IDÉAL INVESTISSEUR n°5 - Page 1 - 5 4 Un été pour réinventer la valeur L’acte d’investir ne se résume pas à une courbe de rendement. Il peut devenir un langage : une manière d’affirmer une esthétique, de transmettre une mémoire ou de se projeter dans le temps. En cet été propice au recul, ce numéro explore une mutation silencieuse mais structurante : l’essor des investissements de passion. Selon le Wealth Report 2025 de Knight Frank, les grandes fortunes mondiales y consacrent en moyenne 3% de leur patrimoine. Art, montres, voitures anciennes, spiritueux rares, chevaux de course… ces actifs structurent leurs portefeuilles avec cohérence. En France, les familles Dassault, Pinault et Arnault illustrent cette dynamique : leurs engagements dans les maisons de vente, la culture ou le sport mêlent passion, rayonnement et stratégie patrimoniale. Chez les jeunes générations fortunées, cette logique prend une autre tournure. Il ne s’agit plus de bâtir des collections cohérentes, mais d’affirmer une identité. L’achat, souvent digital, peut être instinctif ou nostalgique. Un sac, une voiture, un grand vin : autant de fragments d’eux-mêmes. Les objets de collection ne servent plus à signer une position, ils font vibrer. ÉDITO Cette recherche d’alignement touche aussi des choix de lieux. Face aux instabilités du monde, l’Europe redevient une destination patrimoniale. Résidences secondaires, vignobles, hôtellerie de caractère... autant d’actifs qui reflètent un enracinement. À Melides, Christian Louboutin ne signe pas un hôtel parmi d’autres : il façonne un lieu à son image, dans un geste d’artisan et de créateur. Les investissements « passion » ne relèvent pas uniquement de l’hédonisme. En dix ans, la performance moyenne des actifs de collection composant le Knight Frank Luxury Investment Index (KFLII)* rivalise avec les plus grands indices : +192% pour le whisky rare, +125% pour les montres, +85% pour les sacs à main. Un portefeuille diversifié de ce type aurait donc surpassé le S&P 500. Encore faut-il savoir choisir et attendre. Car tous les actifs ne se valent pas. Certains brillent sur le papier, mais n’incarnent rien. D’autres, moins rentables à court terme, peuvent s’imposer par leur capacité à faire sens. Même la rareté ne suffit pas à garantir des rendements : en 2024, alors que les marchés financiers américains flambaient, le Knight Frank Luxury Investment Index* reculait de 3,3%. Le plaisir n’exclut ni les cycles, ni les risques (illiquidité, volatilité, mode...), mais il introduit autre chose : la transmission d’un engagement, d’une partie de ses émotions, d’un peu de soi. - Caroline Courvoisier, fondatrice et directrice de la rédaction *Composition du Knight Frank Luxury Investment Index (KFLII) : sacs à main, bijoux, pièces, montres, voitures, diamants de couleur, mobilier, whisky, vin et art de collection. 6 P.08 EN VUE P.10 LE LAB IDÉAL INVESTISSEUR SUCCESS STORY P.12 Christian Louboutin, le fil rouge de ses nouveaux projets IMMOBILIER P.20 Comment monétiser son bien immobilier ? P.23 Rentabiliser sa résidence secondaire ÉPARGNE P.25 Comment se créer des revenus complémentaires ? INVESTIR DANS SES PASSIONS P.30 Chevaux : du rêve aux grandes courses P.32 Supercars : le placement qui monte… en régime P.34 Whiskies d’exception : un placement tout feu, tout fût P.38 Picasso, l’art de collectionner un génie aux mille visages SOMMAIRE N°5 - Été 2025 Idéal Investisseur est une publication bimestrielle de Brisbane Media, EURL au capital de 130.000 €, RCS de Paris 850566076 Code NAF : 5814Z – TVA FR41850566076 58 rue de Monceau 75008 PARIS Site : www.ideal-investisseur.fr Directrice de la