Premieres pages de Femmes et Revolution en Tunisie - Page 2 - Premieres pages de Femmes et Revolution en Tunisie de Janine Gddalia DU MÊME AUTEUR Poésie Le Pont étroit, illustrations félix Rozen, éd. encre et Lumière, Cannes et Clairan, 2008 Déserts, éd. Japhet, Montpellier, 2007 Essai Le Judaïsme au féminin, avec Annie Goldman, éd. Balland, Paris, 1985 Ouvrages collectifs Mai 68, échos du Languedoc, éd. Cap Béar, 2008 Femmes et Méditerranée, éd. Karthala, Paris,1995 Les Juifs de Tunisie, éd. Le Scribe, Paris, 1989 Dieu a-t-il peur des femmes ? AJf, Montpellier, 1986 Cultures juives méditerranéennes et orientales, éd. Syros, Paris, 1982 Guide Juif de France, éd. Migdal, 1971 Traductions Don Quichotte, de Miguel de Cervantes, illustrations Manuel Boix, traduit de l’espagnol, éd. Pascal, Paris, 2009 Les Juifs du mellah de Schlomo Deshen, traduit de l’anglais, éd. Albin Michel, Paris, 1992 Photographie de couverture ©Claire Malen, auteure photographe, réalise depuis 2011 un travail sur les femmes dans la révolution tunisienne. http://deuxsemainesentunisie.blogspot.fr F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 4 femmes et révolution en Tunisie entretiens avec Azza filali Radhia Nasraoui Nadia el fani Khadija Chérif Marianne Catzaras Meriem Bouderbala Lamia Ben Messaoud Meriem Zeghidi Hejer Bourguiba Michèle, Maya, Nedjma, Alima et fatma Janine Gdalia F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 5 © éditions Chèvre-feuille étoilée 34080 Montpellier bureau@chevre-feuille.fr http://www.chevre-feuille.fr/ second trimestre 2013 iSBN : 978-2-36795-005-1 F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 6 À toutes les femmes, à tous les hommes qui se battent en Tunisie pour l'égalité, la démocratie et la tolérance. F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 7 F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 8 Introduction Le 17 décembre 2010 Mohamed Bouazizi s’immole à Sidi Bouzid 1. Ce jeune homme de 27 ans, marchand ambulant, seul soutien économique de sa famille, tentait de gagner sa vie en vendant à la sauvette des fruits et légumes n’ayant jamais obtenu d’autorisation officielle. Chassé par la police qui lui confisque sa charrette et le stock qu’elle contenait, Mohamed s’immole devant le siège du gouvernorat. Grièvement brûlé, il succombera à ses blessures le quatre janvier 2011. Cette nouvelle bouleverse la Tunisie tout entière. Ce n’est pourtant pas le premier à s’être immolé en Tunisie, plusieurs cas se sont déjà produits, mais le contexte économique est particulièrement difficile et le régime policier pèse sur tous. 1. Depuis cette date près de 200 personnes se sont immolées, le dernier en date le 13 mars 2013, à Tunis, devant le théâtre municipal, un jeune marchand de cigarettes s’immole en dénonçant le chômage! L’immolation est devenue le symbole de la révolte. F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 9 Des manifestations ont immédiatement suivi d’abord à Sidi Bouzid et peu à peu dans tout le pays ; elles sont durement réprimées. Des snipers sont vus sur les toits des maisons tirant sur les jeunes manifestants 2. La presse tunisienne, muselée et à la solde du dictateur, ne parle pas de Mohamed Bouazizi. Seules les chaînes Al Jazira et France 24 en arabe couvrent les événements. Des blogueurs vont sur place et postent sur les réseaux sociaux, encore censurés 3, ce qu’ils ont vu. « Dans tous les foyers, tout le monde voit presque en direct ces visages de « manifestants ensanglantés » dira Khadija Chérif et « le pays en est sérieusement ébranlé. » Le monde entier suit les nouvelles au jour le jour. Les choses s’enflamment. Le premier discours de Ben Ali du 10 janvier annonce quelques projets mais menace les manifestants, qualifiés de terroristes et dont l’objectif serait de déstabiliser le pays. Les jeunes continuent de manifester. À Tunis, ils sont devant le Ministère de l’intérieur et défilent sur l’avenue Habib Bourguiba, principale artère de la ville. 10 feMMeS eT RévOLuTiON eN TuNiSie 2. On estime à plus de 300 morts et 700 blessés, le nombre de victimes durant les 4 semaines de manifestations du 17 décembre au 14 janvier. 