MAD MOVIES n°388 - Page 10 - 388 Rédaction, Administration 51, avenue de Paris 94300 Vincennes Tél.: 01 44 635 635 Directeur de la publication Gérard Cohen g.cohen@custom-publishing.com Directeur de la rédaction et rédacteur en chef Fausto Fasulo fausto@mad-movies.com Secrétaires de rédaction Sacha Rosset, Marianne Ravel Rédacteurs pour ce numéro François Angelier, Sixtine Audebert, François Cau, Erwan Chaffiot, Cédric Delelée, Fausto Fasulo, Pascal Françaix, Gilles Esposito, Christophe Lemaire, Alexandre Poncet, Bruno Provezza, Sacha Rosset, Maybelline Skvortzoff, Professeur Thibaut, San Helving, Bernard le Fourmilier. Rédactrice graphique Carla Ferreira/Pondichery Rédacteur iconographe Mathieu Roux Distribution presse MLP Impression Léonce Deprez Allée de Belgique 62128 Wancourt Remerciements Maya Borreil, Nils Bouaziz, Nicolas Brogniart, Monica Donati, Yasmine El Omari, Pablo GarciaFons, Matthieu Rey, Pauline Vilbert, les équipes du Festival International du Film de La Roche-sur-Yon, de VIEW Conference et des Utopiales. Commission paritaire N°0727 K 81858 ISSN N° 0338-6791 Dépôt légal à parution Editeur délégué Custom Publishing France SAS au capital de 44 000 € RCS Paris 394 412 928 Principal actionnaire G. Cohen Custom Publishing France et MadMovies sont des marques déposées. La publication comporte une édition limitée avec le pack DVD I Spit on Your Grave au prix de 14,99 €. Le DVD ne peut être vendu séparément. Les articles ne peuvent être reproduits sans l’accord écrit de l’éditeur. ©2024 Custom Publishing France. Imprimé en France/Printed in France Publicité MINT (Media Image Nouvelle Tendance) 51 Avenue de Paris 94300 Vincennes www.mint-regie.com Fabrice Régy. fabrice@mint-regie.com Tél.: 01 43 65 19 56 LE DVD MAD Magie de Noël oblige, on vous propose en bundle ce mois-ci un… rape and revenge. Le bonheurdoit être partagé en famille, donc n’hésitez pas à vous réunir devant I Spit onYourGrave, le DVD « élu » de décembre. SERVICEABONNEMENTSmadmovies@abomarque.fr -Tél.:+33(0)534563560. MadMovies/Abonn’escient – Opper : 53, route de Lavaur31240 L’Union Abonnementsenligneetvented’anciensnumérossurwww.mad-movies.com - AbonnementàMadMoviespour1an97,90 € avant réduction surla France métropolitaine. SERVICEDESVENTESRÉSERVÉAUXPROFESSIONNELSOpperDiffusion kiosque. Sarah Mordjane. Tél.:0140942221. smordjane@opper.io LA LAINE SUR LE DOS Ça fait un bail qu’on avait dans le viseur le Nosferatu de Robert Eggers, cinéaste régulier de nos colonnes et habitué de nos panégyriques (même son Northman s’en est bien tiré !). Et si le gars n’appartient évidemment à personne, le voir plein pot, en couv’, chez les petits camarades généralistes, nous a un peu foutu le seum. Tout ça pour vous cracher qu’aujourd’hui, le temps béni des exclus et des propositions éditoriales sur mesure est presque révolu. « Presque », car il nous arrive encore de faire jouer notre incroyable réseau occulte pour vous faire bénéficier d’informations de première main, comme c’est le cas ce mois-ci avec la preview en « world premiere » du très excitant Reflet dans un diamant mort de Hélène Cattet & Bruno Forzani. La vraie différence, et vous l’aurez remarqué si vous savez (bien) lire, se joue au niveau de l’incarnation : qui, aujourd’hui, peut compter dans ses rangs des plumes aussi tordues et abrasives que celles de ce truculent San Helving et du très baroque Bernard le Fourmilier ? Vous savez donc pourquoi vous êtes ici. Bonnes fêtes. I Fausto Fasulo Site Internet & Madshop www.mad-movies.com X @Mad_Movies TikTok@madmovies_magazine Instagram @madmovies_officiel FacebookMadMovies YouTube Mad Movies Magazine imprimé sur du papier issu de forêt à renouvellement durable. Ville d’origine de fabrication du papier : Hagen (Allemagne) Taux de fibres recyclés : 0% Taux d’eutrophisation : 0,020 Kg/tonne Certification : PEFC Aveclesoutiendu Plutôt que de vous goinfrer des best-of miteux à la télé, des streams pourris sur Twitch et du « contenu » gênant surYouTube, branchez-vous sur Ciné+ Frisson. On vous a choisi une « trilogie » made in France bien, bien costaude, avec La Maison du Mal (le 2/12 à 20 h 50), Farang (le 13/12 à 20 h 50) et Acide (le 23/12 à 20 h 50). édito Et aussi… 6VODBORDELLO 14POURQUOIILFAUT(RE)VOIR… 16AVISCHIFFRÉS 18CINÉPHAGES 77MADGAZINE 84FESTIVALS 90MESSALAUDS! 