publication et de la rédaction : Caroline Courvoisier Rédacteur en chef : Jean-Jacques Manceau Rédaction – ont participé à ce numéro : Françoise Paoletti-Benaziez – Gilles Petit – Jean-Jacques Manceau – Nathan d’Ercole – Sophie Larochelle - Catherine Monbreault - Léah Bourgine-Avérous – Jean-François Balaine – Arthur Théo - Antoine Gaspar (Correcteur). redaction@ideal-investisseur.fr Direction artistique : Studio C infographie : Christelle Charlier christelle@studioc-infographie.fr Publicité : Ketil Media - Christian Mavides cmavides@ketilmedia.com ISSN : 3074-5462 CPPAP : 1129 T 95364 Dépôt légal : à parution Distribution : MLP - Service des ventes (réservé aux marchands de journaux) MP CONSEIL - Tél. : 01 42 36 80 84 Abonnement 1 an : 39,50 € (6 numéros). Étranger : nous consulter Par courrier : BRISBANE MEDIA 58 rue de Monceau 75008 PARIS Tél. : 01 40 56 30 91 abonnement@ideal-investisseur.fr Contact lecteurs : magazine@ideal-investisseur.fr Photo de couverture : Christian Louboutin par Jean-Baptiste Mondino Imprimé en France par : Rotochampagne - 11 rue des frères Garnier - ZI Dame Huguenotte - 52000 Chaumont - Tél. : 03 25 35 07 56 Les avis relatifs aux supports financiers et placements sont établis en conformité avec les règles de la profession et sur la base de sources sérieuses et réputées fiables. La responsabilité de Brisbane Media - Idéal Investisseur ne saurait être engagée du fait de leur utilisation. Malgré tous nos efforts pour assurer l’exactitude des informations publiées, des erreurs, inexactitudes ou omissions peuvent survenir. L’éditeur ne peut être tenu responsable le cas échéant. Ce magazine contient des liens vers des sites externes sous forme de QR Code. La rédaction n’ayant aucun contrôle sur le contenu de ces sites, BRISBANE MEDIA décline toute responsabilité quant à leur utilisation. Reproduction interdite, sauf accord de BRISBANE MEDIA. Investissement & Business PEFC-14-38-00257 FR 20 7 FINANCE DE MARCHÉ P.39 Convictions des gérants P.43 AMC versus ETFs actifs : la revanche de la gestion active ? INVESTISSEMENT RESPONSABLE P.45 La finance durable peut-elle disparaître ? NON COTÉ P.49 Le financement participatif à la recherche d’un nouveau souffle P.54 Private Equity : la fête est-elle déjà finie ? CRYPTOS P.58 Du bitcoin pour diversifier votre portefeuille ? BUSINESS P.61 Jean Michel Karam : l’entrepreneur de l’impossible P.65 Club de foot : nouvelle passion des investisseurs P.68 Travailler les pieds dans l’eau : un vrai luxe ? P.70 Construire son mental : le défi d’un homme, la leçon d’un coach P.72 Start-ups : les pépites de l’été P.74 Philantropie : quand la finance a du cœur LIFESTYLE P.75 Montres : le temps à l’heure allemande P.76 Voile, moteur ou catamaran : le guide malin pour louer un bateau cet été P.78 Escapade en Normandie en DS 8, à contre-courant P.80 Au fil du Nil, l’Égypte suspend le temps… P.57 Bulletin d’abonnement Abonnez-vous en ligne ! 8 Sarah Fehaili La finance à impact comme credo La finance à impact a désormais un nouveau visage : celui de Sarah Fehaili, 41 ans, nouvelle Directrice de la Banque d’Affaires à Impact du Crédit Coopératif. Cette ingénieure statisticienne, diplômée de l’ENSAE, de l’ENSIIE et de l’Université Paris-Saclay, incarne un modèle rare dans le monde feutré de la finance : celui d’une expertise rigoureuse, mise au service d’un capitalisme responsable. Après avoir fait ses armes chez HSBC, Société Générale et Amundi, Sarah Fehaili rejoint le Crédit Coopératif en 2011. En l’espace de quelques années, elle y crée le département de contrôle du risque de marché et Ingénierie financière, avant de prendre la direction de