Sur la concentration : chacun à son poste et concentré uniquement sur sa tâche, quelles que soient les tensions et autres gueulantes sur l’eau au passage de bouée. Sur la notion de compétition, à bien distinguer de l’agressivité qui n’est souvent qu’un exutoire et un aveu de faiblesse. De quoi parle-t-on ? Etre en compétition, c’est donner le meilleur de moi-même en étant conscient que la solitude à mon poste est illusoire. Exemple : quand je règle le spi sur un bord de portant, je ne joue pas seul : je suis en compétition directe avec tous les équipiers du plan d’eau qui sont en train de régler leur spi. C’est évidemment vrai pour tous les postes. Si cette notion de compétition est anecdotique en termes de résultats, du moins à notre niveau, elle donne tout son sel à la régate et lui confère cette intensité qui rend l’exercice passionnant. Et si formateur ! Les réflexes qu’on en retire, au-delà de la course et de la performance, font de nous de meilleurs marins dans des domaines qui intéressent aussi la croisière : météo, sécurité, gestion de l’équipage… Et la performance sur l’eau dans tout ça ? Idem : même en croisière, il n’est pas interdit de faire bien marcher son bateau et d’y prendre du plaisir ! Il semblerait même que ce plaisir-là reste la meilleure raison d’aller sur l’eau… Que ce frisson joyeux qui court sous la peau de chaque équipier vaut mieux que toutes les explications théoriques. Que cette qualité d’endorphine iodée est le seul motif sensé au traitement que nous sommes prêts à nous infliger parfois, et ce en toute connaissance de cause… Après tout, chacun sa thalasso. François-Xavier de Crécy Q VOILE MAGAZINE 9, allée Jean Prouvé 92587 CLICHY CEDEX voilemag@editions-lariviere.fr Vous pouvez joindre votre correspondant en composant le 01 41 40 suivi du n° indiqué Président du conseil de surveillance Patrick Casasnovas Présidente du directoire S. Casasnovas Directeur général Frédéric de Watrigant REDACTION Rédacteur en chef François-Xavier de Crécy 41 00 Rédacteur en chef adjoint Damien Bidaine 3292 Rédacteur Paul Gury 33 46 Secrétariat de rédaction Laurence Corroler Maquette Stéphane Machelart 33 43 Illustrations Laurent Hindryckx 56 60 Ont collaboré à ce numéro Patricia Bachelier, famille Baranger, Adrien Dartig, Thibault Desplats, Bertrand Duquenne, Laurens Morel, Ludovic Roussille, Inaniel Swims, François Van Malleghem, Pierre Yves WWW.VOILEETMOTEUR.COM André-Bernard Vidie 56 36 Sherine Lefébure PUBLICITE Directeur de publicité Laurent Lallier 33 42 Chef de publicité Manon Pirotte 34 31 Assistante : Chloé Boudet 35 25 chloe.boudet@editions-lariviere.com e-mail : pubvoile@editions-lariviere.com SERVICE DES VENTES (réservé aux diffuseurs et dépositaires) Chef de produit, Emmanuelle Gay : 34 99 PROMOTION DES ABONNEMENTS Carole Ridereau : 33 48 Abonnements et Vente Par Correspondance Tél. : 03 44 62 43 79. e-mail : abo.lariviere@ediis.fr Service abonnements, Voile Magazine, 45, avenue du Général Leclerc, 60643 Chantilly cedex TARIFS ABONNEMENTS France métropolitaine, 1 an, soit 12 n° + 1 hors série Equipement versions papier + numérique : 146,34 € Tarifs 2025, prélèvements mensuels : 6,95 € Autres pays et par avion, nous consulter au (33) 3 44 62 43 79 ou abo.lariviere@ediis.fr Directeur de la publication et responsable de la rédaction Patrick Casasnovas Impression : Imprimerie de Compiègne, ZAC de Mercières 60205 Compiègne Diffusion MLP « Papier issu de forêts gérées durablement. Origine du papier : Allemagne. Taux de fibres recyclées : 63 %. Certification : PEFC/EU ECO LABEL. Eutrophisation : 0,003 kg/tonne » Printed in France - Imprimé en France Voile Magazine est une publication des Editions Larivière, SAS au capital de 3 200 000 €. Dépôt légal, 2e trimestre 2025 Commission paritaire : 0623 K 83757. ISSN : 1268-2888. Numéro de TVA intracommunautaire : FR 96572 071 884. CCP 11 5915A Paris RCS Nanterre B 572 071 884. Siège social : 12, rue Mozart, 92587 Clichy cedex, France. Tél. : 01 41 40 32 32. INCORPORANT MAGAZINE F.