ROLLING STONE n°162 - Page 5 - 162 NUMÉRO 162 MAI 2024 26 Dylan Leblanc Le Louisianais, installé au nord de l’Alabama, a sorti un album miraculeux l’an dernier, qui a enthousiasmé critique et grand public. Et s’apprête à le présenter sur les routes d’Europe, et de France en particulier. Par BELKACEM BAHLOULI PHOTO DE ALYSSE GAFKJEN 28 St. Vincent Avec son septième album, All Born Screaming, l’intrépide musicienne américaine affirme son indépendance et son rock inflammable. Rencontre. PAR SOPHIE ROSEMONT 68 Last Train Avec Original Motion Picture Soundtrack, le groupe mulhousien revisite son répertoire en mode instrumental et grand écran. De leur ville d’origine à Paris, de Hausgauen à BoulogneBillancourt, reportage en quatre plans-séquences au cœur de la conception d’un album sous influence, à la fois spectaculaire et intimiste. Action! PAR DENIS ROULLEAU Sommaire Le Mix RENCONTRE 15 Marcus King Sous la bienveillance de Rick Rubin, le chanteurguitariste n’aura jamais donné autant de sa personne. Par XAVIER BONNET Q&R 18 Giles Martin En réenregistrant les titres d’Amy Winehouse, l’ingé-son enrichit le biopic qui lui est consacré. Par SOPHIE ROSEMONT RÉÉDITION 20 Billy Idol Rebel Yell fête son 40e anniversaire avec une réédition… Making of d’un chef-d’œuvre. Par DENIS ROULLEAU Guide Musique PEARL JAM 91 Réflexion Les Vedder, Gossard & Co. se remuent autant les méninges que les muscles…! Par XAVIER BONNET TRÉSOR ENTERRÉ 98 Lusaint L’Anglaise Lusaint est l’une des grandes révélations soul blues de l’année. Par BERTRAND DEVEAUD RADIO CLASSIQUE 100 Black Magic Woman Single parfait s’il en est, créé par Fleetwood Mac, il sera repris dans le monde entier, notamment par Santana. Par PHILIPPE BARBOT En couverture Bruce Springsteen par Rob DeMartin Mai 2024 4 | Rolling Stone | rollingstone.fr BD 106 La Route Cette adaptation du roman de Cormac McCarthy par Larcenet est déjà un classique. Par LORAINE ADAM Livres 108 Dan Chaon Les tourments d’un mercenaire au volant de son camping-car, à travers une Amérique à feu et à sang. Par PHILIPPE BLANCHET Dernier mot 114 Chloë Sevigny L’actrice parle de son travail, des critiques et de la parentalité. Par MARLOW STERN Magazine © GERALD JENKINS Sommaire HAÏTI 40 “Après le sang, il ne restera que des cendres” Reportage exclusif sur l’île caribéenne, au cœur de la guerre des gangs la plus dangereuse du monde. Par JASON MOTLAGH EN COUVERTURE 76 Le Boss à San Francisco La tournée 2023-2024 de Bruce Springsteen & The E Street Band, interrompue par un “arrêt maladie” de six mois, a repris le 19 mars dernier sur la côte ouest des ÉtatsUnis. Nous y étions. Par BELKACEM BAHLOULI, PHOTOS DE ROB DEMARTIN Suzie Stapleton 24 Le premier album de cette artiste australienne atypique, ingénieure du son de formation, est un petit chef-d’œuvre d’intelligence, riche de références dark rock. Par ALMA ROTA Éditorial 10 Playlist 12 Chronique Yves Bigot 17 Chronique Bruno Patino 19 Rubriques FRANCE RÉDACTEUR EN CHEF Belkacem Bahlouli SECRÉTAIRE DE RÉDACTION Stéphane Chaumet RÉDACTRICE GRAPHIQUE Ophélie Lebehot RÉDACTRICE EN CHEF PÔLE NUMÉRIQUE Alma Rota RÉDACTION 53, rue Claude-Bernard, 75005 Paris TÉL. 0144397820 redaction@rollingstone.fr ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO : Driss Abdi, Loraine Adam, Philippe Barbot, Laurent Bazin, Yves Bigot, Philippe Blanchet, Charles Bloch, Xavier Bonnet, Mathieu David, Éric Delon, Renaud Dély, Bertrand Deveaud, Pierre-Marie Dufour, Alain Frétet, François Guillaume, Lauric Henneton, Dom Kiris, Philippe Langlest, Bruno Patino, Samuel Regnard, Sophie Rosemont, Denis Roulleau, Silvère Vincent, Francis Zégut. 