l’ALM, de la trésorerie et de la salle des marchés. Une trajectoire sans faute, jalonnée de projets innovants et de succès stratégiques. Intervenante à l’ENSIIE depuis 2013 et membre du conseil de surveillance d’Ecofi depuis 2024, elle se forge une réputation de technicienne pointue, animée par un sens profond de l’impact sociétal. À la tête de cette nouvelle entité, elle entend incarner une autre vision de la banque d’affaires, alignée sur les valeurs historiques du Crédit Coopératif. Organisée autour de deux pôles — Ingénierie Financière et Salle des Marchés — la Banque d’Affaires à Impact se concentre sur le financement des projets de transition écologique, l’économie sociale et solidaire, et l’accompagnement à l’international. « Notre ambition est de faire émerger une autre manière de faire de la banque d’affaires : rigoureuse, responsable et tournée vers les transitions. Une finance utile, au service d’un progrès économique qui intègre l’impact positif », confiet-elle. Sous son impulsion, le Crédit Coopératif redéfinit le cadre d’une banque d’affaires résolument engagée. Alexandre Boutin L’architecte du patrimoine engagé À 43 ans, Alexandre Boutin incarne une nouvelle vision de l’ingénierie patrimoniale : stratégique, responsable et tournée vers l’avenir. Après des débuts au Crédit Mutuel, il cofonde le cabinet BLC & Associés avant de diriger l’Ingénierie Patrimoniale chez Fiducée Gestion Privée. C’est chez Primonial qu’il se distingue, structurant des stratégies complexes pour dirigeants et entrepreneurs, tout en participant à la création du Plan d’Épargne Retraite (PER) en 2019. Enseignant à l’AUREP, il transmet sa passion aux futures générations de conseillers. Aujourd’hui à la tête de l’ingénierie patrimoniale de La Financière d’Orion, il ambitionne de bâtir un modèle performant, alliant optimisation fiscale et impact durable. EN VUE 9 Véronique Uzan Le flair de la transformation Nouvelle patronne d’Allfunds France, Véronique Uzan incarne la gestion d’actifs en version 4.0. Passée par Amundi où elle orchestre les fusions avec Pioneer, Sabadell et Lyxor, elle affine sa marque de fabrique : opérations complexes, plateformes digitales et refonte des modèles. À Montpensier Finance, elle peaufine son pilotage juridique et stratégique. Aujourd’hui, elle prend les rênes d’une plateforme B2B de 1 500 milliards d’euros d’encours, avec pour mission d’accélérer la mue numérique d’Allfunds. Capitaine aguerrie de la « wealthtech », elle combine rigueur et vision client avec une bonne dose d’énergie. La transformation ? Elle l’a dans le code. Marion Le Morhedec L’architecte de la dette Marion Le Morhedec devient Directrice mondiale des investissements obligataires chez Fidelity. Après 20 ans chez Axa IM, où elle pilotait 110 spécialistes et 70 milliards d’euros d’encours, elle prend la tête d’un mastodonte : 1 000 milliards de dollars d’actifs à superviser. Experte de l’intégration ESG et fine connaisseuse des marchés mondiaux, elle s’impose comme l’un des profils les plus solides de la scène obligataire. Basée entre Londres et Paris, elle succède à Steve Ellis avec la mission de faire de Fidelity un leader mondial du crédit. Une nomination qui mêle puissance, finesse et vision long terme. EN VUE Frédérique Pichon-Renet L’instinct patrimonial Chez Aestiam, Frédérique Pichon-Renet prend les commandes du développement commercial avec un CV calibré pour les enjeux patrimoniaux. Passée par Perl, Cogedim Patrimoine et Pierre & Vacances Immobilier, elle a roulé sa bosse dans la nue-propriété, les CGP et l’immobilier international. Diplômée en droit et d’un DESS en droits humains, elle allie