actuel n°145 - Page 1 - Actuel est un magazine hebdomadaire marocain francophone, appartenant au groupe « Logique Presse ». Des sujets très variés y sont abordés (économie, politique, société, culture...). Ce magazine généraliste se veut le porte-parole d'un Maroc moderne, dynam A u rythme où vont les choses, il n’y aura bientôtplusquelesindéfectiblesadeptes delabicyclettequis’abstiendrontd’aller manifester devant la Primature ou le Parlement contre l’augmentation du prix des carburants. Hasard de circonstances, c’est au moment même où Solar Impulse – cet incroyable avion solaire qui repousse les limites de la science et de la technologie à chacun de ses vols – atterrissait sur le tarmac de l’aéroport de Rabat-Salé, que le Maroc s’enflammait à propos d’unehausseduprixdescarburantsaussiviolente que dangereuse. Quel’onneseméprennepas.AbdelilahBenkirane fait montre d’un courage certain en décidant de mettre un terme à la dérive maintes fois dénon- cée, jamais encadrée, de la Caisse de compensation. La décision de porter les prix du carburant à un niveau autorisant une économie de quelque dix milliards de dirhams par an devait être prise. Sauf à entraîner les finances de l’Etat droit dans le mur, et en klaxonnant ! Nul n’ignore le diagnostic porté depuis des années sur cette machine infernale qu’est devenue la Caisse de compensation,sansqu’aucun desgouvernementsprécédentsn’aiteulecourage d’y porter remède. La procrastination ambiante sous le gouvernement de Abbas El Fassi sur ce dossiermajeurquiimpactel’économienationale aconduitlepaysdansuneimpasse.Ilétaittemps de faire demi-tour. Onobserveratoutefoisqueledemi-toureffectué par Benkirane a été réalisé selon une stratégie longuement éprouvée par les chauffeurs de taxi, ceux-làmêmesquimenacentaujourd’huidefaire grève. Car, au lieu de commencer par ralentir, de mettre son clignotant tout en s’assurant – en re- gardant dans son rétroviseur – qu’il n’y avait pas devoituresderrièrelui,l’actuelpilotedel’équipe gouvernementale a brutalement donné, sans prévenir le moindre passager, un coup de volant àgauchepoureffectuerundemi-toursurlescha- peauxderoueettenterderétablirsonvéhiculeau milieud’automobilistesettransporteursaffolés. Il est en effet assez singulier de voir Benkirane 3Edito actuel s’affranchirdelaConstitutionaussiaisémentque lestaxisducodedelaroute.Nulnecontesterasé- rieusementauchefdugouvernementl’impérieuse nécessité dans laquelle il se trouvait de procéder à l’augmentation du carburant, et de s’engager sur la voie de la réforme de la Caisse de compen- sation. On était toutefois en droit d’attendre de la part de l’apôtre de la « bonne gouvernance » un peu plus d’habileté politique pour préparer le terrain avec l’ensemble des acteurs concernés. Abdelilah Hifdi, le président de la Fédération du transportàlaCGEM,parled’orcheznosconfrères des Echos lorsqu’il dénonce l’absence de toute concertation préalable et renvoie Benkirane et consorts à l’article 12 de la Constitution. Hifdi n’a riend’unsyndicalisteagité.C’estsimplementl’un desmeilleursconnaisseurs desproblématiquesdetrans- portsquis’efforcedeprôner l’élaborationd’unevéritable politiquedestransportsqui fait tant défaut à la compé- titivité des professionnels marocains. Laquestionauraitpuêtrepo- séelorsdugrandoraldeBen- kirane,mardidernier,devant laChambredesconseillers. Las,ledébatatournécourt, pourdesombresquestions organisationnelles,privant ainsi le chef du gouvernement de son droit « de (m)’adresser au peuple marocain ». Trois coups de fil plus tard à la direction de 2M, Benkirane s’invitaitmercrediensoiréepourunmagnifique monologuesurunplateaudetélévision.Unesoirée entreamis,avecpetitsfoursetbonsmots,loindes tumultes de la Chambre des conseillers. A défaut des’expliquerdevantlesparlementaires,prenant l’opiniondirectementàtémoin,Benkiraneatenté dejustifiersaméthode.Maisenomettantd’expli- querquandetcommentsongouvernementallait mettre en place les mesures destinées à pallier les hausses de prix