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Wenner ROLLING STONE FRANCE IS PUBLISHED BY RS FRANCE SAS UNDER LICENSE FROM ROLLING STONE LICENSING, LLC, AN AFFILIATE OF PENSKE MEDIA CORPORATION. ROLLING STONE ® AND © 2024 ROLLING STONE, LLC. ALL RIGHTS RESERVED. ROLLING STONE No 162 – MENSUEL, numéro de MAI 2024. Rolling Stone est une publication éditée par RS FRANCE, SAS au capital de 1000 euros. RCS Paris 878718436. Siège social et rédaction: 53, rue Claude-Bernard, 75005 Paris. Tél.: 0144397820. Dépôt légal: deuxième trimestre 2024. Diffusion: MLP. Numéro de commission paritaire: 0128 D 82240. ISSN: 1764-1071. 2291 Les documents reçus ne sont pas rendus, et leur envoi implique l’accord de l’auteur pour leur libre publication. © 2024/RS FRANCE www.rollingstone.fr Rolling Stone France DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Michel Birnbaum Mai 2024 6 | Rolling Stone | rollingstone.fr LE PAPIER UTILISÉ POUR ROLLING STONE EST RECYCLABLE. L’ENSEMBLE DE NOS EXEMPLAIRES EST COMPOSÉ DE PAPIERS CERTIFIÉS PEFC, ISSUS DE FORÊTS GÉRÉES DURABLEMENT. ORIGINE DU PAPIER : FINLANDE CE PAPIER : 100 % PEFC IMPACT SUR L’EAU (P TOT) : 0,002 KG/TONNE Grand Angle PHOTOGRAPHIE DE BEN HOUDIJK | 9 L e dix-huitième album de l’équipée australienne se nommera donc Wild God, produit comme de juste par Nick Cave lui-même et son inséparable partenaire Warren Ellis, le mixage ayant été confié à David Fridmann, qui présida en leur temps aux destinées de projets de Mogwai, MGMT, Spoon, The Flaming Lips ou Mercury Rev – au sein duquel il fut également bassiste jusqu’à l’album All is Dream (2001). C’est encore religieusement mais aussi dans un climat apparemment des plus relax que tout ce petit monde semble s’être attelé à la tâche, prenant place dans la blancheur écarlate de ce studio remis à neuf de Miraval, en Provence (Correns, Var, pour les amateurs de précision géographique) que vient à peine contraster le beige de fauteuils mi-vintage mi-futuristes, le reste des séances d’enregistrement ayant pour cadre les studios Soundtree londoniens. Si les tentatives de monter vocalement dans les aigus d’Ellis sur le chorus du titre-album n’ont manifestement pas été retenues et que les questions existentielles (“Is that a controversial idea?”) n’ont pas davantage perturbé le bon déroulement des opérations, ce même “Wild God” jeté en pâture en guise de single liminaire offre une première indication quant à la tonalité de l’ensemble: fiévreux, pastoral, épique, ces cordes et chœurs gospel qui s’emballent dans un second temps donnant furieusement envie d’en savoir davantage sur les neuf morceaux restants. Pour l’heure, au-delà de la participation révélée de Colin Greenwood, le bassiste de Radiohead qui tournait avec Cave récemment, et du guitariste Luis Almau, il conviendra de s’en tenir aux quelques mots tout aussi enthousiastes du patron: “J’espère que l’album aura le même effet sur les auditeurs qu’il a eu sur moi. Il jaillit des enceintes et j’en ai été balayé. C’est un disque compliqué, mais il est aussi profondément et joyeusement contagieux. Il n’y a jamais de schéma directeur quand nous faisons un album. Ils reflètent davantage l’état émotionnel de ceux qui le composent et des musiciens qui y participent. À l’écoute de celui-ci, il semblerait que nous soyons heureux.” L’histoire veut que Cave ait commencé à travailler au successeur du sépulcral Ghosteen (2019) au premier jour de 2023, littéralement. En septembre dernier, tandis que sortait aux États-Unis une version poche de son livre de conversations avec le journaliste Seán O’Hagan, Cave expliquait à propos du projet, alors encore en cours: “Je pense que l’énergie que nous essayons de trouver dans notre musique doit venir d’ailleurs que du rock’n’roll basique. Il y a beaucoup d’énergie sur le nouvel album, mais ce n’est pas celle venant d’un groupe de rock‘n’roll, c’est-àdire une musique où la guitare domine. Avec Warren, nous cherchons des moyens de créer une musique qui repose sur ce genre d’énergie viscérale.” “We’re wild gods, baby, we’re wild gods…” Pas avec ça que Cave et ses acolytes vont s’attirer