tact juridique et instinct commercial. Sa feuille de route ? Muscler les réseaux, réinventer l’offre SCPI et porter la stratégie B2B et B2C de la maison. Dans un marché en quête de repères, elle promet de conjuguer exigence et élégance. Et ça, les investisseurs adorent. David Aubin rejoint PAREF Gestion comme Directeur Général Délégué pour accompagner une croissance ambitieuse en France et à l’international. Passé par Société Générale, BNP Paribas REIM, puis à la tête de structures comme AtlantiStar, Victoires Haussmann ou ETERNAM, ce juriste formé à la Sorbonne et à Kellogg cumule 30 ans d’expérience à la croisée du financement, de l’immobilier et de la gestion d’actifs. Fin stratège, il maîtrise aussi bien les grands groupes que les plateformes entrepreneuriales. Sa mission : piloter les activités pour compte de tiers, muscler les SCPI maison, et projeter PAREF à l’international. Un profil solide pour une ambition claire. David Aubin L’atout stratégique de Paref 10 Qileo Le dépôt de capital devient éthique Un service express proposé par une nouvelle fintech pour créer son entreprise tout en respectant ses valeurs. Qu’est-ce que c’est ? Un service 100% en ligne pour déposer le capital social lors de la création d’une entreprise, couplé à un compte pro éthique. Comment ça marche ? En 5 min, le créateur remplit son dossier en ligne. L’attestation de dépôt est délivrée sous 12 h grâce à un partenariat notarial. Pour qui ? Créateurs d’entreprises (SAS, SARL, SCI…), notamment ceux en quête de sens. Frais : 69€ tout compris. Performances : Gain de temps majeur, démarche fluide. Risques : Risque faible, lié à la conformité des pièces. LE LAB IDÉAL INVESTISSEUR 7 nouveaux produits à la loupe À chaque numéro, nos experts passent en revue les derniers produits d’épargne et d’investissements lancés sur le marché. Objectif : décoder l’innovation, identifier les opportunités et évaluer leur intérêt dans une allocation patrimoniale. X Fund Le fonds « tout-terrain » de Valhyr Capital (Ramify) Un véhicule d’investissement inspiré de Ray Dalio, accessible aux CGP. Qu’est-ce que c’est ? Un fonds « all-weather » diversifié entre actifs cotés, non cotés et alternatifs. Comment ça marche ? Allocation dynamique, sélection rigoureuse, accessible via assurance-vie luxembourgeoise. Pour qui ? Clients des CGP, family offices ou investisseurs avertis (dès 100 K€). Frais : Inclus dans la gestion (non précisés). Performances : Objectif de 7 à 10% net par an non garantis, volatilité <7%. Risques : Risques de perte en capital, liquidité limitée à 5% par trimestre après 3 ans. Deblock Un compte rémunéré en cryptos La fintech Deblock propose la DeFi (finance décentralisée) aux épargnants. Qu’est-ce que c’est ? Un compte rémunéré connecté à des protocoles DeFi, via l’app Deblock. Comment ça marche ? L’utilisateur dépose ses euros, rémunérés par 6% via Morpho et Yield.xyz. Pour qui ? Grand public, débutants inclus (à partir de 1 €). Frais : Non précisés ; taux nets versés en euros. Performances : Jusqu’à 6% annuel (non garanti). Risques : Risques liés à la blockchain, aux protocoles DeFi et à la volatilité du marché. 