SCIENCE MAGAZINE n°74 - Page 1 - 74 UN DIRIGEANT AVERTI EN VAUT DEUX BON D’ABONNEMENT À compléter et à renvoyer accompagné de votre règlement à Lafont presse, 53 rue du Chemin Vert - CS 20056 - 92772 Boulogne-Billancourt Cedex ✁ AVEC VOTRE ABONNEMENT, recevez en cadeau “TU PEUX GAGNER”, le dernier livre de Robert Lafont Actuellement en kiosques ou sur lafontpresse.fr Plus de 40%de réduction ABONNEZ-VOUS DIRECT SUR LAFONTPRESSE.FR DEVENIR ACTIONNAIRE D’ENTREPRENDRE ? Entreprendre (Lafont presse), groupe indépendant éditeur de 60 magazines publiés en kiosques, est côté sur Euronext Paris (code ALENR). Participez à son développement. ❑ Oui, je m’abonne à Entreprendre : 12 n° pour 58 € (au lieu de 69 €, pour un abo d’un an), et 24 n° pour 116 € (au lieu de 139 €) et je reçois en cadeau le livre de Robert Lafont : TU PEUX GAGNER + une PA gracieuse. ❑ Je m’abonne à Manager & réussir : 10 n° pour 71 € ❑ Je m’abonne à Création d’entreprise magazine : 10 n° pour 78 € ❑ Je m’abonne à L’événement magazine : 10 n° pour 44 € ❑ Je m’abonne à C’est votre argent : 10 n° pour 39 € Total commande : ....................._ Ci-joint mon règlement à l’ordre de Lafont presse par : ❑ Chèque bancaire ou postal ❑ Carte bleue Visa N° Expire-le : IMPORTANT, je note les 3 derniers chiffres du numéro inscrit au dos de ma carte bancaire : Date et signature obligatoires : Tarifs DOM-TOM étranger : + 2 € par numéro servi www.lafontpresse.fr Nom .................................................... Prénom ...................................... Âge .................. Adresse .............................................................................. Activité :................................ Code postal .................. Ville ............................................................................................ Téléphone .......................................... Date de naissance ............................................... Courriel Conformément à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée en 2004, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent. Vous pouvez accéder aux informations vous concernant,lesrectifieretvousopposeràlatransmissionéventuelledevoscoordonnéesencochantlacaseci-contre ❑ ouenadressantuncourrierlibreàLafontpresse–53,rueduCheminvert,92100BoulogneBillancourt. Déductible des dépenses de formation. Directeur de la publication et de la rédaction Robert Lafont courriel : robert.lafont@lafontpresse.fr Secrétaire générale des rédactions : Isabelle Jouanneau - Tél. : 01 46 10 21 21 Isabelle.jouanneau@lafontpresse.fr Rédaction déléguée : Sacha Lorens (sacha.Lorens@free.fr), Laurence Miglioli avec Jean-Louis Carrel, Peter Collins, Raphaël Picard, Jean-François Rosselin, Robert de Roqueserviere, Marie Castellas • ADMINISTRATION Directeur comptable : Didier Delignou didier.delignou@lafontpresse.fr Comptable : Alizée Dufraisse - Tél. : 01 46 10 21 03 alizee.dufraisse@lafontpresse.fr • PUBLICITÉ & PARTENARIATS Directeur Éric Roquebert - Tél. : 01.46.10.21.06 eric.roquebert@lafontpresse.fr Chef de pub : Francis Dominguez Tél. : 06 98 99 89 32 francis.dominguez@lafontpresse.fr • FABRICATION Maquette : Delphine Balme Imprimerie : Rotochampagne (52 - Chaumont) Communication environnementale Origine du papier : Allemagne - Taux de fibres recyclées : 100% - Ce magazine est imprimé sur du papier porteur de l’Ecolabel Européen sous le numéro : DE/011/010 - Eutrophisation : PTot 0.001 Kg/t. • DIFFUSION PRESSE Isabelle Jouanneau - Tél. : 01 46 10 21 21 Isabelle.jouanneau@lafontpresse.fr Distribution : MLP - Tondeur (Belgique) • ABONNEMENTS Hanane Rahmani abonnement.rahmani@lafontpresse.fr Crédits photos couverture : ©AbodeStock Science magazine est édité par Entreprendre S.A au capital de 246 617.28€ RCS NANTERRE 403 216 617 SIRET : 403 216 617 000 23 NAF : 5814Z SA 53 rue du Chemin Vert 92100 Boulogne-Billancourt Tél. : 01.46.10.21.21 - Fax : 01.46.10.21.22 Toute reproduction, même partielle, des articles et iconographies publiés dans Science magazine sans l’accord écrit de la société éditrice est interdite, conformémentàlaloidu11mars1957surlapropriétélittéraireetartistique.Larédaction