-X. DE CRECY Ca respire la joie dans la piaule sur notre Super Arlequin. 66. A l’école de la régate avec Bernard Mallaret 86.Bateaux Tirot : le charme du made in France 60.Treasy 4.0, Skua et RS Cat 12 : la voile légère pour tous 76.Comparatif : quelle tenue pour la régate ? FRANCOIS VAN MALLEGHEM PATRICIA BACHELIER F.-X. DE CRECY FRANCOIS VAN MALLEGHEM VOILE MAGAZINE • JUIN 2025 5 SOMMAIRE N°354-JUIN2025 ACTUS Les potins des pontons.......................................................................10 Jean-Marie Finot...........................................................................................12 Salon de St-Malo..........................................................................................14 International Multihull Show..............................................................26 Course et régate........................................................................................22 Le journal du littoral..............................................................................32 La vie des chantiers Chantier Seascape.................................50 DESSINE-MOIUNBATEAU Dominique Provin....................................................................................16 ZOOM CIC Med Channel Race.........................................................................20 COURRIER Les lecteurs ont la parole..................................................................36 ESSAIS Grand format First 30............................................................................40 Quelques bords à bord JPK 10.50............................................................................................................54 Initiation Trois visions de la voile légère...........................................................60 MAG Super Arlequin A l’école de la régate au Spi Ouest................................................66 Bateaux jouets Les petits bateaux Tirot..................................86 Caribbean Multihull Challenge Multicoques en folie..................................................................................90 MATOS Régate 5 tenues à l’épreuve du Spi Ouest France...........76 Aérien Quelle girouette en tête de mât ?................................82 PARTIR RM 1080 Cap sur l’île aux fleurs !...................................................98 OCCASION Une occasion mise à nu Lagoon 450...................................104 au Spi Ouest 40.Essai grand format : la première croisière du First 30 en Slovénie Le prochain numéro de Voile Magazine sortira en kiosque le 13 juin 2025 Abonnez-vous, page 103 ou sur le site www.editions-lariviere.fr Retrouvez-nous sur Au contact avec le Contention 33 Dust in the Wind, futur vainqueur en Osiris B. THIBAULT DESPLATS 6 JUIN 2025 • VOILE MAGAZINE ACTUS LESPOTINSDESPONTONS D’un côté un marin sans bateau, de l’autre un voilier mythique en quête d’un second souffle… Il suffisait qu’ils se rencontrent ! Cette histoire, c’est celle de Sidney Gavinet et du fameux Cigare Rouge initialement construit pour Jean-Luc Van Den Heede. Le premier pensait avoir tourné la page de la course au large après avoir enchaîné les campagnes autour du monde, notamment sur la Volvo Race où il fit ses premières armes grâce à Eric Tabarly sur La Poste… C’’était en 1991, et on l’appelait encore la Whitbread ! Si, près de 30 ans plus tard il a remporté la Route du Rhum sur Café Joyeux, c’était à titre bénévole et dans une démarche citoyenne en cohérence avec la transformation de son approche et de