11 LE LAB IDÉAL INVESTISSEUR JHES ETF Un ETF actif basé sur des obligations Qu’est-ce que c’est ? Un ETF actif d’obligations investment grade à courte duration (notamment les certificats de dépôt, bons du Trésor, obligations d’État ou d’entreprises...). Comment ça marche ? Gestion active, multisecteurs, liquidité quotidienne, capitalisation des dividendes. Pour qui ? Investisseurs prudents, sensibles aux taux. Frais : Frais de gestion ETF standards. Performance : Objectif non communiqué. Risques : Risque de taux et crédit, moindre volatilité. SWEN Select Infrastructures Le non coté à impact Investir dans les infrastructures via son assurance-vie. Qu’est-ce que c’est ? Un fonds FCPR evergreen dédié aux infrastructures durables. Commentçamarche?Accessibleviaassurancevie/PER, valorisation hebdomadaire. Pour qui ? Epargnants long terme, sensibles à l’impact environnemental. Frais : Non précisés, intégrés au fonds. Performances : Objectif >6 % net/an à horizon 5 ans (non garanti). Risques : Non coté, liquidité limitée, perte en capital possible. Focus Vie de Sapians & Suravenir L’assurance-vie pour entrepreneurs Un contrat 100 % digital sans frais, avec allocation sur mesure Qu’est-ce que c’est ? Un contrat d’assurance-vie premium sans frais, conçu pour dirigeants. Comment ça marche ? Souscription en ligne, accompagnement par un family officer. Pour qui ? Entrepreneurs, cadres, professions libérales. Frais : 0 % sur versements, arbitrages et rachats. Performances : Allocation pilotée par iVesta, accès à ETF et fonds non cotés. Risques : Risques financiers classiques des unités de compte. SCPI New Gen la SCPI labellisée ELTIF Une SCPI paneuropéenne accessible dès 100€, lancée par Aroxys, une société de gestion agréée par l’AMF créée en 2024. Qu’est-ce que c’est ? Une SCPI investie dans l’immobilier diversifié européen. Comment ça marche ? Souscription dès 100 € (prix de part à 95 € au lieu de 100 €, jusqu’à fin 2025). Pour qui ? Nouveaux investisseurs, jeunes actifs, épargnants ESG-friendly. Frais : Jusqu’à 12 % pour la souscription et 12 % pour la gestion annuelle. Performances : Objectif de 7% brut non garanti, revenus européens (fiscalité avantageuse). Risques : Immobilier non garanti, liquidité limitée, perte en capital possible. 12 SUCCESS STORY © José CASTELLAR « Rejoindre un grand groupe aurait pu faciliter certaines choses, mais cela ne correspondait pas du tout à mon besoin profond de liberté. » 13 SUCCESS STORY L’heure est au ralentissement du luxe et à la concentration du secteur ? Rester libre, estce le vrai luxe ? Pour moi, l’indépendance est fondamentale. Dès mes débuts en 1991 avec l’ouverture de ma première boutique à Paris, je voulais absolument que mes clients puissent entrer immédiatement dans un univers qui m’était propre, totalement sous mon contrôle créatif. Je souhaitais présenter mes souliers comme des bijoux dans un écrin. Bien sûr, rejoindre un grand groupe aurait pu faciliter certaines choses, mais cela ne correspondait pas du tout à mon besoin profond de liberté. J’ai toujours été très attaché à mon indépendance ; c’est elle qui m’inspire et me motive au quotidien. Vous avez quand même choisi de vous adosser à Exor. En quoi ce partenaire est à contre-courant des grands groupes ? Exor est dirigé par la famille Agnelli, une famille qui partage véritablement mes valeurs entrepreneuriales. Ce que j’apprécie particulièrement dans ce partenariat, c’est l’esprit de fraternité qui nous unit. Chez Exor, tout se fait dans l’écoute, la concertation et non dans une hiérarchie stricte ou imposée. Ce partenariat me permet donc de préserver ma créativité, tout en développant la marque de manière harmonieuse et équilibrée. Ils n’interviennent pas dans les aspects créatifs, mais me soutiennent sur des décisions structurantes, comme le développement à l’international, ou encore le lancement de projets qui sortent du champ strict de la chaussure. Créateur iconique, entrepreneur instinctif, investisseur éclairé : à 61 ans, Christian Louboutin redessine les contours de son empire avec la même liberté qu’à ses débuts. Hôtels confidentiels, projets artisanaux, partenariats