auxquelles la population va devoir faire face. Un oubli, sans doute… ■ actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 Il est assez singulier de voir Benkirane s’affranchir de la Constitution aussi aisément que les taxis du code de la route. Fâcheuxoubli Sommaire écrivez-nous à courrier@actuel.ma actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 4 n°145 - du 9 au 15 juin 2012 Les Yankees et nous... Tous contre la corruption ! Remember Abdelkrim L’hydre du chômage 16 26 36 42 54 Dans l’univers du Street art SActualités 06 nouvelle génération | Ali Kamouch Au-delà des clichés 08 la semaine en images 10 décryptage 14 dernière heure SDossier 16 dossier | Quand le Maroc était américain SEconomie 26 environnement des affaires | Tadouira, un sport national 30 e-gov | Gouvernement en bas débit 32 emergence | Les leçons du modèle turc SPolitique 36 épopée | Commémorations Abdelkrim n’est pas mort 38 partis | Opposants ou simples trouble-fêtes ? SSociété 42 emploi | L’insoluble crise du chômage 44 société | Solar Impulse Un monstre solaire SMonde 48 egypte | La deuxième révolution 49 russie | Poutine lâche (un peu) du lest 49 azerbaïdjan-iran | Rien ne va plus ! 50 chronique des deux rives SCulture 52 reportage | Dans l’intimité du musée Slaoui 54 expo | Alec Monopoly Entre la case prison et les Champs-Elysées 56 événement | Du jazz au Chellah… plus qu’ailleurs ! 57 festival | La ville spirituelle fête l’humanité 58 knooz.ma | Une vente solidaire en ligne 60 agenda STendances 62 auto | Nissan Juke Le crossover décalé 64 nouveaux produits, nouveaux marchés 66 les choix de... | Stromae Un drôle de maestro photos de couverture brahim taougar et dr actuel actuel est édité par Logique Presse. SARL. Capital social : 25 millions de dirhams. Conseiller spécial : Henri Loizeau Directeur de la publication : Abdellatif El Azizi Directeur commercial : Moulay Ahmed Alami Directeur de la rédaction : Eric Le Braz Rédactrice en chef adjointe : Mouna Kably Assistante de la rédaction : Fatima Azzahra Ghoumari Tél. 05 22 95 18 15 / 16 05 29 00 20 02/ 30 03 Fax. 05 22 95 18 14 SRéDACTION Chefs de service : politique : Abdellatif El Azizi économie : Mouna Kably culture : Amira-Géhanne Khalfallah Rédacteurs : Slimane Ammor, Yanis Bouhdou, Zakaria Choukrallah, Ali Hassan Eddehbi, Khadija El Hassani, Abdelhafid Marzak, Asmaâ Chaïdi Bahraoui, Nicolas Salvi (stagiaire), Ranya Sossey Alaoui (stagiaire) Chroniqueurs : Fouad Benseddik, Pascal Boniface, Driss Jaydane Correspondants : Cyril Bonnel (Paris), Maud Ninauve (Tanger) Photographe : Brahim Taougar Ont collaboré à ce numéro : Mohamed Mouhim, Salima Yacoubi Soussane, Merwann Abboud SéDITION Rédactrice en chef technique : Keiko Catala Secrétaires de rédaction : Ferdinand Demba Bassirou Bâ Révision : Laila Lebbar Directrice artistique : Fadoua Damiri Maquettiste : Youssef El Moutassaddik Conception graphique : Studio Baylaucq & Co. SPUBLICITé Tel : 05 22 36 77 02 / 79 01 Directeur commercial : Moulay Ahmed Alami ma.alami@logiquepresse.ma Responsable commerciale : Ghizlane Malki g.malki@logiquepresse.ma Chefs de publicité : Safaa Aqraou s.aqraou@logiquepresse.ma Karima El Afi k.elafi@logiquepresse.ma Najat Bourkab n.bourkab@logiquepresse.ma Administratrice des ventes : Asmaa Bertal Filali a.filali@logiquepresse.ma IMPRIMERIE Idéale, Casablanca DISTRIBUTION Sochepress Imprimé au Maroc – Printed in Morocco. Tous droits réservés. Reproduction interdite sauf accord de l’éditeur. Tirage : 20 000 ex Sactuel 1, bd Abdellatif Benkaddour 20050 Casablanca, Maroc Dépôt légal : 2010PE0042/ Au-delàdesclichés Ali Kamouch SIssu d’un milieu modeste, il devient ingénieur et manie aussi bien le verbe que les chiffres.Preuve que l’excellence n’est pas l’apanage des gosses de riches. on parcours brise tous les clichés. Der- rière un look sobre, se cache un personnage éclectique, sûr de lui, posé et qui ne cesse de vous surprendre. Ceux qu’il a fré- quentés au sein du 20-Février ont tendance