sa pratique. Au même moment, le Cigare Rouge bénéficiait d’une « transformation intérieure » (sic) complète, et Sidney n’hésite pas à y voir un clin d’œil du destin ! Toujours est-il que le plan Harlé/Mortain, récupéré dans un premier temps par Jean-Marie Patier, a ensuite été racheté par Laurent Givry qui a proposé à Sidney Gavinet d’en prendre la barre jusqu’à la Route du Rhum 2026. D’ici là, il embarquera des équipiers payants sur diverses courses IRC, de l’Armen Race à la Middle Sea Race en passant par la Fastnet, plus un passager invité – si possible éloigné des choses de la mer. Le Cigare Rouge pourrait aussi accueillir toutes sortes de stages et autres sorties initiatiques, avec pour fil conducteur ce leitmotiv qui est aussi celui des conférences données par Sidney : naviguer au large, c’est apprendre à évoluer dans l’incertitude. Une leçon de vie autant qu’un cours de voile en somme... Le programme complet est sur www.caphornconsulting.com. Rens. : 06 08 93 16 62. ROUTE DU RHUM Mise à l’eau à Cherbourg, baptisée à Lorient, la station polaire de Tara va bientôt pouvoir entamer ses premières missions d’observation dans l’océan Arctique. Rappelons que cette station elliptique longue de 26 m, large de 16 et pesant 232 tonnes à vide accueillera 18 équipiers – marins et scientifiques – en autonomie (500 jours) pour des missions d’observation au gré des courants océaniques au plus près des glaces polaires, growlers et icebergs. Une station scientifique polaire dérivante conçue par l’architecte Olivier Petit, déjà auteur de la très médiatique goélette d’exploration polaire Tara (ex-Antartica, lancée en 1989 pour Jean-Louis Etienne). La station partira en direction du Svalbard en juin prochain pour des tests en conditions polaires. Ensuite, Tara Polar Station effectuera une dérive test dans le détroit de Fram de juillet à août. En 2026, les équipes devraient embarquer pour des expéditions de longue durée, profitant du mouvement naturel de la glace pour collecter des données essentielles à la compréhension de notre planète. Comme des hommes, c’est le choix fait chacune de leur côté par Anne Bonny et Mary Read au XVIIIe siècle pour fuir leur condition. La première est une fille illégitime cherchant l’aventure dans les bras puis dans l’accoutrement d’un pirate. La seconde est travestie en garçon dès son plus jeune âge pour ne pas être soustraite à un héritage. Toutes deux vont être liées par une vie d’aventures maritimes et une destinée commune à bord du navire de Jack Rackham. Comme des hommes, par-delà les océans, dans la rudesse de la vie en mer, par-delà les combats et jusqu’à la mort, pour la liberté. Le récit dessiné est passionnant, soufflant au gré des pages un vent de liberté, contre le déterminisme d’une société révolue mais aussi de résilience par-delà la cruauté d’une vie de flibuste librement choisie par nos héroïnes. Un récit très bien servi par le scénario d’Arnaud Le Gouëfflec et les planches signées par Laurent Richard alternant ligne claire, modernité et esthétisme. A. Le Gouëfflec et L. Richard, éd. Glénat, 264 p., 28 €. EXPLORATION Tarabientôtenorbite! BD Deuxfemmes LeCigareRouge reprendlamer! SIDNEYGAVINET ALABARRE BENOIT STICHELBAUT DR VOILE MAGAZINE • JUIN 2025 7 enbref… FETES MARITIMES Bonne nouvelle, les Fêtes maritimes reviendront à Brest en 2027 (du 9 au 14 juillet) seulement trois ans après la dernière édition. Un nouveau rythme qui devrait être pérenne. Rendez-vous dans un an ! EQUIPEMENT DURABLE Mayero, installé à Saint-Malo, collecte des tubes en carbone et/ou en fibre de verre « en fin de vie » pour les revaloriser à travers la fabrication de supports dédiés à nos voiliers : portiques, panneaux solaires, annexes, antennes de communication, etc. Une matière première de