les faveurs des intégristes religieux de tous bords. Mais bon, quelque chose nous dit que ce n’était pas l’objectif prioritaire… Nick Cave Pouvait-on imaginer meilleure perspective de fin d’été que l’annonce d’un nouvel album de Nick Cave et de ses pas si mauvaises graines? Depuis quelques semaines, la question ne se pose plus, et c’est religieusement que la date du 30 août aura été cochée sur les calendriers, agendas et autres téléphones portables. PAR XAVIER BONNET L’Australien sera en concert à Paris, à l’Accor Arena, le 17 novembre prochain. Par BELK ACEM BAHLOULI I L FALLAIT ALLER SUR PLACE. Dans ce numéro, pas moins de quatre reportages. Dont l’un, le plus dur, le plus poignant, a été réalisé à Haïti par le grand reporter américain Jason Motlagh, carnet à la main et appareil photo sur l’épaule, pour documenter la ruine en direct d’un pays soumis, depuis sa création, à une instabilité politique et sociétale hors du commun. Les grandes villes sont en proie à une permanente guerre des gangs, avec les conséquences désastreuses que l’on sait. Des gamins tués, des familles décimées, et toujours plus de peur, de terreur même, face aux héritiers des Tontons Macoutes de sinistre mémoire. Sauf qu’ils ne travaillent plus pour Duvalier père ou fils, mais pour des seigneurs de guerre, ou prétendus tels. Le niveau de pauvreté et d’insalubrité est désormais abyssal et nul ne sait comment tout cela finira. En drame, bien évidemment. Une faillite programmée ou seuls les vautours tirent leur épingle d’un jeu mortel. Prenant, renseigné, riche dans ses analyses, ce reportage a reçu le prestigieux prix Sydney-Schanberg 2023, dont les jurés ont convenu qu’il était “avant tout un récit saisissant de l’effondrement quasi total de l’ordre en Haïti”. Dans un autre registre, Rolling Stone France a déployé sa rédaction afin de suivre les musiciens au plus près de leur processus créatif. Ainsi, Xavier Bonnet a suivi les Bad Juice à Berlin, au fameux studio Candy Bomber, où ils enregistraient leur nouvel album sous la houlette de la productrice et artiste Gemma Ray. Denis Roulleau, lui, s’est rendu à Mulhouse pour suivre les séances d’enregistrement du nouvel opus de Last Train, avec notamment un orchestre symphonique. Enfin, l’auteur de ces lignes a traversé l’Atlantique et les États-Unis jusqu’à San Francisco, afin de voir si Bruce Springsteen s’était bien remis de son ulcère (spoiler alert… oui!). À cela a été intégré dans ce numéro un cahier spécial de 16 pages spécial festivals, afin que vous, chères lectrices et chers lecteurs, puissiez aussi sauter dans un train ou un avion, sur une moto ou dans un camping-car, afin d’aller faire le plein d’énergie rock, car les programmes concoctés par ces rendezvous sont réellement impressionnants. Édito NOUS VOUS ÉCOUTONS! Écrivez-nous à redaction@ rollingstone.fr PARTAGEZ VOSIDÉES “Ce projet a duré deux ans et représente un investissement aussi bien financier que personnel. Nous pouvons nous le permettre car nous sommes 100% indépendants.” JEAN-NOËL, DU GROUPE LAST TRAIN Terrain(s) CONTRIBUTEUR Rob DeMartin, photographe “J’ai toujours aimé photographier les artistes, principalement les danseurs, et j’ai une longue expérience en images sportives, explique Rob DeMartin, chargé de documenter la tournée mondiale de Bruce Springsteen. J’ai l’impression d’apporter ma sensibilité au sport à la musique, mêlée à l’émotion et à la poésie de la danse.” Sa complicité avec le “Boss” remonte à plusieurs années: “J’ai eu la chance de documenter quelques projets plus modestes de Bruce au fil des ans, comme Letter to You, Western Stars, Springsteen on Broadway”, rappelle le photographe, dont le style journalistique lui permet d’immortaliser les coulisses des spectacles ou de faire des portraits dans un environnement naturel. “Le world tour 2023 m’a permis d’accompagner pour la première fois Bruce