à le taquiner en l’incitant à parler de la cause amazighe. Sa passion. « Il est raciste mais il se soigne », dit de lui Nizar Bennamate, son pote du M20, non sans un rire affectueux. Ali Kamouch n’est pourtant pas raciste. C’est un Marocain d’abord. Amazigh ensuite. « L’amazighité est une composante de la culture ma- rocaine, celle que nous parta- geons tous », affirme Ali, dans un arabe teinté d’un accent berbère. Celui de Tinghir, la ville où il a grandi. Issu d’une modeste famille rurale, le jeune homme a parcouru en 27 ans, un très long chemin. Aujourd’hui, il est ingénieur en télécommunications chez Alcatel, après un diplôme décroché haut la main à la prestigieuse Ecole Moham- média des ingénieurs (Emi). Or, rien, ab- solument rien ne le destinait à une telle carrière. « J’étais un cancre en mathé- matiques. La dernière année du collège, j’avais obtenu un 2 sur 20 en maths au premier trimestre », raconte Ali. Le tri- mestre suivant, il tombe sur un profes- seur de maths, ami de son père. Il n’a pas envie de démériter et fait un effort. Ce sera un 17/20, puis un 20/20 au terme du troisième trimestre. « Malgré cela, je n’étais pas intéressé par les filières scienti- fiques. Je voulais m’inscrire en lettres, car j’étais très porté sur la littérature, la poli- tique, la poésie… », raconte notre militant amazigh. Une conversation le conduira à changer d’avis. « Le surveillant général de mon collège était méchant et violent. En fin d’année, il m’a posé la question suivante : "Pour quelle filière optes-tu ?" J’ai dit lettres. Il a rétorqué : "Et qui fera sciences maths ?…" J’ai eu peur de lui, et donc j’ai opté pour les sciences ! » Militant dans l’âme Les années se succéderont et notre homme réussira avec brio ses études, mais sans jamais abandonner sa pas- sion pour la politique qui, à ses yeux, est comme le Barça pour beaucoup de Marocains (inutile d’en rajouter !). Et il n’hésite pas à mettre la main à la pâte. A commencer par le 20-Février, puis l’amazighité. Son rêve est « simple » : créer un parti amazigh. « Quoi ? Mais c’est du racisme. Un parti sur une base ethnique, il n’en est pas question », lui répondent ses amis. « Non, ce parti défendra les Amazighs et sera ouvert à tous les autres Marocains et soutien- dra toutes les autres causes des Marocains. C’est l’Istiqlal qui est fondé sur une base ethnique, se défend-il. Je suis un citoyen du monde avant tout. Je ne suis pas chauviniste. Et la cause que je défends n’est pas la domination de l’amazigh. » Laïcité made in « bladi » Selon lui, l’amazighité a un avantage comparatif de taille. Elle n’est importée ni de l’Orient ni de l’Occident. « C’est un sys- tème autonome et enraciné dans l’histoire… et démocratique sur- tout », explique Ali Kamouch. « Les islamistes importent des fatwas d’Arabie saoudite, et les modernistes font de même avec les valeurs universelles venues de l’Occident. Je suis contre l’is- lamisme, et en faveur des valeurs univer- selles, mais en précisant que ces valeurs universelles existent dans notre propre culture, sans avoir forcément à les im- porter », dit-il. Un exemple ? Il en a plein. Des anecdotes même. « Une fois au bled, raconte-t-il, l’un des habitants a laissé poussé la barbe et est devenu islamiste. En lui parlant de laïcité, le barbu s’est in- surgé et a immédiatement comparé cela à de l’athéisme. Je lui ai alors dit : "Nous avons le fqih du village, pourtant, quand on décide du partage de l’eau, des lots de terrain et du travail, on ne consulte pas le fqih, non ?" » L’homme a acquiescé en saisissant la différence entre laïcité et athéisme… Bien vu, Ali. Ali Hassan Eddehbi Nouvelle génération actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 ©DR Actualités8 Ringarde, la monarchie britannique ? Allons-donc. Pour le jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, Robbie Williams a enflammé le public. Il faut dire qu’il avait un groupe de choc pour l’épauler, avec des cors et des trompettes. n Il y