seconde main autrement destinée à l’enfouissement ou à l’incinération qui sera associée, pour présenter un produit fini, à de la fibre de lin ou de la fibre de carbone de second cycle issu des rebuts de l’industrie automobile. NATIONS UNIES Lors de la 3e Conférence des Nations Unies sur l’océan qui se tiendra à Nice du 9 au 13 juin, le fonds d’intérêt général Explore, fondé par Roland Jourdain et Sophie Jourdain Vercelletto, rassemblera autour du catamaran WE EXPLORE les explorateurs – Plastic Odyssey, Under The Pole et Longitude 181 – afin de porter une voix commune en faveur de la protection de l’Océan. PEINTURE La galerie d’art Maritime de Rouen - L’Art des Marines présente un nouvel artiste : Christophe Grimonpon. Ce peintre officiel de l’Armée de l’air et de l’espace nous prouve, à travers des réalisations ultra réalistes, qu’il n’est pas insensible au monde maritime. DOCUMENTAIRE Portrait documentaire d’Anita Conti, bientôt sur France Télévision : l’appel du large. Aventurière et photographe, elle révolutionne la vision des marinspêcheurs tout en alertant très tôt sur la diminution de la ressource... Un documentaire tout en archives retraçant sa vie à voir mi-juin. FORMATION Le Yacht-club de La Grande Motte organise deux journées 100 % féminines pour faire découvrir la voile dans une ambiance conviviale et bienveillante. Ouvertes à toutes, novices ou curieuses, seules ou accompagnées, ces journées sont une invitation à prendre le large et à explorer un sport aussi complet qu’apaisant. Au programme : voile légère, wingsurf, paddle, catamaran et voilier, encadrés par des professionnels. Objectif : lever les freins, créer du lien, et donner envie de pratiquer la voile durablement. LE DESSIN DU MOIS PAR DARTIG Ce plan Harlé/Mortain sera 2e du Vendée Globe 92 et du Rhum 98 avec VDH. 8 JUIN 2025 • VOILE MAGAZINE ANNEXE A voile et à moteur FIRST 210 VOILE MAGAZINE LanouvellevieduFirst210 C’est une nouveauté 2025, imaginée par Emilien Faurens, également auteur des trimarans Treasy (essai p. 60). Tous sont construits en plaques de fibre de verre monolithique cousues et collées. Il ressort une annexe à la carène pensée pour être à la fois performante au moteur (13 nd avec un 4 ch et une personne à bord, 8 nd à deux) et très stable (cat. D/4 pers.). Ce que l’on aime par-dessus tout : la prochaine possibilité de lui adjoindre un gréement (windsurf ou cat-boat) pour rejoindre le rivage à la voile ou tout simplement s’amuser au mouillage. La Barket 2,8 pèse 50 kg, soit l’équivalent d’une annexe semi-rigide en polyester. Des roues amovibles positionnées sur le tableau arrière sont disponibles en option, tout comme la mise en couleur des francs-bords avec un covering. Barket 2.8. Constr. : Faursail. Long. : 2,80 m. Largeur : 1,50 m. Mot. maxi : 8 ch. Prix : 1 580 €. Surprise ! Ce matin-là, en parcourant un ponton arcachonnais en vue d’embarquer sur le Dragonfly 32 de notre dernière « Occasion mise à nu », nous tombons sur un petit bateau qui ne nous est pas inconnu, loin de là... Le First 210 Voile Magazine ! Rappelez-vous, nous l’avions entièrement restauré, en partenariat avec le chantier Bénéteau et son concessionnaire brestois Yann Rolland (voir également p. 36), au cours de l’année 2016, avant de nous relayer à bord de l’île de Sein à l’île de Porquerolles en passant par le canal du Midi… Un tour de France haut en couleur suivi à la trace par votre mensuel, comme il se doit ! Le bateau avait ensuite été transmis à un lecteur chanceux dans le cadre d’un jeu-concours, puis vendu à un deuxième… Et enfin au troisième que nous avons rencontré à Arcachon. A n’en pas douter, Mathieu Babiarz est un homme heureux. Il a récupéré pour un bon prix un bateau en pleine forme. Les voiles Incidence tiennent bien le coup, la