et le E Street Band lors d’une grande tournée.” Ayant beaucoup voyagé et habitué aux environnements les plus difficiles, Rob, basé à New York, vit avec sa famille dans une petite ferme de l’ouest du Connecticut. Il n’hésite cependant pas à s’embarquer pour une tournée mondiale: “Voir mon travail ajouté aux archives des plus grands artistes de ma génération est un rêve devenu réalité.” Mai 2024 10 | Rolling Stone | rollingstone.fr © ROB DEMARTIN 1 3 deux routards du rock breton, comme s’ils étaient accoudés au comptoir à faire le bilan d’une vie bien remplie. Calme et apaisée, cette chanson posthume du Rennais Dominic Sonic, coécrite avec le Brestois Miossec, est un poignant kenavo au buffet de la gare, juste avant de prendre un dernier train. 8. Blues Pills “Birthday” (Throwdown/BMG) La pilule a du mal à passer! “Birthday” raconte comment un serveur a gâché l’anniversaire d’Elin Larsson, au Mexique. Une façon pour la chanteuse suédoise de lever bien haut le majeur face aux fâcheux, et de transmettre ses valeurs à l’enfant qu’elle portait pendant l’enregistrement de ce brûlot blues rock. 9. Beth Hart “Little Heartbreak Girl” (Mascot Label Group/ Provogue) En toute sobriété, la petite fille planquée sous la personnalité indomptable de Beth Hart se fait entendre pour la première fois. Convoqué à Nashville, le producteur de métal, Kevin Shirley, l’a installée tout simplement derrière son piano pour qu’elle raconte son parcours de vie chaotique, sauvé par la musique. 10. Mazingo “One Poor Teardrop” (Le Backbeat) Le trio franco-américain a des références et une maîtrise qui nous mettent la larme à l’œil. Sapés comme des pionniers de la ruée vers l’or, ils ne cherchent pas le bon filon puisqu’ils l’ont trouvé au fond d’eux-mêmes. La sensibilité de Mazingo est intacte, même après avoir bourlingué entre théâtre de rue et saloon enfiévré. 6. Brother Dege “Where the Black Flowers Grow” (Prophecy/SoundWorks) C’est en étant plongé dans son nouvel album, Aurora, prêt à sortir, qu’on a appris le décès de Dege Legg, à l’âge de 56 ans. Ça fait un sacré choc quand on a le sentiment d’écouter un authentique raconteur d’histoires. On restera longtemps hanté par ses fascinantes fleurs noires, qui naturellement n’existent pas. 7. Dominic Sonic et Miossec “Qu’avons nous fait, qu’avons nous dit” (IDO/L’Autre Distribution) Confession intime de à la surface grâce à Rick Rubin, à la fois producteur et thérapeute, qui a pris Marcus sous son aile. Sans aucune note de guitare superflue, ce disque fait du bien, pour King et pour nous. 5. Bon Jovi “Legendary“ (Island) Quarante ans de rock au brushing impeccable forcent le respect. Le groupe du New Jersey qui a rendu le heavy rock présentable auprès du grand public va-t-il rentrer dans la légende? Depuis que Jon a retrouvé sa voix, tout est fait pour crier haut et fort “Legendary”, taillé pour de réjouissantes tournées des stades. 1. Slash feat. Brian Johnson “Killing Floor” (Gibson/BMG) La marque de guitare Gibson lance son label avec son plus digne représentant actuel. Slash en solo s’en donne à cœur joie en revisitant les classiques du blues, entouré d’une pléiade de stars, dont la casquette hurlante d’AC/DC et l’harmonica de Steven Tyler, pour cet immortel “Killing Floor”. 2. Gary Clark Jr. “Habit” (Warner) Certes, Gary Clark joue toujours du blues, mais le guitariste prodige l’emmène de plus en plus loin, brisant les codes du genre et l’entraînant vers des contrées inexplorées. Il porte en lui tant de créativité, que “Habit”, son grand huit musical, clôture son nouvel album par une renversante échappée de neuf minutes. 3. Vampire Weekend “Mary Boone” (Columbia) C’est le monde à l’envers: maintenant, c’est aux rappeurs d’être samplés! Vampire Weekend rend hommage à Soul II Soul, tout en évoquant Mary Boone, la reine de l’art contemporain newyorkais des 80’s. Il n’y a pas de meilleurs guides que ces deux figures de la scène artistique pour déambuler dans Brooklyn. 