a 23 ans, des étudiants chinois descendaient place Tiananmen pour exprimer leur frustration vis-à-vis du régime. Cette semaine, les Hongkongais leur ont rendu hommage, flambeaux à l’appui. A Hong Kong, on a le droit. n Qu’est-ce qu’ils peuvent bien mijoter ces deux-là, dans ce joli décor bucolique ? Laurent Fabius et son homologue allemand, Guido Westerwelle, auraient échangé des banalités sur la course du monde et le conflit en Syrie. n Royaume-Uni Robbie « couine » pour la reine Tian’anmen L’exception chinoise Allemagne La petite liaison dans la prairie Comme chaque année, le 6 juin, il a fallu commémorer le D-Day, le débarquement des Alliés de 1944. Toujours une bonne occasion pour faire prendre l’air aux troupes et à l’aviation. Une sortie très solennelle pour François Hollande.n France D-Dayfilé s« Mème »pas peur On l’aura compris, le Mème (site spécialisé dans les photos détournées) est à la mode sur Internet. Moroccan Mème Base, sur facebook, en est un véritable vivier. n vu sur la toile sPrésident subnormal Pour faire le buzz aujourd’hui, il suffit d’être banal, voire insignifiant, comme la photo officielle de François Hollande déjà détournée sous toutes les coutures de la toile. n ©AFP ©AFP©AFP ©AFP actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 7Actualités / La semaine en images 9 Il est de bonne humeur, contrairement à ses œuvres. Daoud Aoulad-Syad expose ses photographies à la galerie de l’Aimance de Casablanca. Beaucoup de noir et blanc, assez peu de sourires, à voir jusqu’au 14 juillet. n Fait extraordinaire cette semaine, on a pu apercevoir Vénus en contre-jour. C’est le cas de le dire : la planète est passée quelque part entre la nôtre et le soleil, suscitant l’émerveillement à travers le monde. n Maroc Aimancetalent Ciel Passage de Vénus Les étudiants manifestent à Libreville, la capitale gabonaise. Parmi leurs revendications, entre autres, « l’harmonisation du système LMD », et « la suppression du critère d’âge à l’université Omar Bongo Ondimba ». Un mouvement qui n’est pas du goût des autorités.n Gabon Printemps palabres A la question « qu’appréciez-vous le plus chez vous ? », Jamel répond « ma bogossité ». Et la beauté, l’enfant terrible de la rigolade l’apprécie aussi chez les autres. La preuve : il a choisi deux miss pour inaugurer la seconde édition du MDR. n Maroc On se marre à Kech ! ©B.Taougar/actuel ©DR ©AFP ©B.Taougar/actuel Actualités / décryptage10 actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 ● les Faits A la proposition de l’ambassade américaine de venir présenter leurs doléances concernant le dossier des islamistes en prison, les salafistes ont opposé un niet catégorique. ● le commentaire Alors que l’oncle Sam joue la conciliation et prône le dialogue avec les islamistes, en donnant notamment sa bénédiction à la montée au pouvoir des camarades de Benkirane, les salafistes purs et durs refusent la main tendue. Pire encore, les familles et proches de près d’un millier de détenus de la Salafia jihadia se radicalisent depuis que Ramid a pris les rênes du département de la Justice sans résultat. Le Forum Al Karama qu’il présidait avait été créé pour dénoncer autant les circonstances dans lesquelles ces détenus avaient été arrêtés que les conditions de leur incarcération. Depuis, le torchon brûle entre les salafistes et le PJD. Au point que la commission de soutien aux salafistes en prison a adressé à ses partisans une lettre dans laquelle elle dénonce des « islamistes au pouvoir qui ont manipulé le dossier de la Salafia à des fins politiciennes, alors que les ministres de gauche ont été plus cléments qu’eux dans la gestion de ce dossier ». ● Et demain L’appui au grand jour des Américains au PJD comme aux islamistes d’Annahda risque d’avoir un effet contre-productif pour les intéressés, à savoir les couper de leur base qui, elle, continue de vouer « au grand Satan » une haine séculaire. A.E.A. ▲ Médiation US Le niet des salafistes ©DR ▲ Jusqu’où Benkirane