TUISHOU 2 - Page 1 - Pratique et Théorie du Tuishou à partir des Classiques du Taiji quan 推 手 TUISHOU TOME 2 Pratique et théorie appliquées au Tuishou Claudy Jeanmougin La Griffe du Tigre - 17610 Chérac La calligraphie de couverture est l’œuvre de Frédérique Kuhnapfel notre Maître calligraphe. Frédérique Kuhnapfel Calligraphie japonaise 38, rue de Tunis 17000 LA ROCHELLE 05 46 00 09 17 ecole.tsukiyo@neuf.fr INTRODUCTION AU TOME 2 INTRODUCTION au Tome 2 Introduction au Tome 2 – 203 – seulement celle du Tuishou. Avant de voir de « beaux » échanges il faut visionner des centaines et des centaines de rencontres. Cependant, tout ce que nous dirons peut être utilisé dans le cadre compétitif en sachant qu’il y a une préparation spécifique qui ne sera pas présentée dans ces pages. Oui, la pratique du Tuishou est difficile car elle demande beaucoup de finesse et donc énormément de travail. Et la tentation est grande de vouloir utiliser la force pour préserver son ego. Nous ne devrons jamais oublier ce précepte que nous ne manquons pas de rappeler à chaque fois que nous présentons le Tuishou : S’aider c’est apprendre à céder Le Tuishou se fait à deux et non à un contre un. S’aider c’est à la fois aider l’autre dans l’entraide et soi-même en acceptant l’autre. Quant à céder c’est une attitude très importante qui permet de sauvegarder son unité et donc son intégrité physique et mentale. Céder c’est aller à l’encontre de la résistance et accepter aussi d’avoir été déstabilisé. C’est encore accepter que l’autre a percé et mis à jour vos faiblesses. Le Tuishou est une dure école de modestie et vous comprenez bien que la victoire éphémère d’un combat est bien peu à côté de la richesse que cette discipline peut nous apporter dans la vie de tous les jours. En effet, quand un événement relationnel nous blesse ou nous touche profondément alors qu’il n’y a pas à en faire tout un plat, il convient de se demander pourquoi on réagit ainsi et qu’est-ce qui fait que cette situation nous dérange autant. Nous avons souhaité que le Tome 1 soit le plus près possible de l’enseignement de Maître Wang et aussi très accessible pour les pratiquants, débutants ou non. Une fois que les exercices de base proposés par Maître Wang sont bien maîtrisés dans l’esprit du Tuishou, il est alors possible d’aller au-delà, sans pour autant les négliger. Rappelons que ce qui est fait lors des exercices de base n’est pas forcément à reproduire dans la pratique du Tuishou : certains d’entre eux, ont une intention dont la finalité n’est pas obligatoirement le Tuishou mais la préparation au Tuishou, ce qui est différent. À notre avis, l’exercice de base n°3 est un exercice préparatoire qu’il vaut mieux ne pas reproduire dans la pratique libre du Tuishou, sous peine de risquer des lésions de la structure. Dans ce deuxième Tome nous nous permettrons quelques libertés. Ce qui vous est proposé est le fruit de longues années de pratique et d’animation de stages sur le thème du Tuishou, d’une manière très générale. Nous ne sommes pas un compétiteur chevronné du Tuishou et nous n’avons aucune médaille à exhiber, pas plus qu’un titre acquis lors d’une compétition. Celle-ci nous semble plus propice à un âge ou l’affirmation de soi peut passer par une sorte de dépassement physique en se mesurant à l’autre et nous avons passé cet âge depuis bien longtemps. Il est malheureux de voir que la technique utilisée en compétition est aux antipodes des principes du Taiji quan. Ceci est certainement dû aux règlements qui pervertissent la discipline et pas 推 手 二 TUISHOU 2 - Pratique et Théorie appliquée au Tuishou– 204 – La pratique du Tuishou avec modestie nous aide à résoudre ces conflits intérieurs qui, en fait, ne regardent que nous. Alors que le Tome 1 est consacré uniquement aux exercices préparatoires, dits encore exercices de base, dans ce Tome 2 nous donnerons quelques clés pour commencer une pratique qui soit véritable. Le Tome 2 est divisé en deux parties en continuité du Tome 1, comme l’est la pagination. La 2e Partie sera consacrée à des exercices pratiques pour se constituer un vocabulaire de base à l’expression gestuelle du Tuishou. Dans la 3e Partie nous aborderons les Classiques consacrés principalement au Tuishou ainsi que les conseils de Maîtres dont ceux de Maître Wang. Nous proposerons quelques enchaînements qui serviront à développer cette chère écoute. POINT PIVOT ET POINT DE LEVIER Deuxième Partie - Point pivot et point de levier – 257 – nous avons exploité