4. Marcus King “Mood Swings” (American/Republic/ Universal) Cette voix éraillée a sans doute à voir avec des souffrances personnelles venues de loin. L’émouvant “Mood Swings” les fait remonter 6 2 Le Mix 12 | Rolling Stone | rollingstone.fr | Mai 2024 © 2023 ZOOM PHOTO STUDIO - MIKE MILLER - 2021 AUSTIN NELSON - DANIEL PAKOPCYK PLAYLIST DOM KIRIS PRÉSENTE SES COUPS DE CŒUR DU MOIS Chroniques de disques et playlists de la rédaction sur rollingstone.fr Abonnements Abonnements OU CONFORMÉMENT À LA LOI INFORMATIQUE ET LIBERTÉS DU 6 JANVIER 1978, VOUS DISPOSEZ D’UN DROIT D’ACCÈS ET DE RECTIFICATION DES INFORMATIONS VOUS CONCERNANT EN ADRESSANT UN COURRIER À ROLLING STONE, 53, RUE CLAUDE-BERNARD, 75005 PARIS, FRANCE. 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LesRépublicains sedéchirent FÉVR IER 2024 NUM ÉRO 159 BOB MARLEY FRANCE SOUL REBEL Au cœur d’une révolution musicale Nicolas Richard Delgres Depeche Mode Jim Croce PRÉSIDEN TIELLE AM ÉRICAINE Élection sous HAUTETENSION ROLLING STONE INTERVIEW GREEN DAY Americanparanoïa RENCONTRE JEAN SOLÉ Lecollectionneur SENSATION The Last Dinner Party Lesfrondeuses IDLES BurningMen ENQUÊTE OLIVER ANTHONY Lecountryman dupeuple? PHOTO DE JM CREATIVE Sous la bienveillance de Rick Rubin, le chanteur-guitariste n’aura jamais donné autant de sa personne. Par XAVIER BONNET Marcus King Maux croisés QUOI DE NEUF DANS LE ROCK ? Rolling Stone | 15 L es peines de cœur, les addictions visitées d’un peu trop près, les troubles que les unes et les autres avaient pu causer et/ou aggraver, Marcus King en avait déjà fait état, mais toujours subrepticement, au détour d’une phrase, comme laissant le choix à son interlocuteur de décoder le message ou pas, quitte à ne pas exactement en saisir la nature et surtout l’ampleur. Puis il a compris – du moins lui a-t-on fait comprendre – qu’une dépression chronique et suffisamment exponentielle pour se traduire par des envies autodestructrices ne s’estomperait pas seulement via les meilleurs dosages chimiques, pour peu que l’on parvienne à déterminer ces derniers, ce qui a semblé tarder à être le cas. Bref, il lui fallait admettre qu’exprimer ces souffrances, les verbaliser, serait au moins aussi crucial. C’est ce cheminement – Marcus emploiera plusieurs fois le mot “journey” au cours de l’entretien – qui constitue aujourd’hui la sève de Mood Swings, son nouvel album. Mais au-delà de sa mise en musique, somptueuse et prenante plus souvent qu’à son tour, c’est l’honnêteté presque brutale avec laquelle il dévoile cette relation avec les troubles mentaux qui saisit, au travers des textes de telle ou telle chanson. Une franchise presque “coup de poing”, qui se poursuit dans les diverses interviews qu’il a pu accorder À SAVOIR À VISAGE HUMAIN Le court extrait audio que l’on peut entendre à l’entame de “Mood Swings”, le titre-album qui lance ce dernier, provient d’un documentaire de 1959, The Faces of Depression. C’était pour Marcus King un moyen de montrer le peu de progrès effectués depuis dans le combat contre la maladie. ESPRIT DE GROUPE Après trois albums “en solo”, Marcus King a décidé de ressusciter le groupe qui avait fait sa réputation. Suite à une première approche l’an dernier, des séances plus “sérieuses” se sont déroulées à Nashville, début avril. “Je suis impatient de voir vers quoi ça va nous mener”, assure le principal intéressé. Nous aussi, Marcus, nous aussi… en préambule de la sortie de l’album. “C’était la meilleure guérison que d’être capable de mettre à jour aussi ouvertement ces cicatrices, renchérit-il. En le faisant, j’ai le sentiment et l’espoir d’apporter une peu de réconfort, un boost de confiance aussi, à ceux qui traversent les mêmes situations. C’est une façon de déstigmatiser ces sujets. Tous ceux qui connaissent ces problèmes passent