92ONESHOT! 95LABÉDÉDUMOIS 96ZONETRÈSLIBRE 98LECHOIXDUDRANGELIER Sommaire EN COUVERTURE NOSFERATU Le 25 décembre, quand certains iront chercherleurcadeau au pied du sapin, d’autres iront se jeterà corps perdu dans les bras monstrueux du comte Orlok, et c’est bien sûrnotre cas. Comme un pieu en plein cœurde l’esprit de Noël, le funèbre et sublime Nosferatu de Robert Eggers pointe le bout de son nez pendant les fêtes. Nous en faisons ici l’éloge, et en profitons pour converseravec son réalisateur susnommé ainsi qu’avec son directeur-photo Jarin Blaschke. 44 58 36 66 PREVIEW REFLETDANSUNDIAMANT MORT Cela fait déjà sept ans, soit depuis leur Laissezbronzer lescadavres, que ces diables d’Hélène Cattet et Bruno Forzani nous ont laissés sans nouvelles. Réjouissez-vous : ils s’apprêtent à faire leurgrand retouren 2025, avec Refletdansundiamantmort, film d’espionnage qui fleure bon la vieille péloche, avec le glorieux Fabio Testi en tête d’affiche. Le duo vous invite en coulisse. HOMMAGE TONYTODD Tony Todd, avec sa trogne inoubliable de Candyman, a rendu l’âme le 6 novembre dernier. Nous nous devions de relater– en compagnie du réalisateurBernard Rose, qui l’a fait définitivement entrerdans la légende –, sa riche carrière, de son rôle dans Platoon à sa prestation vocale dans le jeu Marvel’sSpider-Man2 en passant par TheCrow, Rock et Frankenstein. DOSSIER MONDOMOVIES Alors que Potemkine nous sort un très, très prestigieux coffret « Mondo Movies » (comprenant Mondocane, AdieuAfrique, LaCibledansl’œil, TheKillingof America et le livre culte Mondo Movies : reflets dans un œil mort) de derrière les fagots, nous en avons profité pour retracerl’histoire de ces curiosités filmiques, à mi-chemin entre le documentaire et le documenteur. 6 Tigres et Hyènes Personne ne devrait savoir que Waël Sersoub a décroché son premier « grand » rôle dans MILF d’Axelle Laffont, la sortie cinéma à partir de laquelle le monde a décidé que plus rien n’en vaudrait la peine. Et pourtant, ce ground zero civilisationnel vient réduire à néant tout effort de Tigres et Hyènes de Jérémie Guez, film de casse peu convaincu de son urgence d’exister. Vincent Perez et Olivier Martinez se livrent un duel à distance pourapparaître les plus blasés possible, Sofiane Zermani se prend moins au sérieux que dans ses rôles de bizutage pour intégrer la graaaande famille du cinéma français et ça lui réussit. Les scènes d’action tombent à point nommé pour rappeler le savoir-faire du réalisateur, sans hélas jamais parvenir à atténuer ces flashes traumatiques d’Axelle Laffont, Virginie Ledoyen et Marie-Josée Croze fricotant avec des minets imberbes. The Redeemers Dans le finlandais The Redeemers de Niko Kelkka et Miro Laiho chiné par Shadowz, deux illuminés sectaires tentent de répandre la bonne parole au porte-à-porte et ce faisant, tuent accidentellement l’une des bonnes âmes leur ayant ouvert. À peine le temps de cacher le corps que des rôlistes débarquent, et voilà nos missionnaires embrigadés dans leur partie en attendant que la situation se démêle. Ce postulat rigolo s’embourbe dans un dispositif scénaristique répétitif et des contre-performances atones, diluant l’attention tel un morceau de sucre dans la rivière de foutre entourant le donjon dominical de notre cher, si cher Gilles Esposito. Rien de tout cela ne serait très grave si le dernier acte ne multipliait les gerbes de sang numérique proprement dégueulasses, en renfort de son basculement dramatique qui venait de nous tirer de cette douce, si douce léthargie. Lord of Misrule Lord of Misrule, visible sur Shadowz itou uniquement les jours pairs et impairs, tend à prouver qu’il ne faut jamais désespérer de quiconque. Tout le monde a potentiellement, si ce n’est un chef-d’œuvre, du moins un bon film en réserve, dans ses tripes ou dans son cul, pour