sellerie All Purpose n’a pas pris une ride, pas plus que le covering… Notre petit First 210 reste au top et il navigue, deux bonnes raisons de se réjouir ! L’histoire de Rondetto est peu connue en France mais légendaire en Italie. Son skipper, Erik Pascoli, fut le premier Italien à traverser l’Atlantique en solitaire, en 1969, de Portsmouth aux Antilles. Il repartit, en course cette fois-ci, sur l’OSTAR 1972, toujours sur son fidèle folkboat modifié par John Illingworth, et mit 48 jours à gagner Newport après s’être arrêté en Nouvelle-Ecosse pour soigner un vilain abcès… Une autre époque ! Plus tard, Erik Pascoli deviendrait aussi, sur la Whitbread, le premier Italien à passer le cap Horn en course. Disparu en 2013, il laissa Rondetto dans le port de Rapallo où il coula suite à la terrible tempête de 2018. Il ne fut renfloué que trois ans plus tard, mais le nouveau propriétaire s’attacha à le reconstruire à l’identique – et le résultat est magnifique. Récemment racheté par un musée privé stanbouliote appartenant à l’homme d’affaires Rahmi M. Koç, Rondetto est devenu l’une de ses pièces majeures… et navigante, le Bosphore offrant à ses lignes classiques un écrin de choix. Une histoire à retrouver très bientôt dans Voile Mag... PATRIMOINE Rondettosauvédeseaux ACTUS LESPOTINS DES PONTONS Mathieu Babiarz, troisième propriétaire du First 210 Voile Magazine depuis sa restauration. BRUNO CIANCI F.-X. DE CRECY DR 10 JUIN 2025 • VOILE MAGAZINE CULTURE Paquebots, une belle expo ASSOCIATION PASSE-COQUE JérichoaatterrienBretagne! C’est une très belle exposition qui a ouvert ses portes au Havre, au MuMa, et qui nous replonge dans l’esthétique des grands paquebots transatlantiques de l’entredeux-guerres. Coproduite avec le Musée d’arts de Nantes et montée au Havre en partenariat avec French Lines et Compagnies, l’exposition explore les œuvres plastiques inspirées par les paquebots, entre 1913 et 1942. On y retrouve affiches, photographies et peintures d’une époque très marquée par le modernisme. Cette version havraise de l’exposition déjà présentée à Nantes est complétée par les archives de Vladimir Yourkevitch, ingénieur et concepteur du Normandie, lancée en 1932 et ravagée par un incendie en 1942. Un navire qui, plus que tout autre, inspira par ses performances, ses équipements et sa ligne ses contemporains, peintres, photographes et graphistes. Jusqu’au 21 septembre. Arrivé par la route en provenance de Marseille, Jéricho, ce nouveau plan Carter – un classique – qui rejoint la flottille de l’Association Passe-Coque n’est pas en état de naviguer comme l’est Pordin Nancq, le Carter 37 « voilier amiral » de l’association. A peine arrivé à Saint Philibert, Jéricho a donc rejoint l’atelier Passe-Coque pour entamer une restauration minutieuse. Le bateau va être couvert, vidé, sablé et certaines tôles de la coque en acier sont à changer. Seront mobilisés les compétences de Tiago, notre ferronnier expert et de Kristell, notre charpentier de marine, des travaux coordonnés par Alain, notre responsable technique. Mais cet ambitieux projet, qui a pour objectif – comme l’ensemble des projets Passe-coque – de redonner une vie maritime à des unités délaissées, promises à la destruction, ne pourra se réaliser sans un grand soutien le plus large possible. L’appel aux dons (défiscalisables) est lancé ! Faites-le savoir pour que tous ceux qui pensent qu’on peut imaginer une plaisance qui associe la durabilité, la solidarité et l’engagement dans la sauvegarde du patrimoine maritime viennent mettre leur contribution technique, financière ou autres afin que Jéricho reprenne la mer le plus rapidement possible ! Les Terres australes et antarctiques françaises sont à la fête cette année. Elles célébreront la création de l’institution