ne retourne pas les documents et n’est pas responsable de la perte ou de la détérioration des textes et photos qui lui ont été adressés pour appréciation. N° de commission paritaire : 0926 T 87424 - N°ISSN : 1777-0173 Dépôt légal à parution. Avertissement : L’éditeur se réserve la possibilité de republier certaines enquêtes ou reportages des titres Lafont presse. N°74 - Avril/Mai/Juin 2022 Edité par Entreprendre (LAFONT PRESSE) 53 rue du Chemin Vert - CS 20056 92772 Boulogne-Billancourt Cedex www.lafontpresse.fr - Tél. : 01 46 10 21 21 L’ACTUALITÉ DE LA SCIENCE ..............................................................................................................6 OVNI : DES OBSERVATIONS INEXPLIQUÉES ...............................................................42 150 enquêtes chaque année en France ............................................................................................................44 Des phénomènes insolites...............................................................................................................................45 Le Geipan explique l'étrange et documente l'inexpliqué ............................................................................... 45 Les ovnis : un défi pour la sécurité nationale américaine ..............................................................................46 Vincent Costes, responsable du Geipan : « C’est un lieu de science participative. » .......................................47 François Louange, spécialiste de l'analyse des images : « Les cas sont similaires partout sur la planète. »..50 Pr Jacques Py : « On place le témoin dans des conditions idéales pour restituer son souvenir. »...................53 L'ENJEU VITAL DE LA DÉCARBONATION ...................................................................56 Comment accélérer la marche vers la neutralité carbone ? ...........................................................................58 Les avancées des industriels ..........................................................................................................................59 Quel accès aux énergies renouvelables ? .......................................................................................................60 Produire en France ou ailleurs ? .....................................................................................................................61 20% des émissions industrielles du pays à Dunkerque ............................................................................ 63 L'ARCHIVAGE SUR ADN : UNE PREMIÈRE MONDIALE ....................................................................... 64 UNE IMMERSION FASCINANTE DANS LE VIVANT ..............................................................................72 LES LIVRES DE LA SCIENCE .............................................................................................................. 80 LE FORUM DES LECTEURS ............................................................................................................... 82 À lire sur lafontpresse.fr Economie : Entreprendre, Création d’entreprise magazine, Manager & réussir, Placements, C’est votre argent !, Spécial Argent, Business event’, Nouvel agriculteur. People : Journal de France, Intimité, Intimité Dimanche, Spécial Dernière, Secrets de stars, Spécial People, Paris confidences, Célébrité magazine, Confidences magazine, Dossier enquêtes, Enquêtes magazine, Crimes magazine, Histoires vérité, Souvenirs Souvenirs, Numéro Spécial, Collection, Album, Johnny magazine, Johnny actualité, Reines & Rois, Royauté, Gotha magazine. Auto : L’essentiel de l’Auto, Automobile revue, Auto magazine, Pratique Auto, Spécial Auto, Spécial Auto vert, Automobile verte, Auto Souvenir, Youngcars, Tracteurs magazine, Le magazine de l’aviation, L’essentiel du Drone. Sport : Le Foot, Le Foot Paris magazine, Le Foot Lyon magazine, Le Foot Marseille, Le Foot magazine, Rugby magazine, France Basket, Handball magazine, Tennis revue, Le Sport, Le Sport Vélo, Cyclisme magazine, Auto sport magazine, Féminin Footing. 