La revue 100 Numero 19 - Page 1 - La revue 100% Auteurs de Juillet 2012. Cette revue est destinée à présenter des auteurs peu ou non connus du grand public. 2 Sommaire - Couverture : Michèle SEBAL - Billet du mois : Marie BARRILLON, page 3 - Livre : Secrets d’anges de Michèle SEBAL, page 6 - Nouvelle : Les deux plumes de Jean-Louis RIGUET, page 8 - Chronique : Vertiges de Thierry LEDRU, par Marie BARRILLON, page 16 - Poésie : Dans les marges du temps de François TEYSSANDIER, page 20 - Illustration : Le lapin géant par Jessica Albert, page 21 - Chronique : Courts circuits d’Arielle ALBY, par Marie BARRILLON, page 22 - Poésie : Il devient fou de Philippe CORREC, page 25 - Auteur à suivre : Zambar, par Marie BARRILLON, page 26 - Chronique : Ressacs de Yann DUPONT, par Marie BARRILLON, page 30 - Livre : Sortie du recueil "Les plus belles rencontres sur Facebook", Collectif, page 33 - Appel à texte : NL Edition Numérique, page 35 - Salon : Salon du livre de Somain, page 36 - Concours littéraires, page 37 - Participations, page 38 - Livre du mois : Quand j’y pense ! de Marie BARRILLON, page 39 - Partenaires : page 41 3 Billet du mois : La rentrée littéraire ? Qu’est-ce donc ? La rentrée littéraire est toujours un moment difficile pour les petits éditeurs et leurs auteurs ainsi que pour les auteurs autoédités car ces livres passent malheureusement inaperçu face aux grands pontes du milieu littéraire qui étouffent tous les autres. Ajoutons à cela le numérique qui prend, lui aussi, de l’ampleur et pour lequel les gros éditeurs mettent les nouveautés à disposition autant que le format papier, ça laisse peu de place alors que celle-ci était déjà réduite. Et quand on apprend que pour cette rentrée littéraire Grasset publie 13 romans français par exemple et que l’ensemble des ouvrages constituant cette rentrée 2012 se monte à 646 romans français et étrangers selon livres hebdo, on aura du mal à croire que le marché du livre se porte mal sauf, comme toujours, pour les petites maisons d’édition qui elles ne font pas le poids et sont rarement, sinon jamais, citées durant cette période. Ne cherchons pas les raisons dans un panier de crabes ! Certes, nous pouvons admettre que les éditeurs (et libraires) dans l’ensemble ont subi de plein fouet un début d’année difficile. Il est nul besoin d’avoir un raisonnement approfondi pour en trouver quelques raisons légitimes. D’une part, quoi qu’en disent certains détracteurs, la crise est toujours présente, et même plus forte ces derniers temps pour la majorité des lecteurs, ce qui fait chuter sensiblement les ventes. Il suffit de regarder autour de soi et surtout de savoir écouter. Il suffit aussi de passer devant les librairies pour y constater qu’il n’y a pas foule. 4 D’autre part, n’oublions pas que lors de ce début d’année nous étions en période électorale ce qui accapare plus qu’on ne saurait l’imaginer l’attention des citoyens, donc des lecteurs. Mais là ce ne sont que des exemples et à bien y réfléchir, bien d’autres motifs peuvent aussi prévaloir leur place dans la chute des ventes d’ouvrages. Lepoint.fr titre d’ailleurs un article du 1er septembre ainsi : "Rentrée littéraire : avalanche de gros tirages". Et de préciser dans le texte : "Une avalanche sans précédent de livres à très gros tirages est prévue ces prochaines semaines…" Et de surenchérir en précisant encore : "Du jamais vu : ce sont près de 60 titres dont les tirages atteignent ou dépassent les 100.000 exemplaires qui sont programmés par les éditeurs en septembre ou octobre, souligne vendredi Livres Hebdo." Pour nous, la rentrée littéraire c’est à chaque instant ! Alors pour la revue 100% Auteurs, pas de rentrée littéraire. Notre "rentrée littéraire" nous la vivons et la présentons chaque mois de l’année depuis vingt mois. Comment peut-on cautionner autant de sorties d’ouvrages en un mois et faire silence les onze autres ? Comment peut-on prétendre aimer la littérature en écartant systématiquement les petites maisons d’édition sur des périodes "si importantes" ? Donc, vous l’aurez compris, nous continuons plus que jamais à soutenir les petites maisons d’éditions, les auteurs, les auteurs autoédités. Non que nous cherchions à combattre l’autre versant de l’édition précédemment cité, nous ne serions pas assez forts, mais simplement pour tenter de faire exister tout ce petit monde qui se bat chaque jour pour être un minimum vu. 5 La revue et l’association 100% Auteurs sont une entité qui n’a qu’un but mettre en avant les auteurs en recherche de considération pour un peu de reconnaissance et ne changera pas de position tant que les auteurs auront besoin de cette visibilité si importante, tout au