au maximun la puissance développée par l’autre. Et plus l’autre développera de puissance et plus cette puissance pourra se retourner contre lui. Ceci dit, il faut être également réaliste! Si par mégarde un athlète de 70 kg s’est fait ceinturer par un adversaire puissant de 140 kg, l’issue du combat semble tout à fait prévisible. Il faudra pour cet athlète agir de telle sorte qu’il ne puisse jamais être saisi par son adversaire. Utiliser l’énergie Qì 氣 à la place de la force Lì 力 développée par les muscles, c’est profiter du flux énergétique qui se développe en nous sans qu’il y ait la moindre rupture. Cette énergie se développe et se propage selon une dynamique qui suppose un mouvement préalable. Le Qi sera puissant s’il va dans le sens de la pensée et de l’action. C’est donc une force qui prend également naissance dans l’intention gestuelle. Il faut que cette énergie soit sans entrave afin qu’elle accompagne le jeu musculaire. Enfant, j’ai toujours été sidéré par la puissance de mon grand-père alors âgé de 87 ans par rapport à celle de mon oncle, son fils qui, avec 41 ans de moins, avait alors 46 ans. L’un assez petit et très sec, l’autre sec aussi mais plus grand et surtout plus jeune. En certaines circonstances, j’ai vu mon oncle s’acharner à développer toute son énergie pour rester sans résultat devant un effort à fournir pour une tâche alors que mon grandpère, très calme, en venait à bout. J’avais toujours mis cette puissance sur le calme de mon grandpère par rapport à l’acharnement de mon oncle qui se dispersait. Le premier était tout à sa tâche, concentré dans l’effort, le second s’agitait dans ses muscles pourtant puissants. Et pourtant, ce grand-père ne connaissait pas le Taiji quan! PeutQuel que soit le type de poussée qui est effectué lors de la pratique du Tuishou il y a forcément un travail mécanique en jeu qui met en action la puissance musculaire. Alors que peut bien signifier « ne pas utiliser la force musculaire mais l’énergie » ? Quand on parle de force musculaire qu’il ne faut pas utiliser, c’est la puissance physique fruste qui dépense une grande quantité d’énergie mécanique, c’est cette force quelque peu bestiale, irraisonnée, cette force qui se croit capable de venir à bout de tout. C’est aussi cette force qui finit par user, fatiguer, voire détériorer la structure physique. Si la force musculaire est douée d’intelligence, elle dépensera peu d’énergie mécanique car elle répondra aux lois de l’énergétique chinoise. La force musculaire se mesure à la capacité du tissu musculaire à faire un effort précis. Par exemple, l’haltérophile ne pourra pas faire autrement que de développer une force musculaire pour déplacer la masse des haltères. La mobilisation d’une masse inerte demande le développement incontournable d’une force physique, mesurable. Dans la pratique du Tuishou, il ne s’agit pas de déplacer une masse inerte, mais de se mesurer à un être humain mobile. Si « le partenaire ne bouge pas, je ne bouge pas non plus » est-il dit! Dès l’instant où il bouge, je peux alors utiliser la force qu’il développe par le biais des transformations. Quand l’expression se fait au juste instant, nous n’avons pas l’impression de fournir le moindre effort. D’ailleurs, les premières fois nous sommes très surpris de cette capacité à développer une énergie folle sans avoir fait le moindre effort physique. Il n’y a rien de miraculeux en cela, c’est tout simplement que Schéma 1 推 手 二 TUISHOU 2 - Pratique et Théorie appliquée au Tuishou– 258 – Comme ce sont des exercices préparatoires nous devons tout mettre en œuvre pour qu’ils soient parfaitement réussis. De plus, les différentes situations présentées ne sont pas forcément toutes exploitables dans la réalité du Tuishou. Afin d’être très didactique, nous allons reprendre les quatre premiers exercices de base du Tuishou. N’hésitez pas à ouvrir le Tome 1 à la page correspondante de l’exercice. EXERCICE N°1 (PLANCHE E1) 左 右 轉 腰 (後 腿) ZUO, YOU, ZHUAN YAO (HOU TUI) Tourner la taille à gauche et à droite (appui sur jambe arrière) Claudy est le partenaire qui se fait pousser par Géry. Claudy est en appui sur son pied gauche qui est en arrière. Géry est également en appui sur sa jambe arrière avec sa main droite sur le « toit » du sein gauche de Claudy. Au moment de la poussée de Géry, Claudy utilise un point fixe sur la main de Géry pour pivoter sans avoir le moindre recul. Il transfère le poids du corps sur le pied avant et trouve un point de levier avec sa main droite