qui, le 6 août 1955, a uni les îles Crozet, Kerguelen, Saint-Paul-et-Amsterdam, la Terre Adélie et les îles Eparses au sein d’un même territoire, ravitaillé, surveillé et défendu par les navires Astrolabe et Marion Dufresne. Un navire emblématique pour toute une génération de marins et de scientifiques qui fête lui aussi un anniversaire : 30 années de TAAF ! Une année anniversaire qui sera célébrée par la rencontre avec le public et les scolaires à la fois à la Réunion (port d’attache du Marion Dufesne) et dans l’Hexagone. Les TAAF sont aujourd’hui une réserve naturelle nationale inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO et sur la liste verte de l’Union internationale de la conservation de la nature, la plus grande aire marine protégée française et la deuxième mondiale permettant une gestion durable des activités de pêche. Tout un symbole pour des territoires jadis surexploités par les pêcheurs et les chasseurs de phoques. Une année qui a assez mal débuté avec un incendie généralisé sur l’île d’Amsterdam qui a imposé une évacuation d’urgence des hivernants. A noter dans l’agenda de cet anniversaire : un colloque en novembre au sein du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris, une chaîne de podcasts « Latitudes Sud » ainsi qu’une page Instagram et la sortie d’un timbre anniversaire le 6 août prochain par Xavier Gorce (illustration ci-dessus). ANNIVERSAIRE LesTAAFfêtentleurs70ans! ACTUS LESPOTINS DES PONTONS L’illustration de Xavier Gorce sera déclinée dans un timbre anniversaire. Le Doigt de Ste Anne sur l’archipel de Kerguelen. ALEXIAS GARNIER DR 12 JUIN 2025 • VOILE MAGAZINE Unespritlibre etnovateur JEAN-MARIEFINOT ACTUS Ancien collaborateur de Philippe Harlé et fondateur, avec Pascal Conq, du groupe Finot/Conq, Jean-Marie Finot a révolutionné la plaisance avec des idées à la fois simples et radicales. Il s’est éteint le 2 avril à l’âge de 84 ans. Texte : F.-X. de Crécy et Damien Bidaine. IL N’EST PAS UN ENFANT de la côte. Né dans les Vosges et marqué par les ravages de la guerre, c’est sur ces ruines que serait née sa vocation d’architecte avec la manie de tout reconstruire. La voile viendra après son passage par les Glénans, mais toute sa vie, Jean-Marie Finot s’est voulu « architecte avant tout ». Sa culture maritime tardive l’a probablement conduit à innover sans complexe. Il rencontre Philippe Harlé aux Glénans, où le père du Muscadet est directeur technique, et devient son collaborateur. Mais il se destine plutôt à l’architecture terrestre et quand il termine l’Ecume de Mer, commencé Ci-dessus, l’Ecume de Mer, produit à 1 350 exemplaires entre 1968 et 1979. En haut : en couverture de Bateaux, le diable rouge Rêvolution, conçu en 1972 pour l’Admiral’s Cup et déjà très large ! Bagages Supérior, plan Finot/Conq vainqueur du Vendée Globe 1992-93 avec Alain Gautier. avec Philippe Harlé, il est convaincu que c’est son dernier bateau. Ce sera, d’une certaine façon, le premier. Pensé pour aller au rivage et s’y échouer avant de repartir avec la marée, comme son nom l’indique. Il deviendra un bateau de course en version quillard à la demande du chantier hollandais Huismans, qui veut un quarter ton. Le chantier Mallard reprend ensuite la série avec un succès immense. L’Ecume est déjà une synthèse de l’esprit Finot sur 7,50 m de coque, sa taille préférée « parce que c’est celle du plus petit croiseur possible ». Une approche faite de minimalisme – on dirait aujourd’hui de sobriété – et d’ergonomie. Un bateau Finot est une sorte de Haiku, un objet simple et beau qui vous met en contact intime avec la mer et ne met aucun obstacle entre vous et les éléments naturels, sans négliger la performance. Scientifique, Jean-Marie Finot se distingue très tôt comme un architecte