Premières pages de EE 65 Frontieres - Page 4 - Premières pages de EE 65 Frontieres étoiles d’encre revue thématique trimestrielle à nos doubles ISSN : 1620-5022 Éditions Chèvre-feuille étoilée Le clos de la Fontaine Bat B 65, cour Libéral Bruant r ue Jacques Lemercier 3 4 0 8 0 M o n t p e l l i e r Tél/fax : 04 67 73 75 45 contact@chevre-feuille.fr Comité de lecture : Behja Traversac, Maïssa Bey, Marie-Noël Arras Directice de la rédaction : Behja Traversac Directrice artistique : Marie-Noël Arras Directrice de la Communication : Edith Hadri Collaboratrices : Aldona Januszewski, Carole Lilin, Danièle Maffray, Dominique Godfard, Fawzia Assaad, Isabelle Marsala, Isabelle Blondie, Janine Teisson, Marie-Lydie Joffre, Marie Bueno, Marie Malaspina, Michèle Wilisch, Mita Vostok, Nic Sirkis, Nicole Buresi, Peggy Inès Sultan, Rosa Cortes, Rose Marie-Naime, SamiraNegrouche,ValérieMeynadier. Abonnement en France : 58€ pour 2 ans/4 numéros ISBN : 978-2-36795-103-4 Diffusion : Chèvre-feuille étoilée Marraines : Alice Cherki, Arlette Welty-Domon, Cécile Oumhani, Claude Ber, Christiane Chaulet Achour, Esther Fouchier, Fanny Colonna, Ghania Hammadou, Hélène Cixous, Jocelyne Carmichael, Karima Berger, Laurence Farès, Leïla Sebbar, Malika Mokeddem, MarieFrançoise Chitour, Sophie Bessis, Wassyla Tamzali, Zineb Labidi. Représentée en Algérie par Maïssa Bey avec l’assoc. Paroles et Ecritures 10, impasse Poincaré 22000 Sidi-Bel-Abbès Tél/fax : 48 54 65 11 parole_ecriture@yahoo.fr ISSN : 1112-3311 65 edito_Mise en page 1 03/03/2016 02:35 Page 2 On a mis le feu et le feu gagne. Le feu n’a pas de frontières. Aldona Januszewski Depuis la nuit des temps, c’est elle qui mène le jeu, elle, la frontière. Logée en nous, elle s’impose, se diffuse insidieusement dans nos manières d’être et de penser. Elle est à la fois objet de désir et de rejet, tour à tour ombre protectrice ou rempart répulsif. Elle est ancrée dans nos têtes. Omniprésente, comme une greffe dont, souvent, parfois (?) on ne veut pas, mais qui pourtant s’enracine dans nos subconscients, sans que nous prenions tout à fait la mesure de ce qu’elle nous dicte silencieusement, subrepticement, à pas feutrés. Un jeu de pistes. Elle gouverne notre relation aux autres. Avançant à visage masqué, c’est sans doute par son silence sur nos intolérances, qu’elle leur permet d’exister. Cette frontière-là rend inintelligible une partie de notre propre être. Inintelligible ce qui, en nous, admet l’irrationalité du racisme, admet l’infériorisation des femmes, inintelligible ce qui mène à l’agression des enfants. S’il est des frontières à abattre dans les têtes, c’est bien celles-là. Mais la frontière n’est pas que dans nos têtes, elle est partout dans notre environnement, dans notre Histoire. Songeons à la manière dont les frontières dans le monde ont été dessinées, redessinées, délimitées, déplacées, transformées ou créées de toutes pièces, renommées et imposées sans aucun souci pour les peuples qui vivaient alentour, sans souci des relations séculaires qui existaient entre eux, de ce qui les séparaient ou les unissaient, de ce qui a construit l’Histoire de ces territoires qu’on fragmentait di é to 65 edito_Mise en page 1 03/03/2016 02:35 Page 3 et qu’on plongeait dans les conflits les plus dévastateurs. Ce fut, l’apanage de tous les puissants du moment depuis les temps les plus reculés et jusqu’à nos jours. Ce fut le cas sur tous les continents et celui de tous les empires. Le seul souci c’était, c’est encore, agrandir l’empire, soumettre les hommes, s’emparer des richesses. Nous en constatons les ravages chaque jour, chaque heure. Si cette manipulation des frontières a entraîné des guerres cruelles, des traumatismes, la perte des repères arrimés à un sol, séparant des peuples vivant sur le même espace physique depuis des siècles, elle a, dans le même mouvement, creusé la voie de la discrimination ethnique entre ceux qui se vivaient souvent sinon comme semblables, du moins comme voisins respectueux et respectés, ainsi que le rappelle le texte sur l’ex-Yougoslavie de Marie-Noël Arras. Cette différenciation ethnique s’est toujours exercée entre les vainqueurs et les vaincus, entre les conquérants et les indigènes. Une démarcation se dressant comme un isthme entre deux mers, faisant s’effondrer l’imaginaire d’un destin commun, désormais assigné à un étroit critère de couleur de peau, de religiosité ou d’habitudes culturelles. Le racisme a sans doute commencé là. Il est au cœur de ce processus de suprématie des puissants de l’heure. Autrement dit, les frontières géographiques arbitrairement et violemment édifiées ont eu des conséquences sociales, politiques, psychologiques, linguistiques… incalculables. Et ces barbelés-là, sont peut-être les plus inamovibles, les plus dangereux pour l’humanité. C’est cela que dénonce, ici, Elaine Mokhtefi dans un texte lucide et courageux, elle, l’Américaine, bloquée à la frontière d’une Algérie qu’elle a tant aimée. Behja Traversac étoiles d’encre 65-664 edito 65 edito_Mise en page 1 03/03/2016 02:35 Page 4 Qui connaît le désert sait qu’il n’est jamais vraiment ouvert Samira Negrouche Penser à l’idée de la frontière, c’est se demander jusqu’où peuvent s’étendre ses formes. Avant de la regarder sous un aspect limitant ou interdisant, je me laisse dériver vers la possibilité d’un espace, cet espace à vivre, à circonscrire, à protéger. Ce lieu dans lequel nous vivons et dans lequel nous aspirons à l’épanouissement est celui-là même qui nous construit et définit une grande part de nos êtres. Quelle peut donc être l’exigence de cet espace, quelle peut être notre marge de vision et de pensée face aux barrières posées ou imposées ? À partir de quel moment cet espace commence-t-il à nous sembler rétréci voire menacé ? Mais surtout comment une ligne frontalière, jadis lieu d’échange, de rencontres et de vie, peut-elle basculer en zone de conflits et de tensions extrêmes, en lieu de séparation, de répulsion et de déni ? 65 carte blanche_Mise en page 1 04/03/2016 12:55 Page 5
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