long de l’année. Marie BARRILLON 6 Livres Secrets d’anges de Michèle SEBAL, Trinôme Editions Quatrième de couverture : « Petite, je ne jouais pas à la poupée… elles ne m’intéressaient pas… Mon père m’autorisait à jouer avec de très vieux crânes, pieds ou mains habilement conservés… Je pleurais de joie quand, pour moi seule, il orchestrait des saynètes hilarantes où des mains baladeuses aux os blanchis et articulés, ou encore parcheminées, raides ou souples, remplaçaient les habituels Guignol et Gnafron insipides. J’applaudissais en faisant claquer les mandibules de Zonzon, mon squelette préféré, je faisais rouler ses yeux cristallisés dans ses orbites comme des folles billes de loto. Et j’en redemandais. » Descendante d’une lignée qui "tricote la vie et la mort depuis le temps des Druides", Céleste Mervel dirige « Kêr Lucrèce » le funérarium dont elle a hérité et s’intéresse plus aux morts qu’aux vivants. Si elle maîtrise parfaitement les secrets du sel, d’autres secrets surgissant des ombres de la ville close de Guérande vont bouleverser son existence. 7 «Secrets d’anges », le nouveau roman de Michèle SEBAL, nous transporte avec délectation, humour et malice dans un univers où le suspense trouble délicieusement l’harmonie. Pour Michèle SEBAL, être artiste c’est percevoir le monde qui l’entoure et son propre monde, puis exprimer ce qu’il en a été de ce voyage par les mots, la matière, la forme, le théâtre… Haïti, sa terre de naissance et la Côte d'Ivoire de son adolescence colorent tout ce qu’elle crée. Après avoir été attachée de direction, enseignante, danseuse…, elle est aujourd’hui psychanalyste, psychologue, art-thérapeute, mais aussi sculpteur, femme de théâtre et bien sûr écrivain. Amoureuse de la Bretagne et plus précisément de la presqu’île Guérandaise, la petite ville du Croisic est sa terre d’adoption. Cet ouvrage sera disponible à partir du 20 septembre 2012 et publié par Trinôme Éditions. Michèle SEBAL présentera ce roman au salon du livre du Croisic (Plumes d'Equinoxe) les 29 et 30 septembre 2012. Bibliographie de Michèle SEBAL: Comprendre l'adolescence pour en gérer les crises, essai. éd. Vuibert, 2003. Miel des lunes, roman. éd. Glyphe, 2009 Constance Lolita in anthologie Identités. éd. Glyphe, 2009 Croque mi-teintes, nouvelles ponctuées de « Psymages ». éd. Glyphe, 2010 Salad’elleS Mango, spectacle de théâtre qu’elle a écrit et mis en scène (juin et juillet 2012. théâtre Le Nickel, Rambouillet). Troubles et ruptures de l’adolescence, essai. éd. Vuibert, 2012 Secrets d'anges, roman. éd.Trinôme, 2012 8 Nouvelle Les deux plumes Deux plumes, l’une blanche, l’autre noire, voguent sur l’eau de La Loire. Elles proviennent l’une et l’autre de cygnes, l’un âgé, l’autre jeune, ce qui explique la différence de couleur. Les deux plumes sont là depuis quelques heures, dans une eau calme à un endroit formant une petite anse, du côté du Morvan. Vient à passer un bateau qui provoque des vaguelettes bousculant nos deux plumes et les poussant vers l’aval, bien au-delà de leur calme anse. Elles ont un peu peur et elles se demandent où elles vont atterrir. Commence pour elles un long parcours avec des aventures qu’elles n’imaginent même pas. Ici elles découvrent un gros bourg devinant la pointe du clocher de l’église bien au milieu des toits des maisons. La plupart sont en tuiles un peu foncées. Il doit y avoir une grosse cloche car les plumes entendent ses battements sourds. Là elles rencontrent un jardin avec une végétation étonnante, de grands arbres dont les feuilles bruissent élégamment et des parterres de fleurs embaument l’atmosphère et égayent de leurs couleurs diverses et variées l’environnement. Les plumes ont à peine le temps d’appréhender tout cela que les voilà parties de nouveau à l’aventure. Un dériveur les pousse soudain vers la rive, les bousculant au passage méchamment. Elles sont toutes mouillées désormais, décoiffées, alourdies et ont plus de mal à flotter, surtout que l’engin a laissé derrière lui des vagues inquiétantes et assez hautes, d’au moins dix centimètres. D’accord, dix centimètres ce n’est rien, mais rapporté à l’épaisseur d’une plume, c’est quand même plusieurs fois sa hauteur. Tout est relatif aurait dit… vlouf ! Les plumes percutent soudain un rocher, enfin… une grosse pierre posée rien que pour les 9 recevoir. Une niche naturelle les recueille, elles vont pouvoir prendre un peu de repos après tout ce trajet mouvementé, certes intéressant, mais surtout plein d’angoisses pour qui n’a jamais voyagé. Les plumes restent là à récupérer, sans rien dire, bien à l’abri de l’eau tumultueuse qui provient du passage incessant des bateaux. Au bout d’un temps