ce qu’on en sait. Oui, même Olivier Baroux, Fabien Onteniente voire Josée Dayan. Prenez William Brent Bell : le type arrive dans nos vies en 2006 avec l’abominable Stay Alive, à toujours et à jamais dans le quinté de tête des pires insultes jamais adressées à la communauté gameuse, ce qui n’est pas peu dire. Il s’en revient six ans plus tard en sifflotant, l’air de rien, avec un found footage nul et non avenu, Devil Inside. Il fait mine d’avoir inventé la poudre avec The Boy et sa suite, avant de se prendre les pieds dans le tapis de la suite d’Esther, hilarant bousin, lumière tordue dans les ténèbres de 2022. Les chances qu’il déboule un beau jour avec un film potable étaient descendues très exactement à 3,2 %, et BIM ! A contrario de toutes les prédictions, voilà Lord of Misrule, variation convaincante sur les canons de la folk horror. Un script malin, un casting solide porté parl’antagonisme entre une irréprochable Tuppence Middleton et le toujours impeccable Ralph Ineson, et voilà le bon William inspiré comme jaja, à nous tisser une belle ambiance profane de derrière les fagots. À l’aune du genre et de ses plus grandes merveilles, le film n’apporte au bout du compte qu’une série d’habiles contrepoints correctement exécutés, mais au regard de la carrière de son metteur en scène, le terme miracle peut, doit être allègrement brandi. VODBORDELLO GUIDE DE SURVIE DANS LA JUNGLE DU STREAMING, PAR SAN HELVING The Redeemers. Lord of Misrule. 8 VOD BORDELLO sans amour. Dans Ape vs. Mecha Ape, ombre malfaisante du Godzillaverse refilée à AppleTV en échange de secrets d’État capables de faire chanter le Luxembourg comme un rossignol, des acteurs morts à l’intérieuréchangent des répliques plates dans des décors vides. Tom Arnold cabotine sans conviction avec dans les yeux les remugles des restes de sa carrière se nourrissant de charogne pour survivre encore un peu, encore un rôle. Côté effets spéciaux, Sasha Burrow, fidèle de l’Asile depuis une quinzaine d’années, en arrive enfin au niveau de la V1 du King Kong de Peter Jackson en 2005. Pourquoi continuer à enchaîner les machins aussi vides d’intérêt ? Tout simplement parce qu’ils le peuvent, m’sieur Pujadas. Grotesquerie C’est l’éternel problème avec Ryan Murphy. Il vous assomme d’une saison de trop sur l’un de ses soixante-douze shows en cours, vous navre avec une mini-série vulgos que vous vous sentez obligé de materjusqu’au bout au cas où. Pas le temps de jurer mais un peu tard qu’on ne vous y reprendra plus, le voilà qui vous présente sur un plateau plaqué or une nouvelle propale déconcertante. Son dernier forfait du genre se nomme Grotesquerie et se visite sur Disney+, les sanitaires à 2 kilomètres à la ronde et coupé toutes les arrivées d’eau de la ville. Là, et seulement là, libre à vous d’enchaîner les 5 h 30 de cette première saison de Cruel Intentions. Des endives mal braisées y surjouent l’assurance pour tenter de nous faire croire à leur aura sexuelle. La série se ment à ellemême dans ses rares écarts lascifs, d’une pudibonderie à faire soupirer le cadavre de Benoît XVI de lassitude. Tout est plus ou moins en place pour aborder divers sujets de guerre culturelle sur les campus américains ; il n’en sera strictement rien fait, nada, peau de zob. Rien de désagréable, encore moins d’agréable : du vide synthétique pour une génération que les responsables de ce machin considèrent apparemment comme des abrutis. En comparaison, le film de 1999 passe pour une symphonie douce-amère. Ape vs. Mecha Ape S’il y a une chose qui ne bouge pas dans ce business appelé « show », c’est bien le studio The Asylum. Toujours dirigé par les mêmes clampins, toujours à sucer la roue des succès du moment pour attirer du zonard de catalogue VOD éméché, prêt à se faire abuser par une jaquette clinquante et un titre marrant immédiatement trahis pardes productions torchées Cruel Intentions Partout, dans la rosée du matin, dans le sourire de chaque enfant mort, le spectre du renoncement n’attend que de s’abattre sur nous pour nous faire accepter la moindre Zumba