sur la poitrine de Géry. Le mouvement global circulaire entraîne Géry dans sa poussée qui trouve le vide. En fait, Claudy a installé un axe de rotation qui passe par le talon arrière de Géry, là où sa masse prend appui pour la poussée, et le point d’appui de la main de Géry sur sa poitrine qui est en fait le point pivot. Nous constatons que le levier se fait autour d’un axe, nous sommes dans la situation d’un moment d’un couple de forces. Plus le point de levier où s’exerce la poussée est loin de cet axe et moins d’effort il y aura à fournir. être que la guerre de 14-18, durant laquelle il avait servi dans la cavalerie, l’avait-elle conduit à une vision de la vie lui donnant cette sagesse étonnante où il puisait aussi une grande puissance. Ici, nous voyons bien que la puissance de ce petit homme était totalement liée à son état d’être. Tout à sa tâche, l’intention dirigeait toute son action ainsi que l’énergie contenue en lui. Il ne pouvait pas y avoir seule la force physique de ses muscles. Quand on rencontre pour la première fois cette force mystérieuse qui est en nous, elle peut faire peur car on se demande si on va toujours être capable de la contrôler. Qui d’entre vous qui lisez ces lignes n’a pas fait l’expérience d’une projection d’un partenaire sans avoir usé de la moindre force ? Si vous n’avez pas vécu cette expérience personnellement, vous en avez été certainement le témoin. C’est aussi pourquoi le Tuishou doit se pratiquer sur un tapis qui absorbe les chutes, dans un lieu prévu pour les arts martiaux où il n’y a aucun risque de se blesser sur des angles saillants dans la salle. C’est aussi pourquoi les pratiquants de Tuishou doivent s’entraîner à chuter car parfois la chute est inévitable. Savoir chuter c’est aussi savoir reprendre l’initiative dans la plupart des arts martiaux en dehors des compétitions où la chute avec frappe au sol est considérée comme une défaite. En première instance et pour pratiquer le Tuishou en développant le moins de force musculaire possible, nous avons mis au point la technique des points pivot et des points de levier. Points pivot et points de levier Imaginez un bras de levier tout simple. Le point pivot est le point d’appui du levier et le point levier est là où l’on exerce la force F sur le levier (Schéma 1). La technique va consister à installer un point pivot autour duquel il sera possible d’entraîner le partenaire dans une instabilité qui mettra son équilibre en défaut, à partir d’un point de levier où s’exercera une moindre force pour développer une plus grande force L sur le Schéma. PLANCHE E1 Cet exercice offre peu de difficulté et la réussite est assurée du fait du transfert du poids du corps du pied arrière sur le pied avant. Il peut être exécuté en décollant le talon du pied arrière. Attention, il est indispensable de s’entraîner en mobilisant les pieds. Dans notre style, trop souvent la pratique du Tuishou se fait à pas fixes à l’entraînement. Dès qu’il y a un déplacement, il y a maladresse par faute d’entraînement. Deuxième Partie - Point pivot et point de levier – 259 – 1 3 4 2 推 手 二 TUISHOU 2 - Pratique et Théorie appliquée au Tuishou– 260 – EXERCICE N°2 (PLANCHE E2) 右 左 轉 腰 (前 腿) YOU, ZUO, ZHUAN YAO (QIAN TUI) Tourner la taille à droite et à gauche (appui sur jambe avant) Claudy est le partenaire qui se fait pousser par Géry. Claudy est en appui sur ses pieds, le gauche est en arrière. Géry est également en appui sur ses deux pieds, avec la jambe gauche en arrière, avec sa main gauche sur le « toit » du sein droit de Claudy. Géry va effectuer la poussée en transférant le poids du corps sur le pied avant. Claudy va absorber la poussée non en reculant mais en tournant sur le point pivot qu’il aura fixé dans la main de Géry. Dans le même temps, tout en transférant le poids du corps sur le pied avant, il installe un axe de rotation qui va du point d’appui de Géry sur son thorax à l’appui au sol du talon du pied avant de Géry. Pour le transfert du poids du corps sur le pied avant, Claudy a le choix entre une rotation à gauche ou une rotation à droite. Il est intéressant de travailler les deux solutions. Selon le sens de la rotation, Claudy installera un bras de levier qui sera le plus éloigné possible de l’axe de rotation. L’expérience montrera qu’il est plus difficile de se sortir de cette situation mais que c’est possible. PLANCHE E2 Deuxième Partie - Point pivot et point de levier – 261 – 1 2 4 5 3
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