Premieres pages des Fivettes - Page 3 - PAGES A FEUILLETER LES FIVETTES ELEONORA MAZZONI LES FIVETTES Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page3 du même auteur Ce roman est la traduction de Le difettose, ed. Einaudi, 2012 autres publications: Gli ipocriti, ed. Chiarelettere, 2015 In becco alla cicogna! La procreazione assistita: istruzioni per l’uso, postface du Prof. Carlo Flamigni, ed. Biglia Blu, 2016 La testa sul tuo petto. Sulle tracce di San Giovanni, ed. San Paolo, 2016 Ce roman a été adapté au théâtre en Italie par Serena Sinigaglia et interprété par Emanuela Grimalda. (La première représentation a eu lieu au Festival della Mente de Sarzana en 2014) et en Allemagne par Guido Verstegen avec Doris Gruner. Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page4 Eleonora Mazzoni Les Fivettes roman traduction Paola Casadei Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page5 Pour la traduction en français © Éditions Chèvre-feuille étoilée Montpellier édition originale: Le difettose, ed. Einaudi, 2012 bureau@chevre-feuille.fr http://www.chevre-feuille.fr/ mai 2018 ISBn : 978-2-36795-130-0 Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page6 A Maurizio, senza il quale non sarebbe stato possibile questo libro e molto altro, a Matteo ed Emma. À Maurizio, sans lequel ce livre et bien plus encore n’aurait pas pu être, à Matteo et Emma. Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page7 Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page8 9 Scriverò solo cose che possano essere utili sia a me che a te: ti esorterò alla saggezza. Seneca, Lettere a Lucilio, 22.1 J’écrirai uniquement ce qui peut nous être utile, à moi comme à toi : je t’exhorterai à la sagesse. Sénèque, Lettre à Lucilius, 22.1 Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page9 Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page10 Chapitre Un Un jour sur deux je me jette dans la rue à 5 h 50. La nuit est encore vive, dense comme de l’huile. La ville s’anime lentement : des fenêtres s’ouvrent, des gens commencent à sortir, peu de voitures circulent. Le rapide tac tac de mes talons retentit sur l’asphalte au rythme de mon cœur. Avec le 170 je mets une demi-heure pour arriver à Termini1. De là il me faut encore une demi-heure avec le 86 pour rejoindre ce quartier tellement huppé que je dois y exclure tout achat jusqu’à la fin de mes jours. J’arrive à 7h15, à l’heure. Je déteste les retards. Avant de me faire avaler par la porte tambour je mets une dernière couche de poudre et une touche de brillant à lèvres. Je veux arriver belle. Forte. J’enjambe deux par deux les marches du grand escalier, je passe par le long couloir carrelé de granito, les quatre marches de l’entresol, puis à gauche, l’entrée vitrée, de nouveau à gauche, la petite entrée, et toujours tout droit jusqu’à la porte en formica blanc qu’il faut ouvrir avec un bon coup d’épaule. Les voilà. Désormais je les connais presque toutes de vue. Au fond dans le coin, adossée contre son mari, est assise la nord-Africaine, elle a les pieds et les mains décorés de henné et le regard encharbonné. Toujours à l’écart, se tient la grosse, elle a les cheveux blonds et des racines foncées qui vous sautent aux yeux. Près de la fenêtre il y a la rousse, elle porte 1. Termini est la gare de Rome. 11 Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page11 12 d’horribles chaussures de sport fluorescentes. Qui sait quel âge peut bien avoir cette dame qui s’habille sobrement jusqu’aux chevilles puis exhibe des chaussures extravagantes ? Au moins trente-cinq ans. Son visage paraît plus jeune. Rigidité botoxée peut-être, mais les mains ne mentent pas. Et la petite brune au nez aquilin ? Aujourd’hui je n’ai pas très envie de parler, je me tiens à distance et j’attends Katia. Je suis prostrée sur une de ces chaises en plastique rigide qui t’engourdissent les fesses à force d’être assise dessus, et je lis. J’ai emmené mon cher Sénèque. J’ouvre le premier livre des Lettres à Lucilius, tout en observant les autres filles. Une nouvelle vient de s’ajouter au groupe, elle est plutôt moche, elle a des épaules maigrichonnes et une belle poitrine, mise en valeur par son décolleté. Elle doit avoir vingt-sept, disons vingt-huit ans pour être cruelle. Celle-là, à mon avis, elle va y arriver. « Quelle angoisse, lance-t-elle avant d’émettre un petit gémissement. – Allez, courage », lui répond Licia, notre grand vétéran féminin. Licia, je la trouve sympa : premièrement, elle a quarante ans, pour nous « les tristement célèbres quarante », deuxièmement, elle n’a rien perdu de sa verve, mais c’est la bouche qui sourit, pas les yeux. Elle m’attendrit avec son regard de chien battu, ridé par les soucis soudains de qui n’arrive pas à comprendre que dix années se sont écoulées sans résultat. Mon téléphone sonne. C’est Marco. Je me colle contre la fenêtre. « Ça va ? – Oui, mon chéri. Merci d’avoir appelé. – Qu’est-ce que tu fais ? – Devine. » Et je ris. Les Fivettes.qxp_Mise en page 1 13/04/2018 12:42 Page12
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