précurseur. Il est le premier à dessiner un plan de forme en CAO et avec son premier cachet, il achète un ordinateur HP, puis conçoit son propre logiciel de dessin. Il se distingue surtout et très tôt par ses convictions sur les déplacements légers, s’autorisant des carènes plus larges, plus porteuses, plus puissantes. Des principes déjà illustrés par le tonner Révolution, construit en aluminium chez Huismans, dont le large tableau arrière fera rager plus d’un régatier britannique. Ce sont les progrès des matériaux composites qui donneront tout leur sens à cette révolution du planing. Il s’associe en 1985 avec Pascal Conq, inventeur d’une non moins révolutionnaire quille pendulaire. Il en résultera une nouvelle génération de bateaux de course qui trouvera sa forme la plus aboutie dans les IMOCA des années 90-2000 : Bagages Superior, Groupe Sceta, LG, PRB, Fila, Britair, le premier Hugo Boss… Mais aussi le premier Figaro Bénéteau en 1990, de nombreux vainqueurs de la Mini-Transat et des quillards de sport qui marqueront leur temps, à l’image de l’Open 7.50. Côté croisière, ses succès les plus aboutis seront des héritiers de l’Ecume de Mer, à l’image du First 260 (puis 25.7) et de toute la gamme des « petits First » dont l’iconique First 210. Et ce sont peut-être ces bateaux populaires et marins qui resteront l’héritage le plus durable de Jean-Marie Finot, un architecte dont les idées ont nourri une génération dorée de voiliers et de marins. ARCHIVES BATEAUX GILDAS PLESSIS ARCHITECTE NAVAL ALAIN GAUTIER NAVIGATEUR BRUNO BELMONT EXPERT VOILE (GROUPE BENETEAU) ILS ONT DIT DE LUI Je suis venu à l’architecture par un oncle qui travaillait avec lui. Je me souviens de ses carrés arrière, qu’il était le seul à proposer avec Harlé. Il y avait dans ses agencements beaucoup de liberté et je crois que ça vient de sa formation d’architecte DPLG. Cette façon d’aborder l’intérieur des voiliers m’a inspiré pour l’Irisoft 44 ou le Luux 1090 et c’est un esprit de liberté que je transmets à mes étudiants. Jeune architecte, je croisais Jean-Marie Finot à l’Institut Français de l’Architecture Navale. J’étais fortement intimidé, mais c’était un homme agréable et très ouvert à la discussion. Mon premier Finot fut l’Ecume de Mer sur lequel je faisais les entraînements d’hiver à 15 ans. Après vient le Figaro et puis Generali Concorde, un des premiers 60’ Open en aluminium très large pour son époque. Ensuite seulement vient Bagages Supérior, un ketch (la bôme de 9 m de Generali était trop dangereuse à l’empannage en solo) en fibre de verre avec des renforts et un voile de quille en carbone ! Je retiendrai de lui son oreille attentive et sa bienveillance lors de notre première rencontre en décembre 1988 grâce à Pascal Conq avec qui nous naviguions en half tonner. J’ai collaboré avec lui de 2005 à 2015. S’il avait déjà confié le Groupe Finot à Pascal Conq, il participait activement aux réunions préparatoires des nouveaux modèles : il y apportait sa créativité et son obsession des unités simples et efficaces, accessibles. D’ailleurs il était bien plus passionné par la conception d’un First 210 que par celle d’un Oceanis 473, ce qui ne l’empêchait pas de le concevoir plus véloce que le First 47.7 ! Je me souviens d’un homme à la curiosité phénoménale, discutant des heures de la voile de demain qu’il imaginait simplifiée à l’extrême, ouverte à tous. VOILE MAGAZINE • JUIN 2025 13 L’intemporel First 210 (1992-2018), ici dans une tenue Voile Mag, est son plus grand succès. Le First Class 8 (1982-1997), un des monotypes emblématiques du Tour de France à la Voile. Finot à la barre du Wizz avec François Chalain (à l’origine du First 30 et de la gamme Océanis). GERARD BEAUVAIS OLIVIER LE CARRER JAKEZ FRANCOIS VAN MALLEGHEM DR DR DR 14 JUIN 2023 • VOILE MAGAZINE ACTUS LESPOTINSDESPONTONS Ce one-off en aluminium signé Vincent Le Bailly répond au cahier des charges bien précis d’un couple originaire de Savoie qui souhaite partir en grande croisière dès cet été du côté des glaces. Au nord ou au sud ? Peu importe tant que l’aventure et la neige sont au bout de l’étrave ! A bord de ce dériveur intégral en aluminium, en plus d’une isolation par liège projeté et mousse de 60 mm en polyuréthane et d’un système de chauffage abouti (via une chaudière fonctionnant au diesel), on retrouve tout l’équipement nécessaire pour croiser loin des sentiers battus (portique solaire, dessalinisateur, machine à laver, etc.) et des volumes de rangement XXL, que ce soit dans le cockpit protégé par une immense casquette ou sous le pont, dans cet intérieur aussi spacieux que lumineux – le carré est ceinturé de vitrages imposants – et confortable. A noter aussi ce piano original qui circule à la verticale (toutes les manœuvres reviennent en cascade depuis le rouf), la timonerie intérieure à la table à cartes, la douillette cabine propriétaire à l’avant et la grande salle de bains qui fait également office de buanderie. EN CHIFFRES Longueur HT : 13,70 m. Largeur : 4,52 m. Déplacement : 14 100 kg. TE : 1,10-3,10 m. SV au près : 100 m2 . Motorisation : 60 ch. Réservoir gasoil : 600 l. Réservoir eau : 500 l. Matériau : aluminium. Architecte : Vincent Le Bailly. Constructeur : Bord à Bord. Prix : 900 000 €. ISMERIA 45 Pouraffronterlespôles SALONDESAINT-MALO L’ambition de St-Malo : devenir le pendant breton et printanier du Grand Pavois rochelais. Unepremière souslesoleil 19 000 visiteurs ont fait le déplacement du côté de la cité corsaire du 24 au 27 avril dernier pour cette première édition du Nautique de St-Malo. Une affluence encourageante pour ce salon à flot très convivial ! Texte : Paul Gury. Photos : Pierre David et Emmanuel Duclos. PARI REUSSI pour Alain Pichavant, l’ex-patron du Nautic de Paris, et toute son équipe qui ont su utiliser avec brio les bassins de la ville de St-Malo pour lancer ce salon breton ouvert sur la Manche mêlant nouveautés, voiliers d’occasion et un grand hall dédié aux équipementiers. Le long du quai Duguay-Trouin, les visiteurs ont ainsi pu admirer sous un soleil printanier plus de 217 bateaux (hors annexes et canoës-kayaks) dont 37 voiliers. Parmi eux, le petit dernier du chantier Bénéteau, le First 30 (essai en page 40) signé Sam Manuard mais aussi son grand frère le 36 ainsi qu’une partie de la nouvelle gamme des Oceanis (du 30.1 au 40.1). Le chantier Bord à Bord de son côté était venu exposer son Isméria 45, un voilier de grand voyage en aluminium sur plan Lebailly, le Groupe Grand Large, l’Exploration 52 (Garcia Yachts) et l’Allures 45.9 tandis qu’AP Yachting dévoilait son magnifique Bélouga refité. Chez Tofinou, on n’était pas en reste puisque les 7.9 et 9.7 avaient fait le voyage jusqu’à Saint-Malo. Ajoutons que la SNIP, le concessionnaire Bavaria implanté à Ouistreham, était venue avec le C42, élu Voilier de l’année 2021, dans ses valises. A visiter également, le Sun Odyssey 350, le Dufour 41, l’Excess 11, le Maxus 24 Evo et même Adrien, le recordman du tour du monde à l’envers (d’est en ouest) racheté en début d’année par l’écurie de course du Malouin Louis Burton. Enfin, sous l’immense tente se mêlaient grands équipementiers à l’image de Garmin, Navicom, Plastimo, Accastillage Diffusion, la voilerie Delta, l’assureur Pantanenius et une foule de petits chantiers et sociétés de la région. Apprécié de tous, des professionnels comme des visiteurs, le Nautique de St-Malo a déjà pris date pour l’année prochaine… Le carré surélevé de l’Isméria offre une vue imprenable sur l’extérieur.
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