va-t-il décompenser ? ● les Faits Après les prix à la pompe, une hausse des tarifs d’autres denrées de base n’est pas à écarter. C’est ce que suggèrent des scénarios de réforme proposés par le Conseil de la concurrence. ● le commentaire Au risque de nuire à sa popularité, le chef du gouvernement s’attaque au dossier épineux de la subvention en optant pour une hausse des prix à la pompe. Une décision qui prend de court tout le monde. Pour l’équipe de Benkirane, elle était inévitable au vu de l’état des finances publiques et surtout de la pression sur la Caisse de compensation. A fin mai, 80% des 32,5 milliards de dirhams alloués se sont déjà évaporés. Ce qui pourrait signifier que d’autres décisions aussi impopulaires soient à venir. Le renchérissement des prix du sucre et de la farine sont en ligne de mire. Et les scénarios de réforme suggérés par le Conseil de la concurrence ne pouvaient mieux tomber pour conforter les orientations de l’équipe Benkirane. Sans surprise, la libéralisation des prix des produits subventionnés devrait s’accompagner d’un ajustement de la fiscalité et d’une aide ciblée aux populations démunies. ● Et demain S’il opte pour cette piste, le gouvernement Benkirane aura du pain sur la planche pour réussir l’identification et le ciblage des populations concernées, et surtout pour éviter les dérapages et autres détournements. K.E.H. ©BrahimTaougar/actuel Gestion déléguée Lobbying de Tecmed ▲ ● les Faits La hausse des prix des carburants se répercutera sur les résultats financiers de Tecmed Maroc. « Cela engendrera quelque 9 millions de dirhams de dépenses supplémentaires par an », explique Luis Masiello Ruiz, DG du délégataire. Pire. Pour réviser les conditions tarifaires et répercuter la hausse, il faudra attendre la date anniversaire du contrat. ● le commentaire Les conditions tarifaires sont indexées sur la moyenne des prix des carburants des douze derniers mois. Et puisque la hausse n’est intervenue qu’en juin, « la compensation ne sera que partielle », conclut Ruiz. Tecmed enregistre également 475 millions de dirhams d’impayés à travers le Maroc. « Nous devons être payés dans les 60 jours qui suivent le dépôt de nos factures. Or, ce n’est presque jamais le cas », affirme le directeur général de Tecmed. A cela, il faut ajouter les revendications salariales qui portent, pour la plupart, sur une augmentation de 100%. « La masse salariale représente 50% de nos charges, la doubler serait un suicide. Et les grèves ne résoudront pas la situation », conclut Ruiz. ● Et demain Toutes ces « pressions » pèsent sur l’activité du délégataire et menacent sa stabilité financière. Pour s’en sortir, Tecmed et d’autres opérateurs dans la même situation vont créer une association. Son premier objectif : faire du lobbying pour que la loi sur la gestion déléguée soit révisée. A.M. ©AICPRESS Actualités / décryptage12 Justice : deux poids, zéro mesure ● les Faits Le ministère de la Justice s’est prononcé sur l’affaire de l’étudiant islamiste Sofiane Azami Hosni, qui aurait gardé des séquelles psychologiques après son passage chez la police. Le département de Mustafa Ramid a démenti « catégoriquement » les « allégations de torture et d’« enlèvement » diffusées par la presse, après avoir chargé la BNPJ de l’enquête. ● le commentaire Une enquête, avec force détails livrés au grand public, dont les conclusions sont accessibles aux associations que le ministère invite dans son communiqué à venir consulter le dossier ! C’est sûr, on se croirait dans une démocratie scandinave. Mais modérons notre enthousiasme : l’affaire du jeune Sofiane a surtout bénéficié du buzz suscité par une militante algérienne qui a publique- ment « alpagué » notre ministre lors de son grand oral à Genève. Autre fait : le jeune en question est membre du Mouvement unicité et réforme proche du PJD, et a donc bénéficié de la pression des bases du parti. Nous avons vu comment le ministre s’est empressé d’annoncer une enquête sur les