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Participez à son développement. www.lafontpresse.fr Sommaire magazine SCIENCE Nom : Prénom : Adresse : Code Postal : Ville : Télephone : Date de naissance : Courriel : ❏ Je règle par Chèque bancaire ou postal à l’ordre de Lafont presse 53 rue du Chemin Vert - CS 20056 - 92772 Boulogne-Billancourt Cedex par carte Bancaire visa N° : expire fin cryptogramme (les trois derniers chiffres au dos de votre carte) signature : ABONNEZ-VOUSEt renvoyez ce bon dument rempli à Lafont Presse 53 rue du Chemin Vert - CS 20056 - 92772 Boulogne-Billancourt Cedex OUI, je m’abonne à Science magazine (papier + numérique) et je reçois chez moi 10 numéros dont 2 n° gratuits au prix de 54€ au lieu de 68€ Abonnez-vous sur www.lafontpresse.fr Tarif DOM TOM et étranger : + 2€par revue servie magazine SCIENCE Conformément à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée en 2004, vous bénéficiez d’un droit d’accès et de rectification aux informations qui vous concernent. Vous pouvez accéder aux informations vous concernant, les rectifier et vous opposer à la transmission éventuelle de vos coordonnées en cochant la case ci-contre ❏ ou en adressant un courrier libre à Lafont presse , 53, rue du Chemin vert, 92100 Boulogne Billancourt. RELEVÉ DE CONDAMNATION PÉNALE Par jugement du 17 février 2022, la SA Entreprendre et M. Robert Lafont, en qualité de Directeur de la publication, ont été condamnés pour contrefaçon pour édition ou reproduction d’œuvre de l’esprit au mépris des droits de l’auteur faits commis à Boulogne-Billancourt du 2 décembre 2012 au 30 juin 2016 prévus par ART.L.3353, ART.L.335-2, AL.2, ART.L.112-2, ART.L.121-2 AL.1, ART.L.122-2, ART.L.122-4, ART.L.122-6 C.PROPR.INT. et réprimés par ART.L.335-2 AL.2, ART.L.335-5 AL.1, ART.L.335-6 C.PROPR.INT. à une amende délictuelle de 50.000 euros et 10.000 euros, à titre de peine principale, 2 mois d’affichage de la décision au siège de la société 53, rue du Chemin Vert - 92100 Boulogne-Billancourt, à titre de peine complémentaire, 1 mois de diffusion de messages informant le public d’une condamnation, à titre de peine complémentaire, ainsi que la présente à diffuser. La preuve des extraterrestres OVNIS P.42 www.lafontpresse.fr L’éditeur français, imprimé en France Entreprendre (Lafont presse), groupe côté sur Euronext Paris. www.lafontpresse.fr La passion d’informer La vague OVNI a démarré lors de la seconde guerre mondiale mais c'est l'observation de l'industriel américain Kenneth Arnold, le 24 juin 1947, qui mobilisa l'opinion publique. Au-dessus des Montagnes Rocheuses, il vit 9 objets de forme discoïdale filant dans le ciel à plus de 2000 km/h. Depuis, des dizaines, des centaines de milliers de témoins à travers le monde ont témoigné avoir vu des OVNI. Parmi eux, des militaires, des chercheurs, des ingénieurs, des astronomes dont la parole peut être digne de foi. Après avoir éliminé les canulars, les photos truquées, etc., ce qui ne s'avère pas toujours facile, il reste un grand nombre d'observations pour lesquelles il est généralement possible de donner une explication. En effet, quiconque n'a pas connaissance d'une rentrée atmosphérique d'un morceau de fusée ou de satellite, n'a jamais vu de la foudre en boule ou même observé la Lune dans des conditions particulières, a toutes les raisons d'être étonné d'un tel spectacle. Des phénomènes lumineux peuvent provenir également d'étoiles, d'avions, de ballons, et même d'oiseaux ou d'insectes. Sur une photo, des reflets ou des poussières dans l'appareil ont parfois induit les témoins en erreur. Mais, sur l'ensemble des observations, il reste un tout petit nombre qui demeure inexpliqué. Aujourd'hui, le phénomène est pris au sérieux dans de nombreux pays. En France, au sein du CNES, le Geipan (Groupe d'Etude et d'Information sur les Phénomènes Aérospatiaux Non identifiés) recueille les témoignages, les analyse, enquête si besoin. Il travaille en collaboration avec de nombreux organismes scientifiques et militaires ainsi que des experts de diverses disciplines pour chercher une réponse même aux cas les plus insolites. Aux États-Unis, les autorités