par les mêmes moments, la seule différence est dans la volonté de les exprimer ou de les taire. Je ne me vois pas pour autant comme un porte-parole de ceci ou cela. C’est là un concept bien trop intimidant. D’une certaine façon, je ne fais qu’extérioriser ce qui m’a aidé, moi.” Mood Swings est aussi – et pour beaucoup – l’histoire d’une rencontre. Avec Rick Rubin, le producteur dont on s’abstient de dérouler le tableau de chasse en matière de collaborations, quand l’espace… d’expression de gratte-papier qui nous est imparti n’est pas élastique. Une rencontre comme une évidence, à écouter celui qui a dû momentanément quitter sa Nashville d’adoption pour suivre le producteur dans ses installations à Malibu, aux mythiques Shangri-La Studios, puis, dans un second temps, en Italie, non loin de Venise. Quitte à devoir s’adapter à des méthodes de travail radicalement différentes de celles qu’il avait pu éprouver avec Dan Auerbach sur ses deux précédents albums, El Dorado (2020) et Young Blood (2022). Des méthodes différentes et parfois étranges, comme lorsque certaines séances californiennes étaient scrutées par le biais de caméras GoPro disposées un peu partout dans le studio, tandis que le “gourou” observait le tout depuis… le Costa Rica. Sans parler de cette décision du même Rubin de faire écouter à son protégé du moment des prises vocales de Chris Cornell issues d’enregistrements avec Audioslave, afin que King y puise quelque inspiration pour son propre chant sur “Fuck My Life Up Again”, le premier single issu de Mood Swings, que l’on mettra quiconque au défi d’entendre de la même façon désormais. “Bien sûr, compte tenu du contexte [les tendances suicidaires de King et la façon dont l’ex-voix de Soundgarden s’est donné la mort en mai 2017, ndla], ce fut un moment vraiment fort, très pesant, concède Marcus. Mais nous avons très vite compris tous les deux, sans échanger un mot, que c’était ce qu’il fallait faire à cet instant précis. Il n’y avait aucune intention chez Rick de me mettre mal à l’aise. Musicalement, ça ne pouvait que nous apporter quelque chose. C’était le seul but poursuivi et ce fut le cas. Rick a une approche très philosophique des choses. Il ne joue d’aucun instrument et il se met d’une certaine façon dans la peau du futur auditeur, de ce qui va accrocher son oreille. Il aime prendre son temps, laisser les choses se décanter. Bref, tout le contraire de Dan [Auerbach], avec qui nous partageons cette propension très propre à Nashville à faire les choses rapidement. Pour résumer cette différence ou l’illustrer, El Dorado s’était bouclé en cinq-six jours, alors qu’il aura fallu deux ans pour que Mood Swings soit complété.” L’autre différence notoire sur Mood Swings est bien entendu la mise en retrait de la guitare, déchue de son statut de premier rôle et soudain devenue simple accompagnatrice. C’est cette voix qui dirige tout, conduit tout, de manière logique dans la poursuite de cette idée de tout mettre sur la table là où, du propre aveu de son propriétaire, la guitare lui a longtemps fourni un moyen de se cacher. Une voix qui renverra volontiers ici ou là au souvenir de ces chanteurs soul ses années 1960, déclinant à leur tour peines et effrois en tout genre. Marcus reconnaît n’avoir rien fait pour en éviter l’inspiration. “J’en aurais été bien incapable tant je baigne dans ces musiques depuis toujours, reconnaît-il, sans ambages là non plus. Je ne conçois pas autrement un désir de se montrer le plus vrai quand il s’agit de mettre en avant des sentiments profonds.” MARCUS KING Mai 2024 © JM COLLECTIVE 16 | Rolling Stone | rollingstone.fr Le Mix Sur ce nouvel album, le guitariste met en avant sa voix assez unique. Par Y VES BIGOT Sign O’ The Times Mai 2024 rollingstone.fr | Rolling Stone | 17 AYA NAKAMURA En réalité, au-delà des qualités poétiques discutables de “Djadja” et des succès de la