menaces de mort qu’aurait reçues le cheikh Haddouchi et, pa- radoxalement, le manque d’enthou- siasme à enquêter sur l’affaire du jeune Ezzedine Roussi, qui a pourtant lui aussi déclaré avoir été « torturé ». ● Et demain Notre ministre ira-t-il jusqu’au bout en livrant par exemple les conclusions de l’enquête sur Kamal Ammari, ce jeune décédé il y a un an après une manifestation du M20 ? Z.C. ● les Faits A deux semaines de l’ouverture de la Conférence des Nation unies sur le développement durable à Rio, le Maroc dresse le bilan de ses réalisations et se lance de nouveaux défis. ● le commentaire Vingt ans après la conférence de Rio sur le développement durable, et en dépit de grandes contraintes, le Maroc affiche un bilan globalement positif en matière de développement durable. Des programmes structu- rants ont été élaborés et certains ont permis des avancées notoires. Ainsi, par exemple, le taux d’électrification du rural (PERG) s’établit à 97,4% contre 15% en 1992. De même, l’accès à l’eau potable en milieu rural s’est amélioré avec un taux de 92% contre 14% il y a deux décen- nies. Mais si au département de Fouad Douiri on préfère mettre plus l’accent sur les réalisations, il ne faut pas oublier le retard dans certains chantiers stratégiques. C’est le cas en particulier de la Charte nationale de l’environnement et du développe- ment durable, adoptée en 2010, et dont la mise en œuvre traîne suite au retard dans l’adoption de la loi-cadre. Initialement, ce texte devait être adopté en 2011, mais l’échéance n’a cessé d’être repoussée. Aujourd’hui, les responsables tablent sur une promulgation d’ici la fin de l’année. ● Et demain Beaucoup de choses ont été concré- tisées ces dernières années en matière de développement durable. Mais la lente évolution de la régle- mentation bloque la machine. Pour- tant, ce dossier fait partie de la liste des urgences du gouvernement. K.E.H. ▲ Développement durable : le bilan ©DR ©Brahimtaougar/actuel Le Real à Tétouan Pour2millionsd’euros ▲ ● les Faits Pour jouer le 24 juillet contre le Moghreb Atlético de Tétouan (MAT) dans le grand stade de Tanger, le Real Madrid devrait empocher deux millions d’euros lors de ce match amical. ● le commentaire Pour récompenser leurs poulains, sacrés champions du Maroc cette saison pour la première fois de leur histoire, les dirigeants du MAT au- raient décidé de débourser les deux millions d’euros qu’exige le Real Madrid pour jouer à Tanger. Pour- tant, on sait qu’en 2011, le président du club de football du Moghreb de Tétouan, Abdelmalek Abroune, avait annoncé qu’il voulait démission- ner en raison du déficit financier énorme (plus de cinq millions de dirhams, à l’époque) qui grevait la trésorerie. En effet, à plusieurs re- prises, Abroune, qui a dirigé ce club de première division depuis 2006, avait expliqué son ras-le-bol par l’absence de soutien financier de la part des autorités locales, des élus, et du conseil provincial et régional dont les contributions sont jugées dérisoires. Abroune, qui soutient avoir personnellement dépensé plus de 25 millions de dirhams, avait agité le drapeau de la démission avant de se rétracter. ● Et demain Il y a bien entendu le précédent du FC Barcelone qui pour sa venue au Maroc le 28 juillet prochain, pour jouer un match amical à Tanger, de- vrait empocher beaucoup plus qu’un million d’euros. Mais la question de la provenance de l’argent, reste posée. A.E.A. ©DR ▲ actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 Actualités14 Prison Red Bull vous donne des ailes ! « En 2008, je suis allé voir le cheikh Omar Haddouchi en prison. Il était dans une cellule individuelle dotée d'un frigo. Il m’a proposé une canette de Red Bull et ne m'a pas parlé de torture. » Dans Akhbar Al Youm, Hafid Benhachem conteste l'accusation selon laquelle la torture serait pratiquée dans ses pénitenciers. Qui dit vrai ? On ne le saura pas, mais on apprend que nos prisons ressemblent parfois à des hôtels 5 étoiles. n