sont alertées depuis environ deux ans suite à des passages fréquents d'ovnis observés par les pilotes de chasse de la marine sur la côte Atlantique. Tout en supposant plutôt qu'ils seraient d'origine terrestre : des pays adversaires pourraient-ils tester des technologies hypersoniques, allant jusqu'à 10 à 20 fois la vitesse du son ? Une agence spéciale doit être créée pour mener l'enquête. Entre les convaincus et les sceptiques, le débat n'a pas fini d'agiter les esprits. Cependant, malgré l'ampleur des observations, les preuves concrètes manquent toujours. Jusqu'à ce jour, aucun ovni porteur d'une signature extraterrestre n'a été retrouvé sur Terre... Sacha Lorens magazine SCIENCE 5éditorialéditorial LES OVNI SONT-ILS EXTRATERRESTRES ? Science magazine n°74 Prédire les nouveaux variants du SARS-CoV-2 Moins de crues avec le réchauffement climatique ? Lors de la pandémie de Covid-19, de nouveaux variants du virus SARS-CoV-2 ont régulièrement émergé, susceptibles de renforcer la transmissibilité du virus ou de réduire l'efficacité des vaccins ou des traitements avec des anticorps. Anticiper les mutations encore inconnues qui pourraient apparaître dans les futurs variants duSARS-CoV-2estparconséquentdevenu un enjeu majeur. Une équipe de recherche du Laboratoire de biologie computationnelle et quantitative au sein de l'Institut de Biologie Paris Seine (IBPS - Sorbonne Université / CNRS), en collaboration avec l'Université de Lausanne, proposeunenouvelleapprocheinformatique. Son objectif : prédire la mutabilité de toutes les positions individuelles dans les protéines du SARS-CoV-2. Cette méthode n'utilise qu'un seul génome de ce virus, en combinaison avec des séquences génomiques d'autres coronavirus préexistants. Les prédictions obtenues sont cohérentes avec la variabilité actuellement observable des protéines du SARS-CoV-2, laquelle a évolué au cours des deux dernières années. Cela suggère que ce modèleestcapabledeprévoirstatistiquement l'apparition de variants inédits. En combinant leurs prédictions avec des données immunologiques, les scientifiques ont observé qu'Omicron et d'autres variants sont enrichis en mutations dans des positions dangereuses dans le domaine de liaison au récepteur de la protéine Spike. Cette dernière joue un rôle central dans la liaison, la fusion et l'entrée du virus dans les cellules hôtes humaines, et elle est la cible principale des thérapies par anticorps et du développement de vaccins.Unetelleobservationpeutcontribuer à orienter la conception de nouveaux vaccins ou de thérapies par anticorps quicombattront les futurs variants du SARS-CoV-2, et ce en ciblant des positions moins mutables mais immunogènes. En dehors du SARS-CoV-2, les résultats montrentl'efficacitédelaméthodequipourra par conséquent s'appliquer à de potentielles futures épidémies causées par de nouveaux pathogènes viraux. Les prédictions étant réalisées à partir d'un seul génome de l'agent pathogèneainsiquededonnéespréexistantes provenant de bases de données génomiques publiques, elles peuvent être disponibles à un stade très précoce d'une éventuelle épidémie,etcelaavantquedegrandesquantitésde donnéesobservationnellesouexpérimentales ne soient disponibles. Cette solution aide à prévoirlavariabilitéfutureetàfocalisernotre attention sur les régions les plus à risques. Pas partout ! En étudiant des sédiments lacustresetenreconstituantdeschroniques de crues survenues au cours des périodes froides et chaudes de l’ère industrielle, du dernier millénaire et de l’Holocène, une équipe internationale animée par un scientifique de l’Institut des géosciences et de l’environnement de Grenoble (IGE - UGA/Grenoble-INP-UGA/CNRS/IRD) a apportéunnouveléclairagesurlelienentre les crues et le réchauffement climatique. Le risque de crues pourrait être exacerbé avec le changement climatique. La situation est particulièrement préoccupante dans les zonesmontagneusestellesquelesAlpesdont le taux de réchauffement est plus élevé que celui de l’hémisphère nord. De plus, le risque 6 ACTUALITÉS BREVES Le télescope le plus puissant jamais lancé dans l'espace ! ©ESA-S.Corvaja Le 25 décembre 