3. Sur un site « erreur 404 » les messages pouvaient être lus. F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 10 4. un char demeure encore sur l’avenue Habib Bourguiba en face de l’ambassade de france et de la Cathédrale. Des bâtiments publics ou étrangers sont protégés par des barbelés. La capitale, le pays tout entier est en état d’insurrection. La police multiplie les arrestations et les violences. Le pouvoir tente de contenir les événements. Dans un second discours, le 13 janvier, Ben Ali lâche du lest. il s’engage à ne pas se représenter aux prochaines élections comme il avait envisagé de le faire en modifiant la Constitution. il a « entendu » les Tunisiens et promet la fin de la censure, l’accès libre à internet et la création de 300000 emplois. Ses soutiens politiques font défiler quelques centaines de personnes à la solde du régime qui poussent des youyous de joie à la gloire du raïs alors que le peuple tunisien enterre ses morts. Pour les opposants, la colère ne tombe pas. Le 14 janvier une immense manifestation envahit les villes et notamment Tunis où les jeunes ont été rejoints par la très grande majorité des Tunisiens, tous soudés pour retrouver leur dignité autour du slogan « Dégage ». L’armée dont les chars 4 sont déployés dans la ville refuse de tirer et prend le parti de la population. Ben Ali comprend enfin que la partie est perdue. Sa famille était déjà partie la veille. Lui-même s’enfuit le 14 vers 20h00 pour une destination inconnue. C’est en Arabie Saoudite qu’on accepte de l’accueillir. 11iNTRODuCTiON F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 11 La liesse succède alors aux jours de violence. Les Tunisiens n’en reviennent pas eux-mêmes. en une semaine tout a basculé! ils ont pu venir à bout d’un dictateur qui régnait sans partage, lui et sa famille, depuis 23 ans sur la Tunisie. J’ai suivi au jour le jour ces événements par la presse, par les réseaux sociaux, les rares conversations possibles avec des amis, et ce vendredi-là a été pour moi aussi un jour de joie. Depuis quelques mois je ressentais une intense nostalgie, un besoin essentiel de retourner en Tunisie et j’avais envisagé d’y passer quelques mois pour retrouver mon pays natal, la langue, les couleurs, les saveurs de mon enfance et de mon adolescence. Cela faisait presque deux décennies que je n’y étais pas allée ne supportant pas l’atmosphère de méfiance, de délation que faisait régner le régime de Ben Ali. J’ai voulu me rendre à Tunis dans les semaines qui ont suivi cette révolution mais mes amis tunisiens m’en dissuadaient: « Ce n’est pas le moment, il y a trop de troubles, attends un peu. » Plus tard « Attends après les élections, ce sera plus clair. » – et si ça empire? Ai-je dit? – Mais non tu verras, il y aura des élections, une représentation islamique certes, mais faible. C’est que les islamistes, présents dans le paysage 12 feMMeS eT RévOLuTiON eN TuNiSie F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 12 politique tunisien depuis trente ans, mais qui n’avaient en rien participé à la Révolution, se sont réorganisés en force après le retour de leur chef, en exil à Londres, Ghanouchi 5. Disposant d’un réseau associatif de bienfaisance, de soutiens financiers importants de l’Arabie Saoudite et du Qatar, les islamistes ont battu la campagne pour les élections. ils ont mobilisé leurs militants et en ont convaincu d’autres, par tous les moyens. Ainsi, le pire est arrivé. Les élections se sont déroulées le 23 octobre avec les résultats que l’on sait. effondrement. Déception. une révolution volée? un gouvernement provisoire, composé d'ennahda, du CPR 6 et d'ettakattol 7, et appelé depuis la « Troïka », fut mis au point. ennahda s'était réservé les postes régaliens et avait accordé, aux ténors des deux autres partis laïcs, la présidence provisoire de la République à Moncef Marzouki et celle de l'Assemblée Constituante à Mustapha Ben Jaafar. 13iNTRODuCTiON 5. Rached Ghannouchi, Chef d’ennahda, parti islamiste issu du Mouvement de tendance islamiste fondé dans les années 80 durement réprimé alors. emprisonné puis libéré, il s’exila à Londres avant de rentrer en triomphe le 20 janvier 2011. 6. CPR, Congrès Pour la République créé par Moncef Marzouki. 7. ettakattol, forum Démocratique pour le Travail et les Libertés, créé en 1994 par Mustapha Ben Jaafar. F tunisiennes et revolution en tunisie 14 05_Mise en page 1 15/05/2013 01:08 Page 13
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