Football Ballesperdues Les résultats médiocres du Onze national se sont répercu- tés sur notre classement Fifa. Le Royaume perd dix places en passant à la 70e position, der- rière l'Algérie (32e ), la Tunisie (46e ) et l'Egypte (48e ). n Alger-Berlin ViaCasablanca Aziz Benboujida, représentant de la marque Rodenstock, a été choisi par le groupe allemand pour développer l'enseigne en Algérie. Après de nombreuses visites de prospection en Algérie, le représentant marocain du spécialiste allemand des verres progressifs a conclu un partenariat avec la famille Rabah Attouche, propriétaire de l'entreprise algérienne Redenlens. n SLe regard de Mouhim l Le ministre de l'Energie, Fouad Douiri, n'aurait pas été informé à l'avance de la hausse du prix à la pompe. D'autant plus surprenant que c'est la première fois que l'on assiste à une hausse de cette ampleur (20%) d'un seul coup. l Depuis la crise du secteur bancaire en Espagne, les Marocains qui disposaient de comptes dans la Péninsule ibérique seraient en train de rapatrier leurs avoirs. Parole de douanier à la frontière de Sebta. l Après les ambassadeurs, les équipes de Othmani planchent à nouveau sur la nomination d'une vingtaine de consuls. l Ahmed Toufiq a déclen- ché une mini-opération mani pulite en procédant à la mutation de délégués des Habous dans toutes les grandes villes. l Lors de la réunion du comité exécutif de l'Istiqlal, qui s'est tenue lundi à Rabat, Taoufiq Hejira, qui préside la commission préparatoire du 16e congrès et que l'on disait out, a joué au véritable patron du parti, face à un Abbas El Fassi, particulièrement fatigué. l Un rapport des services fait état d'une chute de plus de 25% de la popularité du PJD, dans les grandes villes du Maroc. l Les députés de l'USFP se penchent sur la construction des maisons à Tamesna après que plusieurs appartements se sont lézardés de l'intérieur, contraignant les résidents à quitter les lieux immédia- tement. n Les bruits du village C’est la collecte des céréales au 15 mai, selon l'ONICL, en hausse de 22%. 22millions de quintaux Lapêche aupoulpe est ouverte jusqu’au 4 août entre Sidi Lghazi, au sud de Boujdour, et Lagouira. Mais le quota globalestplutôtfaible,fixéà5 500 tonnes seulement, contre 21 000 tonnes lors de la saison d’hiver. Le volume autorisé est réparti sur les trois segments de pêche (3 465 tonnes pour la pêche hauturière, 605 tonnes pour la pêche côtière et 1 430 tonnes pour la pêche artisanale à Dakhla. n ©DR Pollution Taghazoutsur lestracesde Saïdia Malgré le tapage médiatique des écolo- gistes de la région de Saïdia pour dénoncer les conséquences dé- sastreuses de la station sur son environnement, voilà que Taghazout semble réitérer les mêmes erreurs. Sauf que là, le projet étant attenant à une forêt d’arganiers, les dégâts risquent d’être reten- tissants. Sans parler de la pénurie d’eau qui frappe l’ensemble de la région du Souss. La tension hydrique menace de s’aggraver à cause de l’arrosage des parcours de golf. n actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 SLe chiffre Poulpe Quotasenchute libre Dernière heure 15 [ lu dans la presse arabophone ] Grèvesencascade Lespectredejuin 1981 Les services de sécurité sont sur les dents depuis l'an- nonce de la hausse des prix du carburant, qui a provoqué une cascade d'augmentations sur les denrées de première nécessité. L’ODT tente d’or- ganiser, le 10 juin à Rabat, la « Marche pour la colère » en signe de protestation contre le cumul de défaillances des gouvernements précédents, aggravé par la politique « anti- sociale » et « antipopulaire » du gouvernement Benkirane. n Prostitution DescenteàFès Le tribunal de première instance de Fès a eu la main lourde envers un hôtelier. Les deux gestionnaires de l'hôtel, situé à l'avenue Hassan II, ont été condamnés à deux ans de prison ferme et une amende de 100 000 DH pour « pratique de la prostitution ». Un avis de recherche est lancé contre la propriétaire de l'hôtel. n Asile Aïcha