2021, le télescope spatial James Webb (JWST), le plus grand et le plus puissant jamais lancé dans l'espace, décollait à bord d'une fusée Ariane 5 depuis le Centre Spatial Guyanais de Kourou. Développé par la NASA, en coopération avec l'ESA et l'Agence Spatiale Canadienne (CSA), il a pour ambition de détecter la lumière des premières étoiles et galaxies apparues après le Big Bang, d'étudier la formation et l'évolution des galaxies, des étoiles et des systèmes planétaires, ainsi que de caractériser l'atmosphère des exoplanètes connues. Ayant vocation à remplacer le télescope spatial Hubble, il est équipé d'instruments de pointe permettant quatre modes d'observation différents avec une sensibilité sans commune mesure avec les autres télescopes spatiaux. Presque un mois après son lancement, le JWST est arrivé au second point de Lagrange (L2), une orbite située à 1,5 million de kilomètres de la Terre idéale pour observer le cosmos. Il sera opérationnel à partir de juin et promet des découvertes révolutionnaires en astrophysique ainsi que de nouvelles images de l'Univers lointain à couper le souffle ! 7ACTUALITÉSBREVES Science magazine n°74 8 ACTUALITÉS BRÈVES hydrologique y est déjà élevé en raison de la forte densité de population et de l’occurrence de crues soudaines qui est favorisée par les processus hydrométéorologiques associés à la forte topographie. Desscientifiquesfrançais,suisses,allemands et italiens ont voulu savoir si l'élévation de la température augmenterait ce risque. Ils ont étudié des sédiments lacustres et reconstitué des chroniques de crues survenues durant diverses conditions climatiques passées, sur 33sitesdifférentsdanslesAlpeseuropéennes. Lors d’une crue, l’augmentation du débit entraîne une importante érosion des matériaux, lesquels sont transportés par le cours d’eau. Plus à l’aval, ils se retrouvent piégés dans les lacs où ils forment des dépôts caractéristiques, appelés « dépôts de crues ». Ces dépôts sont très bien préservés au cours des millénaires. En réalisant des carottages (comme cela se pratique dans la glace), les scientifiques peuvent prélever, identifier et dater les dépôts de crues afin de reconstituer les changements de fréquence et d’intensité des crues à travers le temps. Pas moins d’une trentaine de chroniques, remontant jusqu’à 10 000 ans, ont ainsi pu être produites. Puis les données ont été compilées pour analyser les changements de fréquence des grandes crues (temps de retour ≥ 10 ans) au cours des périodes froides et chaudes de l’ère industrielle, du dernier millénaire ainsi que de l’Holocène. Les résultats montrent qu'unréchauffementde+0,5à+1,2°C,d’origine naturelle aussi bien qu'anthropique, a conduit à une diminution de 25 à 50% de la fréquence des grandes crues. Si cette tendanceàlabaissen'estpasconcluantedansles enregistrements couvrant moins de 200 ans, elle apparaît persistante dans ceux allant de 200 à 9 000 ans. Une même analyse a été conduite sur les crues extrêmes (temps de retour ≥ 100 ans). Contrairementàladiminutiongénéraliséedes grandes crues pendant les périodes chaudes, l’évolutiondescruesextrêmesrévèledestendancesdifférentesselondesbassinsversants. Ilapparaîtnotammentquelescruesextrêmes sont plus fréquentes dans certains petits bassins versants de montagne lors des périodes chaudes. Régionalement, le risque de crue pourrait donc globalement décroître avec le réchauffement climatique, sauf dans certains petits bassins versants de montagne où les crues extrêmes pourraient être plus fréquentes. Ces résultats apportent de nouvelles informations pour mieux appréhender le phénomèned’inondationsextrêmesdanslesAlpes. Science magazine n°74 9ACTUALITÉSBRÈVES Avant la naissance de la Terre, son eau était déjà disponible Repérer un véhicule autonome par le regard du « conducteur » Avantmêmel’accrétiondespremiersblocs constitutifs de notre planète, l'eau était là, issue du milieu interstellaire... C'est grâce à la chimie du carbone et de l'eau que l'on peut comprendre l’apparition de la vie. Pour ce qui est de l'eau, il s’agit de suivre les différentes variations (les isotopes) de l’hydrogèneetdel’oxygènequilacomposent. C'est