certain, l’une ouvre l’œil et dit à l’autre : – Quelle aventure ! Nous avons bien fait 200 kilomètres, nous voilà presqu’arrivées à Gien. Cela fait deux à trois jours, deux à trois nuits, que nous voguons sans savoir où nous allons. – Tu as raison, il sera bien souhaitable que nous puissions nous établir un peu dans un endroit stable. Nous allons réfléchir à la situation désormais que nous sommes un peu stabilisées. Chacune des plumes reste en silence quand elles entendent un plouf dans l’eau. Elles regardent autour un peu effrayées. Quoi ? Qu’est-ce encore ? Un poisson vient les sentir, sûrement pour les manger. Mais il est rassasié et n’a pas faim. Alors, n’ayant rien d’autre à faire, il fait un tour, puis une deuxième tour, comme s’il attendait quelque chose. Au troisième tour, il fonce droit sur les deux plumes, qui prennent vraiment peur cette fois-ci. Elles se recroquevillent l’une contre l’autre et se mettent à réciter des Ave qu’elles n’ont jamais appris. Le poisson freine soudain, ses nageoires servant d’aérofreins, s’arrête à deux centimètres et leur lance : – Mais que faites-vous là dans cet endroit hostile pour des plumes ? Ne sachant soudain quoi répondre, dans un premier temps, les plumes se taisent. Mais la blanche, qui est plus âgée, prend son courage à deux mains et prononce timidement quelques mots : 10 – Poisson bonjour, je vois que tu ne nous veux aucun mal car, dans le cas contraire, tu nous aurais déjà croquées. Que faisons-nous là ? Nous ne le savons pas non plus ? Nous avons été détachées par nos porteurs lors d’un déplumage de santé, nous sommes tombées à l’eau, puis une vague nous a jetées dans le courant de La Loire qui nous a conduites ici. – Votre voyage a été long ? Interroge le poisson, curieux. – Nous ne savons pas bien. A notre avis, nous flottons depuis deux ou trois jours et nuits, nous sommes parties dans le Morvan et nous voilà ici près de Gien. – Cela fait une trotte quand même. Avez-vous pu voir le paysage ? Les contrées ne doivent pas être les mêmes que par ici. – Nous venons d’un pays de petite montagne avec de belles grosses bâtisses bien solides couvertes de tuiles foncées. C’est du costaud. Le fleuve royal n’est pas très large mais le courant y est très violent. Lorsque nous étions accrochées au dos de nos porteurs, des cygnes majestueux, nous pouvions apercevoir un peu plus de paysages. A la hauteur de l’eau, nous ne voyons pas grand-chose, sauf ce qui est vraiment haut. C’est pourquoi nous ne découvrons que les toits des maisons, les clochers des églises, les châteaux. Une fois sur deux nous ne pouvons voir les jardins, seuls les grands arbres nous renseignent, de même que les odeurs et les senteurs de la flore. – Une chose m’intrigue, dit le poisson. Pourquoi l’une de vous est blanche et l’autre noire ? – Je sais répondre, s’égosille la plume noire. Moi je suis jeune. Les jeunes cygnes ont des plumes noires. En vieillissant, elles deviennent blanches. Elle, elle est vieille. 11 – Reste polie, la dispute la plume blanche. Je ne suis pas si vieille que cela. J’ai deux ans de plus que toi, c’est tout. La plume blanche se drape dans sa fourrure et sa dignité et fait mine d’être fâchée. La plume noire, découvrant qu’elle l’avait blessée, se rapproche d’elle et lui fait un câlin en l’embrassant tendrement. Le poisson pense « toutes les mêmes, ce sont bien des filles » mais il déclare : – C’est bien, vous vous êtes réconciliées. Heureusement car votre route ne semble pas terminée. Je pense que vous ne pourrez pas rester ici éternellement. Une vague vous fera votre compte sans que vous n’y preniez garde. Et vous partirez pour de nouvelles aventures. Les deux plumes ne répondent pas mais soupirent de déplaisir. Le poisson leur propose : « Si vous le souhaitez, je peux vous accompagner un bout de chemin. Comme cela, je pourrais vous aider dans l’adversité. » La plume noire répond : « si tu promets de ne pas nous manger quand tu auras faim, je suis d’accord ». Le poisson la rassure : « les poissons n’aiment pas les plumes. » Alors, le poisson les poussent toutes les deux dans le courant du fleuve et les accompagnent pour leur éviter des désagréments. La Loire devient plus large et le courant moins fort. Les plumes tourbillonnent tandis que le poisson veille à les protéger. L’avancée se fait normalement sans aspérités particulières. Le poisson devient poète : « La Loire est tour à tour, belle, laide, gentille, méchante, tempétueuse, volubile, calme, démontée, envahissante, majestueuse, dangereuse, protectrice. Ce fleuve est beau et je m’y plais. Parfois, à la fonte des neiges ou à la suite des pluies
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