Kadhafi préfère le Royaume Les Algériens cherchent à se débarrasser de Aïcha Kadhafi en l'expédiant au Maroc. La fille de l’ex-dictateur libyen, qui a adressé sa demande d’asile au Maroc par des canaux parallèles, embarrasse le pouvoir algérien avec ses sorties médiatiques intempestives où elle fustige des responsables de l'actuel gouvernement libyen. n SNEP Lagrogne Les actionnaires mino- ritaires sont-ils en train de reprendre la main ? En tout cas, ceux de la Société nationale d’électrolyse et de pétrochimie (SNEP) ou- vrent une brèche en disant « stop » à l’octroi de jetons de présence aux adminis- trateurs. Et ils ont obtenu gain de cause. Les raisons de cette levée de boucliers ? La chute du résultat net de 61%, et la non-distribution des dividendes. Et surtout, le non-respect des promesses faites au moment de l’intro- duction en Bourse. A qui le tour ? n Gouvernement Benkirane court- circuite les députés Joli coup du chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane. Après avoir été interdit de parole lors de la première séance mensuelle des questions orales, qui devait avoir lieu mardi après-midi au sein de la seconde Chambre du Parlement, mais qui a été ajournée après des joutes oratoires animées, le chef du gouvernement s’est rabattu sur les deux chaînes de télévision publiques pour « expliquer aux citoyens pourquoi le gouvernement a augmenté le prix du carburant ». Les téléspectateurs de 2M et de Al Aoula ont ainsi découvert un Benkirane tendu, face aux deux journalistes, clamant que « les mesures ont été décidées par le gouvernement pour éviter d’aggraver le déficit de la Caisse de compensation, précisant qu’une aide financière directe était prévue pour les plus nécessiteux » ! n L es écrits attaquant les écoles coraniques et leurs symboles sont de retour, notamment par cette couver- ture du magazine actuel intitulée « Mohamed Maghraoui, cet homme est dan- gereux ». Usant d'un vocabu- laire désuet, les détracteurs des écoles coraniques criti- quent le financement par les « pétrodollars », et l’impor- tation du « wahhabisme » qui menace « nos constantes et l’islam marocain tolérant et modéré ». Il n’est nul besoin de rappeler l’effet positif des écoles coraniques sur la dif- fusion des valeurs de l’islam et l'instauration de la paix sociale. Le « wahhabisme » est un terme inventé par les soufis pour effrayer les mu- sulmans, donnant l’impres- sion qu’il s’agit d’un schisme […] A supposer que le « wahha- bisme » existe, les écoles co- raniques ne l’enseignent pas. Elles enseignent les sciences de la charia, de manière to- talement ouverte sur toutes les productions des imams et exégètes musulmans […] Les différences entre les ou- lémas doivent être débattues dans le respect, et non dans les accusations gratuites d’intégrisme, ni par les abus de pouvoir telle la fermeture illégale des écoles décidée par le ministère de l’Intérieur en 2007 […]. n actuelﻐﺮباﻟﻤ N°143 - du 26 mai au 1er juin 2012 - 15 DH- 3 € w w w . a c t u e l . m a SPÉCIAL FÈS-MEKNÈSLes voies de la modernisation p.32 Cet hommeest dangereux CASA AMERICAN SCHOOLGuerre de «clans»chez les parents d’élèves p.48 Il revendique un islamcontraire à nos valeurs Il démultiplie ses écolescoraniques Il forme des centaines deprédicateurs salafistes Il est financé par des réseauxwahhabites Mohamed Maghraoui Assabil Lejournalsalafisteréplique ©DR La question de la semaine sur La question de la semaine prochaine Retrouvez-nous sur notre page fan facebook.com/actuelmaroc Quel sera le résultat du match Maroc-Côte d'Ivoire ? n Maroc 3 - 1 Côte d'Ivoire n Maroc 2 - 1 Côte d'Ivoire n Maroc 0 - 3 Côte d'Ivoire n Maroc 1 - 1 Côte d'Ivoire 11,90% 59,52% 21,43% Comment avez-vous trouvé la prestation de Benkirane sur la hausse des carburants ? actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 7,14% Dossier16 actuel / Semaine du 9 au 15 juin 2012 ©BrahimTaougar/actuel QuandleMarocétait
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