comme un gigantesque jeu de piste au travers de l’histoire de l’Univers ! Des scientifiques du CNRS, de l’université de Paris-Saclay, du CEA et de l'université de Pau et des pays de l'Adour, avec le soutien du MNHN, sont remontés à la composition isotopique de l’eau au tout début du Système solaire,danssesrégionsinternes,làoùsesont formées les planètes telluriques telles que la Terre. Ils sont partis de l'analyse de l’une des plus vieilles météorites du Système solaire, grâce à une méthode innovante développée spécialement pour cette étude. Ils ont ainsi découvert l’existence de deux réservoirs gazeux dans les premiers 200 000 ansduSystèmesolaire,avantmêmelaformationdespremiersembryonsplanétaires.L’un de ces réservoirs est le gaz solaire à l’origine detoutelamatièreduSystèmesolaire :ilapu êtremesurédirectementpourlapremièrefois dans la météorite. Le second réservoir est un gaz enrichi en vapeur d’eau, ayant d’emblée la composition isotopique de l’eau terrestre ! Ce réservoir a pu se former par un apport massif d’eau interstellaire dans les régions internes chaudes du Système solaire. Cela se serait produit lors de l’effondrement de l’enveloppeinterstellaireetdelaformationdu disqueprotoplanétaire.L'eaudelaTerreétait donc déjà disponible en ces temps reculés... Quand il y aura sur la route des voitures autonomes et des voitures encore pilotées pardeshumains,ilseranécessairedefaire la différence entre les deux. Et si tout se basait sur le regard ? Les véhicules présents et à venir sont aujourd'hui classés selon leur niveau d'automatisation. Les niveau 1 et 2 correspondent auxvéhiculesquenouscroisonsd'oresetdéjà sur la route. Ils sont équipés d’assistances à la conduite : régulateur de vitesse adaptatif, système d’aide au maintien dans la voie, ou même systèmes plus intégrés (comme le célèbre Autopilot de Tesla). Si ces systèmes prennentenchargetoutoupartiedelagestion de la vitesse et du contrôlé latéral, le conducteur doit cependant continuer à surveiller en permanence la route. A partir du niveau 3, l’automate contrôle le véhicule en toute sécurité, laissant la possibilité au conducteur de ne plus surveiller la route : il peut alors lire un livre, regarder une vidéoousurfersurinternet.Danscecas,ondit queleconducteursortdelaboucledesupervision de la conduite. Cependant il doit être en mesure de reprendre la main si le système le demande ;maisencorefaut-ilqu'ilsoitenétat dereprendrelecontrôledansletempsimparti. Levéhiculeautonomedoitdoncfaireundiagnosticdel’étatduconducteur :est-iltoujours installé correctement dans son siège ? Est-il bien éveillé ? Et a-t-il une bonne conscience de la situation ? Science magazine n°74 10 ACTUALITÉS BRÈVES Dans le cadre du projet ANR Autoconduct, l’équipe Perception, Action, Cognition pour laConceptionetl’Ergonomie(PACCE),dirigée par Franck Mars au sein du Laboratoire desSciencesduNumériquedeNantes(LS2N CNRS/École Centrale de Nantes/Université de Nantes/IMT Atlantique), a travaillé sur la manière dont le regard du conducteur peut être utilisé pour participer à ce diagnostic. Des expérimentations ont été réalisées en simulateur de conduite. Le comportement visuel du conducteur était mesuré via un oculomètre qui permettait à chaque instant de déterminer vers quelles aires d’intérêt son regardétaitdirigé.Letempspassésurchaque aire et l’ensemble des transitions d’une aire à une autre ont formé 182 indicateurs. L'objectifétaitdoncdedéterminerdansquelle mesure il était possible de deviner, uniquement sur la base du regard, si le conducteur était dans un véhicule classique ou dans un véhicule autonome. Les résultats ont montré qu'il suffisait de prendre en compte le temps passé à regarder la route droit devant soi pour définirenpremièreapproximationl’influence de l’état d’automatisation du véhicule sur le regard. Cependant, ce modèle laissait place à des erreurs de classification. Par contre, en considérant l’ensemble des transitions entre zones d’intérêt, le modèle obtenu distinguait beaucoup plus clairement les deux situations de conduite. Unesecondeétudeaalorsétémenéepourprédire le temps passé à penser à autre