exempte de tout contrôle qualité. Maintenant plus que jamais, il ne faut rien lâcher. Une personne inconnue vous vante les atouts du film Sexe intentions de RogerKumble dans un transport en commun ? Crachezlui dans l’œil d’un air paternaliste en lui montrant la fiche IMDb du réalisateur. Un collègue vous demande si vous avez vu l’adaptation du film en série, sortie sur Prime Video y a pas longtemps ? Videz une boîte de laxatifs dans sa gourde en polyuréthane après avoir démonté tous Ape vs. Mecha Ape. assez ironiquement vu les monceaux de barbaque et de blasphèmes sournois déployés. Soit l’enquête d’une flic jouée par la monumentale Niecy Nash dans un rôle d’alcoolique infecte avec son entourage, autour de laquelle rôdent un prêtre adepte de l’autoflagellation, une nonne fan de tueurs en série, une fille obèse, un mari dans le coma, le mec de Taylor Swift dans ses débuts à l’écran. L’ambiance putride développée par Murphy, Jon Robin Baitz et Joe Baken s’infiltre sournoisement dans la partie reptilienne du cerveau, malgré les airs de déjà-vu, malgré les hoquets stylistiques, et survit même au retournement de situation interdit balancé aux deux tiers de l’intrigue. Cat’s Eyes Que dit le plébiscite critique et public de la série Cat’s Eyes, rattrapable sur TF1+ ? Qu’à l’heure où se profile une émission intitulée Merci Dorothée sur la première chaîne, en hommage à la grande prêtresse des bébés zappeurs, la nostalgie ne s’est jamais aussi bien portée ? Que le règne des IP (propriétés intellectuelles) n’a jamais été aussi puissant, compliquant encore plus l’émergence de toute nouvelle création ? Que le moindre parti pris d’écriture de cette version « Paris, je t’aime » des filles d’aujourd’hui, enfants-de-laformeuh, nous renvoie à notre grand âge ? Réponses dans l’ordre : c’est possible, j’en ai peur ma bonne dame, va bien te faire foutre. Un jour, peut-être, les séries destinées au prime time des grandes chaînes nationales se passeront de ces dialogues d’exposition infernaux et incessants, et engageront des seconds rôles ailleurs qu’à la sortie d’usines de contrefaçons en principauté d’Andorre. En attendant ces jours meilleurs, il est permis d’apprécier les efforts sur le découpage de l’action et sa mise en scène, si vous me passez l’expression. Cat’s Eyes. Grotesquerie. 10 VOD BORDELLO La Cage La magnanimité envers FranckGastambide peut se justifierde multiples façons. Un réel talent pourbien s’entourerà l’écriture et à la mise en scène, une sincérité désarmante à l’heure du cynisme étalé en mode de vie, une efficacité rouleaucompresseur, une générosité un rien roublarde capable de faire avaler des palettes entières de couleuvres, sans oublier le souvenir indélébile de cette projection de Pattaya dans un silence de mort à l’infâme Festival de l’Alpe d’Huez, au milieu d’une salle remplie de résidents des EHPAD alentour, avec pour point culminant cette vingtaine de départs de la salle au moment de la scène de diarrhée sur personne de petite taille. Les deux saisons de Validé avaient tiré très fort sur la corde de la suspension d’incrédulité et des limites de son sympathique casting ; La Cage sur Netflix cherche visiblement le point de rupture. Tout le monde joue très mal, l’intrigue condense tous les clichés du film sportif jusqu’à une moelle informe saupoudrée de dei ex machina absurdes, et pire que tout, le combat final s’achève surune note à ce point anti-spectaculaire qu’elle demande un second visionnage au ralenti pour s’assurer de n’avoir rien raté. Franckie la Gastambe mise sur l’engouement autourdu MMA comme il le faisait surle rap, en s’assurant d’appuyer surtous les boutons libérateurs d’endorphine, en se castant l’air de rien dans un rôle de mentor respecté. Pourtant, POURTANT, le tout se regarde avec un plaisir forcément un peu sale. Peu d’épisodes, un format resserré autour de la demi-heure, un rythme spartiate dans la connerie dramaturgique : le risque de s’envoyer la saison 2 derrière la cravate day one est réel. Hellbound Previously on Hellbound, trois créatures surnaturelles, mi-colosses