reine de l’intertextualité linguistique français/anglais/bambara/nouchi/espagnol, le problème, c’est bien le préjugé de couleur à l’encontre de l’égérie mondiale de Lancôme. Merde In France © KRISTY SPAROW/GETTY IMAGES “Y a pas moyen, Aya, ici c’est Paris, pas le marché de Bamako” affiche une banderole du groupe d’ultradroite Les Natifs, qui a déclenché une polémique démontrant, quelques mois après celle autour des “Lacs du Connemara”, combien la chanson est au cœur de la vie française. Certes, Aya Danioko est née bamakoise, mais depuis mai 2021 elle possède la nationalité française et a aujourd’hui les moyens de faire son marché rue Cler et, après Bercy, de se produire au Stade de France, malgré les 63 % de Français qui trouvent qu’elle ne les représente pas. Tout ça parce que, selon L’Express, Emmanuel Macron aurait évoqué avec elle la possibilité qu’elle chante Piaf pour la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris plutôt que Mireille Mathieu, Patricia Kaas ou Nathalie Lhermitte. Aucune ne s’est manifestée, ni n’a fait à la chanteuse de “SMS” de procès en légitimité, qu’elle ne revendique d’ailleurs pas. Patrick Bruel, toujours prêt, s’est dit disponible en cas d’impasse. Marine Le Pen, dont le père dirigeait un label indépendant largement consacré à la musique militaire, la récuse, comme sa nièce Marion Maréchal: “Elle ne chante pas en français, on ne comprend rien à ce qu’elle dit.” Elle préfère réfuter le métissage linguistique qui lui permet d’être la chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde après Céline Dion: ben oui, mais fallait pas aller coloniser si on ne voulait pas que le français se partage, argot, verlan, javanais et louchébem compris, se créolise et en retour ressuscite des termes gaulois désuets (“daron”, “catin”, “palabre”). Jamais à une outrance près, Éric Zemmour croit l’entendre chanter “un peu dans une langue étrangère” et la compare défavorablement à Mozart, pourtant guère français – ni chanteur. Gérard Larcher, président du Sénat, récemment vu à Versailles en grande conversation avec Mick Jagger, estime, lui, qu’“on est loin de la représentation de la France”. Il stigmatise “Catchaca”, hymne à la levrette, ignorant qu’il s’agit depuis plus d’une décennie la position préférée des Françaises, et donc de certaines sénatrices. Cyril Hanouna préférerait qu’elle chante en anglais comme David Guetta, qui serait pour lui une plus grande star française à l’international, sans toutefois correspondre à la notion de “chanteur”. Daft Punk non plus, mais une reformation à cette occasion avec Pharrell Williams, directeur créatif de LVMH, interprétant “Milord”, le seul vrai tube dans le monde anglophone d’Édith Giovanna G a s s i o n , “ m ô m e Piaf” à la grand-mère kabyle (Aïcha Saïd ben Mohamed), ça aurait du panache. Puisqu’en réalité, audelà des qualités poétiques discutables de “Djadja” et des succès de la reine de l’intertextualité linguistique français/anglais/bambara/ nouchi/espagnol, le problème, c’est bien le préjugé de couleur à l’encontre de l’égérie mondiale de Lancôme – espérons, pas son physique, la grossophobie est aussi un délit: une pétition dénonçant sa “vulgarité” affichait à sa place une photo de la rappeuse Megan Thee Stallion! “Vous pouvez être raciste, mais pas sourd, répliquait la jeune femme de 28 ans sur X, je vous dois quoi en vrai? Kedal” Alors qui, sinon Aya Nakamura? Grace Jones, qui a fait un tube planétaire de “La Vie en rose” ? Angélique Kidjo et ses cinq Grammy Awards ? Céline Dion aphone? Johnny en hologramme avec chœurs et orchestre symphonique dirigés par Yvan Cassar (il a chanté “L’Hymne à l’amour” et “Non, je ne regrette rien”). On remarque que Nick Cave vient d’enregistrer une magnifique version de “La Vie en rose” pour la série The New Look. Merde, il n’est pas français…
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