chose que laconduite,lorsquelesconducteursroulaient en véhicule autonome. On appelle cela le vagabondage de la pensée ou mindwandering, et c'est un indicateur de la sortie de boucle de supervision. Le meilleur modèle obtenu permet de prédire le score de mindwandering en observant les stratégies visuelles du conducteur pendant seulement 2 minutes. L’analyse des indicateurs retenus pour construire le modèle laisse supposer que les conducteurs négligent des informations importantes pour construire une bonne conscience de la situation, notamment celles permettant d’anticiper la situation future. Et cette fois encore, la dynamiqueduregardsembleplusimportante quelaquantitédetempspasséàobservertelle ou telle aire d’intérêt. Ce travail prépare le chemin vers la conception d’algorithmes de diagnostic de l’état du conducteur, bien utile dans le nouveau paradigme du véhicule autonome. (INS2I) Un océan révélé sur Mars Ilya3milliardsd'années,laplanèterouge avait probablement un climat froid et humide. Et elle pourrait bien avoir eu à sa surface un océan stable. Il est aujourd'hui admis la présence d'eau liquide dans un lointain passé de Mars. En témoignel'existencedevalléesramifiées.Mais de là à envisager un océan, il y a un grand pas à franchir. L’histoire du climat martien conserve encore de nombreuses inconnues. Unecollaborationinternationale,impliquantdes chercheursdulaboratoiredeGéosciencesParisSaclay (GEOPS - CNRS / Univ. Paris-Saclay) etduNASA/GISS,vientdelivrerdenouveaux résultats qui accréditeraient cette hypothèse. Jusqu’alors, aucune modélisation climatique n’avait permis de corroborer l’existence de grandes étendues d’eau, même en remontant jusqu’à3,5ou4milliardsd’années.Lesmodèles semblaientplutôtindiquerquel’eaus’accumulait sur les montagnes sous forme de neige. Leschercheursontréalisédenouvellessimulations en tenant compte de deux nouveaux ingrédients qui se sont révélés essentiels : la circulation océanique et l’évolution des glaciers. Leur étude révèle que la présence dans l’hémisphère Nord d’un océan circumpolaire peut être envisagée il y a 3 milliards d’années.Etcelamêmeavecdestempératures moyennes de Mars inférieures au point de congélation (0°C pour l’eau pure), du fait de la circulation océanique qui a pu réchauffer Science magazine n°74 11ACTUALITÉSBRÈVES Une pollution inattendue vue de l'espace Pour la première fois, grâce à l’imagerie satellite, des scientifiques ont quantifié à l’échelleduglobelesémissionsmassivesde méthane dues à l’exploitation des hydrocarbures,ainsiqueleurimpactclimatique. Ces émissions étaient jusqu'ici sous-estimées.Colmaterces« fuites »pourraitgénérer des milliards de dollars d’économies pour les pays responsables ! Leméthane(CH4)estuncontributeurmajeur au changement climatique : son pouvoir de réchauffement sur 100 ans est environ 30 fois supérieur à celui du CO2 . Un quart des émissions anthropiques de ce gaz à effet de serre provient de l’exploitation mondiale du charbon, du pétrole et du gaz naturel, le CH4 en étant le principal composant. Une étude de 2018 avait déjà démontré, à partir du cas des États-Unis, la vaste sous-estimation dans localement la surface jusqu’à 4,5°C. Les simulations prédisent la présence de glaciers, lesquels auraient ramené la glace des hauts plateaux vers l’océan, ce qui est en accord avec les interprétations géologiques des images. Le climat était vraisemblablement froid sur les continents équatoriaux mais l’océan circumpolaire a cependant pu rester liquide. Un certain nombre d’indices géologiques, comme les paléo-rivages ou les dépôts de méga-tsunamis, indiquent d'ailleurs indirectement la présence d’un océan. Si ce nouveau scénario est avéré, notre planète sœur aurait pu être largement propice au développement de la vie avant de devenir la planèterouge.Lavies’esteneffetdéveloppée à la même période sur Terre pour conquérir un grand nombre d’écosystèmes. Denouvellesanalysessontattendues,notammentcellesfourniesparleroverchinoisZhurong posé sur Mars à l’endroit d’une zone autrefois recouverte d’eau. Viendront-elles corroborer ce résultat ?
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