mi-fumées de pneus, surgissent quand et où bon leur semblent pour faire leur marché d’âmes à amener en enfer. Ces irruptions impromptues précipitent l’avènement de mouvements religieux ennemis pour tenter de donner un sens à ce qu’il faut bien qualifier de beau bordel. La saison 2 démarre cahin-caha avec dans sa besace des rescapés de l’au-delà désorientés. Yeon Sang-ho, maître du film d’animation traumatisant (The Fake, King of Pigs) et petit prince du zomblard en goguette (Dernier Train pour Busan, Peninsula), se régale visiblement à créer son univers de fiction à la fois pré et postapo, entre une esthétique fasciste classic rock et des résurgences punkoïdes des années 1980, le tout mariné de mysticisme frelaté et instrumentalisé sans que personne ne comprenne vraiment quoi que ce soit. Sa tendance fâcheuse à sauter d’un personnage à l’autre dès que le ton vire trop mélo joue toujours contre lui, et empêche d’apprécier le potentiel du projet à sa juste mesure. Le sérieux papal avec lequel des éléments loufoques sont répétés à qui mieux mieux n’arrange rien mais sur ce dernier point, une solution existe : passer en VF, et profiter des savoureux freestyles de Christophe Lemoine dans le rôle de Moulin à Vent, l’influenceur peinturluré de la secte Pointe de Flèche. Le légendaire doubleur français de Cartman et Butters dans South Park nous prouve une énième fois qu’il vient rarement pour trier les trombones par tailles, couleurs puis odeurs. GTmax Impossible de savoir ce qu’est venu faire Riadh Belaïche, Just Riadh de son nom d’influenceur, dans GTmax d’Olivier Schneider, dernière hallucination somnambulique d’un cinéma de genre bizarrement made in France pourNetflix. Le gars est tellement absent en matière d’acting ou d’une quelconque personnalité que le film lui-même décide de GTMax. La Cage. Hellbound. 12 VOD BORDELLO bifurqueràmi-parcourssurlepersonnage de sa sœur. Cette dernière est à peu près défendue par Ava Baya et ses yeux qui vous jugent d’avoir choisi de regarder cette sombre histoire de braquage sur des scooters tunés pour sauver le circuit familial,auxdialoguesaussitristesetlittérauxqu’unmanueldegrille-pain.ClémentineCélariéetGérardLanvinn’ontabsolument rien à jouer, ils le savent et accusent le coup avec ce qu’il faut de dignité pour que plus personne ne leur en reparle jamais derrière. Jalil Lespert a presque l’air de s’amuser. Tant mieux pour lui. Mon futur moi Certes, il eût sans doute été risqué de traduire littéralement le titre VO My Old Ass en « Mon vieux cul », mais opterpour l’intitulé français Mon futurmoi ? Quelle tristesse, quelle imputrescible défaite de la pensée plongeant un peu plus l’Occident dans des abîmes hémorroïdaires. Le film de Megan Park, topable sur Prime, confronte son héroïne adolescente à elle-même, plus âgée d’une grosse vingtaine d’années, au gré d’un trip sous champignon. Dans le rôle, Aubrey Plaza accomplit de nouveau ce qui est devenu son sacerdoce : une énième apparition décalée en bourgeoise frustrée vaguement inquiétante. En grande pro sortie indemne du dernier Coppola, elle s’acquitte avec les honneurs d’un personnage dont le caractère profondément hors sol vire au reflet de la dérive du cinéma indépendant américain, de la comédie romantique américaine, d’une certaine idée du cinéma de genre, d’un certain mode de vie autocentré et déconnecté du monde extérieur à un point quasi criminel. Il reste tout à fait possible de trouver Mon vieux cul mignon et touchant, les œillères requises à cet effet doivent en revanche être en béton armé et mesurer 4 mètres sur 4. The Gates Dans l’introduction de The Gates, aperçu par des témoins rôdant sur les rives de Paramount+, la bonne vieille gueule d’atmosphère de Richard Brake fait la blague. Oui, l’image est terne à en pisser de la bile et cette histoire de tueuren série jetant une malédiction avant de cramer sur la chaise électrique n’augure rien de bon, mais Richard nous ressort ses meilleures tronchasses de sociopathe comme si demain n’existait déjà plus. Et puis, plus rien, le grand vide. Un