stratégiques, nouvelles lignes et surprises à la prochaine Fashion Week : derrière la semelle rouge, une vision en mouvement, qui conjugue excellence et intuition. Christian Louboutin, le fil rouge de ses nouveaux projets 14 SUCCESS STORY – rouge en portugais – est évidemment un clin d’œil à la semelle de mes souliers, mais aussi une déclaration de passion. Qu’est-ce qui fait de Vermelho un hôtel à part ? Il ne ressemble à aucun autre hôtel. Le lieu, c’est une décoration éclectique mêlant influences portugaises, espagnoles, égyptiennes et françaises. On retrouve des fresques du peintre grec Konstantin Kakanias et des sculptures de l’Italien Giuseppe Ducrot. Chaque espace y est pensé comme une œuvre singulière. La collaboration avec Olivia Putman et son équipe a été précieuse : elle a compris mon désir de créer un lieu à contre-courant, où l’esthétique ne se soumet à aucune mode. L’hôtel comprend aussi un jardin, une piscine, des œuvres d’art contemporain, un mobilier sur mesure, et une équipe formée à offrir une hospitalité sincère et attentive. Pourquoi avoir créé un restaurant qui porte votre prénom (écrit Xtian)? Au départ, c’était presque une blague ! Tellement de gens racontaient qu’ils avaient dîné « chez Christian » que j’ai eu envie de leur offrir un lieu réel où cette affirmation serait vraie. Mais au-delà du clin d’œil, j’ai voulu proposer une cuisine authentique, locale, portugaise, avec une touche d’élégance. C’est un prolongement naturel de l’hôtel : un lieu de plaisir, de rencontres, et de générosité. Qu’est-ce qu’un Breton aux racines égyptiennes est venu faire au sud du Portugal, à Comporta, puis Melides ? J’ai découvert Comporta dans les années 1980 grâce à un ami portugais vivant à New York, qui m’y a emmené avec une amie commune, Larissa. À l’époque, Comporta était un village quasi désert, avec quelques maisons dans le sable et un restaurant unique. La beauté sauvage du lieu, les dunes, l’Atlantique, m’ont tout de suite charmé. J’y suis retourné chaque été, d’abord en invité, puis en propriétaire. J’y possède maintenant 5 maisons. Mais avec le temps, Comporta s’est transformée : elle est devenue une destination internationale, fréquentée, mondaine. Cela ne correspondait plus à ma quête de tranquillité. C’est en explorant les alentours que j’ai découvert Melides, plus rural, plus préservé. Loin des projecteurs, mais proche de la mer et de la nature, ce village avait tout ce que je recherchais : l’authenticité, la beauté simple et une lumière extraordinaire. C’est là que j’ai décidé d’installer mon nouvel ancrage portugais. Vermelho : un hôtel né d’un hasard ou d’un besoin d’intimité ? Le projet de l’hôtel Vermelho, c’est une histoire de hasard, ou presque. J’avais acheté une maison dans le village, et comme elle n’était pas idéale pour recevoir beaucoup d’amis, j’ai pensé ouvrir un petit restaurant à proximité. C’est en parlant avec le maire de Melides que l’idée d’un hôtel est apparue. Il m’a dit qu’il manquait un lieu pour accueillir les visiteurs. J’ai accepté sur-le-champ, sans trop réfléchir, comme cela m’arrive souvent. Puis, en avançant, j’ai voulu créer quelque chose de très personnel. Je n’ai pas conçu Vermelho comme un hôtel classique, mais comme une grande maison vivante. Chaque chambre, chaque espace, raconte une histoire. J’ai choisi des objets d’art, des antiquités, des textiles du monde entier, pour donner une âme à chaque recoin. Le nom « Vermelho » J’aime que mon nom vive dans la culture populaire – dans les chansons, les clips, les films – cela me touche beaucoup. À condition de toujours garder l’exigence.
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