souci de la reconstitution historique limité à des chapeaux hauts de forme et des vestes cintrées, une trouille panique de ne plus maîtriser la grammaire enfantine du champ-contrechamp. Des ectoplasmes de personnages nuls passent leurtemps à suggérer des pistes d’intrigue sans oser les suivre. John Rhys-Davies a l’air de tenir un semblant de forme, même si sa présence dans un machin aussi indéfini relève vraisemblablement d’un chantage. The American Society of Magical Negroes Le trope narratif du « Noir magique » décrit cette manie du cinéma américain d’employer des personnages noirs dans le seul but d’aider les héros blancs. The American Society of Magical Negroes de Kobi Libii, tombé surCanal+, imagine une confrérie occulte et surnaturelle entièrement dévolue à ce principe dans la vie de tous les jours, à laquelle une jeune recrue campée par l’irrésistible Justice Smith va offrirses services. Les commentaires anti-wokistes outragés trouvables sur la moindre critique en ligne tendent à démontrer que la guerre culturelle bat décidément son plein et que le discours du film frappe juste. La langueur de son tunnel romantique central aurait gagné à se défaire d’une bonne vingtaine de minutes pour accentuer son charme et sa pertinence dans un même élan. The Gates. Tout le monde connaît Steve McQueen, surnommé le « King of Cool » grâce à ses rôles dans Bullitt, L’Affaire Thomas Crown ou euh… Le Blob. Ce qu’on sait moins, c’est qu’il est passé à la mise en scène assez tardivement, puisqu’il était déjà âgé de 78 ans lorsqu’il a réalisé Hunger en 2008 après vingt-huit ans de bronzette sous le soleil du Mexique. Un film dans la lignée de Papillon, racontant la captivité d’un terroriste irlandais, dont la scène la plus marquante montrait un agent d’entretien passer la serpillière dans le couloird’une prison en plan fixe pendant un quart d’heure, histoire de bien nous expliquer que c’est chiant de faire le ménage. McQueen enchaîne avec Shame, portrait d’un sex addict inspiré de la vie de Gilles Esposito (« J’ai été très fierd’interpréterle rôle de ce ténébreux séducteur, même si je ne suis pas aussi bien pourvu que lui » nous confiait Michael Fassbender), puis signe 12 Years a Slave, qui s’intéresse à la difficulté de recruterdu personnel quand on dirige une plantation en Louisiane avant la guerre de Sécession. Après Les Veuves qui, me dit-on, parle d’épouses qui ont perdu leurs maris, le voilà qui s’attaque à un remake mal déguisé d’Empire du soleil avec Blitz, mais sans Jason Statham. On y voit en effet un petit métis boudeur être envoyé à la campagne pour échapper aux bombardements allemands qui pleuvent sur Londres et sauter du train pour rejoindre sa maman, laquelle profite de l’absence de son gamin pour aller faire la teuf avec ses copines. Chemin faisant, il lui en arrive de belles : il se fait un copain de son âge qui se fait écraser par un train en traversant la voie ferrée, se fait un autre copain plus vieux qui finit explosé par un obus en aidant une vieille dame à traverser la rue, s’en fait un troisième qui s’avère être un détrousseur de cadavres, avant d’empêcher une inondation et d’être recueilli par une gentille dame qui s’avère être une femme cupide, tout ça sur les violons plaintifs de Hans Zimmer. Pendant ce temps, sa mère se lance mollement à sa recherche en tirant la tronche parce qu’elle préférerait aller danser, mais esquisse tout de même un légerrictus quand il finit par la retrouver. Si ce mélo pour mémés gagne un Oscar, je me pends par la trompe. I Ce mois-ci, Bernard est allé voir un film taillé pour les Oscars, un peu comme celui où Kate Winslet joue une photographe de guerre féministe branchée cul qui fume comme un pompier et picole comme une vache. Blitz 2024. Londres. Réalisation très académique Nevada Smith. Interprétation Saoirse Ronan qui fait la gueule, Un jeune débutant qui fait la gueule et Plein d’Anglais qui leurfont la gueule. Disponible en SVOD (Apple TV+). BERNARD LE FOURMILIER LE COUP DE CŒUR DE
MAD MOVIES n°388 - Page 10
MAD MOVIES n°388 - Page 9
viapresse